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25/05/2011 | LUXEMBOURG | N°27183

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 mai 2011, 27183


Tribunal administratif N° 27183 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 août 2010 3e chambre Audience publique du 25 mai 2011 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat en matière de discipline

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 27183 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 août 2010 par Maître Laure Stachnik, avocat à la Cour, assistée de Maître Paul Lambert, avocat, les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur

…, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du Conseil de discipline d...

Tribunal administratif N° 27183 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 août 2010 3e chambre Audience publique du 25 mai 2011 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat en matière de discipline

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 27183 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 août 2010 par Maître Laure Stachnik, avocat à la Cour, assistée de Maître Paul Lambert, avocat, les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat du 27 avril 2010 prononçant à son égard les sanctions disciplinaires du changement d’administration et de la rétrogradation ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 6 décembre 2010 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 6 janvier 2011 par Maître Laure Stachnik au nom de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 27 janvier 2011 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur le délégué du gouvernement Guy Schleder en sa plaidoirie.

Monsieur …, inspecteur auprès de la Commission de Surveillance du Secteur Financier, ci-après désignée par la « CSSF », entra en service le 1er septembre 1990 et obtint sa nomination définitive le 1er septembre 1992.

Par une lettre du 15 juin 2009, la CSSF saisit le commissaire du gouvernement chargé de l’instruction disciplinaire en vue de procéder à une instruction disciplinaire à l’encontre de Monsieur …, conformément à l’article 56, paragraphe 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après dénommée « statut général ».

Le 8 février 2010, le commissaire du gouvernement clôtura l’instruction disciplinaire et décida de transmettre le dossier pour attribution au Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désigné par « Conseil de discipline », conformément à l’article 56, paragraphe 5 du statut général.

Par une décision du 27 avril 2010, le Conseil de discipline prononça à l’encontre de Monsieur … les sanctions disciplinaires du changement d’administration et de la rétrogradation au grade 10 échelon 10 et fixa le délai pendant lequel l’intéressé ne peut pas prétendre à une promotion ou à un avancement à trois ans.

Cette décision est motivée comme suit :

« (…) Il est reproché à … d’avoir, dans la période du 9 octobre 2008 au 27 mars 2009, importuné à 14 reprises une collègue de travail, en l’occurrence …, soit en la harcelant sexuellement, soit en lui imputant injurieusement dans des écrits à destination de ses supérieurs un comportement déplacé, bien qu'il lui ait à plusieurs reprises été enjoint par ses supérieurs de cesser ce comportement, la Commission spéciale en matière de harcèlement ayant ainsi dû être saisie de cette affaire.

Un comportement analogue vis-à-vis d'une autre collègue de travail, en l'occurrence …, est mis à charge de …. Il lui est reproché plus particulièrement d'avoir harcelé sexuellement … à trois reprises et d'avoir, lors d'une entrevue avec ses supérieurs, injurieusement imputé à … et à ses parents un comportement des plus improbables. Ces faits se sont déroulés entre le 13 juillet 2009 et le 3 août 2009.

… ne conteste pas la matérialité des faits mis à sa charge, mais il continue à affirmer que son comportement a été provoqué tant par … que par ….

Etant donné cependant que … s'est plainte auprès de la Direction de la CSSF à plusieurs reprises, oralement et par écrit et ce dès le 17 octobre 2008, du comportement de … et que … s'est plainte dès le 28 juillet 2009 auprès de ses supérieurs à plusieurs reprises, tant oralement que par écrit du comportement de … et au vu des nombreuses attestations testimoniales versées au dossier, confirmant le comportement inqualifiable de … à l'égard de ses victimes et, finalement, au vu du fait que … a dû changer de bureau et de parking et que … a dû changer de parking afin d'éviter toute rencontre avec …, il convient de retenir que le comportement de ce dernier n'a été provoqué ni par …, ni par ….

Les faits détaillés au rapport d'instruction sont dès lors établis en cause et constituent manifestement des manquements graves et répétés à l'article 9, paragraphe 1., alinéa 2 du statut général qui dispose que le fonctionnaire doit se tenir consciencieusement aux ordres de service, à l'article 10, paragraphe 1., alinéa 1 du statut général qui impose à tout fonctionnaire d'éviter tout ce qui pourrait porter atteinte à la dignité de ses fonctions et tout ce qui pourrait donner lieu à scandale et compromettre les intérêts du service public, à l'article 10, paragraphe 1., alinéa 2 du statut général qui dispose que le fonctionnaire est tenu de se comporter avec dignité et civilité dans les rapports de service avec ses collègues et, finalement, à l'article 10, paragraphe 2 du statut général qui impose au fonctionnaire de s'abstenir de tout fait de harcèlement sexuel et moral à l'occasion des relations de travail.

Aux termes de l'article 53 du statut général, l'application des sanctions se règle notamment d'après la gravité de la faute commise, la nature et le grade des fonctions et les antécédents du fonctionnaire inculpé. Elles peuvent être appliquées cumulativement.

… est inspecteur auprès de la CSSF. Il est entré en service le 1er septembre 1990 et tient sa nomination du 1er septembre 1992. Il est classé au grade 11 échelon 11 et aucun antécédent disciplinaire formel n'est consigné dans son dossier.

Le délégué du Gouvernement a proposé de condamner … à la rétrogradation.

Au vu de la gravité et de la multiplicité des fautes disciplinaires retenues à charge de …, tout en tenant compte tant de l'absence d'antécédents disciplinaires du fonctionnaire que de sa durée de service, le Conseil décide de prononcer à l'égard de … les sanctions disciplinaires prévues aux articles 47.4 et 47.7 du statut général, à savoir le changement d'administration et la rétrogradation qu'il fixe au grade 10 échelon 10, la durée pendant laquelle … ne pourra prétendre à une promotion étant fixée à trois ans. (…) » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 août 2010, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision précitée du 27 avril 2010 du Conseil de discipline.

Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours en annulation, en faisant valoir qu’un recours en réformation serait prévu en la présente matière et que même si un demandeur pouvait se limiter à ne solliciter que l’annulation de la décision attaquée dans le cas où un recours en réformation serait prévu, encore faudrait-il que le demandeur invoque un moyen d’annulation à l’appui de son recours, ce qui ne serait toutefois pas le cas en l’espèce.

Le demandeur fait répliquer que son recours aurait été introduit conformément aux termes de l’article 79 du statut général, en vertu duquel le tribunal pourrait annuler la décision s’il estimait que le fonctionnaire avait été frappé d’une sanction trop sévère, et substituer une sanction moins grave que celle qui avait été prononcée. Il soutient en outre qu’il appartiendrait au tribunal de qualifier le recours introduit et que comme il aurait sollicité tant l’annulation de la décision litigieuse que l’institution d’une autre sanction, il aurait partant sollicité la réformation de la décision déférée.

Aux termes de l’article 54, paragraphe 2 du statut général, en dehors des cas où le Conseil de discipline statue en appel, le fonctionnaire frappé d’une sanction disciplinaire prononcée par le Conseil de discipline peut dans les trois mois de la notification de la décision prendre recours au tribunal administratif qui statue comme juge du fond.

Etant donné que le présent recours est dirigé contre la décision du Conseil de discipline du 27 avril 2010 n’ayant pas statué en appel, mais ayant prononcé des sanctions disciplinaires à l’égard du demandeur, c’est à bon droit que le délégué du gouvernement soutient qu’un recours en réformation est légalement prévu en l’espèce.

Il ressort de la lecture de la requête introductive d’instance, et notamment de son dispositif, que le demandeur sollicite tant l’annulation de la décision déférée que l’institution d’une sanction moins sévère à celle qui a été prononcée par le Conseil de discipline, de sorte qu’il y a lieu d’admettre que le demandeur sollicite la réformation de la décision litigieuse.

Les développements du demandeur fondés sur l’article 79 du statut général qui a trait à la procédure de la révision des sanctions prononcées par le Conseil de discipline sont partant à écarter pour manquer de pertinence.

Le moyen d’irrecevabilité du délégué du gouvernement laisse partant d’être fondé.

Le délégué du gouvernement relève par ailleurs que la décision entreprise n’aurait pas été versée par le demandeur parmi les pièces, tel que requis par l’article 2, alinéa 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Dans la mesure où le délégué du gouvernement se contente de signaler ce défaut de pièce sans cependant en tirer une conclusion juridique et dans la mesure où le demandeur a produit ensemble avec son mémoire en réplique la décision litigieuse du Conseil de discipline, il y a simplement lieu de faire abstraction de cette observation, étant relevé par ailleurs que, s’il est exact qu’au prescrit de l’article 2 de la loi précitée du 21 juin 1999, la décision critiquée doit en principe figurer parmi les pièces versées avec la requête introductive d’instance afin que la juridiction saisie puisse pleinement exercer son pouvoir de contrôle, le non-respect de cette exigence, en l’espèce, n’entraîne pas l’irrecevabilité du recours, étant donné que la décision du Conseil de discipline déférée a été versée en cours d’instance, de sorte à rendre pleinement opérationnel le contrôle au tribunal, sans qu’une atteinte aux droits de la défense ne soit donnée par ailleurs (cf. trib. adm. 3 juillet 2002, n° 14587, Pas. adm.

2010, V° Procédure contentieuse, n° 260). Partant, la recevabilité du recours ne saurait être critiquée sous cet angle.

Le recours en réformation ayant, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi, il est dès lors recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur soutient en substance que la sanction prononcée par le Conseil de discipline serait disproportionnée par rapport aux faits reprochés.

Il soutient ensuite que le commissaire du gouvernement chargé de l’instruction disciplinaire n’aurait relevé que les points en sa défaveur, de sorte à n’avoir instruit le dossier qu’à sa charge et non pas aussi à sa décharge.

Il exprime en outre ses regrets quant à son comportement qu’il ne juge pas digne d’un fonctionnaire de l’Etat, ni d’un homme adulte et souligne qu’il aurait sollicité conseil auprès d’un médecin psychiatre. Il renvoie à des attestations testimoniales qu’il verse en cause et qui le décriraient comme un homme respectable et bien intégré. Il explique son comportement par les problèmes de couple dans sa vie privée qui se seraient soldés par un divorce. Tout en soulignant qu’il n’aurait jamais nié les faits, il continue à affirmer qu’il aurait été provoqué par ses collègues féminines.

Le demandeur insiste ensuite sur le fait qu’il n’aurait pas eu d’antécédents disciplinaires et que son travail n’aurait jamais donné lieu à des reproches. En ce qui concerne le changement d’administration prononcé par le Conseil de discipline, il fait valoir qu’il ferait partie du département … de la CSSF et qu’un changement d’administration lui ferait perdre toute son effectivité en raison de l’absence d’un poste comparable dans les autres administrations. Il précise dans ce contexte qu’il aurait été déclaré apte au travail par le médecin du travail.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement rétorque que les sanctions disciplinaires infligées par le Conseil de discipline seraient adéquates. En ce qui concerne les attestations testimoniales produites par le demandeur à l’appui de son recours, il estime que celles-ci ne seraient pas admissibles dans le cadre d’un recours en annulation où le tribunal est appelé à statuer en tenant compte de la situation de fait et de droit au jour de la prise de décision dès lors qu’elles auraient été établies postérieurement à la décision déférée. En outre, ces témoignages ne seraient pas pertinents dans la mesure où ils n’auraient pas trait aux faits reprochés. Il souligne ensuite que les sanctions prononcées, et plus particulièrement le changement d’administration serait la sanction la plus adaptée dans un cas de harcèlement sexuel afin de protéger les victimes.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur souligne que les témoins attesteraient de son honorabilité et leurs témoignages seraient partant admissibles. Il insiste encore sur sa durée de service de plus de vingt ans au sein de la CSSF qui lui aurait permis d’acquérir un certain degré de spécialisation et d’efficacité qui ne lui serait pas d’une grande utilité en cas de changement d’administration. Il donne également à considérer que les contacts avec les deux collègues concernées seraient limités actuellement au strict minimum et qu’il n’aurait plus eu de problèmes depuis le mois d’août 2009.

En ce qui concerne, en premier lieu, le reproche à l’adresse du commissaire du gouvernement de ne pas avoir instruit le dossier à charge et à décharge, tel que cela est requis par l’article 56, paragraphe 2, du statut général, le tribunal ne saurait déceler aucun élément permettant de retenir un défaut d’impartialité dans le chef du commissaire du gouvernement en ce qu’il n’aurait instruit le dossier qu’à charge. Force est de constater que le demandeur se borne à faire état de ce qu’il aurait adressé des explications écrites tant à la commission spéciale en matière d’harcèlement qu’au commissaire du gouvernement, mais que ses propos n’auraient vraisemblablement pas été pris en compte. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les deux lettres rédigées par le demandeur respectivement le 27 mars 2009 à l’adresse de la présidente de la commission spéciale en matière de harcèlement et le 7 septembre 2009 à l’adresse du commissaire du gouvernement sont jointes au dossier de l’instruction disciplinaire, en tant qu’annexes numéros 20 et 34, et que, par ailleurs, ces lettres contenant la prise de position du demandeur sur les faits lui reprochés sont mentionnées dans le rapport de la commission spéciale en matière de harcèlement ainsi que dans le rapport d’instruction du commissaire du gouvernement, de sorte qu’il y a lieu d’admettre que ces lettres ont été prises en considération. A défaut d’autres éléments plus circonstanciés, le moyen du demandeur tiré d’une irrégularité de la procédure disciplinaire ne peut qu’être rejeté.

Quant au fond, il y a lieu de relever que le demandeur ne conteste pas la réalité des faits lui reprochés, ni la matérialité des manquements au statut général retenus, mais il estime que les sanctions prononcées seraient disproportionnées par rapport aux faits lui reprochés.

Aux termes de l’article 53, alinéas 1 et 2 du statut général, « l’application des sanctions se règle notamment d’après la gravité de la faute commise, la nature et le grade des fonctions et les antécédents du fonctionnaire inculpé.

Elles peuvent être, le cas échéant, appliquées cumulativement. » A cet égard, il convient de rappeler que dans le cadre du recours en réformation introduit contre une sanction disciplinaire, le tribunal est amené à apprécier la nature et la gravité des faits commis par l’agent en cause en vue de déterminer si la sanction prononcée par l’autorité compétente a un caractère proportionné et juste, en prenant notamment en considération la situation personnelle de l’agent et ses antécédents éventuels (cf. trib. adm. 1er juillet 1999, n° 10936 du rôle, Pas. adm. 2010, V° Fonction publique n° 247 et autres références y citées).

Il y a également lieu de rappeler que l’ancienneté de service et l’absence d’antécédents disciplinaires constituent des éléments qui doivent être pris en considération en vue de la détermination de la sanction disciplinaire appliquée (cf. Cour adm. 3 juillet 2008, n° 23915C du rôle, Pas. adm. 2010, V° Fonction publique, n° 251 et autres références y citées).

En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que le demandeur, qui est inspecteur auprès de la CSSF, s’est rendu coupable d’avoir importuné, respectivement harcelé une collègue de travail, à savoir Madame …, durant la période du 9 octobre 2008 au 27 mars 2009, soit en la harcelant sexuellement, soit en lui imputant injurieusement dans des écrits à destination de ses supérieurs un comportement déplacé. Il s’est ensuite rendu coupable d’un comportement similaire envers une autre collège de travail, en l’occurrence Madame …, durant la période du 13 juillet 2009 au 3 août 2009, en la harcelant sexuellement et en lui imputant injurieusement lors d’une entrevue avec ses supérieurs, à elle ainsi qu’à ses parents, un comportement des plus improbables.

Si le demandeur ne conteste pas la matérialité des faits reprochés, il continue néanmoins à affirmer que son comportement aurait été provoqué par les deux collègues féminines et par le climat de travail ayant régné à la CSSF.

Or, force est de constater que ces allégations du demandeur ne sont corroborées par aucun élément du dossier, respectivement sont contredites par les témoignages précis et concordants figurant au dossier disciplinaire qui confirment le comportement déplacé du demandeur. S’y ajoute, tel que cela a été relevé par le Conseil de discipline que les deux collègues de travail en question se sont plaintes à plusieurs reprises auprès de la direction de la CSSF du comportement du demandeur, tant oralement que par écrit, que Madame… a dû changer de bureau et de parking et que Madame… a dû changer de parking afin d’éviter tout contact avec le demandeur. En conséquence, le moyen tiré de ce que le demandeur aurait été provoqué par ses collègues de travail laisse d’être établi.

Quant au bien-fondé du choix des sanctions infligées, qui sont le changement d’administration et la rétrogradation au grade 10 échelon 10, telles que prévues à l’article 47, points 4 et 7 du statut général, il y a lieu de rappeler que le demandeur s’est rendu coupable successivement des faits d’harcèlement sexuel envers deux collègues féminines, malgré les avertissements et rappels à l’ordre lui adressés par la direction de la CSSF. Ces faits constituent des manquements graves et répétés à l'article 9, paragraphe 1, alinéa 2, du statut général qui dispose que le fonctionnaire doit se tenir consciencieusement aux ordres de service, à l'article 10, paragraphe 1, alinéa 1, du statut général qui impose à tout fonctionnaire d'éviter tout ce qui pourrait porter atteinte à la dignité de ses fonctions et tout ce qui pourrait donner lieu à scandale et compromettre les intérêts du service public, à l'article 10, paragraphe 1, alinéa 2, du statut général qui dispose que le fonctionnaire est tenu de se comporter avec dignité et civilité dans les rapports de service avec ses collègues et, finalement, à l'article 10, paragraphe 2, du statut général qui impose au fonctionnaire de s'abstenir de tout fait de harcèlement sexuel et moral à l'occasion des relations de travail.

Ces faits dont le demandeur ne conteste pas la matérialité constituent des faits d’une gravité indéniable qui justifient, au vu de leur caractère répétitif malgré des rappels à l’ordre, et nonobstant l’absence d’antécédents disciplinaires et une ancienneté de plus de vingt ans, les sanctions prononcées par le Conseil de discipline qui ne sauraient ainsi être regardées comme disproportionnées eu égard à la nature et à la gravité des faits reprochés.

Cette conclusion ne saurait être énervée par le fait que le demandeur affirme suivre un traitement médical et psychologique, étant donné que le demandeur reste en défaut d’établir la réalité d’un tel traitement, les seules pièces produites par le demandeur à cet égard, à savoir la confirmation d’une consultation en date du 31 août 2010 auprès d’un médecin psychiatre et la confirmation d’une consultation auprès de l’asbl du planning familial en date du 30 septembre 2010, toutes deux postérieures à la décision déférée du 27 avril 2010, ne permettant pas d’établir que le demandeur suit ou a suivi un traitement thérapeutique.

Quant aux attestations testimoniales produites par le demandeur qui, contrairement à ce que soutient le délégué du gouvernement, sont admissibles dès lors que le tribunal est appelé à statuer en l’espèce comme juge du fond et qu’il peut dès lors en tenir compte alors même que le Conseil de discipline n’en avait pas connaissance, elles ne sauraient avoir une incidence sur la nature de la sanction infligée au demandeur. En effet, dès lors que le demandeur ne nie pas la matérialité des faits reprochés, ces attestations établies par un curé, des voisins, par sa sœur ainsi que par des connaissances et qui attestent que le demandeur est un homme gentil, tranquille, honnête, consciencieux, serviable, sont sans réelle pertinence en ce qui concerne le bien-fondé de la sanction prononcée.

Enfin, en ce qui concerne plus particulièrement la sanction du changement d’administration, le tribunal, à l’instar du délégué du gouvernement, arrive à la conclusion que c’est une sanction adéquate pour des faits de harcèlement sexuel sur deux collègues qui travaillent toujours à la CSSF.

Ainsi, au regard des circonstances de l’espèce, le tribunal est amené à retenir que les sanctions disciplinaires du changement d’administration et de la rétrogradation au grade 10 échelon 10, avec fixation du délai pendant lequel le demandeur ne peut prétendre à une promotion ou à un avancement à trois ans, telles que prononcées par le Conseil de discipline, constituent des sanctions adéquates.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en réformation est à rejeter comme non fondé.

Au vu de l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure de 750 euros sollicitée par le demandeur est à rejeter comme non fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclaré non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que sollicitée par le demandeur ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Martine Gillardin, vice-président, Annick Braun, juge, Andrée Gindt, juge, et lu à l’audience publique du 25 mai 2011 par le vice-président, en présence du greffier assumé Sabrina Knebler.

s. Sabrina Knebler s. Martine Gillardin Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 25 mai 2011 Le Greffier assumé du Tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 27183
Date de la décision : 25/05/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2011-05-25;27183 ?

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