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26/02/2010 | LUXEMBOURG | N°26598

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 février 2010, 26598


Tribunal administratif Numéro 26598 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 février 2010 3e chambre Audience publique extraordinaire du 26 février 2010 Recours formé par Monsieur …, contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 26598 du rôle et déposée le 16 février 2010 au greffe du tribunal administratif par Maître A

rnaud Ranzenberger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembou...

Tribunal administratif Numéro 26598 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 février 2010 3e chambre Audience publique extraordinaire du 26 février 2010 Recours formé par Monsieur …, contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration en matière de rétention administrative (art. 120, L. 29.08.2008)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 26598 du rôle et déposée le 16 février 2010 au greffe du tribunal administratif par Maître Arnaud Ranzenberger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, prétendant être né le … à … (Algérie) et être de nationalité algérienne, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à la réformation d'une décision du 3 février 2010 du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration, ordonnant la prolongation de son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une nouvelle durée d’un mois à partir de la notification de la décision en question ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 18 février 2010 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, Maître Frédéric Delsol en remplacement de Maître Arnaud Ranzenberger et Madame le délégué du gouvernement Claudine Konsbrück en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 février 2010.

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Le 4 janvier 2010, Monsieur … fut appréhendé par la Police grand-ducale en défaut de pièces d’identité.

Le même jour le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration, ci-après « le ministre » prit une décision de refus de séjour à son encontre.

Par décision du même jour, le ministre ordonna le placement du demandeur en rétention administrative au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification de la décision en question intervenue le 4 janvier 2010. Ladite décision fut fondée sur les articles 120 à 123 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et de l’immigration, ci-après « la loi du 29 août 2008 ».

Par décision du 3 février 2010, le ministre ordonna la prorogation du placement du demandeur au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig pour une nouvelle durée maximale d’un mois à partir de la notification de la décision en question.

Ladite décision, notifiée le 4 février 2010 à l’intéressé, est fondée sur les motifs suivants :

« Vu les articles 120 à 123 de la loi du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu mon arrêté pris en date du 4 janvier 2010 décidant du placement temporaire de l’intéressé ;

Considérant que l’intéressé et démuni de tout document d’identité et de voyage valable ;

Considérant qu’une demande d’identification a été adressée aux autorités algériennes en date du 14 janvier 2010 ;

- qu’en attendant le résultat des recherches quant à son identité, l’éloignement immédiat de l’intéressé est impossible en raison de circonstances de fait ;

Considérant qu’il y a nécessité de reconduire la décision de placement ».

Par requête déposée le 16 février 2010 au greffe du tribunal administratif, le demandeur a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision ministérielle portant prorogation de son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière du 3 février 2010.

Etant donné que l'article 123, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement en rétention, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal.

Le recours en réformation est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que le ministre resterait en défaut de faire état des démarches entreprises pour organiser son rapatriement dans son pays d’origine. Il s’interroge encore sur l’utilité d’une telle demande d’identification adressée aux autorités compétentes au motif qu’il n’aurait jamais dissimulé ni son identité, ni sa nationalité. Il conclut que la nécessité requise à la base d’une décision de reconduction ferait défaut en l’espèce.

Le délégué du gouvernement fait valoir que le moyen soulevé ne serait pas fondé.

L’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008, permet au ministre, dans l’hypothèse où l’exécution d’une mesure d’éloignement est impossible en raison de circonstances de fait, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, étant entendu que le paragraphe (3) du même article permet au ministre de reconduire, en cas de nécessité, la décision de placement à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois.

Une impossibilité de procéder à l’éloignement immédiat d’un étranger en raison de circonstances de fait est vérifiée notamment lorsque ce dernier ne dispose pas des documents d’identité et de voyage requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères en vue de l’obtention d’un accord de reprise de l’intéressé. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour la durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée à trois reprises en cas de nécessité.

Cependant en présence d’une personne démunie de documents de voyage et même de documents d’identité, tel que cela est le cas en l’espèce, le ministre doit d’abord procéder à une vérification de l’identité et de l’origine de la personne concernée et ensuite s’adresser aux autorités du pays d’origine afin d’établir l’identité de la personne concernée et de se faire délivrer des documents de voyage, de sorte que le moyen mettant en cause l’utilité de la demande d’identification adressées aux autorités étrangères compétentes laisse d’être fondé.

En ce qui concerne l’absence de démarches suffisantes entreprises, et par conséquent l’absence de « nécessité » en résultant, pourtant requise pour la prorogation de la décision de placement, il appartient au tribunal d’analyser si le ministre a pu se baser sur des circonstances permettant de justifier que la prorogation de la décision de placement a été nécessaire. Il convient d’ajouter qu’une mesure de rétention s’analyse en une mesure administrative privative de la liberté de mouvement de la personne concernée et qu’elle doit être limitée à la durée strictement nécessaire afin de permettre l’exécution d’une mesure d’éloignement. A cette fin, le ministre est dans l’obligation de faire entreprendre avec la diligence requise toutes les démarches nécessaires afin d’organiser cette mesure d’éloignement.

Quant aux démarches concrètes entreprises par le ministre, il ressort des pièces déposées que le ministre a chargé, le 5 janvier 2010, c’est-à-dire dès le lendemain de la prise de la première mesure de rétention, le service de Police judicaire afin d’enquêter sur l’identité du demandeur et de lui faire parvenir les « résultats de vos recherches Eurodac et CCPD en relation avec l’intéressé ». Le 7 janvier 2010, le service de Police judicaire est encore une fois contacté afin de faire parvenir au service compétent les empreintes digitales et des photos du demandeur. Les recherches effectuées le 13 janvier 2010 dans le fichier Eurodac se sont révélées négatives. Le 14 janvier 2010, les autorités luxembourgeoises se sont adressées au Consulat de la République algérienne à Bruxelles afin de faire identifier le demandeur tout en insistant sur le caractère urgent de la demande. Il ressort encore d’un rapport de la Police du 18 janvier 2010 que le demandeur est prêt de parler avec le Consulat algérien et de rentrer ensuite en Algérie. Le 4 février 2010, les autorités luxembourgeoises ont recontacté le consulat et ils ont été informés que la demande est en cours d’instruction. Le 19 février 2010, un itératif contact téléphonique avec le Vice-consul fait état de ce que le consulat n’a pas encore obtenu une réponse de la part des autorités à Alger et que la demande est toujours en cours d’instruction.

Au vu des diligences ainsi déployées, le tribunal est amené à constater qu’au moment où il statue, des démarches suffisantes ont été entreprises, de sorte que le moyen fondé sur une absence de diligences suffisantes, voire de l’inertie des autorités laisse d’être fondé, étant encore à souligner que les autorités ministérielles sont tenues d’attendre le résultat des recherches engagées avant de pouvoir procéder au rapatriement du demandeur.

Aucun autre moyen n’ayant été soulevé, le recours sous analyse est dès lors à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Catherine Thomé, premier juge, Claude Fellens, juge, Françoise Eberhard, juge, et lu à l’audience publique extraordinaire du 26 février 2010 par le premier juge, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Catherine Thomé Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 26.02.2010 Le Greffier du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 26598
Date de la décision : 26/02/2010

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2010-02-26;26598 ?

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