Tribunal administratif Numéros 25592 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 avril 2009 1re chambre Audience publique du 15 mars 2010 Recours formé par la société anonyme … S.A., …, contre deux décisions de l’Administration communale de Mondorf-les-Bains, en présence de la société à responsabilité limitée … s.à r.l. …, en matière de marchés publics
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JUGEMENT
Vu la requête déposée le 6 avril 2009 au greffe du tribunal administratif, inscrite sous le numéro 25592 du rôle, par Maître Marc KLEYR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A., établie et ayant son siège social à L- … , inscrite au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 6349, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision de l’Administration communale de Mondorf-les-Bains du 16 mai 2008, portant adjudication d’un marché relatif à la fourniture d’un fourgon d’incendie du type « TLF 3000 STA » pour le Centre Technique situé à Mondorf-les-Bains, à la société à responsabilité limitée … s.à r.l., établie et ayant son siège social à L- … , inscrite au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …, ainsi que contre une décision de l’Administration communale de Mondorf-les-Bains du 23 mars 2009 écartant l’offre de la société anonyme … S.A. ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 7 avril 2009, portant signification de ce recours à l’Administration communale de Mondorf-les-
Bains, ainsi qu’à la société à responsabilité limitée … s.à r.l. ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 22 juin 2009 par Maître Richard STURM, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, constitué pour la société à responsabilité limitée … s.à r.l. ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 7 juillet 2009 par Maître Pierre METZLER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, constitué pour l’Administration communale de Mondorf-les-Bains ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 septembre 2009 par Maître Marc KLEYR, avocat à la Cour, pour compte de la société anonyme … S.A. ;
Vu le mémoire en duplique déposé par Maître Pierre METZLER, avocat à la Cour, au greffe du tribunal administratif en date du 8 octobre 2009 pour le compte de l’administration communale de Mondorf-les-Bains ;
Vu le mémoire en duplique déposé par Maître Richard STURM, avocat à la Cour, au greffe du tribunal administratif en date du 12 octobre 2009 pour compte de la société à responsabilité limitée … s.à r.l. ;
Vu les pièces versées en cause et plus particulièrement les décisions attaquées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Yasmine POOS, en remplacement de Maître Marc KLEYR, Maître Anne-Laure JABIN, en remplacement de Maître Pierre METZLER, et Maître Richard STURM en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 novembre 2009 ;
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Dans le cadre d’une soumission publique lancée par l’administration communale de Mondorf-les-Bains portant sur la fourniture d’un fourgon d’incendie de type « TLF 3000 STA » la société anonyme … S.A. et la société à responsabilité limitée … présentèrent chacune une offre.
Il ressort du procès-verbal d’ouverture de la soumission litigieuse du 16 mai 2008 que la société … a remis une offre pour un prix hors taxes de 336.000.- € et que la société … a remis une offre pour un prix hors taxes de 352.000.- €.
Lors de sa séance du 23 mars 2009, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Mondorf-les-Bains constata que la soumission publique a donné comme résultat une offre de la part de la société … s.à r.l. pour un montant de 386.400.- € et une offre de la part de la société … S.A. pour un montant de 404.800.- € et il décida à l’unanimité d’adjuger la fourniture d’un fourgon d’incendie du type « TLF 3000 STA » pour les besoins du service d’incendie à la société … aux conditions de son offre et des cahiers de charges et au prix de 386.400.- €, toutes taxes comprises, au vu notamment de l’avis de la direction des services de secours du ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire du 5 mars 2009 proposant d’adjuger la fourniture litigieuse à la société … s.à r.l..
Par courrier du 23 mars 2009, le bourgmestre de la commune de Mondorf-les-Bains, dénommé ci-après le « bourgmestre », informa la société … s.à r.l. que le marché litigieux lui avait été adjugé au montant total de 386.400.- €, toutes taxes comprises, au motif qu’elle « a présenté une offre complète et économiquement la plus avantageuse ».
Par courrier du même jour, le bourgmestre informa la société … S.A. que son offre n’avait pas été prise en considération « parce qu’elle n’est pas la plus avantageuse ».
Par courrier du 6 avril 2009, le mandataire de la société … S.A. informa le bourgmestre que sa mandante « conteste formellement [la] décision d’adjudication datée du 23 mars 2009 », en soutenant que l’offre de sa mandante aurait été la « mieux-disante ». Par le même courrier, le bourgmestre fut prié de suspendre avec effet immédiat la soumission litigieuse en s’abstenant de procéder à la signature du contrat d’adjudication.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 6 avril 2009, inscrite sous le numéro 25592 du rôle, la société … S.A. a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision qualifiée de décision « d’adjudication » du 16 mai 2008, ainsi que d’une décision prise par l’administration communale de Mondorf-les-Bains en date du 23 mars 2009 par laquelle elle a été informée que son offre émise dans le cadre de la soumission sous analyse a été écartée.
A l’appui de son recours, la société anonyme … S.A. expose en premier lieu que l’administration communale de Mondorf-les-Bains aurait violé l’article 46 du règlement grand-
ducal du 7 juillet 2003 sur les marchés publics dans la mesure où l’adjudication n’aurait pas eu lieu endéans le délai de deux mois à partir du jour de l’ouverture de la soumission, à savoir le 16 mai 2008. Elle fait soutenir dans ce contexte que ni le délai de droit commun de deux mois, ni le délai qui peut exceptionnellement être prévu par le cahier spécial des charges de quatre mois au maximum n’auraient été respectés en l’espèce, en ajoutant que les dispositions de l’article 47 du même règlement grand-ducal n’auraient pas été respectées, dans la mesure où le pouvoir adjudicateur ne se serait plus adressé aux adjudicataires pour les inviter à se prononcer sur la prolongation du maintien de leurs offres, de sorte qu’il ne pourrait plus être actuellement retenu que l’offre présentée par la société … soit encore la plus avantageuse. Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse souligne encore qu’il s’agirait ici d’un délai de rigueur dont le seul non-respect entraînerait automatiquement l’illégalité de la décision entreprise.
La demanderesse reproche encore au pouvoir adjudicataire d’avoir retenu l’offre de la société …, alors même que celle-ci ne satisferait pas aux conditions posées par le cahier des charges litigieux, notamment en ce que contrairement à l’exigence posée au point c) de la page 9 du cahier spécial des charges, la marque et le type de la pompe du fourgon incendie n’auraient pas été indiqués, ce qui serait contraire à l’article 56 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 et en ce que contrairement à l’article 20 du cahier des charges, la société … n’aurait pas joint « une description technique de la pompe avec rendement de débit ». Ainsi, la société … affirme dans son mémoire en réponse que la force motrice nécessaire et la quantité de débit pour 40 bar n'auraient pas été indiquées.
La demanderesse conclut en outre à une violation des articles 56 et 57 du règlement grand-ducal précité du 7 juillet 2003, dans la mesure où le type de pompe à fournir aurait été effacé au « tipex » sur le diagramme relatif aux performances de la pompe joint par la société … à son offre.
Enfin, la société demanderesse est d’avis que le fournisseur de la société …, à savoir une société dénommée « XXX », ne travaillerait plus avec la société …, de sorte que cette dernière serait actuellement dans l’impossibilité de livrer le fourgon incendie offert.
Au vu de l’ensemble de ces considérations, la demanderesse estime que le pouvoir adjudicateur n’aurait pas dû prendre en considération l’offre soumise par la société …, en application de l’article 59 du règlement grand-ducal précité du 7 juillet 2003. Par ailleurs, la demanderesse souligne que l’administration communale de Mondorf-les-Bains n’aurait pas respecté le principe d’égalité et aurait procuré un avantage à la société … en prenant uniquement en considération le fait que cette dernière aurait remis l’offre la moins-disante et en faisant abstraction du fait qu’elle n’aurait pas respecté le cahier des charges. Dans cet ordre d’idées elle souligne encore qu’en 2003 le législateur aurait opéré un revirement conséquent en excluant comme seul critère d’attribution l’offre la moins-disante et en le remplaçant par celui de l’offre la mieux-disante, offre qu’elle-même aurait soumis.
Finalement, la société demanderesse sollicite une indemnité de procédure à hauteur de 2000,- euros.
L’administration communale de Mondorf-les-Bains soulève en premier lieu l’incompétence du tribunal en ce qui concerne le recours en réformation introduit par la demanderesse, au motif que d’après les dispositions légales en vigueur, seul un recours en annulation serait prévu en la présente matière.
En ce qui concerne le recours en annulation introduit par la société … S.A., l’administration communale de Mondorf-les-Bains conclut également à son irrecevabilité dans la mesure où il est dirigé contre une prétendue décision d’adjudication du 16 mai 2008, alors que cet acte constituerait un simple procès-verbal d’ouverture de la soumission litigieuse et constituerait dès lors un acte préalable non susceptible de porter préjudice, tout en soutenant que la décision d’adjudication aurait été prise en date du 23 mars 2009.
En ce qui concerne l’intérêt à agir de la société … S.A., l’administration communale de Mondorf-les-Bains fait plaider que dans la cas où le tribunal ferait droit à la demande d’annulation de la décision d’adjudication du 23 mars 2009 pour non respect des délais fixés aux articles 46 et 47 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003, un tel intérêt à agir ferait défaut en l’espèce, alors que la société demanderesse n’aurait pas eu la qualité de soumissionnaire au jour du dépôt de son recours.
En fait, l’administration communale de Mondorf-les-Bains précise que son ancien fourgon d’incendie menaçait d’être hors usage, de sorte que conformément à l’article 156 (3) du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003, elle aurait pris la décision, en date du 28 novembre 2006, de le remplacer. Elle souligne par ailleurs que cette décision aurait été avisée par le ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du Territoire en date du 24 janvier 2007. Elle précise en outre qu’elle aurait été obligée de passer par l’ouverture d’une soumission publique et que pour ce faire, elle aurait utilisé le cahier des charges relatif à la fourniture de matériel d’incendie élaboré par la direction des services de secours du ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du Territoire. L’administration communale de Mondorf-les-Bains affirme avoir adressé un avis de publication au journal officiel de l’Union Européenne en date du 7 avril 2008, lequel aurait été publié à partir du 10 avril 2008 et dans lequel aurait été indiqué la description du marché, à savoir un véhicule de lutte contre incendie du type « TLF 3000 STA », ainsi que le délai d’exécution de 360 jours. Le prédit avis aurait en outre précisé qu’il s’agit d’une procédure « ouverte », que le critère d’attribution serait le « prix le plus bas » et que les offres seraient ouvertes le 16 mai 2008 à 11 heures. L’administration communale de Mondorf-les-Bains souligne encore avoir indiqué dans le procès-verbal du 16 mai 2008 deux des cinq offres reçues, à savoir celle de la société …, ainsi que celle de la société ….
Elle précise encore que par courrier du 5 mars 2009, le ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire a écrit au Commissaire de district de Grevenmacher afin de le « prier de bien vouloir inviter le collège échevinal à confier la fourniture du matériel d'incendie, conformément à l'avis de la commission technique du service d'incendie et sur la proposition de M le Président du Conseil Supérieur pour le service d'incendie le lot 1 à la firme … de … véhicule du type TLF 3000 STA) au prix de 386.400 EUR, TVA comprise ».
Après avoir réceptionné ce courrier, le collège des bourgmestre et échevins de Mondorf-les-
Bains a adjugé, lors de sa séance du 23 mars 2009, le marché public à la société … et cette décision d'adjudication a été notifiée par courrier du 24 mars 2009 à la société … .
En droit et en ce qui concerne plus particulièrement le non-respect allégué des délais prévus aux articles 46 et 47 du règlement grand-ducal du 7 juillet 203, la commune fait plaider que la longueur du délai d'adjudication ne serait pas le fait de la commune mais du ministère de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire. Par ailleurs elle affirme que ni l'article 46, ni l'article 47, ni aucun autre article du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 ou encore de la loi du 30 juin 2003 ne sanctionnerait le non respect du dépassement du délai. Elle donne encore à considérer que même si le délai aurait expiré et que les deux concurrents n'auraient pas été d'accord à maintenir leurs offres, cela voudrait simplement dire qu'à l'expiration du délai de deux sinon quatre mois, plus aucun de ces deux concurrents n'aurait été soumissionnaire. Elle en conclut que si la société … sollicite l’annulation de la décision déférée pour non respect de ces délais, cela signifierait d'abord qu'elle ne maintiendrait plus son offre et que partant elle se reconnaîtrait elle-même comme n'étant plus soumissionnaire après l'expiration de ce délai, de sorte qu’elle n’aurait plus disposé d’un intérêt à agir le jour du dépôt du recours contentieux.
Elle souligne que si au contraire la société … continuerait à se prétendre un soumissionnaire évincé, ce qu'elle aurait fait en soutenant avoir un intérêt à agir, cela voudrait dire que son offre aurait été maintenue jusqu'au jour de l'adjudication du marché public.
La commune précise encore que conformément aux articles 151, 153, 154 et 159 du règlement grand-ducal précité, elle aurait dû obtenir la position de la commission spécialisée en matière d'incendie auprès du ministère de l'Intérieur, ainsi que l'avis dudit ministre avant de procéder à l'adjudication du marché public, de sorte que la décision d'adjudication aurait parfaitement respecté la procédure prévue par la législation sur les marchés publics.
En ce qui concerne l’argument selon lequel la société … aurait présenté un dossier incomplet, alors qu’elle n’aurait ni indiqué la marque, ni le type de pompe et n’aurait pas non plus fourni la description technique et le rendement de débit de cette dernière, la commune souligne que la société … aurait fourni l’ensemble des documents exigés tant par le cahier des charges que par les article 51 et 56 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 et précise que la marque et le type de pompe seraient indiqués par la mention « S 2000 /FPN 10-2000 » à la page 9 du cahier spécial des charges. Elle soutient encore que le diagramme dont fait état la partie demanderesse aurait bien été présenté par la société … dans les annexes à son bordereau de soumission.
La commune conteste encore que sur le diagramme relatif aux performances de la pompe, le type de la pompe aurait été effacé au « tipex », alors que la société XXX, fournisseur de la pompe, ne disposerait que d'une variété de pompe et que la page 9 du cahier spécial des charges 5indiquerait bien qu'il s'agit de la pompe S 2000 /FPN 10-2000. Par ailleurs la commune soutient que l’usage du « tipex » concernerait un document dénommé « Kennlinie », document non légalement requis auquel il est fait référence à la page 9 du cahier spécial des charges et qui comporterait effectivement un traitement au « tipex » dans la rubrique où il aurait fallu indiquer le type de pompe », de sorte que cette mention au « tipex » ne serait dès lors pas susceptible à induire en erreur qui que ce soit.
Quant au fait que la société XXX aurait conclut un contrat d’exclusivité avec une autre société que la société …, l’administration communale de Mondorf-les-Bains déclare ignorer ce fait, en soutenant pour le surplus qu’il n’aurait pas été établi par la partie demanderesse.
Face à deux dossiers techniquement au point et répondant aux conditions exigées, la commune explique avoir choisi celui qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse et ceci conformément aux articles 88 et 89 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003.
Finalement, la commune fait plaider qu’elle aurait besoin de remplacer son fourgon incendie le plus rapidement possible et qu’il résulterait d’un document intitulé « concerne le délai de livraison en cas d'une éventuelle commande » daté du 15 mai 2008 et joint à l’offre de la société demanderesse que cette dernière n'aurait pas été en mesure de respecter le délai de livraison prévu dans le cahier des charges. La commune en conclut que la société … aurait présenté l'offre économiquement la plus avantageuse.
Enfin, la commune sollicite la condamnation de la société anonyme … au paiement d’une indemnité de procédure de 3.500,- euros.
La société … de son côté se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité du recours introduit par la société …, tout en précisant qu’aucun recours en réformation ne serait prévu en la présente matière, de sorte que celui-ci devrait être déclaré irrecevable. Par ailleurs, la société … souligne que le recours devrait être déclaré irrecevable en ce qu’il est dirigé contre une décision datée du 16 mai 2008, alors qu’il s’agirait ici d’un simple procès-verbal d’ouverture de soumission.
En outre, la société … fait plaider que la société demanderesse n'aurait pas introduit de recours contentieux contre l'avis d'adjudication relatif à la « fourniture d'un fourgon d'incendie du type TLF 3000 STA », publié par l'administration communale de Mondorf-les-Bains, sur le portail des marchés publics du Grand-Duché de Luxembourg en date du 14 avril 2008 sur base d'une décision prise par le Collège des Bourgmestre et Echevins en date du 7 avril 2008, de sorte qu’elle serait mal venue, à l'heure actuelle, de critiquer les conditions du marché public. La société … en conclut que le recours, tendant à la réformation, sinon à l'annulation de la décision du 23 mars 2009, serait à déclarer irrecevable, sinon mal fondé, en son intégralité, alors que cette décision ne serait que « la suite logique et légale » de l'avis n° 08/11357 et de la décision prise par le Collège dès Bourgmestre et Echevins en date du 7 avril 2008.
En fait, la société … rappelle qu'en date du 14 avril 2008 a été publié l'avis d'adjudication n° 08/11357, relatif à la « fourniture d'un fourgon d'incendie du type TLF 3000 STA » pris par décision du Collège des Bourgmestre et Echevins de l'administration communale de Mondorf-les-Bains du 7 avril 2008, sur le portail des marchés publics du Grand-Duché de Luxembourg. Elle souligne que le bordereau, lequel n’aurait comporté qu'une seule feuille relative à l'inscription d'un prix, de même que l'ensemble du cahier général et spécial des charges auraient été remplis par ses soins et remis au pouvoir adjudicateur, en date 6du 7 mai 2008. Elle rappelle en outre que l'ouverture de la soumission aurait eu lieu en date du 16 mai 2008 dans les locaux de l'administration communale de Mondorf-les-Bains et qu'il résulterait du procès-verbal d'ouverture de ladite soumission que son offre était la plus avantageuse. Elle souligne encore ignorer la raison pour laquelle ce n'était qu'en date du 23 mars 2009 que la commune de Mondorf-les-Bains l'avisa de la passation du marché.
En droit, la société … soutient que le fait que les délais prévus dans les dispositions de l'article 46 du règlement grand-ducal n'aient pas été respectés ne constituerait pas une cause d'annulation de la soumission, alors que les causes d'annulation seraient prévues limitativement au chapitre XX en son article 91 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 précité. Tout comme la commune, elle souligne qu’aucune sanction ne serait prévue en cas de dépassement du délai fixé à l’article 46 dudit règlement grand-ducal et que l'article 47 du même règlement grand-
ducal, prévoirait clairement que le marché peut être conclu, même après que les délais aient expirés, à condition que l'offre soit maintenue, ce qui aurait bien été le cas en l’espèce. La société … en conclut que le marché a valablement pu lui être attribué.
En ce qui concerne le moyen relatif à ce que l'offre remise par la société … n'aurait pas satisfait aux conditions du cahier des charges, ce qui expliquerait la raison pour laquelle son offre aurait été la moins onéreuse, la société … fait plaider qu’elle aurait rempli correctement le bordereau remis et qu’elle aurait joint l'ensemble des pièces demandées.
En ce qui concerne le moyen relatif à la violation des dispositions des articles 56 et 57 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 précité, la société … souligne avoir correctement indiqué la marque et le type du fourgon incendie, ce qui résulterait d’ailleurs des pièces versées en cause.
De même, elle souligne qu’il résulterait des pièces versées en cause qu’elle a joint une description technique de la pompe avec rendement de débit. Finalement, en ce qui concerne les diagrammes relatifs aux performances de la pompe, la société … affirme les avoir joint également.
En ce qui concerne l’affirmation d’après laquelle la société … n'aurait plus comme fournisseur la société XXX, de sorte qu’elle serait dans l'impossibilité de livrer le fourgon offert, la société adjudicataire affirme que ces propos seraient dénués de tout fondement et ne constitueraient que pure polémique et elle demande acte qu'elle reste à même de livrer ledit fourgon. La société … conclut que l’ensemble des conditions légales auraient été respectées en l’espèce, de sorte que le marché lui aurait été valablement attribué par décision souveraine du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Mondorf-les-Bains, en date du 23 mars 2009.
Finalement, la société … sollicite la condamnation de la société anonyme … au paiement d’une indemnité de procédure de 2.000,- euros.
1.
Quant à la recevabilité :
La loi ne conférant pas compétence au tribunal pour statuer en tant que juge de fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande principale tendant à la réformation des deux actes déférés.
Quant au recours subsidiaire en annulation, il échet de constater que ledit recours est dirigé contre deux actes juridiques distincts, à savoir contre un acte qualifié de décision de l’administration communale de Mondorf-les-Bains du 16 mai 2008, portant adjudication du marché à la société à responsabilité limitée …, ainsi que contre une décision de l’administration communale de Mondorf-les-Bains du 23 mars 2009 écartant l’offre de la société demanderesse.
Il résulte cependant des pièces versées en cause que la prétendue décision d’adjudication datée du 16 mai 2008 constitue en réalité le procès-verbal d’ouverture de la soumission, acte prévu à l’article 69 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 portant exécution de la loi du 30 juin 2003 sur les marchés publics. Ledit procès-verbal ne saurait être considéré en lui-même comme pouvant porter préjudice, alors qu’il a comme unique finalité de reprendre les résultats de la soumission, ainsi que les réclamations et objections éventuelles formulées lors de l’ouverture de la soumission.
La partie demanderesse dans son mémoire en réplique, reconnaît d’ailleurs elle-même qu'il s’agit ici d’une simple erreur matérielle. Elle admet qu’aucune décision d'adjudication n'a été prise en date du 16 mai 2008 et que le recours est en réalité dirigé contre la seule décision d'adjudication du 23 mars 2009.
En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que l'acte émanant d'une autorité administrative, pour être sujet à un recours contentieux, doit constituer, dans l'intention de l'autorité qui l'émet, une véritable décision, à qualifier d'acte de nature à faire grief, c'est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle ou patrimoniale de celui qui réclame. Si le caractère décisoire de l'acte attaqué est une condition nécessaire à la recevabilité du recours contentieux, il n'est pas pour autant une condition suffisante. Pour être susceptible de faire l'objet d'un recours la décision critiquée doit encore être de nature à faire grief1.
C’est dès lors à bon droit que les parties défenderesse et tierce-intéressée concluent à l’irrecevabilité du recours en annulation pour autant qu’il est dirigé contre le procès-verbal du 16 mai 2008, alors qu’il s’agit ici d’un acte juridique préalable à une décision d’adjudication dépourvu de tout élément décisionnel.
En ce qui concerne l’intérêt à agir de la société demanderesse, lequel est contesté tant par l’administration communale de Mondorf-les-Bains que par la société …, il y a lieu de rappeler qu’en matière de marchés publics, un recours contentieux est ouvert au demandeur qui a un intérêt quelconque, dès que cet intérêt implique un lien personnel avec l’acte attaqué et une lésion individuelle par le fait de l’acte2. En l’espèce, force est de constater que la société … a bien été soumissionnaire et a partant un lien personnel avec la décision d’adjudication du 23 mars 2009 et en voyant son offre refusée, elle a subi une lésion individuelle, de sorte que l’intérêt à agir est bien donné en l’espèce.
Le recours en annulation en ce qu’il est dirigé contre la décision d’adjudication du 23 mars 2009, est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
1 Trib. Adm. 27 décembre 2007 n°22838 du rôle, Pas. adm. 2009 V° Actes administratifs n°26 2 Trib. Adm. 1er juin 2006 n°20906 du rôle, Pas adm. 2009 V° Marchés publics, n°136 2. Quant au fond :
Dans un premier temps, la société demanderesse conclut à l’illégalité de la décision d’adjudication pour avoir été prise en violation des articles 46 et 47 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003.
L’article 46 du prédit règlement grand-ducal dispose :
« (1) Le terme de l’adjudication ne dépasse normalement pas deux mois à compter du jour de l’ouverture de la soumission.
(2) Pour des mises en adjudication d’envergure, le cahier spécial des charges peut prévoir un délai plus long sans qu’il ne puisse excéder quatre mois. » Force est d’abord au tribunal de constater qu’en l’espèce le terme de l’adjudication a largement dépassé les délais prévus par l’article 46 précité, alors que la décision d’adjudication a été prise plus de dix mois après l’ouverture de la soumission.
Force est encore de constater qu’il résulte des pièces versées en cause que ce n’est qu’en date du 5 mars 2009 que l’administration communale de Mondorf-les-Bains a été invitée par le ministre de l’Intérieur à procéder à l’acquisition du fourgon incendie et d’adjuger le marché à la société …. L’administration communale de Mondorf-les-Bains a dès lors dû faire face à des circonstances imprévues, à savoir une lenteur administrative de la part des services du ministère de l’Intérieur et plus particulièrement de la Direction des Services de Secours, lenteur qui l’a empêché de respecter les délais prévus à l’article 46 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003.
Le pouvoir adjudicataire s’est dès lors retrouvé dans la situation décrite à l’article 47 du règlement grand-ducal précité, lequel dispose :
« Les soumissionnaires sont liés à leur offre jusqu’à l’expiration de ce délai. Si à la suite de circonstances imprévues, l’adjudication ne peut avoir lieu dans ce délai, les concurrents dont les offres ont été reconnues valables et avantageuses sont invités à se prononcer sur la prolongation du maintient de leur offre. » Il en résulte que l’article 47 du même règlement grand-ducal prévoit expressément le cas où ce délai ne peut être respecté en raison de circonstances imprévues, tout en précisant que dans un tel cas de figure les soumissionnaires doivent être appelés à se prononcer sur la prolongation du maintient de leur offre.
Le non-respect du délai prévu par l’article 46 précité pendant lequel le soumissionnaire est engagé par son offre, n’a dès lors pas comme conséquence automatique de mettre fin à la validité de l'offre proprement dite, mais d’après l’article 47 du même règlement grand-ducal a pour conséquence que le soumissionnaire doit se prononcer sur le maintien de son offre, maintien auquel il n’est plus tenu.
Il résulte cependant des pièces versées en cause que l’administration communale de Mondorf-les-Bains, avant de procéder à l’adjudication, a omis de contacter les sociétés dont les offres ont été reconnues valables et avantageuses, à savoir la société … et la société …, à se prononcer sur la prolongation du maintient de leur offre. Ce n’est en effet qu’en date du 13 août 2009, c’est-à-dire plus de cinq mois après l’attribution du marché, que l’administration communale de Mondorf-les-Bains s’est adressée à la seule société … afin que cette dernière se prononce sur le maintien de son offre, de sorte que les dispositions de l’article 47 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 n’ont pas été respectées en l’espèce.
Or, il appartient au tribunal de souligner que les délais prévus à l’article 46, ainsi que la formalité prévue à l’article 47 ne sauraient constituer une fin en soi, mais ont pour but de protéger le pouvoir adjudicateur d’une part, en lui garantissant le maintien des offres pendant un certain délai, et les sociétés soumissionnaires, d’autre part, en leur permettant de se libérer des offres soumises après un délai de 4 mois à partir de l’ouverture de la soumission. Ainsi, force est de retenir que l’expiration du délai pendant lequel le soumissionnaire est engagé par son offre ne met pas fin à la validité de l’offre proprement dite, mais a uniquement pour effet qu’il n’est plus tenu d’accepter l’exécution du marché aux conditions indiquées originairement3. Or, en l’espèce il résulte des pièces versées en cause que la société … était bien disposée à maintenir son offre, le maintien de l’offre ayant été explicitement confirmé en date du 17 septembre 2009. Par ailleurs, pour entraîner l’annulation de la décision d’adjudication pour violation de la loi ou pour violation des formes destinées à protéger les intérêts privés, encore aurait-il fallu que la société soumissionnaire évincée, à savoir la société à responsabilité limitée …, démontre, outre le fait que la société … n’était plus disposée à maintenir son offre – hypothèse d’ores et déjà écartée-
que de ce fait elle aurait elle-même subi une lésion du non respect des prédites dispositions réglementaires, alors que c’est son offre qui aurait du être retenue. Or, en l’espèce, la société … ne démontre en aucune façon en quoi le non respect des délais précités, ou encore le non-respect de la formalité prévue à l’article 47, auraient été susceptibles de lui porter préjudice, étant donné qu’uniquement le contenu de la décision d’adjudication elle-même qui a affecté la société soumissionnaire évincée et non pas les formes et délais dans lesquels la décision a été prise.
Au vu des considérations qui précèdent, le moyen relatif à une violation des articles 46 et 47 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 laisse d’être fondé.
La société demanderesse affirme encore que la décision d’adjudication devrait encourir l’annulation pour avoir été prise en violation de l’article 56 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 dans la mesure où l’obligation figurant à la page 9 du cahier spécial des charges sous le point c) à savoir d’indiquer la marque et le type de la pompe du fourgon incendie n’aurait pas été respectée par la société … s.à r.l., alors que cette dernière aurait laissé cette rubrique en blanc En ce qui concerne la prétendue violation de l’article 56 du règlement grand-ducal précité du 7 juillet 2003 dispose, il y a lieu de rappeler que ledit article dispose :
« Il est interdit de changer ou d’ajouter quoi que ce soit au texte ou aux inscriptions des pièces de soumission. Les ratures ou corrections de tout genre sont inadmissibles. Les erreurs d'inscription sont à corriger sur une feuille séparée qui est à signer par le soumissionnaire et à annexer à l'offre. La feuille séparée contenant des corrections d'erreur d'inscription de la part du soumissionnaire est à marquer « ne varietur » par l'agent présidant la séance d'ouverture et mention des corrections est faite dans le procès-verbal. Le procès-verbal fera également mention des supports informatiques éventuellement remis. ».
L’article 56 vise dès lors exclusivement le cas des ajouts ou des changements apportés au texte ou aux inscriptions des pièces de soumission, mais non le cas dans lequel il a été omis de remplir une rubrique déterminée, de sorte que c’est à tort que la société demanderesse affirme 3 Maurice-André Flamme, Commentaire pratique de la réglementation des Marchés publics, Tome 1A p.
1115, sixième édition que la décision déférée aurait été prise en violation de l’article 56 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 au motif que la société … aurait omis d’indiquer la marque et le type de pompe.
L’article 57 de son côté dispose : « Toutes les positions du bordereau doivent être remplies, elles ne peuvent ni être barrées, ni contenir le terme « néant », ni le chiffre zéro (0,-), à moins que le cahier des charges n’en dispose autrement et sans préjudice des dispositions des articles 25 à 29 concernant les variantes et les solutions techniques alternatives ».
Il résulte cependant des pièces versées en cause, et plus particulièrement du cahier spécial des charges que la société … a, à la page 9 sous le point c) du cahier spécial des charges ayant trait à la marque et du type de la pompe, indiqué l’information suivante : « S. 2000-FPN 10-
2000 ». C’est dès lors à tort que la société demanderesse affirme que cette rubrique aurait été laissée en blanc par la société …, de sorte que le moyen y afférent est à rejeter.
Par ailleurs elle conclut à la violation des articles 56 et 57 alors que le type de pompe à fournir aurait été effacé au « tipex » sur le diagramme relatif aux performances de la pompe joint par la société … à son offre.
Il appartient d’abord au tribunal de souligner qu’ici encore les formalités prévues aux articles 56 et 57 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 ne sauraient constituer une fin en soi, mais ont pour but d’écarter le danger de fraudes et d’éviter que le pouvoir adjudicateur puisse être induit en erreur en ce qui concerne le contenu de l’offre lui soumise. L’administration n’étant en effet pas obligée de rejeter une soumission non conforme, à condition d’user des mêmes critères envers tous les soumissionnaires pour apprécier leurs offres et à condition que les irrégularités ne soient pas substantielles, c’est-à-dire de nature à empêcher une comparaison des offres4, étant donné qu’il n’y a pas lieu de multiplier les causes de nullité absolue pour des non-
conformités de pure forme, mais de laisser une certaine marge d’appréciation à l’administration.5 Dès lors, le non-respect d’une des formalités prévues aux articles 57 et 58 n’est pas expressément assorti de la sanction de la nullité de la procédure d'adjudication et elle ne tient pas à l'existence ou à la substance même de l'acte, lesdites formalités constituant des prescriptions supplémentaires tendant à garantir la régularité de la procédure d'adjudication et le principe de l'égalité des chances entre les soumissionnaires, son inobservation n'affectant par conséquent la légalité de la procédure d'adjudication que s'il ressort en outre des éléments du dossier que le jeu de la concurrence a été faussé, c'est-à-dire que les intérêts du maître de l'ouvrage ou des soumissionnaires ont été lésés6 . Or, en l’espèce il ressort des pièces versées en cause que le jeu de la concurrence n’a en aucune façon été faussé par ladite correction au « tipex », laquelle n’a en outre pas pu induire en erreur le pouvoir adjudicataire.
En effet, s’il est vrai qu’en l’espèce, sur un document annexe qualifié par la société … par le nom de « Kennlinie », le type de la pompe a effectivement été biffé au « tipex », il y a cependant lieu de souligner que cette correction au « tipex » se trouve cependant dans un 4 Voir en ce sens C.E. belge 22 mars 1957 arrêt Sogiaf, R.J.D.A. 1956 p. 291 5 Maurice-André Flamme, Commentaire pratique de la réglementation des Marchés publics, Tome 1A p.878, sixième édition 6 Voir par analogie Cour adm. 16 janvier 2003 n°15173C du rôle, Pas. adm. 2009 V° Marchés publics, n° 109 document annexé au bordereau de soumission et non requis légalement. En outre, il y a lieu de souligner que ledit document indique bien la marque de la pompe, à savoir « XXX », et la référence S-2000. Il y a par ailleurs lieu de rappeler qu’il résulte des pièces versées en cause que tant la marque que le type de pompe ont été indiqués dans le cahier spécial des charges et plus particulièrement à la page 9 sous le point c) du cahier spécial des charges à savoir « S.
2000-FPN 10-2000 ». Or, il ressort des développements non utilement contestés de la société … que son fournisseur, la société XXX ne fabrique qu’un seul type de pompe de sorte que la marque et le type de pompe était renseignés à suffisance. C’est partant à tort que la société demanderesse conclut à l’illégalité de la décision d’adjudication au motif que la marque et le type de pompe auraient été enlevées au « tipex » dans le document en question, de sorte que ledit moyen est à rejeter.
En ce qui concerne l’affirmation selon laquelle la force motrice nécessaire et la quantité de débit pour 40 bar n'auraient pas été indiquées par la société …, cette dernière explique que ce point n’aurait pas été laissé en blanc étant donné que le cahier spécial des charges (page 9) indiquerait « siehe Kennlinie ». Elle souligne que l'espace nécessaire pour indiquer ces caractéristiques se serait avéré insuffisant, de sorte qu’elle aurait dû faire un renvoi à un document à part décrivant toutes les caractéristiques de la pompe.
Il résulte effectivement des pièces versées en cause et plus particulièrement de l’original de l’offre présentée par la société …, que la force motrice nécessaire et la quantité de débit pour 40 bar ont été indiquées dans les pièces jointes au bordereau de soumission et notamment dans un document indiqué « Pumpen-Kennlinien für die Prüfung des Wirkungsgrades » et dans un document intitulé « Prüfung des Wirkungsgrades », de sorte que c’est à tort que la société … affirme que la description technique de la pompe avec rendement et débit, telle qu’exigée par l’article 20 du cahier des charges ferait défaut en l’espèce. Ici encore aucune violation des articles 56 et 57 ne peut être retenue, de sorte que le moyen afférent est dès lors également à rejeter.
Dans son mémoire en réplique, la société demanderesse affirme encore que le type de pompe indiqué par la société … ne correspondrait pas aux exigences du cahier des charges et plus précisément à ce que la pompe soit une pompe à haute pression étant donné que la lettre « H » correspondant au « Hochdruckpumpe » n’aurait pas été indiquée. Cependant c’est à juste titre que l’administration communale de Mondorf-les-Bains rétorque que les fabricants de pompe choisissent librement l'appellation qu'ils désirent utiliser pour identifier leurs pompes et que ce n’est pas parce que une lettre « H » pour « Hochdruckpumpe » ferait défaut dans une appellation, que cela signifie ipso facto qu'il ne s'agit pas d'une pompe à haute pression, de sorte que ce moyen est à rejeter pour ne pas être fondé.
Dans son mémoire en réplique, la société … fait encore plaider qu’il y aurait eu violation de l’article 58 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 dans la mesure où le document intitulé « Pumpen-Kennlinie für die Prüfung des Wirkungsgrades » aurait été corrigé au « tipex ».
Il y a d’abord lieu de rappeler que l’article 58 précité dispose :
« Toute note explicative doit être présentée sur feuille séparée. Elle ne peut déroger aux conditions contraignantes du dossier de soumission ».
Abstraction faite de la question de la recevabilité de ce moyen, il convient de retenir que le moyen est en tout état de cause non fondé alors que tout comme les articles 56 et 57, l’article 1258 du règlement grand-ducal a pour but de protéger le pouvoir adjudicateur d’être induit en erreur par les soumissionnaires et ne constitue dès lors pas une fin en soi. A ce sujet il y a lieu de rappeler que de telles formalités constituent des prescriptions supplémentaires tendant à garantir la régularité de la procédure d'adjudication et le principe de l'égalité des chances entre les soumissionnaires et son inobservation n'affecte la légalité de la procédure d'adjudication que s'il ressort en outre des éléments du dossier que le jeu de la concurrence a été faussé, c'est-à-dire que les intérêts du maître de l'ouvrage ou des soumissionnaires ont été lésés7. Or, comme il a d’ores et déjà été développé ci-avant, tant le type de la pompe que la marque de la pompe sont identifiables dans le document intitulé « Pumpen-Kennlinie für die Prüfung des Wirkungsgrades » et dans le cahier spécial des charges, de sorte que ni l’administration communale de Mondorf-les-Bains, ni les sociétés soumissionnaires n’ont pu être induites en erreur. Au vu des considérations qui précèdent il y a lieu de rejeter également le moyen relatif à une prétendue violation de l’article 58 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003 précité.
La société demanderesse affirme encore que l’article 20 du cahier des charges n’aurait pas été respecté par la société …, étant donné que celle-ci aurait joint des plans d’aménagement qui ne seraient pas à l’échelle 1/10. Or il résulte des pièces versées en cause que la société … a bien produit un plan d'aménagement à l'échelle 1/10 tel qu’exigé par l’article 20 du cahier des charges. En ce qui concerne les autres plans joints à l’offre, il s’agit de plans supplémentaires non exigés par ledit cahier des charges. Comme ces plans n’étaient pas légalement requis, l’échelle à laquelle ils ont été dressés importe peu, de sorte que le moyen afférent est à rejeter.
Enfin, la partie demanderesse estime que la société … ne serait plus en mesure de livrer le matériel offert, dans la mesure où le fournisseur dudit matériel, à savoir la société XXX ne travaillerait plus avec elle, de sorte que l’offre de la société … n’aurait pas dû être prise en considération et ceci conformément à l’article 59 du règlement grand-ducal du 7 juillet 2003.
Or, abstraction faite de ce que l’affirmation relative au fait que la société XXX ne travaillerait plus avec la société … est contestée par cette dernière et qu’il s’agirait en tout état de cause le cas échéant d’un problème d’exécution, et plus particulièrement d’une question d’inexécution contractuelle, la partie demanderesse n’apporte aucune pièce et aucun élément de nature à établir cette affirmation qui reste dès lors à l’état de pure allégation, de sorte que ledit moyen est à rejeter comme non fondé.
Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de déclarer le recours en annulation tel qu’introduit par la société … non fondé.
Compte tenu de l’issu du litige la demande en indemnité de procédure formulée par la société anonyme … est à déclarer non fondée.
En ce qui concerne les indemnités de procédures sollicitées par l’administration communale de Mondorf-les-Bains et … dans leurs mémoires en réponse, s’élevant à 3.500,-
respectivement 2.000,- euros, force est de retenir que compte tenu de l’issue du litige et du fait que ces deux parties ont dû faire appel à l’office d’un avocat, il parait inéquitable de laisser à leur charge les frais non compris dans les frais de justice, de sorte qu’il y a lieu d’accorder tant à la partie défenderesse, qu’à la partie tierce intéressée une indemnité de procédure évaluée ex aequo et bono à 1.500,- euros.
7 Cour adm. 16 janvier 2003 n°15173C du rôle, Pas. adm. 2009, V° Marchés publics, n° 109.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours principal en réformation irrecevable;
déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable en ce qu’il est dirigé contre le procès-verbal d’ouverture de la soumission daté du 16 mars 2008 ;
reçoit le recours subsidiaire en annulation en ce qu’il est dirigé contre la décision d’adjudication du 23 mars 2009 en la forme ;
au fond le déclare non fondé et en déboute ;
rejette la demande en indemnité de procédure formulée par la société anonyme … ;
condamne la société anonyme … à payer à l’administration communale de Mondorf-les-
Bains une indemnité de procédure d’un montant de 1.500.- euros ;
condamne la société anonyme … à payer à la société à responsabilité limitée … s.à r.l. une indemnité de procédure d’un montant de 1.500.- euros ;
condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 15 mars 2010 par :
Marc Sünnen, premier juge, Claude Fellens, juge, Thessy Kuborn, juge, en présence du greffier Arny Schmit.
s. Arny Schmit s. Marc Sünnen 14