Tribunal administratif N° 25854 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 juin 2009 3e chambre Audience publique du 29 juin 2010 Recours formé par Monsieur …, contre une décision du ministre des Transports en matière de permis à points
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 25854 du rôle et déposée le 30 juin 2009 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom Monsieur …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d'une décision du ministre des Transports du 30 mars 2009 suspendant son droit de conduire un véhicule automoteur pour une durée de douze mois ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 septembre 2009 ;
Vu les pièces versées et notamment la décision attaquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Ardavan Fatholahzadeh et Monsieur le délégué du gouvernement Guy Schleder en leurs plaidoiries respectives.
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Par courrier du 26 mars 2009, le ministre des Transports, ci-après « le ministre », constata que le capital de points affecté au permis de conduire de Monsieur … était épuisé.
Par arrêté du 30 mars 2009, le ministre suspendit le droit de Monsieur … de conduire un véhicule automoteur pour une durée de douze mois au vu des articles 2 bis et 13 de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques, désignée ci-après par « la loi du 14 février 1955 », et de l’article 90 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques et au motif de la perte de l’intégralité des points du capital dont était doté le permis de conduire de l’intéressé.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 30 juin 2009 et inscrite sous le numéro 25854 du rôle, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 30 mars 2009.
Ni la loi du 14 février 1955, ni aucune autre disposition légale ne prévoyant un recours au fond en matière de suspension du droit de conduire, seul un recours en annulation a pu être introduit en l’espèce.
Le recours en annulation ayant, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.
L’analyse de la légalité externe d’une décision administrative devant précéder celle du bien-fondé de la décision, le tribunal est de prime abord amené à analyser le moyen du demandeur tiré d’une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, désigné ci-
après par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ». Le demandeur fait valoir qu’il aurait détenu le droit de conduire un véhicule automoteur et que ce droit lui aurait été retiré par le ministre sans lui permettre de fournir ses observations.
Le délégué du gouvernement se réfère à un arrêt de la Cour administrative du 6 mars 2008, inscrit sous le numéro 23073C du rôle, pour conclure qu’il n’y aurait en l’espèce aucune violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979.
Aux termes de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 : « Sauf s’il y a péril en la demeure, l’autorité qui se propose de révoquer ou de modifier d’office pour l’avenir une décision ayant créé ou reconnu des droits à une partie, ou qui se propose de prendre une décision en dehors d’une initiative de la partie concernée, doit informer de son intention la partie concernée en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l’amènent à agir.
Cette communication se fait par lettre recommandée. Un délai d’au moins huit jours doit être accordé à la partie concernée pour présenter ses observations. (…) » L'article 9, comme d'ailleurs l'article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif au droit des tiers intéressés à participer à l'élaboration d'une décision susceptible d'affecter leurs droits et intérêts, remplit une fonction essentielle en ce qu'il tend à garantir aux personnes susceptibles d'être affectées par une décision administrative de faire valoir, au préalable, leur point de vue et leurs moyens qui sont de nature à influer sur cette décision et, le cas échéant, à modifier la décision envisagée initialement.
La participation de l'administré à l'élaboration de la décision administrative ne présente cependant une réelle utilité que pour autant que celui-ci est en mesure, par son intervention, d'apporter des éléments et arguments de nature à influencer la décision à intervenir. Tel est le cas lorsque l'administration dispose, pour prendre sa décision, d'un pouvoir d'appréciation et que la collaboration de l'administré peut amener celle-ci à prendre en compte ces observations et à rendre une décision différente de celle qu'elle aurait pu prendre en dehors de l'intervention de celui-ci.
S'il est vrai que les dispositions afférentes de la réglementation sur la procédure administrative non contentieuse n'opèrent pas une distinction entre les décisions qui appellent l'administration à statuer en pure légalité et celles au sujet desquelles elle dispose d'un pouvoir d'appréciation et que les décisions relevant même de la pure légalité appellent en principe une consultation préalable des personnes concernées, l'omission par l'administration de ce faire entraînant dans son chef un comportement contraire à la lettre des textes en question, la sanction adéquate n'est pas dans ces hypothèses l'annulation de la décision administrative, la teneur de la nouvelle décision à intervenir ne pouvant différer de celle de la première décision, à supposer que celle-ci soit conforme à la loi, puisqu'elle intervient en pure légalité.
En décider autrement reviendrait à assigner à l'annulation d'une décision administrative une fonction purement formelle sans utilité réelle étant donné que la nouvelle décision à prendre est, dans ces conditions, nécessairement la même que la décision annulée. Or, l'annulation d'une décision administrative, acte grave, ne doit intervenir que lorsque le contenu de la nouvelle décision à intervenir à la suite de l'annulation est susceptible de différer de celui de la décision annulée. L'hypothèse ainsi envisagée diffère fondamentalement de celle où la décision administrative prise dans une matière relevant de la pure légalité ne respecte pas cette légalité et où l'administré est en droit d'en solliciter, moyennant un recours contentieux, l'annulation1.
En l'espèce, la décision de suspension du droit de conduire pour une durée de douze mois, qui intervient sur la base de l’article 2 bis, paragraphe 3, de la loi du 14 février 1955, est une conséquence légale du retrait de l’ensemble des points dont le permis de conduire est doté, intervenant de plein droit et liant le ministre, dont l’arrêté afférent ne comporte, d’après l’article 2 bis, paragraphe 3 de la loi du 14 février 1955, que le constat que la personne concernée a perdu l’ensemble des douze points dont son permis était affecté suite aux différentes décisions de retrait de points intervenues préalablement2. Le ministre ne dispose partant d'aucun pouvoir d'appréciation pour prendre la décision nécessaire de suspension du droit de conduire, suite à l’épuisement de l’intégralité des points affectés au permis de conduire de l’intéressé.
Il s'ensuit que le non-respect par le ministre des Transports de la disposition de l'article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, dont la matérialité n’est pas contestée en l’espèce, n'est pas de nature à entraîner l'annulation de la décision déférée, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.
Quant au bien-fondé de la décision déférée, Monsieur … fait d’abord valoir que le ministre aurait motivé la suspension de son droit de conduire par le constat que le capital de points dont est doté son permis de conduire serait épuisé à la suite de six infractions au code de la route. Suivant le demandeur, une infraction parmi lesdites six infractions n’aurait pas dû lui être imputée. Ainsi, deux points auraient été retirés du capital de points de son permis de conduire, pour avoir conduit en date du 19 août 2007 un véhicule automoteur dont les pneumatiques n’auraient pas présenté des rainures principales d’une profondeur d’au moins 1,6 mm. Or, ledit véhicule aurait appartenu à son employeur et ne lui aurait été mis à la disposition que pour l’exercice de ses fonctions, de sorte que son employeur aurait dû veiller à l’entretien du véhicule. Il ajoute qu’il aurait été employé en tant que chauffeur-livreur et que suite à la suspension de son droit de conduire, son employeur l’aurait licencié.
Le délégué du gouvernement explique de prime abord de manière générale que la réduction de points serait une sanction administrative intervenant de plein droit à chaque fois que les conditions d’application sont réunies sans que le ministre dispose d’un pouvoir d’appréciation. Par ailleurs, la réduction à zéro du capital de points dont est doté un permis de conduire entraînerait automatiquement la suspension du droit de conduire pour une durée de douze mois.
Le délégué du gouvernement fait valoir que le demandeur aurait été informé par le ministre des différentes réductions subséquentes de points par courrier recommandé. Le 1 cf. Cour adm. 6 mars 2008, n° 23073C du rôle, Pas. adm. 2009, V Transports, n° 52 et autres références y citées.
2 cf. trib. adm. 29 janvier 2007, n° 21828 du rôle, confirmé par : Cour adm. 3 juillet 2007, n° 22672C du rôle, Pas. adm. 2009, V° Transports, n° 49 et autres références y citées.
demandeur aurait dirigé son recours à l’encontre de la décision du 29 mars 2009, portant suspension de son droit de conduire pour une durée de douze mois. Ladite décision serait basée sur des décisions antérieures de retraits de points, dont le ministre n’aurait tiré que la conséquence légale de la suspension du droit de conduire. Or, le moyen invoqué par le demandeur tendrait principalement à énerver la validité du retrait de deux points intervenu le 19 août 2007 et notifié au demandeur le 17 septembre 2007. Cette décision aurait cependant été préalable et distincte de la décision du 30 mars 2009 et aurait été susceptible de faire l’objet d’un recours. Ladite décision ayant entretemps acquis autorité de chose décidée, le ministre aurait valablement pu la prendre en considération dans la décision déférée du 29 mars 2009 pour constater l’épuisement des points du permis de conduire du demandeur et suspendre son droit de conduire.
Le tribunal est amené à constater à l’instar du délégué du gouvernement qu’une décision prononçant la suspension du droit de conduire est la conséquence légale de la perte de l’intégralité des points du permis de conduire, intervenant de plein droit et liant le ministre conformément à l’article 2 bis, paragraphe 3 de la loi du 14 février 1955. La décision portant suspension du droit de conduire se limite partant à tirer la conséquence légale de décisions antérieures ayant procédé à la réduction de points du capital dont est doté le permis de conduire, tout en constituant une décision indépendante desdites décisions antérieures, qui sont susceptibles de faire l’objet d’un recours autonome.
En l’espèce, le tribunal est saisi d’un recours tendant à l’annulation de la décision du ministre du 30 mars 2009, constatant l’épuisement des points dont est affecté le permis de conduire du demandeur et prononçant en conséquence la suspension de son droit de conduire pour une durée de douze mois. La décision du 17 septembre 2007 ayant informé le demandeur que quatre points ont été retirés du capital dont est doté son permis de conduire du chef de l’infraction d’usage sur un véhicule automoteur autre qu’une machine, ou sur une remorque, de pneumatiques ne présentant pas des rainures principales d’une profondeur d’au moins 1,6 mm, constitue une décision préalable et distincte de la décision déférée du 30 mars 2009, susceptible de faire l’objet d’un recours autonome. Dans la mesure où la notification de la décision du 17 septembre 2007 n’est pas contestée et où le demandeur n’a pas introduit de recours à l’encontre de ladite décision, cette dernière a acquis autorité de chose décidée et ne saurait plus être remise en cause, de sorte que le ministre a valablement pu la prendre en compte pour constater l’épuisement des points du permis de conduire du demandeur et prononcer en conséquence la suspension de son droit de conduire.
Le moyen afférent du demandeur est partant à rejeter pour ne pas être fondé.
En second lieu, le demandeur reproche à la décision déférée de violer l’article 6.1. de la Convention européenne des droits de l’Homme, désignée ci-après par « la CEDH ». Il estime que le retrait de points du capital dont est doté un permis de conduire constituerait une sanction pénale, de sorte que les dispositions de l’article 6.1. de la CEDH trouveraient application en l’espèce et que sa culpabilité aurait donc dû être constatée dans le cadre d’un procès équitable au sens dudit article.
Le demandeur estime encore que si l’administration avait fait une juste application des dispositions de la loi en fonction de l’individualisation de la peine, il détiendrait toujours deux points.
Il fait encore plaider que la sanction de la suspension de son droit de conduire serait disproportionnée par rapport aux infractions qu’il aurait commises, plus particulièrement au regard d’un arrêt de la Cour européenne des doits de l’Homme du 23 septembre 1988 ayant considéré le droit de conduire comme essentiel dans la société actuelle.
Le délégué du gouvernement rétorque que la décision de réduire des points du capital dont est doté un permis de conduire serait une sanction à compétence liée, qui serait la conséquence d’une procédure pénale ayant permis au demandeur de pouvoir prétendre à une procès équitable devant un tribunal indépendant, et non point une sanction judiciaire. Etant donné que le paiement d’un avertissement taxé aurait pour effet de mettre fin à toute poursuite et d’enlever au conducteur toute possibilité de porter l’affaire devant le juge pénal, le demandeur aurait accepté la réalité des faits concernant l’infraction commise en date du 19 août 2007 en payant l’avertissement taxé dressé à son encontre. Dès lors, ni la loi du 14 février 1955, ni la décision déférée ne seraient contraires à l’article 6.1. de la CEDH.
Quant à la disproportion alléguée de la sanction prononcée, le représentant étatique estime que selon le système luxembourgeois du permis à points, chaque infraction prise en compte correspondrait à une diminution du capital de points affecté à un permis de conduire suivant un mécanisme de pondération de points énoncé à l’article 2 bis de la loi du 14 février 1955.
En vertu de l’article 6.1. de la CEDH : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (…) ».
Quant à l’applicabilité de l’article 6.1. de la CEDH en matière de permis à points, force est au tribunal de constater que tant le législateur luxembourgeois, lors de l’élaboration de la loi du 2 août 2002 modifiant la loi du 14 février 1955 et introduisant le permis à points au Luxembourg, que la Cour européenne des droits de l’Homme dans son arrêt précité du 23 septembre 19983, retiennent que la perte de points et l’annulation respectivement la suspension du droit de conduire qui en découle est une sanction administrative qui est toutefois soumise aux règles posées par l’article 6 de la CEDH.
En l’espèce, il ressort des pièces versées au dossier, et notamment de la décision du ministre du 26 mars 2009 constatant que le capital de points affecté au permis de conduire du demandeur est épuisé, que le demandeur s’est vu retirer des points de son permis de conduire suite à des infractions au Code de la route commises les 18 septembre 2003, 2 juillet 2004, 12 mars 2007 et 19 août 2007 et suite au paiement des avertissements taxés y relatifs. Le demandeur s’est encore vu retirer des points de son permis de conduire, suite à un jugement du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, chambre correctionnelle, du 14 janvier 2009, le condamnant du chef de délit de grande vitesse.
En ce qui concerne, tout d’abord, le retrait de points suite à la décision précitée du tribunal correctionnel de Luxembourg, force est de constater que ce retrait est la conséquence d’une procédure pénale ayant permis au demandeur de prétendre à un procès devant un tribunal indépendant, à savoir le tribunal correctionnel de Luxembourg, et ayant abouti à une 3 arrêt CEDH, « Malige c/ France », 23 septembre 1998, req. n°27812/95 condamnation, qui est devenue définitive. Pour le surplus, la décision ministérielle de retrait de points, suite à la condamnation pénale devenue définitive, est encore susceptible de faire l’objet d’un recours devant la juridiction administrative, par l’introduction d’un recours en annulation, afin de vérifier si l’autorité administrative qui procède au retrait de points a agi à l’issue d’une procédure régulière, faculté dont le demandeur n’a, d’après les éléments soumis au tribunal, pas fait usage.
En ce qui concerne, d’autre part, les retraits de points suite aux différents avertissements taxés, il échet de rappeler que la réduction de points est une mesure administrative qui intervient de plein droit, chaque fois que les conditions d’application en sont réunies. Concernant les avertissements taxés, la perte de points intervient au moment du paiement de la taxe, paiement qui implique la reconnaissance implicite par l’auteur de son comportement fautif et l’acceptation tacite du retrait de points.
En effet, le paiement de l’avertissement taxé, effectué dans un délai de 45 jours à compter de la constatation de l’infraction, s’analyse en une transaction, laquelle a pour effet d’arrêter toute poursuite avec, comme corollaire, la conséquence d’enlever au conducteur la possibilité de voir contrôler devant le juge pénal, seul compétent à cet égard, la réalité des faits à l’origine de l’infraction en cas de contestation.
C’est la raison pour laquelle l’information du conducteur relative à la perte de points et au nombre afférent est substantielle afin de garantir ses droits, cette information devant par ailleurs être préalable afin de mettre le conducteur en mesure de payer et de signer l’avertissement taxé en connaissance de cause.
En l’espèce, il ressort de la décision litigieuse du 26 mars 2009 ayant constaté l’épuisement des points affectés au permis de conduire du demandeur, que ce dernier a payé pour les infractions commises les 18 septembre 2003, 2 juillet 2004, 12 mars 2007 et 19 août 2007 les avertissements taxés respectifs en dates des 24 septembre 2003, 13 juillet 2004, 30 mars 2007 et 11 septembre 2007. D’ailleurs, il n’est pas contesté que le demandeur a payé les différents avertissements taxés dressés à son encontre et qu’il n’a pas saisi le tribunal pour contester la réalité des infractions qui lui étaient reprochées devant le juge compétent. En payant les différents avertissements taxés, le demandeur a partant renoncé aux voies de recours qui lui étaient pourtant ouvertes, de sorte qu’à l’heure actuelle il ne peut plus se prévaloir d’une violation de l’article 6.1 de la CEDH.
Il s’ensuit que la décision ministérielle attaquée n’est pas contraire à l’article 6.1. de la CEDH, de sorte que le moyen tiré de la violation de l’article 6.1. de la CEDH est dès lors à rejeter.
Quant au moyen tiré de la disproportionnalité de la sanction, allégué par le demandeur, il échet de rappeler que dans le cadre d’un recours en annulation, le juge administratif a le droit et l’obligation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée et de vérifier si les motifs dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée. S’il est vrai que dans ce cadre, le juge administratif n’est pas autorisé à contrôler des considérations d’opportunité se trouvant à la base de l’acte attaqué, il est néanmoins amené à vérifier si les faits à la base de la décision sont établis à l’exclusion de tout doute. Dans la mesure où en matière de permis à points, la suspension du droit de conduire n’est qu’une conséquence légale de la perte de l’intégralité des points affectés au permis de conduire, conformément à l’article 2 bis, paragraphe 3 de la loi du 14 février 1955, la question de savoir si la mesure prise est proportionnelle par rapport aux faits établis, découle en matière de permis de conduire directement du texte de la loi qui a procédé dans ses dispositions à une évaluation des peines applicables.
Il s’ensuit que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.
Enfin, le demandeur soutient que la décision déférée serait intervenue en violation de l’article 11 (4) de la Constitution, garantissant à chaque individu le droit au travail et l’exercice de ce droit. Il explique que pour exercer son métier de chauffeur-livreur un permis de conduire serait indispensable. Partant, en le privant de son droit de conduire, le ministre le priverait également de son droit au travail.
Le délégué du gouvernement estime que la décision déférée ne méconnaîtrait pas l’article 11 (4) de la Constitution.
Aux termes de l’article 11 (4) de la Constitution « la loi garantit le droit au travail et l’Etat veille à assurer à chaque citoyen l’exercice de ce droit. (…) ». Le tribunal ne saurait suivre le raisonnement du demandeur suivant lequel la suspension du permis de conduire pour une durée de douze mois entraverait son droit au travail, étant donné que la disposition constitutionnelle en question ne garantit pas à tout citoyen le droit au maintien dans un emploi déterminé. Par ailleurs, si la mesure de suspension du droit de conduire du demandeur est susceptible d’avoir une incidence sur les conditions d’exercice par celui-ci de sa profession de chauffeur-livreur, le moyen tiré d’une atteinte au droit au travail ne saurait, s’agissant d’une mesure de police destinée à prévenir la commission d’autres infractions au code de la route, utilement être invoqué.
Le moyen tiré d’une violation de l’article 11 (4) de la Constitution est partant à rejeter pour ne pas être fondé.
Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours est à rejeter pour n’être fondé dans aucun de ses moyens.
Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
déclare le recours en annulation recevable en la forme ;
le déclaré non fondé, partant en déboute ;
condamne Monsieur … aux frais.
Ainsi jugé par :
Martine Gillardin, vice-président, Françoise Eberhard, juge, Annick Braun, juge, et lu à l’audience publique du 29 juin 2010 par le vice-président, en présence du greffier Judith Tagliaferri.
s. Judith Tagliaferri s. Martine Gillardin Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 29.06.2010 Le Greffier du Tribunal administratif 8