Tribunal administratif N° 26128 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 septembre 2009 1re chambre Audience publique du 5 juillet 2010 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du bourgmestre de la commune de Kiischpelt en matière d’urbanisme
________________________________________________________________________
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 26128 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2009 par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L- … , tendant à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la commune de Kiischpelt du 21 avril 2009 ayant autorisé Monsieur … à réaliser des travaux de couverture du toit et l’installation de fenêtres sur un immeuble sis à L-9776 Wilwerwiltz, sur la parcelle … , ainsi qu’à l’annulation d’une décision du bourgmestre de Kiischpelt ayant autorisé Monsieur … à réaliser la construction d’un balcon avec balustrades et porte-fenêtre sur l’immeuble précité ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Alex MERTZIG, demeurant à Diekirch, du 2 octobre 2009 portant signification de ce recours à l’administration communale de Kiischpelt ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 6 octobre 2009 portant signification de ce recours à Monsieur … ;
Vu la constitution d’avocat déposée au greffe du tribunal administratif le 14 octobre 2009 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Kiischpelt ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 22 décembre 2009 par Maître Steve HELMINGER pour compte de l’administration communale de Kiischpelt, notifié le même jour à Maître Georges KRIEGER ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 12 janvier 2010 par Maître Georges KRIEGER au nom du demandeur, notifié le même jour à Maître Steve HELMINGER ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 9 février 2010 par Maître Steve HELMINGER pour compte de l’administration communale de Kiischpelt, notifié le même jour à Georges KRIEGER ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres David YURTHMAN, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, et Maître Anne-Claire BLONDIN, en remplacement de Maître Steve HELMINGER, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 26 avril 2010.
_____________________________________________________________________________
Par courrier du 26 mars 2009 adressé à l’administration communale de Kiischpelt, Monsieur … sollicita la délivrance d’une autorisation en vue de la réfection de la toiture de son immeuble sis sur la parcelle … , à Wilwerwiltz, de l’installation de fenêtres Velux dans la toiture et d’une porte-fenêtre ainsi que pour l’aménagement d’un balcon avec garde-corps.
En date du 21 avril 2009, le bourgmestre de la commune de Kiischpelt délivra à Monsieur … une autorisation pour la couverture du toit de son immeuble et l’installation de fenêtres type Velux. Par décision du 14 mai 2009, le Bourgmestre de Kiischpelt octroya à Monsieur … une seconde autorisation relative à l’aménagement d’un balcon avec balustrade et à l’installation d’une porte-fenêtre.
Par courrier du 20 mai 2009, Monsieur …, propriétaire d’un terrain adjacent au terrain sur lequel se trouvent les immeubles faisant l’objet des autorisations litigieuses, fit part à l’administration communale de Kiischpelt de son mécontentement et de ses réserves face aux autorisations précitées. Le 26 juin 2009, le mandataire de Monsieur … somma l’administration de la commune de Kiischpelt de suspendre l’exécution des travaux sur le chantier litigieux.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 30 septembre 2009, Monsieur … a fait introduire à un recours tendant à l’annulation des autorisations de construire précitées.
En ce qui concerne la compétence du tribunal administratif pour connaître du présent recours, force est de constater qu’aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en matière de permis de construire, de sorte que le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation qui est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
Avant de procéder à l’examen du fond du présent recours, il convient en premier lieu d’examiner le moyen critiquant l’intérêt à agir dans le chef de Monsieur …. A cet égard l’administration communale de Kiischpelt fait plaider que si les voisins proches auraient un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d’urbanisme, cette proximité de situation constituerait certes un indice pour établir l’intérêt à agir, mais ne suffirait pas à elle seule pour le fonder. En effet, il faudrait de surcroît que l’inobservation de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin susceptible de leur causer un préjudice nettement individualisé. En l’espèce la seule violation de la règlementation urbanistique dont se prévaut le demandeur aurait trait à la profondeur de l’immeuble du bénéficiaire de l’autorisation litigieuse par rapport à la voie publique. Or, un tel argument ne serait pas de nature à aggraver la situation de voisin du demandeur et se confondrait avec l’intérêt général. En outre, l’argument implicite attaché à la prétendue création d’une nouvelle surface aménagée à l’habitation s’inscrirait au-delà du cadre juridique et factuel délimité par les décisions attaquées et devrait dès lors être écarté des débats.
Le demandeur entend résister au moyen précité en soulevant, d’un côté, être le voisin direct de l’immeuble litigieux, et, de l’autre côté, que les travaux autorisés entraîneraient une aggravation concrète et importante de sa situation de voisin étant donné que le bourgmestre aurait clairement fait état dans son courrier du 15 juillet 2009 que les espaces restaurés pourraient éventuellement être aménagés ultérieurement comme locaux habitables et que ce dernier lui aurait recommandé de prendre conseil juridique en ce qui concerne le droit de passage pour joindre ses propriétés bâties. Il serait dès lors évident que la création d’une nouvelle unité de logement entraînerait une aggravation concrète de sa situation.
Force est de constater que toute partie demanderesse introduisant un recours contre une décision administrative doit justifier d'un intérêt personnel distinct de l'intérêt général. Si les voisins proches ont un intérêt évident à voir respecter les règles applicables en matière d'urbanisme, cette proximité de situation constitue un indice pour établir l'intérêt à agir, mais ne suffit pas à elle seule pour le fonder. Il faut de surcroît que l'inobservation éventuelle de ces règles soit de nature à entraîner une aggravation concrète de leur situation de voisin.1 Ainsi, l’intérêt à agir s’apprécie non pas de manière abstraite, par rapport à la seule qualité de propriétaire d’un immeuble voisin, mais concrètement au regard de la situation de fait invoquée.2 En l’espèce, il se dégage des pièces versées en cause que le demandeur est propriétaire de la parcelle … de Wilwerwiltz adjacente à la parcelle 309/2373 de Monsieur … sur laquelle porte les autorisations litigieuses, de sorte que la qualité de voisin direct est vérifiée en l’espèce.
Cependant, force est au tribunal de constater que les décisions litigieuses se limitent à autoriser le renouvellement de la charpente, de la couverture et de la ferblanterie du toit d’une bâtisse délabrée, ainsi que l’installation de fenêtres type Velux en ce qui concerne la décision du 21 avril 2009 et le remplacement d’une porte-fenêtre et la construction d’un balcon avec balustrade en ce qui concerne la décision du 14 mai 2009. Il résulte d’autre part des explications des parties que les travaux autorisés n’entraînent aucun changement par rapport aux limites de la parcelle du demandeur et n’affectent pas l’assise de la construction existante ou le gabarit de cette dernière. Il s’ensuit que la situation de voisin du demandeur n’est a priori pas affectée par les travaux en cause étant donné qu’ils ne sont pas de nature à entraîner une aggravation concrète de sa situation de voisin. Il en résulte que le demandeur n’a pas d’intérêt à agir contre les décisions déférées.
Cette conclusion n’est pas énervée par les allégations du demandeur selon lesquelles les travaux litigieux serviraient à la création d’un nouveau logement, ce qui entraînerait une aggravation concrète de sa situation étant donné que ni la création d’un nouveau logement ni un éventuel changement d’affectation des bâtissent existantes ne font l’objet des décisions déférées.
Il se dégage partant de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’en l’état Monsieur … n’a pas d’intérêt à agir contre les décisions déférées, de sorte que son recours doit être déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt à agir.
1 Cf TA 22 janvier 1997, n° 9443 du rôle, Pas. adm. 2009, v° Procédure contentieuse, n° 56.
2 Cf TA 15 décembre 2004, n° 17824, Pas. adm. 2009, v° Procédure contentieuse, n° 55 Monsieur … réclame encore l’allocation d’une indemnité de procédure sur base de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives d’un montant de 2.500.- €. Au vu de l’issue du litige, il n’y a pas lieu de statuer sur la demande d’indemnité de procédure qui n’est qu’un accessoire à la demande principale et qui ne saurait avoir une existence autonome.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours en annulation irrecevable ;
condamne le demandeur aux frais Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 5 juillet 2010 par :
Marc Sünnen, premier juge, Claude Fellens, premier juge, Thessy Kuborn, juge, en présence du greffier Arny Schmit.
s. Schmit s. Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 5.7.2010 Le Greffier du Tribunal administratif 4