Tribunal administratif No 27647 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 janvier 2011 3e chambre Audience publique du 9 novembre 2011 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du directeur de l’administration des services de secours en matière de stage
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 27647 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 14 janvier 2011 par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision qualifiée comme émanant du directeur de l’administration des services de secours relative à la non-prolongation de son stage, lui communiquée oralement le 31 décembre 2010 à 16.30 heures, ainsi que d’une décision non datée qualifiée également comme émanant du directeur de l’administration des services de secours concernant la non-organisation de son examen de fin de stage ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 31 mars 2011 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 2 mai 2011 par Maître Jean-Marie Bauler au nom de Monsieur … ;
Vu l’exploit du 10 mai 2011 de l’huissier de justice suppléant Gilles Hoffmann, agissant en remplacement de l’huissier de justice Carlos Calvo, demeurant à Luxembourg, portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration des services de secours, représentée par son directeur actuellement en fonctions, établie à L-2557 Luxembourg, 1, rue Robert Stumper ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 27 mai 2011 ;
Vu les pièces versées en cause ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jean-Marie Bauler et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Guillou-Jacques en leurs plaidoiries respectives.
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Par arrêté du 2 décembre 2009 du ministre de l’Intérieur et à la Grande Région, ci-après désigné par « le ministre », Monsieur … fut admis au stage de … du service d’urgence de l’administration des services de secours avec effet au 1er janvier 2010 « pour une durée renouvelable d’une année ».
En date du 31 décembre 2010, un entretien eut lieu entre Monsieur … et son supérieur hiérarchique direct, Monsieur …, au sujet de la question de la prolongation de son stage au-delà du 31 décembre 2010.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 janvier 2011, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision non écrite de non-prolongation de son stage qui lui aurait été communiquée oralement par Monsieur … sur instruction du directeur de l’administration des services de secours, ci-après désigné par « le directeur », et d’une décision de refus non datée qui émanerait du même directeur d’organiser son examen de fin de stage dans un délai utile tenant compte de la réduction de stage de 11 mois dont il bénéficiait pour qu’il puisse obtenir sa nomination de fonctionnaire à partir du 1er février 2011.
1) Quant à la compétence du tribunal et à la recevabilité du recours Quant à la question de la compétence du tribunal pour statuer sur le recours principal en réformation, il convient de relever qu’aucune disposition légale ne prévoit un recours au fond en matière de refus de prolongation du stage ou encore en matière de refus d’organiser un examen de fin de stage. Il s’ensuit que le tribunal est incompétent pour analyser le recours en réformation introduit à titre principal, tel que cela a été relevé à juste titre par le délégué du gouvernement.
Dès lors seul un recours en annulation a pu être introduit en l’espèce.
Concernant la recevabilité du recours, le représentant étatique conteste de prime abord l’existence à la fois d’une décision de refus de prolonger le stage du demandeur et d’une décision de refus d’organiser l’examen de fin stage en temps utile.
Plus particulièrement, sans contester l’existence d’un entretien avec le demandeur au sujet de la fin de son stage, le représentant étatique conteste le caractère décisionnel de l’acte litigieux, en soutenant qu’il n’y aurait eu qu’un constat de l’arrivée du terme de l’arrêté d’admission au stage au 31 décembre 2010. D’autre part, il conteste l’existence d’une décision de refus d’organiser l’examen de fin de stage, tout en faisant valoir que le demandeur n’aurait jamais formulé de demande y relative.
Quant au déroulement des faits, le délégué du gouvernement donne les précisions suivantes : il expose que le demandeur aurait, suite à la réussite de l’examen-concours en automne 2009, été admis avec effet au 1er janvier 2010 au stage en vertu d’un droit de priorité des volontaires de l’armée pour les emplois de la carrière inférieure des administrations tel que prévu par un règlement grand-ducal du 13 décembre 2004.
Le délégué du gouvernement précise que le demandeur aurait sollicité, par un courrier du 23 février 2010, une réduction de stage par référence à l’article 8 du règlement grand-ducal modifié du 30 janvier 2004 déterminant les cas d’exception ou de tempérament aux conditions de stage, de formation pendant le stage et d’examen de fin de stage pour certains candidats des administrations de l’Etat et à l’article 10 de la loi modifiée du 27 juillet 1992 relative à la participation du Grand-Duché de Luxembourg à des opérations pour le maintien de la paix (OMP) dans cadre d’organisations internationales. Le directeur aurait soutenu favorablement cette demande de réduction de stage sur base de l’article 10 de la loi du 27 juillet 1992, précitée, mais il aurait exprimé ses doutes quant à l’opportunité d’une réduction ultérieure sur base de l’article 8 du règlement grand-ducal du 30 janvier 2004, précité, en raison d’un manque d’expérience du demandeur après un stage de seulement une année, et d’une absence de l’habilitation de sécurité ayant été sollicitée en date du 18 janvier 2010 sur le fondement de l’article 14 de la loi du 15 juin 2004, précitée, habilitation qui serait nécessaire puisque la fonction occupée par le demandeur aurait impliqué le maniement de pièces classifiées.
Indépendamment de la nécessité de cette habilitation, l’administration aurait éprouvé en plus des doutes quant à la garantie de moralité requise de la part du demandeur puisqu’il aurait présenté un bulletin 2 du casier judiciaire fort chargé. Compte tenu de ce casier judiciaire et par référence à l’article 2.5 du règlement grand-ducal du 7 avril 2006 déterminant les conditions d’admission, de nomination et d’avancement du personnel des cadres de l’Administration des Services de Secours, désigné ci-après par « le règlement grand-ducal du 7 avril 2006 », prévoyant la possibilité d’éliminer un candidat sur base des inscriptions au bulletin 2 du casier judiciaire, il aurait été décidé, en concertation avec le ministre du ressort, d’attendre l’émission de l’habilitation de sécurité demandée.
Le représentant étatique expose encore que suite à l’avis favorable de la ministre déléguée à la Fonction publique et à la Réforme administrative, le stage du demandeur aurait été réduit d’une durée totale de 11 mois.
Dans la mesure où en octobre 2010, l’habilitation de sécurité n’aurait pas encore été établie, le demandeur en aurait été informé par le directeur. En novembre 2010, la situation n’aurait toujours pas changé et le demandeur en aurait à nouveau été informé. Ainsi, une entrevue aurait eu lieu en date du 5 novembre 2010 en présence du directeur et du chef de la division administrative, technique et médicale, lors de laquelle le demandeur aurait été informé des conséquences que le défaut d’une habilitation de sécurité pourrait avoir, plus particulièrement qu’il ne pourrait pas continuer à travailler à son poste, de sorte que cela ne pourrait que signifier la fin de son stage. Le représentant étatique souligne qu’au vu de cette situation, il n’aurait pas été indiqué d’organiser un examen de fin de stage. Pareillement, la situation aurait été examinée afin d’envisager une réorientation en interne, ce qui n’aurait cependant pas pu se faire à défaut d’autres postes disponibles dans l’administration auxquels l’intéressé aurait pu être transféré.
Dans la mesure où l’habilitation de sécurité aurait toujours fait défaut en décembre 2010, une troisième entrevue aurait eu lieu le 15 décembre 2010, en présence du directeur et du chef de la division de la protection civile.
A l’approche du terme prévu par l’arrêté d’admission au stage, le ministre du ressort aurait dû constater que l’habilitation de sécurité n’aurait toujours pas été émise et qu’il était ainsi dans l’impossibilité de prolonger le stage. Ce constat aurait été signalé au directeur qui aurait demandé au supérieur hiérarchique direct du demandeur, à savoir Monsieur …, de rappeler à ce dernier les effets du terme de l’arrêté d’admission au stage en s’appuyant sur le contenu des entretiens de novembre et de décembre 2010.
La partie étatique souligne encore que le ministre d’Etat aurait en date du 1er février 2011 refusé la délivrance d’une habilitation de sécurité au demandeur.
Il convient de relever que dans la mesure où l’existence d’une décision administrative conditionne la recevabilité du recours, il y a de prime abord lieu d’examiner la question de savoir si une décision de non-prolongation du stage, respectivement une décision de refus d’organiser l’examen de fin de stage ont été prises en l’espèce.
Aux termes de l’article 2 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, un recours est ouvert « contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible ».
Cette disposition limite l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives que l’acte litigieux doit constituer une décision administrative, c’est-à-dire émaner d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et qu’il doit s’agir d’une véritable décision, affectant les droits et intérêts de la personne qui la conteste (F. Schockweiler, Le contentieux administratif et la procédure administrative non contentieuse en droit luxembourgeois, n° 46, p. 28).
L'acte émanant d'une autorité administrative, pour être sujet à un recours contentieux, doit dès lors constituer, dans l'intention de l'autorité qui l'émet, une véritable décision, à qualifier d'acte de nature à faire grief, c'est-à-dire un acte de nature à produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle ou patrimoniale de celui qui réclame (trib. adm., 18 juin 1998, n° 10617 et 10618, Pas. adm. 2010, V° Actes administratifs, n° 26, et autres références y citées). Plus particulièrement, n'ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n'étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l'administration, tout comme les déclarations d'intention ou les actes préparatoires d'une décision (trib. adm., 23 juillet 1997, n° 9658, confirmé sur ce point par arrêt du 19 février 1998, n° 10263C, Pas. adm. 2010, V° Actes administratifs, n° 43, et autres références y citées).
Pareillement, une lettre qui ne porte aucune décision et qui n’est que l’expression d’une opinion destinée à éclairer l’administré sur les droits qu’il peut faire valoir ou plus généralement sur la situation juridique, de même qu’un avis sur l’interprétation à donner à un texte légal ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation (trib. adm. 7 mars 2007 n° 21708 du rôle, Pas. adm. 2010, V° Actes administratifs, n° 53).
Il y a encore lieu de relever que la circonstance qu’en l’espèce les actes allégués n’ont pas la forme écrite n’est pas de nature à exclure qu’ils aient un caractère décisionnel. Il appartient seulement au demandeur de rapporter la preuve de l’existence des décisions.
Quant à la décision de refus de prolonger le stage Le délégué du gouvernement soutient que Monsieur … aurait uniquement été informé de ce que son stage prenait fin au 31 décembre 2010, tandis que le demandeur estime qu’une véritable décision portant refus de prolonger le stage aurait été prise.
Aux termes de l’article 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désigné par « le statut général », :
« 1) (…) nul n’est admis au service de l’Etat en qualité de fonctionnaire s’il ne remplit les conditions suivantes :
(…) g) avoir accompli un stage et passé avec succès l’examen de fin de stage.
(…) 3) (…) Sans préjudice de l’application éventuelle de l’alinéa 11 du présent paragraphe, la durée du stage est de deux ans pour le stagiaire admis au stage sur un poste à tâche complète (…). L’admission a lieu pour une année ; pour que le stage continue, il doit être prolongé. (…).
Avant la fin du stage, le stagiaire doit subir un examen qui décide de son admission définitive.
Le stage peut être prolongé pour une durée s’étendant au maximum sur douze mois :
a) en faveur du stagiaire qui n’a pas pu se soumettre à l’examen de fin de stage pour des raisons indépendantes de sa volonté ;
b) en faveur du stagiaire qui a subi un échec à l’examen de fin de stage. Dans ce cas, le stagiaire devra se présenter de nouveau à l’examen. (…) Les décisions relatives à la suspension et à la prolongation du stage sont prises par le ministre du ressort (…) ».
Il se dégage des dispositions qui précèdent que le stage est en principe de deux ans, que l’admission au stage est en principe faite pour une année et que le législateur a prévu la possibilité d’une prolongation du stage. Au regard des termes employés dans les dispositions précitées, cette prolongation n’est pas automatique, mais présuppose une décision afférente du ministre du ressort. Cette conclusion est d’ailleurs confortée par le libellé de l’arrêté d’admission au stage précité du 2 décembre 2009 qui se réfère à une durée de stage d’un an « renouvelable ».
Il est constant qu’aucune décision écrite de refus de prolongation du stage n’a été prise en l’espèce. Il est cependant encore constant que le stage, initialement prévu comme allant jusqu’au 31 décembre 2010, n’a pas été prolongé.
Il convient dès lors d’examiner si, en l’espèce, le demandeur a seulement été informé de la cessation de son stage à l’arrivée du terme initialement prévu sans que la prolongation éventuelle soit un sujet de discussion, ou si, au contraire, l’administration a jugé utile de prendre position par rapport à une question de prolongation éventuelle du stage, hypothèse qui, au regard des développements qui précèdent, requiert nécessairement une décision afférente du ministre, qu’elle soit positive ou négative.
Il n’est pas contesté par la partie étatique qu’un entretien a eu lieu fin décembre 2010 entre le directeur, le chef de la division administrative, technique et médicale, et le demandeur au sujet de la fin du stage de ce dernier, d’ailleurs précédé d’autres entretiens sur le même sujet. Au regard des précisions fournies par le délégué du gouvernement dans son mémoire en réponse, ensemble les explications fournies par le demandeur, le tribunal est amené à retenir que la prolongation du stage a été un sujet de discussion entre les parties, qui était lié à la question de l’obtention par le demandeur d’une habilitation de sécurité, et que la décision querellée par le demandeur et notifiée par Monsieur … se situe dans le contexte de ces discussions.
Il s’ensuit que les explications fournies fin décembre 2010 au demandeur ne se limitaient pas à un simple constat de l’expiration de l’arrêté d’admission au stage, mais comportaient une véritable décision administrative affectant la situation du demandeur, en ce sens que celui-ci a été clairement informé d’une décision de ne pas prolonger son stage, malgré la possibilité offerte au ministre de le prolonger sur le fondement des dispositions précitées de l’article 2 du statut général au regard des discussions ayant eu lieu entre parties.
Il s’ensuit que le moyen d’irrecevabilité du délégué du gouvernement fondé sur un défaut d’existence d’une décision de non-prolongation du stage est à rejeter comme non fondé.
Quant à la décision de refus d’organiser l’examen de fin de stage Le délégué du gouvernement conteste également l’existence d’une décision de refus d’organiser un examen de fin de stage en temps utile en soutenant que comme la fin du stage se situerait, compte tenu des réductions de stage accordées au demandeur, au 31 janvier 2011, le ministre aurait encore eu le temps d’organiser l’examen de fin de stage, ceci en fonction de l’obtention ou non de l’habilitation de sécurité.
Il convient de prime abord de relever que s’il est vrai qu’en vertu de l’article 3 (4) du règlement grand-ducal du 7 avril 2006, l’examen d’admission définitive doit avoir lieu au plus tard trois mois avant la fin de la période de stage, à moins que le candidat bénéficie d’une réduction de stage, cela ne signifie pas qu’en cas de réduction de stage, l’organisation du stage soit à la discrétion de l’administration, sauf à respecter un délai raisonnable, comme l’entend la partie étatique. En effet, en vertu de l’article 2(3) du statut général, le stagiaire doit subir un examen qui décide de son admission définitive et cet examen doit avoir lieu avant la fin du stage.
Il s’ensuit que même en cas de réduction de stage, l’examen de fin de stage doit être organisé avant la fin du stage, qui, le cas échéant, a fait l’objet d’une prolongation pour les motifs prévus à l’article 2 (3) du statut général.
Ceci étant relevé, le tribunal est cependant amené à retenir qu’en l’espèce l’existence d’une décision de refus d’organiser un examen de fin de stage en temps utile ne se dégage pas des éléments du dossier.
En effet, force est de constater qu’en l’espèce aucune décision écrite portant refus d’organiser l’examen de fin de stage en temps utile n’a été prise. Il ne se dégage pas non plus des éléments du dossier qu’une décision orale en ce sens ait été prise. A cet égard, il convient plus particulièrement de relever que les discussions des parties lors de l’entrevue de fin décembre 2010, lors de laquelle Monsieur … a été informé de la prise d’une décision de non-prolongation de son stage, ont tourné uniquement autour de la question de la prolongation du stage, sans que le tribunal ne dispose d’éléments permettant de retenir que la question de l’organisation de l’examen de fin de stage ait été abordée.
Or, tel que cela a été relevé ci-avant, pour qu’une décision administrative susceptible de recours devant le tribunal administratif puisse être retenue, l’acte incriminé doit constituer, dans l'intention de l'autorité qui l'émet, une véritable décision.
A défaut de matérialisation d’une quelconque intention de l’administration de prendre une décision de refus d’organiser un examen de fin de stage en temps utile et eu égard aux contestations formelles de la partie étatique à cet égard, l’existence d’une décision de refus d’organiser un examen de fin de stage en temps utile ne se trouve pas vérifiée en l’espèce, de sorte que le moyen d’irrecevabilité soulevé par le délégué du gouvernement est à accueillir pour autant que le recours vise une prétendue décision de refus d’organiser l’examen de fin de stage en temps utile.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est à déclarer irrecevable pour autant qu’il est dirigé contre une prétendue décision de refus d’organiser l’examen de fin de stage en temps utile.
Ledit recours est recevable pour le surplus, pour avoir par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi.
2) Quant au fond A l’appui de son recours, le demandeur expose qu’à la suite de sa réussite à l’examen pour l’admission au stage de … du service d’urgence, il aurait été admis au stage à partir du 1er janvier 2010. Il aurait bénéficié d’une réduction de stage de 6 mois en raison d’une période de volontariat à l’armée luxembourgeoise et d’une réduction supplémentaire de 5 mois en raison d’une participation à une opération de maintien de la paix (OMP) au Kosovo, de sorte que son stage aurait dû prendre fin le 31 janvier 2011.
En droit, il invoque trois moyens par rapport à la décision de ne pas prolonger son stage :
- la décision émanerait d’une autorité incompétente, au motif qu’il aurait appartenu au ministre de l’Intérieur et à la Grande Région, et non pas au directeur de prendre cette décision ;
- l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-
ducal du 8 juin 1979 », aurait été violé au motif qu’il aurait dû être entendu au préalable dans ses explications ;
- l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 aurait été violé au motif que la décision ne serait pas motivée ;
Il convient d’examiner de prime abord le moyen fondé sur l’incompétence de l’auteur de la décision du refus de prolonger la période de stage du demandeur.
A cet égard, le représentant étatique soutient que la décision émanerait en réalité du ministre, en s’appuyant plus particulièrement sur une lettre dudit ministre du 4 janvier 2011.
Il est constant qu’en l’espèce, la décision litigieuse a été portée à la connaissance du demandeur par Monsieur …, supérieur hiérarchique direct de Monsieur ….
Si le demandeur affirme que Monsieur … aurait porté à sa connaissance une décision émanant du directeur, le représentant étatique soutient qu’en réalité celui-ci aurait transmis une décision émanant du ministre.
Les actes administratifs bénéficiant de la présomption de légalité, il incombe à l’administré qui entend faire annuler un acte administratif de rapporter la preuve de son illégalité.
Plus particulièrement en l’espèce, il appartient au demandeur d’établir que la décision orale qui a été prise et qui lui a été communiquée par son supérieur hiérarchique, a été prise par le directeur et non pas par le ministre, tel que le requiert l’article 2 du statut général qui dispose que « les décisions relatives à la (…) prolongation du stage sont prises par le ministre du ressort (…) ».
Le tribunal est amené à retenir qu’à défaut par le demandeur d’établir, plus particulièrement au regard des contestations afférentes de la partie étatique, que l’auteur de la décision était en réalité le directeur notamment au regard des termes exacts employés par Monsieur …, il convient de retenir qu’en l’espèce la décision litigieuse a été prise par l’autorité compétente dans la matière, à savoir le ministre de l’Intérieur et à la Grande Région qui, en vertu de l’arrêté grand-ducal du 27 juillet 2009 portant constitution des Ministères, est compétent pour les services de secours, conclusion qui est corroborée par un courrier du 4 janvier 2011 dudit ministre à la ministre déléguée à la Fonction publique et à la Réforme administrative dans lequel ledit ministre fait référence à une décision prise par lui de ne pas prolonger le stage du demandeur. Cette conclusion n’est pas énervée par l’affirmation du demandeur qu’il n’aurait jamais reçu une quelconque communication écrite du ministre, dans la mesure où, en l’espèce, la décision ne lui a pas été directement notifiée par le ministre, ni d’ailleurs par le directeur, mais elle lui a été transmise oralement par son supérieur hiérarchique direct, Monsieur ….
Il s’ensuit que le moyen fondé sur l’incompétence de l’auteur de la décision de non-
prolongation du stage est à rejeter comme étant non fondé.
Quant au moyen fondé sur une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, qui dispose que : « Sauf s’il y a péril en la demeure, l’autorité qui se propose de révoquer ou de modifier d’office pour l’avenir une décision ayant créée ou reconnu des droits à une partie, ou qui se propose de prendre une décision en dehors d’une initiative de la partie concernée, doit informer de son intention la partie concernée en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l’amènent à agir.
Cette communication se fait par lettre recommandée. Un délai d’au moins huit jours doit être accordé à la partie concernée pour présenter ses observations. (…) », c’est à juste titre que le délégué du gouvernement fait valoir que la décision de refus de prolonger le stage ne rentre pas dans les prévisions de cette disposition.
En effet, l’application dudit article 9 présuppose soit le retrait ou la modification d’une décision ayant créé ou reconnu des droits, soit la prise d’une décision en dehors de l’initiative de l’administré.
Il se dégage de l’arrêté d’admission au stage du 2 décembre 2010 du ministre que le demandeur a été admis au stage pour une durée d’un an, renouvelable. Le stage ayant débuté le 1er janvier 2010, les effets de l’arrêté d’amission au stage ont cessé le 31 décembre 2009, sauf l’hypothèse d’une prolongation qui, en l’espèce, n’a pas été accordée. Or, une telle prolongation ne constitue pas un droit acquis au bénéfice du stagiaire. En effet, l’existence d’un tel droit acquis ne découle ni des termes de l’article 2 (3), précité, du statut général, qui, à propos de la prolongation du stage dispose que « pour que le stage continue, il doit être prolongé » et « le stage peut être prolongé », suivi d’une description des cas de figure dans lesquels une prolongation peut être accordée, ni d’ailleurs des termes de l’arrêté ministériel du 2 décembre 2009, précité, qui prévoit que la durée du stage est renouvelable. Les termes ainsi choisis impliquent que la prolongation du stage est subordonnée à la prise d’une décision du ministre qui dispose de cette faculté, mais n’est pas obligé d’accorder une prolongation du stage.
Il s’ensuit que la décision de ne pas prolonger le stage ne constitue pas une décision révoquant ou modifiant pour l’avenir une décision ayant créé ou reconnu des droits.
Cette décision ne s’analyse pas non plus en une décision intervenue en dehors de l’initiative du demandeur. En effet, le demandeur, ayant nécessairement un intérêt à la prolongation du stage qui, d’après les explications fournies par le délégué du gouvernement, dépendait de l’obtention de l’habilitation de sécurité, a participé de façon non contestée à diverses réunions ayant trait à l’obtention de cette habilitation et à l’incidence de cette habilitation sur la fin du stage. Il y a dès lors lieu d’admettre que la décision litigieuse ne figure pas parmi les décisions visées à l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 et ne s’analyse point en une décision prise en dehors de l’initiative du demandeur.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le moyen fondé sur une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 est à rejeter comme non fondé.
Le demandeur invoque enfin un moyen fondé sur une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.
L’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 consacre le principe que d’une manière générale toute décision administrative doit reposer sur des motifs légaux, et que certaines catégories de décisions doivent formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui leur sert de fondement et des circonstances de fait à leur base.
A cet égard, il convient de préciser que la sanction de l’obligation de motiver une décision administrative consiste dans la suspension des délais de recours. La décision reste valable et l’administration peut produire ou compléter les motifs postérieurement et même pour la première fois devant le juge administratif En l’espèce, force est au tribunal de constater que s’il est vrai qu’il ne se dégage pas des éléments du dossier quels éléments de motivation ont été fournis au demandeur lors de l’entretien avec Monsieur … ayant eu lieu fin décembre 2010 lors duquel la décision de non-prolongation du stage lui a été notifiée, le délégué du gouvernement a fourni en cours d’instance des explications détaillées quant aux motifs à la base de la décision litigieuse, qui repose sur le défaut d’obtention de l’habilitation de sécurité à l’arrivée du terme de l’arrêté d’admission au stage du 2 décembre 2009. Indépendamment de la question du bien-fondé de la motivation ainsi fournie, - qui d’ailleurs n’a pas été remise en cause par le demandeur, les moyens présentés par lui se limitant à des moyens de procédure -, le tribunal est amené à retenir que la motivation ainsi fournie par le délégué du gouvernement doit être considérée comme suffisante au regard de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.
Il s’ensuit que le moyen fondé sur une violation de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 doit être rejeté comme étant non fondé.
Aucun autre moyen n’ayant été formulé, le recours est à rejeter comme étant non fondé.
Eu égard à l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par le demandeur est à rejeter.
Quant à la demande subsidiaire formulée par la partie étatique dans son mémoire en duplique de prononcer un sursis à statuer, celle-ci est à abjuger dans la mesure où le recours dirigé contre le refus d’accorder l’habilitation de sécurité n’a à ce stade de la procédure pas d’incidence sur le bien-fondé du présent recours, le demandeur s’étant limité à invoquer des moyens de procédure.
Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal ;
déclare irrecevable le recours subsidiaire en annulation pour autant qu’il est dirigé contre une prétendue décision de refus d’organiser l’examen de fin de stage en temps utile ;
le déclare recevable pour le surplus ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;
rejette la demande subsidiaire de l’Etat de prononcer un sursis à statuer ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par :
Martine Gillardin, vice-président, Annick Braun, premier juge, Andrée Gindt, juge, et lu à l’audience publique du 9 novembre 2011 par le vice-président, en présence du greffier Judith Tagliaferri.
s. Judith Tagliaferri s. Martine Gillardin Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 09.11.2011 Le Greffier du Tribunal administratif 11