Tribunal administratif Numéro 28649 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 mai 2011 1re chambre Audience publique du 6 février 2012 Recours formé par Monsieur … et consorts, … contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration en matière de protection internationale (art. 19, L.5.5.2006)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 28649 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 20 mai 2011 par Maître Nicky Stoffel, assisté de Maître Christian Barandao-
Bakele, tous les deux avocats à la Cour, inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Serbie) et de son épouse, Madame …, née le … (Serbie), tous les deux de nationalité serbe, demeurant actuellement à L-…, tendant, d’une part, à la réformation d’une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration du 20 avril 2011 rejetant leur demande en obtention d’une protection internationale comme n’étant pas fondée et d’autre part, à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire contenu dans la même décision ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 5 septembre 2011 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Katrin Djober Hussein, en remplacement de Maître Nicky Stoffel et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 30 janvier 2012.
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En date du 7 février 2011, Monsieur … et son épouse, Madame …, introduisirent auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après dénommée « la loi du 5 mai 2006 ».
En date du même jour, Monsieur … et son épouse Madame …, ci-après dénommés « les consorts …-… », furent entendus par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale sur leur identité et l’itinéraire suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg.
Monsieur … fut entendu en date du 24 février 2011 par un agent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, sur les motifs à la base de sa demande de protection internationale.
Madame … fut entendue en date des 11 et 31 mars 2011 par un agent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, sur les motifs à la base de sa demande de protection internationale.
Par décision du 20 avril 2011, notifiée par lettre recommandée envoyée le 29 avril 2011, le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration, ci-après dénommé « le ministre », informa les consorts …-… de ce que leur demande avait été rejetée comme non fondée. Cette décision est libellée comme suit :
« J'ai l'honneur de me référer à vos demandes en obtention d'une protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection que vous avez présentées auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères en date du 7 février 2011.
En application de la loi précitée du 5 mai 2006, vos demandes de protection internationale ont été évaluées par rapport aux conditions d'obtention du statut de réfugié et de celles d'obtention du statut conféré par la protection subsidiaire.
En mains le rapport de la Police judiciaire, ainsi que les rapports d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères des 24 février, 11 mars et 31 mars 2011.
Il résulte du rapport de la Police judiciaire que selon le tampon dans votre passeport, vous êtes entrés dans l'Union européenne en date du 4 février 2011, via la Hongrie.
Monsieur, vous affirmez que vous auriez été chauffeur de taxi et que vous auriez vécu à Vranska Banja. Vous dites qu'en 1992, vous auriez déposé une demande d'asile en Allemagne, laquelle fut refusée et ainsi vous seriez retourné en Serbie en 2002. Vous dites avoir emporté une voiture de l'Allemagne en Serbie et que cette dernière aurait été confisquée par la police. Votre voiture aurait été vendue aux enchères en 2004 et vous indiquez qu'on vous aurait interdit d'enchérir sur votre propre voiture. Il résulte de vos déclarations que vous auriez été insulté de manière quotidienne parce que vous seriez rom et parce que vous auriez fait le porte à porte en tant que témoin de Jehova.
Vous indiquez qu'en 2007 ou 2008, des cambrioleurs auraient volé la « caisse de votre communauté », ainsi que les bijoux de votre épouse. La police serait venue sur les lieux, cependant, elle n'aurait pas fait les efforts nécessaires pour trouver les coupables. Vous soupçonnez que les agents auraient seulement été intéressés à voir l'intérieur de votre maison.
Vous affirmez cependant que la police aurait contrôlé toutes les pièces et que des empreintes digitales auraient été prises. Mais, en raison des commentaires sur votre maison, « jolie et bien rangée », vous n'auriez pas pris au sérieux leur travail.
Vous indiquez par la suite qu'un chauffeur de taxi vous aurait une fois traité de gitan et vous ajoutez qu'il vous aurait même frappé. Par conséquent, vous vous seriez rendu à un commissariat de police pour porter plainte. Un policier vous aurait proposé de faire une déclaration, ce que vous auriez refusé, étant donné que vous auriez vu que le coupable aurait des fois salué des agents de police. Par conséquent, vous soupçonnez qu'ils se connaitraient entre eux. Vous dites ne pas avoir d'autres problèmes en Serbie, à part ceux que vous auriez décrits.
Madame, vous confirmez les dires de votre époux et vous indiquez que vous auriez été discriminée en Serbie en raison de votre appartenance ethnique et religieuse. De plus, votre maison aurait été cambriolée. Vous ajoutez que la salle de réunion [témoin de Jehova] aurait été incendiée. Vous continuez vos dires en disant qu'un jour en 2010, vous auriez dû « aller en mission de porte en porte avec une sœur en mission ». Cependant, étant donné que vous auriez été malade, vous auriez été remplacée par une autre femme. Lors de leur mission, les deux femmes auraient été attaquées par des serbes. Depuis lors, vous vivriez dans la crainte que vous seriez également attaquée. Vous dites que cette affaire aurait passée au tribunal, mais que les coupables auraient été libérés parce qu’ils auraient été des adolescents et en plus soûls quand ils auraient attaqué les deux femmes.
Vous ajoutez à vos dires qu'un jour, votre fils aurait eu mal à l'épaule, raison pour laquelle vous l'auriez accompagné chez un médecin. Ce dernier vous aurait dit que ce ne serait rien de grave. Mais vous supposez qu'en raison de votre appartenance ethnique, le médecin n'aurait pas voulu examiner votre fils. Vous ajoutez à vos dires que les serbes ne vous laisseraient pas pratiquer votre religion. Pour étayer cette déclaration, vous dites que votre salle de réunion aurait été détruite. Jusqu'au jour présent, la police n'aurait pas trouvé les coupables et vous dites croire qu'elle ne serait pas intéressée à faire une enquête.
Finalement, Madame, vous dites que vous voudriez avoir une autorisation de travail au Luxembourg.
Il y a d'abord lieu de relever que la reconnaissance du statut de réfugié n'est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d'origine, mais aussi et surtout par la situation particulière des demandeurs qui doivent établir, concrètement, que leur situation individuelle est telle qu'elle laisse supposer une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève. Or, les faits que vous alléguez ne sauraient constituer un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu'ils ne peuvent, à eux seuls, établir dans votre chef une crainte fondée d'être persécuté dans votre pays d'origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques ainsi que le prévoit l'article 1er, section 1, § 2 de la Convention de Genève ainsi que les articles 31 et 32 de la loi précitée du 5 mai 2006.
Soulignons en premier lieu que l'appartenance à une ethnie minoritaire n'entraîne pas d'office la reconnaissance du statut de réfugié. A cela s'ajoute que votre désir de pouvoir gagner de l'argent au Luxembourg ne saurait justifier une demande de protection internationale.
Quant au fait que votre voiture aurait été confisquée par la police, notons d'abord que le document portant sur la confiscation que vous avez remis aux autorités luxembourgeoises, dit clairement au deuxième point que votre oncle aurait été propriétaire de la voiture. De plus, force est de constater que votre nom n'y figure pas. A cela s'ajoute qu'il ne ressort ni des documents versés et ni de vos propres dires pourquoi la voiture aurait été confisquée. Quoi qu'il en soit, le fait que la police aurait confisquée la voiture de votre oncle ne saurait justifier une demande de protection internationale, d'autant plus qu'il n'est pas établi que vous auriez vraiment été le propriétaire dudit véhicule.
Concernant le cambriolage de la « salle de réunion », le vol de la « caisse de votre communauté », ainsi que le vol des bijoux de votre épouse, force est de constater que ces faits constituent des délits de droit commun perpétrés par des personnes privées. S'agissant d'actes émanant de personnes privées, une persécution commise par des tiers peut être considérée comme fondant une crainte légitime au sens de la Convention de Genève uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités politiques pour l’un des motifs énoncés par ladite Convention. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce. En effet, vous affirmez tous les deux que la police aurait contrôlé toutes les pièces de votre maison et que des empreintes digitales auraient été prises. C'est uniquement en raison des commentaires des policiers que vous jugez que ces derniers n'auraient pas pris au sérieux leur travail. Or, le fait que les policiers auraient remarqué que votre maison serait «Jolie et bien rangée », ne saurait mettre en cause le sérieux de leur travail. Le fait que les cambrioleurs n'auraient pas été trouvés ne saurait également pas mettre en doute le travail des policiers. En effet, ne pas tous les délits de droits commun sont élucidés. Pour le surplus, Monsieur, il convient de relever que vous avez affirmé que vous auriez refusé de porter plainte contre un collègue qui vous aurait traité de gitan. Par conséquent, il ne peut être établi que les autorités serbes auraient refusé à vous offrir une protection quelconque.
Madame, Monsieur, quant à vos indications que vous auriez été discriminés en raison de votre appartenance religieuse, il convient de noter que le fait que des gens vous auraient insulté quand vous auriez sonné à leur porte dans le contexte de vos missions des témoins de Jehova, ne saurait être qualifié comme persécution systématique au sens de la Convention de Genève. Par conséquent, aucune atteinte à la liberté religieuse ne peut être constatée. De plus, vous dites vous-même que vous pouvez exercer votre religion dans votre salle de rencontre/de réunion.
Citons finalement dans ce contexte un article de presse du site internet « Jehovaszeugen » qui dit: „Serbien anerkennt Jehovas Zeugen: BELGRAD (Serbien). Das Ministerium für religiöse Angelegenheiten Serbiens entsprach dem Antrag der „Christlichen Religionsgemeinschaft Jehovas Zeugen" und trug sie in das Register der Kirchen und Religionsgemeinschaften ein. Die Eintragung trat am 8. Februar 2010 in Kraft. Damit sind Jehovas Zeugen nun in allen Nachbarländern Serbiens und allen Mitgliedsstaaten der Europäischen Union gesetzlich als Kirche bzw. Religionsgemeinschaft anerkannt. Serbien strebt die Mitgliedschaft in der EU an.
Mit der Entscheidung, Jehovas Zeugen ins Register der Kirchen und Religionsgemeinschaften einzutragen, anerkennt das serbische Ministerium für religiöse Angelegenheiten, dass Jehovas Zeugen in Serbien seit Jahrzehnten bestehen und tätig sind. Jehovas Zeugen gibt es in dieser Region schon lange. Bereits in den frühen 1920er-Jahren gab es im Königreich der Serben, Kroaten und Slowenen Internationale Bibelforscher, wie Jehovas Zeugen damals genannt wurden, die ihren Glauben in vielen Städten Serbiens praktizierten. Das Innenministerium anerkannte Jehovas Zeugen am 9. September 1930. lm Jahr 1953 wurden sie in der Föderativen Volksrepublik Jugoslawien als christliche Religionsgemeinschaft eingetragen. (…)" Finalement, Madame, quant au fait que vous dites vivre dans la crainte, étant donné que deux de vos soeurs de mission auraient été attaquées par des serbes, force est de constater que des faits non personnels mais vécus par d'autres personnes ne sont susceptibles de fonder une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève uniquement si le demandeur de protection internationale établit dans son chef un risque réel d'être victime d'actes similaires en raison de circonstances particulières. Or, votre crainte de vous faire attaquer par des serbes quand vous « allez en mission de porte en porte », est à considérer comme un simple sentiment général d'insécurité, plutôt qu'en une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève.
Finalement, Madame, vous indiquez qu'en raison de votre appartenance ethnique, le médecin n'aurait pas voulu examiner votre enfant. Or, il convient de relever que vous n'êtes pas très convaincantes dans vos indications. L'affirmation que le médecin aurait dit que l'épaule endolorie de votre fils ne serait rien de grave, ne saurait être interprétée comme refus de prendre votre enfant en consultation. Si jamais vous auriez eu des doutes quant à l'expertise médicale du médecin, vous auriez pu consulter un autre docteur. En effet, selon le rapport du mois de juin 2010 du Bundesamt für Migration und Flüchtlinge :
„(…) Das öffentliche Gesundheitssystem leidet unter einem Mangel an Mitteln und Investitionen, bietet jedoch allen Bürgern eine grundlegende Versorgung. (…) Anspruch auf kostenlose Behandlung im öffentlichen Gesundheitssystem Serbiens haben nur von der staatlichen Pflichtversicherung erfasste Personen. Dies setzt im Regelfall einen ständigen legalen Aufenthalt in Serbien voraus. lm Rahmen der gesetzlichen Krankenversicherung sind folgende Personen ohne Einkommen anspruchsberechtigt :
- Personen, die Volkszugehörige der Roma sind;
- Arbeitslose und Personen mit einem Einkommen unterhalb einer gesetzlich festgelegten Grenze;
- Kinder unter 15, Schuler und Universitätsstudenten bis zum Ende der Ausbildung (maximal bis zum Erreichen des 26. Lebensjahres) - In Notfällen können Kinder bis 15 Jahre, Inhaber einer Geburtsurkunde, eines Passes / Personalausweises und schwangere Frauen eine kostenlose medizinische Versorgung erhalten.
- (…)" En ce qui concerne la situation générale des Roms en Serbie, citons le rapport du BAA du 19 janvier 2010, intitulé « Die Lage der Roma in Serbien »:
„(…) Die neue serbische Verfassung, in Kraft getreten im November 2006, untersagt jede Form direkter und indirekter Diskriminierung von Angehörigen ethnischer und anderer Gemeinschaften oder Minderheiten. Die Verfassung sieht Maβnahmen der affirmative action für Minderheiten vor. lm Jahr 2006 verabschiedete die Regierung Beschlüsse zur Repräsentation von Minderheiten im öffentlichen Sektor, die sich noch in der konkreten Umsetzungsphase befinden.
Zuständig für die Koordinierung der von den einzelnen Ministerien umzusetzenden Minderheitenmaβnahmen ist das mit der Regierungsneubildung 2008 geschaffene Ministerium für Menschen- und Minderheitenrechte. Neben den verfassungsrechtlichen Bestimmungen (Art.14, 75 bis 81) verbieten auch einfachgesetzliche Regelungen explizit die Diskriminierung von ethnischen Minderheiten. (…) lm März 2009 wurde ein Anti-Diskriminierungsgesetz angenommen. Dieses Gesetz markiert einen Meilenstein bezüglich des Schutzes der Menschenrechte in Serbien, wobei die Einsetzung eines unabhängigen Kommissars zum Schutz der Gleichbehandlung von Minderheiten und sozialer Gruppen vorgesehen ist und der Anfang des Jahres 2010 operativ tätig werden soll. Dieses Gesetz ist insofern bemerkenswert, als sich die serbische Gesellschaft gegenüber Gruppierungen wie Roma, Personen mit Behinderungen und LGBT-Gruppen als zum Teil immer noch sehr vorurteilsbehaftet und intolerant zeigt. (…) Auch zu den Aufgaben des Mitte 2007 erstmals gewählten Ombudsmannes gehört ausdrücklich das Eintreten für Minderheitenrechte. Daneben spielt auch das Ministerium für Menschen- und Minderheitenrechte bezüglich Durchsetzung und Förderung von Menschenrechten eine entscheidende Rolle. (…) Auβerdem wurde ein Memorandum über die Kooperation mit mehr als 150 Zivllgesellschaftsorganisationen, die auf dem Gebiet von Menschenrechtsagenden tätig sind, unterzeichnet. (…) Dass die serbische Regierung gewillt ist, das Roma-Problem entsprechend der eingegangenen Verpflichtung aus dem Projekt der Roma-Integration anzupacken, kann auch aus den diversen Aktivitäten zur Verbesserung der Lage der Roma auf lokaler Ebene abgelesen werden. (…) Mit Hilfe des Ministeriums für Menschen- und Minderheitenrechte, der Europäischen Agentur für Wiederaufbau und der OSZE wurden in ausgewählten Gemeinden mit besonders hohem Romaanteil sog. Koordinatoren für Roma Angelegenheiten eingerichtet, die integrale Bestandteile der Gemeindeverwaltung sind. (…)" Enfin, en vertu de l'article 21 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection et du règlement grand-ducal du 1er avril 2011 modifiant le règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 fixant une liste de pays d'origine sûrs au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection, la République de Serbie doit être considérée comme pays d'origine sûr où il n'existe pas, généralement et de façon constante de persécution au sens de la Convention de Genève. Ce constat n'a pas pu être contredit par l'examen individuel de vos demandes de protection internationale.
Par tout ce qui précède force est donc de conclure que vous n'alléguez aucun fait susceptible de fonder raisonnablement une crainte de persécution en raison d'opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l'appartenance à un groupe social, susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays. Les conditions permettant l'octroi du statut de réfugié ne sont par conséquent pas remplies.
En outre, votre récit ne contient pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 37 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection. En effet, les faits invoqués à l'appui de votre demande ne nous permettent pas d'établir que a) vous craignez de vous voir infliger la peine de mort ou de vous faire exécuter, b) vous risquez de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, c) vous êtes susceptibles de faire l'objet de menaces graves et individuelles contre votre vie en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.
Etant donné que les faits invoqués à la base de vos demandes de protection internationale ne sauraient être actuellement admis comme justifiant à suffisance une crainte de persécution ;
dès lors, et a fortiori, l'absence matérielle de crainte actuelle fondée s'impose également en ce qui concerne la demande tendant à obtenir la protection subsidiaire. En effet, vous ne faites pas état d'un jugement ou d'un risque de jugement vous condamnant à la peine de mort. Vous ne faites également pas état de risque réel de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants ou de risques réels émanant d'une violence aveugle résultant d'un conflit armé interne ou international. En s'appuyant sur tous les rapports et jurisprudence cités la situation actuelle en Serbie ne saurait être considérée comme conflit armé interne ou international.
Vos demandes en obtention d'une protection internationale sont dès lors refusées comme non fondée au sens de l'article 19§1 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection.
La présente décision vaut ordre de quitter le territoire.
La décision de rejet de vos demandes de protection internationale sont susceptibles d'un recours en réformation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d'un avocat à la Cour dans un délai d'un mois à partir de la notification de la présente.
Un recours en annulation devant le Tribunal administratif peut être introduit contre l'ordre de quitter le territoire, simultanément et dans les mêmes délais que le recours contre la décision de rejet de votre demande de protection internationale. Tout recours séparé sera entaché d'irrecevabilité.
Je vous informe par ailleurs que le recours gracieux n'interrompt pas les délais de la procédure ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 mai 2011, les consorts …-… ont fait introduire un recours tendant, d’une part, à la réformation de la décision ministérielle précitée du 20 avril 2011 portant refus de leur demande en obtention d’une protection internationale et, d’autre part, un recours tendant à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire, inscrit dans le même document.
1. Quant au recours tendant à la réformation de la décision portant refus d’une protection internationale Etant donné que l’article 19 (3) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en réformation en matière de demandes de protection internationale déclarées non fondées, un recours en réformation a valablement pu être dirigé contre la décision ministérielle déférée.
Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.
A l’appui de leur recours, les demandeurs déclarent être d’origine serbe et appartenir à l’ethnie rom. D’autre part, ils exposent appartenir à la communauté religieuse des témoins de Jéhovah. Ils auraient subi un certain nombre de persécutions qui les auraient décidé à quitter leur pays d’origine. En effet, en 2004, la voiture du demandeur, qu’il aurait acquise en Allemagne, aurait été confisquée par la police sans aucun motif valable. Malgré ses démarches pour récupérer son véhicule, celui-ci aurait été arbitrairement vendu aux enchères. Ils précisent que Monsieur … aurait été chauffeur de taxi et que cette confiscation arbitraire aurait mis en péril son activité professionnelle. D’autre part, il serait arrivé que Monsieur … ait été traité de gitan par ses collègues chauffeurs de taxi jaloux de la bonne marche de son activité. Ces remarques humiliantes et réflexions à caractère ethnique auraient été quotidiennes et il aurait même été agressé physiquement dans l’exercice de son activité par un collègue serbe. Pourtant, il n’aurait pas osé porter plainte en raison des antécédents de son agresseur, qui aurait été un narcotrafiquant proche de la police serbe.
En 2007 ou 2008, les consorts …-… auraient été victimes de cambrioleurs qui auraient volé la caisse de leur communauté religieuse - Monsieur … ayant été en charge de la caisse de la communauté en sa qualité de trésorier - ainsi que les bijoux de Madame …. La police aurait été appelée sur les lieux, mais les agents chargés des premières investigations se seraient révélés d’un laxisme regrettable et malgré que des empreintes digitales auraient été relevées dans la maison, aucune diligence n’aurait été entreprise pour retrouver les coupables.
En outre, du fait de leur appartenance à la communauté des témoins de Jéhovah, les requérants auraient subi de nombreuses entraves au libre exercice de leur foi. Ainsi, ils auraient été régulièrement insultés lorsqu’ils auraient été en mission d’évangélisation pour le compte de leur communauté. Nombre de coreligionnaires des consorts …-… auraient été agressés physiquement, de sorte que ceux-ci auraient vécu dans une crainte constante lorsqu’ils partaient en mission d’évangélisation. Enfin, le lieu de culte des témoins de Jéhovah aurait été détruit par des personnes inconnues sans qu’aucune enquête ne soit ouverte par la police pour retrouver les coupables.
Finalement, sur le plan sanitaire, les demandeurs auraient été victimes de discrimination dans la mesure où un de leurs fils aurait souffert de l’épaule, mais le médecin qui les aurait reçu à l’hôpital les auraient renvoyés à la maison sans avoir examiné le garçon, en prétendant qu’il n’aurait rien de grave, alors qu’il aurai été évident qu’il aurait souffert.
En droit, les demandeurs font valoir que les éléments exposés permettraient d’affirmer qu’ils établissent dans leur chef une crainte fondée de persécution du fait de leur ethnie et de leur religion tel que stipulé dans les articles 31 et 32 de la loi du 5 mai 2006.
En effet, ce serait en raison leur appartenance ethnique qu’ils auraient subi au quotidien les insultes et autres remarques humiliantes de la part des Serbes. Leur appartenance ethnique aurait été également la cause pour laquelle les demandeurs auraient subi des discriminations dans les hôpitaux et pour laquelle le demandeur n’aurait pas pu accomplir sereinement son activité de chauffeur de taxi et qu’il se serait vu saisir sans raison son véhicule qui aurait été par la suite mis aux enchères. A ce sujet, les demandeurs entendent préciser que contrairement à ce qu’a affirmé le ministre dans la décision déférée, le véhicule saisi aurait appartenu à Monsieur …, le nom de l’oncle ayant figuré uniquement sur les papiers du véhicule parce que ce dernier se serait chargé de l’achat et de l’acheminement de la voiture de l’Allemagne vers la Serbie.
En ce qui concerne la situation générale des Rom de Serbie, les demandeurs font état d’un communiqué de l’agence de migration suédoise qui estime que la plupart des Rom ayant demandé asile en Suède auraient vécu dans des conditions misérables et seraient discriminés. Ils relatent encore que dans la ville de Nis, une cinquantaine de maisons auraient été démolies en avril 2009 et leurs occupants, appartenant à l’ethnie des Rom, auraient dû abandonner les lieux.
Lorsque l’administration de la ville aurait installé des containers pour les loger dans un village à la périphérie de Belgrade, les habitants de ces villages auraient immédiatement bloqué l’accès aux routes et ils auraient demandé à ce que les containers soient enlevés, menaçant même de mettre le feu aux voitures si les Rom venaient s’y installer. Cette attitude de la population démontrerait le rejet dont elle ferait preuve vis-à-vis de la minorité rom et par ricochet des discriminations et humiliations subies par l’ensemble des membres de cette minorité.
D’autre part, le 1er octobre 2010, Amnesty International aurait fait état d’une expulsion forcée par les autorités de Belgrade d’une communauté rom vivant dans des habitations précaires dans un quartier appelé Belville. Selon les informations reçues par Amnesty International, la ville de Belgrade, qui serait en train d’élaborer un projet de réinstallation pour les habitants de Belville, n’aurait communiqué aucune date d’expulsion aux Rom pourtant premiers visés et ne les aurait même pas consultés au sujet du projet de réinstallation ou de solutions de relogement.
Ainsi, il ressortirait clairement du prédit rapport que la situation des minorités ethniques en Serbie serait toujours aussi préoccupante. Selon le même rapport, que ce soit en Serbie ou au Kosovo, les minorités subiraient toujours des discriminations et les violences interethniques n’auraient pas cessé. Au sujet de la discrimination vis-à-vis des Rom, le même rapport estimerait que ces derniers continueraient d’être victimes de discriminations, notamment dans le domaine de l’accès à l’éducation, à la santé et à l’emploi. Rares seraient ainsi ceux qui bénéficieraient du droit à un logement convenable. En outre, la plupart n’auraient pas de papiers d’identité et ne pourraient donc pas se faire enregistrer en tant que résidents par les administrations locales.
En ce qui concerne le plan d’action destiné à mettre en œuvre la stratégie d’intégration des Rom, des Ashkalis et des Egyptiens, il n’aurait toujours pas été appliqué. Les demandeurs exposent encore que parmi les femmes rom, on estimerait environ à 75% la proportion d’analphabètes, il serait difficile de se protéger contre les violences domestiques et plusieurs ONG auraient dénoncé en octobre 2010 la discrimination dont seraient victimes les Rom en matière de logement. D’autre part, en juin 2010 le comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales du Conseil de l’Europe aurait souhaité que le système judiciaire se montre plus efficace face aux discriminations subies par les minorités et il aurait également demandé que des mesures soient prises pour que les Rom puissent obtenir les papiers d’identité et ne soient plus victimes des discriminations dans le domaine de l’enseignement, de l’emploi, de la santé et du logement. Du rapport précité il ressortirait également qu’à Belgrade une dizaine d’inconnus auraient agressé une personne déplacée venue du Kosovo. Atteinte d’une lésion au poumon, cette personne aurait été conduite à l’hôpital, mais elle en serait partie plus tard de son propre chef dans la mesure où, dépourvue de papiers d’identité, elle n’aurait pas pu bénéficier d’une prise en charge médicale. En outre, la police n’aurait pas voulu enquêter sur ce qui lui serait arrivé. Par ailleurs, trois autres attaques contre des Rom auraient été signalées au mois de juillet 2010, aucun des agresseurs n’aurait été traduit en justice pour ces faits.
Les demandeurs exposent ensuite que la Serbie compterait entre 450 000 et 800 000 Rom, dont 30% vivraient avec moins de 2, 15 € par jour et selon certaines estimations, environ 100 000 hommes habiteraient à Belgrade dont un tiers dans quelque 147 quartiers informels. Vivant dans des campements, c’est-à-dire sans adresse juridiquement valable, ils ne pourraient pas obtenir de permis de séjour, document constituant une des conditions essentielles pour avoir accès aux soins de santé. D’autre part, seuls les enfants dont les parents ont le statut de résident pouvaient être scolarisés, et rares seraient ceux qui achèveraient leur scolarité élémentaire.
Les demandeurs en concluent que les persécutions fondées sur leur appartenance à l’ethnie des Rom seraient partant corroborées par les rapports crédibles et dignes de foi sur les traitements généraux réservés aux Rom malgré les rapports officiels optimistes sur la question.
En ce qui concerne les persécutions fondées sur la religion, les demandeurs font valoir qu’il aurait été établi par les auditions qu’ils auraient subi des actes de persécution en raison de leur appartenance à la communauté des témoins de Jéhovah. Le vol de la caisse de la communauté, les insultes subies au cours de leur mission et même les agressions physiques d’autres coreligionnaires laisserait admettre sinon une persécution, du moins une crainte fondée de persécution dans leur chef. En effet, le fait que des témoins de Jéhovah auraient été agressés alors qu’ils auraient été en mission d’évangélisation à Vranje, permettraient de conclure que tout témoin de Jéhovah accomplissant sa mission d’évangélisation encourait de grands risques d’être agressé.
Enfin, la destruction criminelle de la salle de culte des témoins de Jéhovah serait concluante dans ce sens que les membres de cette communauté seraient victimes d’actes de persécution du fait de leur religion. Le fait que les fidèles continueraient à se réunir, ne signifierait pas qu’ils ne seraient pas persécutés.
Quant au départ de leur pays d’origine, les demandeurs font valoir qu’ils auraient subi des actes de persécution depuis des années et n’auraient pas voulu utiliser les circuits de passeurs clandestins pour franchir la frontière et se réfugier dans un autre pays. En effet, cette pratique ne correspondrait pas à leurs croyances religieuses. Ainsi, ils auraient attendu l’ouverture des frontières et la délivrance de leur passeport pour quitter la Serbie. D’autre part, la combinaison des différents éléments de persécutions auraient grandement influé sur la santé psychologique de la demanderesse qui se serait trouvé dans un état de stress psychique permanent qui lui aurait fait perdre ses cheveux. Ainsi, la double difficulté sans cesse grandissante de vivre au quotidien en tant que Rom et en tant que témoin de Jéhovah, les requérants n’auraient eu d’autre solution que de quitter leur pays d’origine pour demander asile au Luxembourg.
Le délégué du gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs et conclut au rejet du recours.
Aux termes de l’article 2 a) de la loi du 5 mai 2006, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.
La notion de « réfugié » est définie par l’article 2 c) de ladite loi comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner (…) ».
Une crainte de persécution au sens de l’article 2 c) de la loi du 5 mai 2006 doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considéré individuellement et concrètement, le demandeur de protection internationale risque de subir des persécutions.
Aux termes de l’article 31 (1) de la loi du 5 mai 2006 : « Les actes considérés comme une persécution au sens de l’article 1 A de la Convention de Genève doivent : a) être suffisamment graves du fait de leur nature ou de leur caractère répété pour constituer une violation grave des droits fondamentaux de l’homme, (…) ».
L’examen des déclarations faites par les demandeurs lors de leurs auditions respectives, ainsi que les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse et les pièces produites en cause, amène toutefois le tribunal à conclure que les demandeurs restent en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle fondée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leurs opinions politiques ou de leur appartenance à un certain groupe social ainsi que le prévoit l’article 2 c) de la loi du 5 mai 2006.
En effet, en ce qui concerne tout d’abord la situation générale des Rom en Serbie, s’il n’est pas contesté que les membres de cette communauté sont exposés à des discriminations et à des conditions de vie précaires, il ne ressort toutefois ni des arguments développés par les demandeurs, ni des éléments du dossier que cette situation générale soit telle que tout membre de la minorité Rom puisse faire valoir des raisons de craindre d’être persécuté du seul fait de cette origine ethnique.
Il se dégage des explications du délégué du gouvernement que les autorités serbes ont entrepris des efforts pour améliorer le sort et les conditions de vie de la communauté. Il ressort à cet égard d’un rapport intitulé « Operational Guidance Note Serbia » de la UK Border Agency de septembre 2008, cité par le délégué du gouvernement, que les discriminations envers les Rom n’atteignent en général pas le niveau de persécution et que les autorités sont disposées à offrir une protection suffisante, même si l’efficacité de la protection peut être limitée par les actes individuels de certains policiers.
De même, il ressort d’un rapport du « Bundesamt für Migration und Flüchtlinge » allemand de juin 2010, qu’en 2002, la Serbie a introduit une loi pour protéger les minorités nationales, reconnaissant par ailleurs les Rom comme groupe ethnique autonome. Depuis 2007, un Ombudsmann élu serait chargé pour défendre les droits des minorités. En juillet 2008, un ministère pour les droits de l’homme et les droits des minorités a été crée, et, en mars 2009, une loi interdisant toute discrimination a été votée. Ce même rapport indique que les Rom, à condition d’être déclarés et de disposer de papiers d’identité, ont droit à la couverture sociale et qu’ils ont accès aux soins, à des indemnités de chômage et de pension ainsi qu’à l’éducation.
Ces constats ne sont pas énervés par les observations des demandeurs relatives à la situation des Rom en Serbie, étant relevé qu’ils n’ont versé en cause aucun document, tels les rapports internationaux ou articles de presse invoqués par eux dans la requête, ni fourni les références exactes des sources à la base des extraits cités dans la requête.
Quant au rapport d’Amnesty International de 2010 sur la Serbie dont se prévalent les demandeurs et qui porte essentiellement sur l’expulsion de Rom de campements illégaux situés notamment à Belgrade et sur le cas précis d’une personne ayant été attaquée par des inconnus, force est de constater qu’il ne ressort pas de ce rapport que tout membre de la communauté rom aurait des raisons de craindre de faire l’objet de persécutions en Serbie.
Il suit des développements qui précèdent que les demandeurs n’ont pas soumis au tribunal des éléments suffisants de nature à contredire l’appréciation faite par le ministre sur la situation générale des Rom en Serbie, étant rappelé qu’il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence des demandeurs et d’instruire le dossier à leur place.
Dès lors, les éléments d’appréciation à la disposition du tribunal ne lui permettent pas de considérer que la situation de la minorité rom en Serbie soit telle que tout membre de cette communauté a des raisons de craindre des persécutions au sens de la loi du 5 mai 2006 du seul fait de son origine ethnique.
Quant à la situation particulière des demandeurs, forcer est au tribunal de constater, en ce qui concerne la vente aux enchères de la voiture des demandeurs, que s’il est exact que cet incident se meut sur la toile de fond de considérations relatives à l’appartenance ethnique des demandeurs, en l’occurrence des Serbes jaloux qu’un Rom soit propriétaire de deux voitures et ont dénoncé les demandeurs auprès de la police, il n’en reste pas moins que le demandeur a omis de demander la protection des autorités policières ou judiciaires suite à l’information que sa voiture serait vendue aux enchères. En effet, le demandeur s’est limité à se rendre à la vente aux enchères et essayé d’acquérir lui-même la voiture, projet auquel il a dû renoncer suite aux menaces proférées à son encontre par d’autres intéressés, alors qu’il aurait pu et dû se tourner vers les autorités policières voire judiciaires afin de clarifier la situation. Ainsi, dans la mesure où la recherche de la protection des autorités étatique voire des organisations internationales présentes sur le territoire du pays de provenance, constitue un élément intrinsèque de la définition de persécution au sens de la loi du 5 mai 2006, l’absence de la recherche de protection, sans motif valable, a pour conséquence que les faits ne sauraient être qualifiés de persécution.
En ce qui concerne les cambriolages dont les demandeurs ont été victimes, force est au tribunal de constater, d’un côté, qu’il ne ressort pas clairement des éléments lui soumis pour appréciation que les prédits cambriolages ont été motivés par l’appartenance des demandeurs à la minorité des Rom, voire par l’appartenance des auteurs à la majorité des Serbes, et, de l’autre côté, qu’il ressort ru récit des demandeurs que les autorités appelées sur place afin d’enquêter sur les prédits cambriolages, ont entrepris des investigations afin de trouver les auteurs, telles que la prise d’empreintes digitales, de sorte que, même si ces investigations n’ont pas abouti, on ne saurait conclure que les demandeurs n’ont pas bénéficié de la protection des autorités sur place.
Cette conclusion n’est pas énervée par les remarques des policiers que la maison des demandeurs serait bien entretenue et bien équipée.
Finalement, en ce qui concerne le problème invoqué par les demandeurs en relation avec leur religion, force est de constater que l’incendie de la salle de réunion des témoins de Jéhovah constitue un fait isolé, ne visant pas individuellement les demandeurs et par ailleurs, qui a fait l’objet d’une enquête policière. Ici encore, le tribunal retient que si les auteurs de l’incendie n’ont pas pu être déterminés par la police serbe, ce fait ne saurait établir que les autorités sur place ne peuvent ou ne veulent pas leur conférer une protection adéquate. En effet, dans la mesure où une sécurité absolue ne saurait même pas être garantie dans les Etats qui se sont dotés d’un système policier et judiciaire efficace et adéquat, il importe d’analyser si ces autorités ont le pouvoir et surtout la volonté d’engager toutes les mesures nécessaire afin de garantir une telle protection.
Dans la mesure où il ne ressort pas des éléments soumis au tribunal que la police serbe serait restée en défaut de prendre les dispositions nécessaires, il s’ensuit que l’incendie ne saurait être qualifié d’actes de persécution. Il en est de même des agressions subies par d’autres témoins de Jéhovah, étant donné qu’ici encore les demandeurs n’ont pas été visé personnellement, et d’autre part, il ne ressort pas des éléments soumis au tribunal que le système judiciaire serbe serait parfaitement inefficace vis-à-vis de telles actions, étant donné qu’il est impossible de déterminer, à l’état actuel de l’instruction du dossier, pour quelle raison précise les auteurs, qui par ailleurs ont été identifiés et cités en justice, ont été relâchés, les demandeurs ayant indiqué au cours de leur entretien que le tribunal en charge du procès dirigé contre les auteurs de l’acte précité aurait retenu que ces auteurs auraient été complètement ivres.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a rejeté la demande en reconnaissance du statut de réfugié des demandeurs.
Quant au volet de la décision litigieuse portant refus d’accorder le bénéfice du statut conféré par la protection subsidiaire, il y a lieu de relever qu’aux termes de l’article 2 e) de la loi du 5 mai 2006, peut bénéficier de la protection subsidiaire : « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37 (…) ».
L’article 37 de la loi du 5 mai 2006 définit comme atteintes graves : « a) la peine de mort ou l’exécution ; ou b) la torture ou les traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine ; ou c) des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. » Le tribunal constate qu’à l’appui de leur demande de protection subsidiaire, les demandeurs n’invoquent aucun moyen spécifique, de sorte qu’il y a lieu de conclure que ladite demande est basée sur les mêmes motifs que ceux qui sont à la base de leur demande de reconnaissance du statut de réfugié.
Or, au vu des conclusions dégagées ci-avant au sujet de la demande en reconnaissance du statut de réfugié, dans la mesure où il a été jugé que les faits et motifs invoqués par les demandeurs manquent de fondement, il y a lieu de retenir qu’il n’existe pas davantage d’éléments susceptibles d’établir, sur la base des mêmes événements ou arguments, qu’il existerait de sérieuses raisons de croire qu’ils encourraient, en cas de retour dans leur pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 précité. Plus particulièrement, les demandeurs restent en défaut d’établir qu’en cas de retour dans leur pays d’origine, ils risqueraient la peine de mort ou l’exécution, la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, ou encore des menaces graves et individuelles contre leur vie ou leur personne en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.
Il s’ensuit en l’absence d’autres éléments, que c’est à juste titre que le ministre a retenu que les demandeurs n’ont pas fait état de motifs sérieux et avérés permettant de croire qu’ils courraient le risque de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 de la loi du 5 mai 2006 et qu’il leur a partant refusé l’octroi d’une protection subsidiaire au sens de l’article 2 e) de ladite loi.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a déclaré la demande de protection internationale sous analyse comme non justifiée, de sorte que le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.
2. Quant au recours tendant à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire Etant donné que l’article 19 (3) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre l’ordre de quitter le territoire contenu dans une décision statuant sur une demande de protection internationale, le recours en annulation introduit contre pareil ordre contenu dans la décision déférée du 18 avril 2011 est recevable pour avoir été, par ailleurs, introduit dans les formes et délai de la loi.
Les demandeurs se limitent à solliciter l’annulation de l’ordre de quitter le territoire sans formuler un quelconque moyen à l’appui de leur demande.
Aux termes de l’article 19 (1) de la loi du 5 mai 2006, dans sa version applicable à la date de la décision en cause, une décision négative du ministre en matière de protection internationale vaut ordre de quitter le territoire.
Le ministre ayant rejeté la demande de protection internationale des demandeurs, il pouvait dès lors a priori valablement assortir le refus d’une protection internationale d’un ordre de quitter le territoire. A défaut d’un quelconque moyen dans la requête, le tribunal ne saurait en l’état actuel du dossier mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision portant ordre de quitter le territoire.
Il s’ensuit que le recours en annulation est à rejeter pour ne pas être fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 20 avril 2011 portant rejet d’un statut de protection internationale ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 20 avril 2011 portant ordre de quitter le territoire ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
condamne les demandeurs aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 6 février 2012 par :
Marc Sünnen, vice-président, Claude Fellens, premier juge, Thessy Kuborn, juge en présence du greffier Arny Schmit.
s. Arny Schmit s. Marc Sünnen 15