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04/02/2010 | LUXEMBOURG | N°24502

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 février 2010, 24502


Tribunal administratif Numéro 24502 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 juin 2008 2e chambre Audience publique du 4 février 2010 Recours formé par la société à responsabilité limitée … Sàrl, contre des décisions prises par la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg en matière d’affiliation et de cotisations professionnelles

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24502 du rôle et déposée le 13 juin 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Pierre Elvinger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avoca

ts à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … Sàrl, établie et ayan...

Tribunal administratif Numéro 24502 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 juin 2008 2e chambre Audience publique du 4 février 2010 Recours formé par la société à responsabilité limitée … Sàrl, contre des décisions prises par la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg en matière d’affiliation et de cotisations professionnelles

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24502 du rôle et déposée le 13 juin 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Pierre Elvinger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … Sàrl, établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, tendant principalement à l’annulation d’une décision prise par la Chambre de Commerce de procéder à son affiliation et de réclamer de sa part le paiement d’un montant de … € au titre de l’année 2007, telle que cette décision ressort d’un bulletin de cotisation portant rappel des cotisations antérieures relatives de l’année 2007 émis le 13 mars 2008, subsidiairement à la réformation du bulletin de cotisation émis par la Chambre de Commerce pour l’année 2007, tel qu’émis en date du 5 juillet 2007 et rappelé par le bulletin précité du 13 mars 2008, et encore plus subsidiairement à l’annulation des bulletins de cotisation des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008 reprenant chaque fois un montant de … € à payer au titre de la cotisation pour l’année 2007 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Claude Steffen, demeurant à Esch-sur-

Alzette, du 20 juin 2008, portant signification de ce recours à la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, établie à L-1615 Luxembourg, 7, rue Alcide de Gasperi ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 novembre 2008 par Maître Patrick Kinsch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, ledit mémoire ayant été notifié le même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la partie demanderesse ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 décembre 2008 par Maître Pierre Elvinger pour compte de la société à responsabilité limitée … Sàrl, ledit mémoire en réplique ayant été signifié à la Chambre de Commerce par un exploit de l’huissier de justice suppléant Josiane Gloden, agissant en remplacement de l’huissier de justice Jean-Claude Steffen, demeurant tous les deux à Esch-sur-Alzette, du 19 décembre 2008 et notifié le même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la Chambre de Commerce ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 19 janvier 2009 par Maître Patrick Kinsch, pour compte de la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, ledit mémoire en duplique ayant été notifié le même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la partie demanderesse ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport et Maître Pierre Elvinger, ainsi que Maître Patrick Kinsch en leurs plaidoiries respectives.

En date du 5 juillet 2007, la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, ci-après dénommée la « Chambre de Commerce », émit à l’égard de la société à responsabilité limitée … Sàrl, ci-après dénommée la « société … », un bulletin de cotisation portant sur l’année 2007 d’un montant de … €.

Par un bulletin émis en date du 13 mars 2008, la Chambre de Commerce rappela le paiement des cotisations pour l’année 2007 d’un montant de … €.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 13 juin 2008, la société … a fait introduire principalement un recours en annulation contre une décision de la Chambre de Commerce portant sur son affiliation à ladite chambre professionnelle et sur le paiement de sa cotisation d’un montant de … € pour l’année 2007, tel que ces décisions ressortiraient du bulletin de cotisation précité du 13 mars 2008 et, subsidiairement, un recours tendant à la réformation des bulletins de cotisation précités des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008 et, à titre encore plus subsidiaire, un recours tendant à l’annulation de ces mêmes bulletins.

1. Quant au recours en annulation introduit contre la décision de la Chambre de Commerce portant affiliation de la société … Il y a lieu de relever qu’à défaut de l’existence d’un recours au fond en matière de décisions prises par une chambre professionnelle et portant sur l’affiliation à ladite chambre, seul un recours en annulation a pu être dirigé contre une prétendue décision prise par la Chambre de Commerce en matière d’affiliation.

C’est à tort que la Chambre de Commerce conclut tout d’abord à l’irrecevabilité du recours dans la mesure où celui-ci tend à l’annulation d’une décision qui aurait été prise par la Chambre de Commerce concernant l’affiliation de la société demanderesse à ladite chambre professionnelle, au motif qu’une telle décision séparée et indépendante du bulletin de cotisation annuelle n’aurait pas été prise par elle, étant donné que s’il est vrai qu’il ne ressort d’aucun élément du dossier administratif soumis au tribunal qu’une décision expresse a été prise par la Chambre de Commerce par laquelle il a été décidé de reconnaître la société … comme ayant la qualité de ressortissante de la Chambre de Commerce, il n’en demeure pas moins que par le fait d’émettre un bulletin de cotisation à l’encontre de la société …, la Chambre de Commerce a non seulement fixé le montant des cotisations réclamées à la société …, mais elle a également retenu d’une manière unilatérale l’obligation de principe de l’assujettissement au paiement de la cotisation dans le chef de la société …, en lui reconnaissant ainsi la qualité de ressortissante de la Chambre de Commerce, une telle décision étant nécessairement sous-jacente, en l’absence d’une quelconque autre décision expresse prise par la Chambre de Commerce, à la décision portant fixation des cotisations annuelles. Il s’ensuit que dans le cadre d’un recours dirigé contre un bulletin de cotisation, le destinataire dudit bulletin peut également introduire une contestation portant sur sa qualité de ressortissant de la Chambre de Commerce. Il s’ensuit que le moyen d’irrecevabilité afférent doit être écarté pour ne pas être fondé.

Il échet encore de constater dans ce contexte que le recours est dirigé quant à ce volet contre le bulletin de rappel de la cotisation due pour l’année 2007 du 13 mars 2008.

Dans la mesure où la Chambre de Commerce n’a pris aucune décision séparée retenant la qualité de ressortissant dans le chef de la partie demanderesse, il y a lieu de considérer que la décision afférente, concernant plus particulièrement la société …, est nécessairement sous-

jacente à la décision précitée du 13 mars 2008. Il s’ensuit que la partie demanderesse a valablement pu introduire un recours en annulation contre la décision précitée de la Chambre de Commerce du 13 mars 2008, dans la mesure où celle-ci contient implicitement mais nécessairement la décision quant à la reconnaissance de la qualité de ressortissante dans le chef de la société ….

Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été invoqué à l’encontre de la décision précitée du 13 mars 2008 dans la mesure où celle-ci contient l’élément décisionnel suivant lequel la demanderesse a été reconnue en tant que ressortissante de la Chambre de Commerce, il échet de déclarer le recours en annulation recevable dans cette mesure pour avoir été introduit par ailleurs dans les formes et délai prévus par la loi.

Quant au fond concernant ce volet du recours, la partie demanderesse soutient que ce serait à tort que la Chambre de Commerce aurait pris la décision de la qualifier de ressortissante de ladite chambre professionnelle, alors qu’elle n’exploiterait aucune industrie et aucun établissement commercial, que ce soit au Luxembourg ou à l’étranger, de sorte qu’elle ne saurait être qualifiée de ressortissante de la Chambre de Commerce. Elle fait soutenir dans ce contexte qu’elle constituerait une société de participations financières dont l’activité se limiterait à la prise et à la détention de participations.

Il échet de relever que la loi modifiée du 4 avril 1924 portant création de chambres professionnelles à base élective, ci-après dénommée la « loi du 4 avril 1924 », contient des critères et définitions suffisants pour déterminer la qualité de ressortissant de cette chambre professionnelle.

En effet, concernant la question de la détermination de la qualité de ressortissant de la Chambre de Commerce, il échet de relever que l’article 3, alinéa 1er de la loi du 4 avril 1924 dispose que pour faire face à leurs dépenses, les chambres professionnelles sont autorisées à percevoir de leurs ressortissants une cotisation dont la base de perception est établie par chaque chambre.

S’il est vrai qu’avant une réforme législative intervenue le 3 juin 1926, la loi du 4 avril 1924 considérait comme assujettis les électeurs de la chambre, depuis une loi du 3 juin 1926 modifiant l’article 3, alinéa 1er de la loi du 4 avril 1924, le terme « électeur » a été remplacé par celui de « ressortissant » pour tenir compte de ce que certaines personnes qui bénéficient de l’activité de la chambre professionnelle ne se font pas inscrire sur les listes électorales.

Ceux qui sont en droit d’être électeurs sont partant à considérer comme ressortissants, l’inverse n’étant par ailleurs pas forcément vrai.

En vertu de l’article 37, alinéa 1er de la loi du 4 avril 1924, sont qualifiées pour participer à l’élection des délégués composant la Chambre de Commerce, les personnes qui exploitent une industrie ou un établissement financier ou commercial ne ressortissant pas de la Chambre des Artisans et figurant sur le registre aux firmes prescrit par la loi et l’arrêté du 23 décembre 1909 relatifs au registre de commerce et des sociétés, tels qu’en vigueur à la date du 4 avril 1924.

La disposition en question suffit à déterminer les personnes qui sont qualifiées pour être électeurs aux élections professionnelles et partant ressortissants de la Chambre de Commerce.

Au vu de cette conclusion d’ordre général, il échet ensuite de déterminer si la société demanderesse remplit les conditions posées par l’article 37, alinéa 1er de la loi du 4 avril 1924.

En effet, une réponse affirmative à cette question caractériserait dans son chef l’obligation de principe de payer les cotisations annuelles à percevoir par la Chambre de Commerce.

Comme il a été relevé ci-avant, l’article 37, alinéa 1er de la loi du 4 avril 1924 dispose que sont qualifiées pour participer à l’élection des délégués composant la Chambre de Commerce – et constituent dès lors des ressortissants de celle-ci, ainsi que cela résulte des développements qui précèdent – les personnes qui exploitent une industrie ou un établissement financier ou commercial ne ressortissant pas de la Chambre des Artisans et figurant sur le registre aux firmes prescrit par la loi et l’arrêté du 23 décembre 1909, précités.

Selon les indications contenues dans sa requête, la société … est inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro ….

Par ailleurs, indépendamment de la question de savoir si elle exerce une activité commerciale, elle exploite un établissement qui est à considérer comme commercial en ce qu’il a la forme commerciale. De plus, son objet social lui permet d’effectuer des opérations commerciales, ce qui lui confère encore un caractère commercial, indépendamment de la question de savoir si, concrètement, elle se livre pendant l’un ou l’autre exercice à de telles opérations.

Il s’ensuit que la société … est à considérer comme ressortissante de la Chambre de Commerce et en tant que telle soumise à l’obligation de payer les cotisations légalement dues1.

Il suit des développements qui précèdent que le moyen tiré de ce que la société … ne serait pas à considérer comme constituant une ressortissante de la Chambre de Commerce est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Aucun autre moyen n’ayant été invoqué par la société demanderesse à l’encontre du bulletin litigieux du 13 mars 2008, dans la mesure où celui-ci retient implicitement, mais nécessairement la qualité de ressortissante dans le chef de la société …, il échet de rejeter le recours dans cette mesure comme n’étant pas fondé.

2. Quant au recours en réformation introduit contre les bulletins des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008 1 cf. Cour adm. 8 juillet 2008, n°s 24036C et 24037C du rôle A défaut de l’existence d’un recours au fond en matière de décisions prises par une chambre professionnelle et portant sur les cotisations qui lui sont dues de la part de ses membres, le tribunal administratif doit se déclarer incompétent pour connaître du recours en réformation introduit contre les bulletins de cotisation litigieux des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008.

Il échet dans ce contexte de relever que c’est à bon droit que la partie défenderesse soutient que les cotisations perçues par elle ne constituent pas des impôts, étant donné qu’alors même que lesdites cotisations constituent des prélèvements obligatoires, elles ne sont collectées ni par l’Etat, ni par les communes afin de financer les dépenses de ceux-ci. Ceci est d’autant plus vrai que lesdites cotisations ne sont pas prélevées afin de financer les charges publiques, et ne servent ainsi pas à financer les dépenses des pouvoirs publics2. En effet, les cotisations à verser à une chambre professionnelle, dont la Chambre de Commerce, sont à considérer comme constituant des taxes parafiscales dans la mesure où elles constituent des prélèvements obligatoires effectués dans un intérêt économique ou social déterminé au profit d’une personne morale autre que l’Etat et les communes3. Au vu de ces considérations, il n’y a partant pas lieu de faire droit aux développements de la partie demanderesse quant à la qualification desdites cotisations d’impôts, qualification qui, d’après elle, devrait lui ouvrir un recours en réformation contre les bulletins de cotisation litigieux du 5 juillet 2007 et 13 mars 2008.

3. Quant au recours en annulation introduit contre les bulletins de cotisation litigieux des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008 En l’absence de l’existence d’un recours en réformation en matière de décisions prises par une chambre professionnelle et portant sur les cotisations qui lui sont dues de la part de ses membres, seul un recours en annulation a pu être dirigé contre les décisions rendues par la Chambre de Commerce en matière de prélèvements de cotisations de la part de ses membres.

C’est à tort que la partie défenderesse conclut à l’irrecevabilité du recours dans la mesure où il est dirigé contre le bulletin précité du 5 juillet 2007, au motif qu’il aurait été introduit au-delà du délai légalement prévu, étant donné qu’à défaut de preuve quant à la date de la notification du bulletin de cotisation litigieux du 5 juillet 2007, aucun délai de recours n’a commencé à courir, de sorte que le recours en annulation a été introduit contre ledit bulletin dans le délai légal. Il échet encore de constater que le recours en annulation introduit contre le deuxième bulletin de cotisation, portant rappel des cotisations pour l’année 2007, datant du 13 mars 2008, a été introduit auprès du tribunal administratif en date du 13 juin 2008, de sorte qu’il a également été introduit dans le délai légal.

Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été invoqué par la partie défenderesse à l’encontre de ce volet du recours, celui-ci est à déclarer recevable pour avoir été introduit par ailleurs dans les formes légales.

Dans le cadre de ce volet du recours, la partie demanderesse conclut tout d’abord à l’annulation des bulletins de cotisation litigieux des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008, au motif qu’ils auraient été pris sur base d’une délégation accordée à la Chambre de Commerce par l’article 37bis de la loi du 4 avril 1924, délégation qui, dans la mesure où ladite cotisation 2 cf A.Steichen, Manuel de droit fiscal, 4e éd. 2006, t. 1 n°24 3 cf A.Steichen, ibidem n°41 serait à considérer comme constituant un impôt, violerait l’article 99 de la Constitution. Dans ce contexte, la partie demanderesse soutient encore que ledit article 37bis violerait l’article 36 de la Constitution, étant donné que la fiscalité constituerait un domaine réservé à la loi et que seule la fixation du taux d’imposition pourrait être déléguée au Grand-Duc. Enfin, la partie demanderesse conclut également à une violation de l’article 101 de la Constitution, qui aurait été violé du fait par la Chambre de Commerce d’avoir institué un système de cotisation à taux dégressif.

Il échet tout d’abord de relever que c’est à bon droit que la Chambre de Commerce fait soutenir que les cotisations perçues par elle ne constituent pas des impôts, mais des taxes parafiscales, tel qu’il a été retenu ci-avant.

Etant donné que le moyen tiré de la violation des articles 36, 99 et 101 de la Constitution est basé sur l’argumentation suivant laquelle les prélèvements à effectuer au profit de la Chambre de Commerce, appelés cotisations, constitueraient des impôts et dans la mesure où, comme il a été constaté ci-avant, lesdites cotisations ne sont pas à considérer comme des impôts, mais comme des taxes parafiscales, le moyen afférent manque de fondement, de sorte qu’il est à rejeter. Il échet d’ailleurs dans ce contexte de relever que les articles 99 et 101 de la Constitution ne visent que les impôts prélevés au profit de l’Etat, ce qui n’est manifestement pas le cas des cotisations à verser à une chambre professionnelle, comme la Chambre de Commerce. Quant à une prétendue violation de l’article 36 de la Constitution par l’article 37bis de la loi du 4 avril 1924, il échet de relever que la violation de cette disposition constitutionnelle n’a été invoquée que dans le contexte du raisonnement de la partie demanderesse suivant lequel les cotisations à verser à la Chambre de Commerce constitueraient des impôts. Or, étant donné que cette qualification desdits versements n’a pas été retenue ci-avant, ce moyen a également perdu sa pertinence.

Au vu des conclusions ci-avant tirées, il échet encore de constater que la question préjudicielle à poser à la Cour Constitutionnelle suivant la proposition afférente de la part de la partie demanderesse devient sans objet, dans la mesure où elle est également basée sur la fausse prémisse suivant laquelle la cotisation à verser à la Chambre de Commerce serait à considérer comme constituant un impôt.

En deuxième lieu, la partie demanderesse souhaite voir retenir l’illégalité des bulletins de cotisation déférés, au motif que le règlement grand-ducal prévu à l’article 3 de la loi du 4 avril 1924, à savoir celui relatif au mode et la procédure d’établissement des rôles des cotisations, n’aurait pas été pris à la date de la fixation de la cotisation pour l’année 2007. Elle estime encore que s’il est vrai qu’un règlement grand-ducal a été pris en date du 21 décembre 2007, il n’en resterait pas moins que celui-ci ne saurait régulariser le bulletin émis antérieurement en date du 5 juillet 2007, la Chambre de Commerce ayant été obligée de faire application de la législation et de la réglementation applicables au jour où elle a pris le bulletin de cotisation litigieux.

La Chambre de Commerce s’oppose à ce moyen en soutenant que dans la mesure où la partie demanderesse affirme n’avoir reçu, au courant de l’année 2007, un bulletin de cotisation portant sur les cotisations à lui verser pour l’année 2007 en question, en ce qu’elle ferait valoir qu’elle n’aurait reçu le bulletin de l’année 2007 qu’en date du 14 mars 2008, il y aurait lieu de faire application de la réglementation applicable à cette date, et plus particulièrement du règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007. La Chambre de Commerce fait encore soutenir dans ce contexte que d’après son appréciation des faits, le bulletin du 13 mars 2008 ne constituerait pas un bulletin portant rappel des cotisations antérieurement dues pour l’année 2007, mais « la première notification d’un bulletin de cotisation pour l’année en question ».

La partie demanderesse s’oppose toutefois à une telle application qu’elle qualifie de rétroactive du règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 et rappelle ainsi sa position suivant laquelle ledit bulletin relatif à l’année 2007 aurait dû être émis en conformité avec la règlementation applicable avant l’entrée en vigueur dudit règlement grand-ducal du 21 décembre 2007.

Il échet tout d’abord de relever que le présent recours est dirigé contre deux décisions prises par la Chambre de Commerce, la première datant du 5 juillet 2007 et portant bulletin de cotisation pour l’année 2007 et la deuxième constituant le bulletin de rappel du 13 mars 2008, portant rappel des cotisations antérieurement dues pour l’année 2007, vraisemblablement non payées à la date d’émission de ce bulletin de rappel.

Quant au bulletin de cotisation du 5 juillet 2007, s’il est vrai que la date de notification dudit bulletin à la partie demanderesse n’a pas pu être établie, faute d’indication à ce sujet soumise par la Chambre de Commerce, il n’en reste pas moins qu’il n’est pas contesté en cause que ledit bulletin a été émis à la date qu’il porte, à savoir le 5 juillet 2007. Il s’ensuit que la Chambre de Commerce, en émettant ledit bulletin, a nécessairement dû faire application de la réglementation applicable au jour de la prise de sa décision. Or, il échet de constater qu’à la date de la prise de ladite décision, le règlement grand-ducal prévu par l’article 3 de la loi du 4 avril 1924 relatif au mode et à la procédure d’établissement des rôles des cotisations n’avait pas été pris, alors même que la prise dudit règlement grand-ducal était obligatoire et que ni l’article 37bis ni un quelconque autre article de la loi du 4 avril 1924 n’introduisent une dérogation à ce titre4.

Au vu des différentes pièces versées et au vu des observations formulées par la partie demanderesse, il y a lieu de retenir que la Chambre de Commerce s’est dotée à partir de sa création d’une réglementation qui résulte en partie de son règlement d’affiliation et de cotisation et du règlement d’ordre intérieur et en partie d’une pratique administrative mise en place et adaptée depuis 1924 lui permettant d’un côté d’établir les rôles ou bulletins de cotisations et d’un autre côté de percevoir les cotisations.

Force est de retenir que ni des instruments de codification interne, comme en l’espèce le règlement d’affiliation et de cotisation et le règlement d’ordre intérieur, ni la mise en place d’une pratique administrative, même si elle semble exister depuis des décennies, ne sont de nature à suppléer à l’absence d’un règlement grand-ducal expressément exigé en l’occurrence5.

Il échet encore de constater qu’il ressort clairement du libellé de l’article 3 de la loi du 4 avril 1924 qu’un règlement d’administration public doit déterminer le mode et la procédure d’établissement des rôles des cotisations, taxes, droits et primes.

Il se dégage partant de la loi du 4 avril 1924, telle que modifiée par la suite, que le législateur a subordonné l’application de la législation prévoyant le droit des chambres 4 trib. adm. 24 octobre 2007, n° 22636 du rôle, confirmé par Cour adm. 17 avril 2008, n° 23755C du rôle 5 trib. adm. 24 octobre 2007, n° 22636 du rôle, confirmé par Cour adm. 17 avril 2008, n° 23755C du rôle professionnelles à prévoir des cotisations, taxes, droits et primes, dont l’établissement doit se faire selon un certain mode et selon une certaine procédure, à l’entrée en vigueur d’un règlement grand-ducal règlementant ces opérations.

Il se dégage de ce qui précède, qu’en l’absence d’existence du règlement grand-ducal prévu par l’article 3 de la loi du 4 avril 1924 au moment de l’établissement du bulletin de cotisation de la Chambre de Commerce du 5 juillet 2007, l’émission de ce bulletin ne disposait pas d’une base légale suffisante, de sorte que ce bulletin encourt l’annulation. Le même sort doit nécessairement s’appliquer au bulletin de rappel du 13 mars 2008 qui, dans la mesure où il a pour seul objet de rappeler le paiement de cotisations antérieurement échues, telles que fixées par le bulletin précité du 5 juillet 2007, ne contient aucun élément décisionnel nouveau par rapport à celui contenu dans le bulletin du 5 juillet 2007.

Il échet partant d’écarter comme étant non pertinents tous les développements soumis au tribunal quant à une prétendue application rétroactive du règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 voire relatifs à la question de savoir si le bulletin de rappel émis en date du 13 mars 2008 a été émis sur base du fondement légal dudit règlement grand-ducal.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation est à déclarer fondé, sans qu’il y ait lieu de prendre position par rapport aux autres moyens et arguments développés par les parties à l’instance.

Au vu de l’issue du présent litige, il y a lieu de faire masse des frais et de les partager entre les deux parties à l’instance.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme le recours en annulation dans la mesure où il est dirigé contre la décision litigieuse du 13 mars 2008, en ce que celle-ci a reconnu implicitement mais nécessairement la qualité de ressortissante de la Chambre de Commerce dans le chef de la société demanderesse ;

au fond, déclare ledit recours dans cette mesure non fondé, partant en déboute ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation dirigé contre les bulletins litigieux des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008, en ce que ceux-ci portent sur le montant de la cotisation à payer pour l’année 2007 au profit de la Chambre de Commerce ;

reçoit en la forme le recours en annulation dans la mesure où il est dirigé contre les bulletins litigieux des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008, en ce que ceux-ci portent sur le montant de la cotisation à payer pour l’année 2007 au profit de la Chambre de Commerce;

au fond, déclare ledit recours dans cette mesure justifié, partant annule les bulletins de cotisation émis par la Chambre de Commerce en date des 5 juillet 2007 et 13 mars 2008 ;

fait masse des frais et condamne tant la Chambre de Commerce que la partie demanderesse à en payer la moitié.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Martine Gillardin, premier juge, Annick Braun, juge et lu à l’audience publique du 4 février 2010 par le premier vice-président, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Carlo Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 04.02.2010 Le Greffier du Tribunal administratif 9


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 24502
Date de la décision : 04/02/2010

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2010-02-04;24502 ?

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