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24/11/2009 | LUXEMBOURG | N°25327

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 novembre 2009, 25327


Tribunal administratif N° 25327 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 janvier 2009 3e chambre Audience publique du 24 novembre 2009 Recours formé par Monsieur …, contre une décision du ministre des Classes moyennes en matière d’autorisation d’établissement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 25327 du rôle, déposée le 27 janvier 2009 au greffe du tribunal administratif par Maître Dogan Demircan, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des a

vocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, gérant de société, demeurant à L-…, tendant à l...

Tribunal administratif N° 25327 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 janvier 2009 3e chambre Audience publique du 24 novembre 2009 Recours formé par Monsieur …, contre une décision du ministre des Classes moyennes en matière d’autorisation d’établissement

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 25327 du rôle, déposée le 27 janvier 2009 au greffe du tribunal administratif par Maître Dogan Demircan, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, gérant de société, demeurant à L-…, tendant à l’annulation sinon à la réformation d’une décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement du 27 octobre 2008, par laquelle ledit ministre a révoqué son l’autorisation d’établissement ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 15 avril 2009 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 15 mai 2009 par Maître Dogan Demircan pour compte de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 22 mai 2009 par le délégué du gouvernement ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision déférée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Maître Dogan Demircan et Madame le délégué du gouvernement Betty Sandt en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 17 juin 2009 ;

Vu l’avis du tribunal administratif du 15 juillet 2009 prononçant la rupture du délibéré et invitant les parties à déposer un mémoire supplémentaire ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 10 septembre 2009 par le délégué du gouvernement ;

Vu le mémoire supplémentaire, intitulé mémoire en réplique, déposé au greffe du tribunal administratif le 15 septembre 2009 par Maître Dogan Demircan pour compte de Monsieur … ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport complémentaire ainsi que Maître Dogan Demircan et Monsieur le délégué du gouvernement Guy Schleder en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 septembre 2009.

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En date du 8 octobre 2008, le ministre fit parvenir à Monsieur …, titulaire des autorisations d’établissement numéros … en nom personnel et … en tant que gérant de la société … s.à r.l. un courrier de la teneur suivante :

« Par la présente, j'ai l'honneur de me référer à votre requête sous rubrique et plus particulièrement à votre lettre du 30 juillet 2008. Votre demande a fait entre temps l'objet d'un réexamen de la part de la commission prévue à l'article 2 de la loi d'établissement du 28 décembre 1988, modifiée le 4 novembre 1997 et le 9 juillet 2004.

Le résultat m'amène à vous informer au vu de l'attestation testimoniale fournie par Monsieur …, il est établi que vous avez joué le rôle d'intermédiaire pour procurer à Monsieur … des attestations CE falsifiées. De telles pratiques ne sont pas conciliables avec les obligations professionnelles qui s'imposent à vous dans le cadre de l'exercice de vos activités soumises à la loi de 1988. Par vos agissements, vous avez volontairement induit en erreur le Ministère. La commission cons ultati ve pr écitée estime par conséquent que vous n'êt es plus honor abl e professionnellement.

Comme je me rallie entièrement à l'avis de la commission consultative, j'ai l'intention de procéder à la révocation de vos autorisations no … et no … pour défaut d'honorabilité, conformément aux dispositions des articles 2 et 3 de la loi d'établissement du 28 décembre 1988, modifiée le 4 novembre 1997 et le 9 juillet 2004.

Par conséquent et conformément aux dispositions du règlement du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'État et des Communes, vous disposez d'un délai de 8 jours à partir de la réception de la présente pour présenter d'éventuelles observations ou demander à être entendu en personne. […] » Ce courrier ministériel fut suivi d’une prise de position en date du 13 octobre 2008 de la part de Monsieur … dans laquelle il conteste tant avoir fourni un quelconque document à Monsieur … que connaître ce dernier.

Le 27 octobre 2008, le ministre fit parvenir la décision ayant la teneur ci-après libellée à Monsieur … :

« Par la présente, j'ai l'honneur de me référer à votre requête sous rubrique, qui a fait entre-temps l'objet de l'instruction administrative prévue à l'article 2 de la loi modifiée du 28 décembre 1988 relative au droit d'établissement.

Dans le cadre de l'affaire des fausses attestations CE il s'est révélé que Monsieur … a procuré ou aidé à procurer à un nombre indéfini de personnes des attestations CE falsifiées en vue de favoriser l'obtention de leur autorisation d'établissement. Dans ce contexte, il est établit qu'il a organisé l'attestation CE falsifiée de Monsieur …. Ce dernier a d'ailleurs produit une attestation testimoniale en bonne et due forme à ce sujet. Par ailleurs, l'enquête administrative a révélé que par le biais du café à …, exploité par son épouse, il a activement favorisé les pratiques précitées. Il est établi que Monsieur … a joué le rôle d'intermédiaire pour trafiquer des fausses qualifications professionnelles et ce en vue d'obtenir des autorisations d'établissement.

La commission consultative précitée estime qu'un tel comportement est incompatible au niveau de l'honorabilité professionnelle. Elle est par conséquent d'avis que Monsieur … ne présente plus conditions d'honorabilité professionnelle requises en vue d'obtenir une autorisation d'établissement.

Comme je me rallie aux conclusions de cet organe de consultation, je suis au regret de ne pouvoir faire droit à votre requête dans l'état actuel du dossier en me basant sur les articles 2 et 3 de la loi susmentionnée.

La présente décision peut faire l'objet d'un recours par voie d'avocat à la Cour endéans trois mois auprès du Tribunal Administratif. » Le 27 janvier 2009, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision du ministre de Classes moyennes, du Tourisme et du Logement du 27 octobre 2008.

A l’appui de son recours le demandeur fait valoir qu’il n’existerait aucune preuve qu’il aurait été impliqué dans le trafic de fausses qualifications professionnelles en vue de l’obtention de l’autorisation d’établissement. Les allégations soulevées par le ministre reposeraient sur de simples suppositions et l’attestation de Monsieur … serait formellement contestée dans la mesure où elle reposerait sur des propos insidieux. A titre subsidiaire, il fait plaider que s’il s’avérait qu’une telle situation serait plausible, son comportement aurait été dicté par pur altruisme face au désarroi de Monsieur …. Il relève être titulaire d’une autorisation d’établissement depuis 1999 et qu’il n’y aurait jamais eu le moindre écart dans ce contexte.

Le délégué du gouvernement fait valoir qu’une enquête administrative aurait relevé un réseau criminel luso-luxembourgeois procurant à des ressortissants portugais, souhaitant obtenir une autorisation d’établissement au Luxembourg, des formulaires originaux d’attestations CE portugaises mais dont le contenu serait de complaisance. Un ou plusieurs agents de la Confédération de l’Industrie portugaise, ci-après « la CIP », compétente pour la délivrance des attestations CE portugaises, ainsi que plusieurs intermédiaires auraient été impliqués dans ce trafic. L’enquête administrative diligentée à l’encontre du demandeur aurait relevé que ce dernier serait un de ces intermédiaires. Quant à la relation entre le demandeur et Monsieur …, le délégué du gouvernement explique que l’enquête administrative diligentée à l’égard du dernier aurait décelé que les qualifications qu’il aurait invoquées n’auraient pas été authentiques et qu’il se serait expliqué lors d’une réunion au sein du ministère en date du 2 juillet 2008. Lors de cette réunion, Monsieur … aurait avoué que les qualifications professionnelles indiqués sur l’attestation CE ne correspondrait pas à la réalité et qu’il n’aurait jamais travaillé comme indépendant au Portugal. D’autre part, il aurait expliqué que le demandeur lui aurait proposé de l’aider afin d’obtenir les documents portugais requis pour obtenir une autorisation d’établissement au Luxembourg. En date du 11 juillet 2008, Monsieur … aurait envoyé une attestation testimoniale dans laquelle il aurait confirmé ses dires de l’entrevue du 2 juillet 2008. Par ailleurs, dans une affaire connexe soumise au tribunal et comportant le numéro 25537 du rôle, le second mandataire du demandeur aurait confirmé dans un courrier du 13 février 2009 qu’il serait la personne intermédiaire entre Monsieur … et l’agent de la CIP, mais qu’il ne s’agirait que d’un service d’ami, alors qu’auparavant le demandeur aurait nié connaître Monsieur …. Le demandeur aurait confirmé cette version des faits lors d’une entrevue du 1er avril 2009 au sein du ministère.

Quant à l’implication du demandeur dans l’affaire des faux, le délégué du gouvernement fait valoir qu’il aurait obtenu diverses autorisations d’établissement dans le domaine du bâtiment, qu’il aurait été gérant technique de plusieurs sociétés et que d’autres demandes d’autorisations d’établissement seraient encore pendantes. D’autre part, les dossiers du demandeur auraient été saisis par la police judiciaire, de sorte qu’on pourrait présumer qu’il y serait également impliqué et l’attestation CE qui aurait permise au demandeur d’obtenir les autorisations d’établissement aurait été émise par l’agent de la CIP ayant été un des principaux protagonistes dans l’affaire des fausses attestations CE. Si le ministère avait demandé aux autorités portugaises une confirmation officielle de l’authenticité de l’attestation CE et des informations qu’elle contient, il n’aurait pas encore obtenu de réponse.

Quant au fond, le délégué du gouvernement estime qu’il serait incontestable que le demandeur aurait agi comme intermédiaire dans l’affaire des faux, notamment en raison du fait que ni Madame … ni Monsieur … n’auraient connu le faussaire portugais, de sorte que ces informations auraient dû lui être transmises par le demandeur, d’autant plus qu’il serait en aveu sur les deux cas mentionnés ci-avant. Un tel comportement serait inconciliable avec les conditions d’honorabilité professionnelles telles qu’exigées par la loi du 28 décembre 1988 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales, telle que modifiée notamment par la loi du 4 novembre 1997 ainsi que par la loi du 9 juillet 2004, ci-après « la loi d’établissement ».

Finalement, ni le moyen selon lequel le demandeur disposerait d’une autorisation d’établissement depuis 1999 ni celui de la perte de moyens de subsistance ne sauraient être retenus.

Quant au moyen d’irrecevabilité invoqué, le demandeur fait valoir que la requête introductive d’instance aurait été signée. D’autre part, il estime que son implication dans l’affaire des fausses attestations n’aurait jamais été démontrée objectivement. Il conteste avoir nié connaître Monsieur … et fait valoir à cet égard qu’il l’aurait connu sous le nom de « Dias » ce qui expliquerait le malentendu lors de l’entretien auprès de la police. Il conteste d’autre part avoir avoué son implication et estime qu’en vertu du principe de la présomption d’innocence seule une décision de justice coulée en force jugée pourrait retenir son implication dans un réseau criminel. Finalement, il fait valoir que son rôle se limiterait à la mise en contact de Monsieur … avec l’agent au Portugal, mais qu’il aurait ignoré toutes les démarches entreprises par Monsieur …, sauf qu’il aurait relancé l’agent au Portugal pour savoir ce qu’il en était du dossier de Monsieur ….

Dans son mémoire en duplique le délégué du gouvernement fait valoir que sur présentation des diplômes et autres documents officiels, la CIP délivrait les attestations CE contre le paiement d’une taxe de 10 euros. Or, il semblerait que l’agent de la CIP en charge de la préparation de ces attestations CE aurait eu l’habitude d’établir des attestations de complaisance contre le paiement d’une somme de 500 à 1.500 euros.

En l’espèce l’implication du demandeur dans ce réseau serait confirmée tant par le dossier de Monsieur … que par celui de Madame ….

Concernant le premier dossier, le délégué du gouvernement fait valoir que Monsieur … aurait déjà introduit une demande d’autorisation d’établissement avant de passer par l’intermédiaire du demandeur, mais celle-ci aurait été refusée pour défaut de qualification professionnelle. Il s’ensuivrait que si Monsieur … aurait rempli les conditions de qualifications professionnelles, il se serait tout simplement adressé à la CIP pour obtenir l’attestation afférente, de sorte qu’il serait à présumer que Monsieur … se serait adressé au demandeur pour obtenir l’attestation CE malgré son défaut de qualification professionnelle.

Etant donné que l’agent de la CIP n’aurait pas connu Monsieur …, c’est le demandeur qui aurait dû fournir les données personnelles nécessaires. L’implication du demandeur serait aggravée par le fait que la somme d’argent que Monsieur … lui aurait donnée se recouperait à peu près avec les sommes demandées par l’agent de la CIP afin d’établir les attestations CE de complaisance.

En ce qui concerne le dossier de Madame …, le délégué du gouvernement rappelle que lors d’une entrevue au ministère tant la précitée que le demandeur auraient avoué que les indications sur l’attestation CE de Madame … ne correspondraient pas à la réalité, de sorte qu’elle ne remplissait pas les conditions de qualification professionnelle pour l’exercice de l’activité de coiffeur.

Suite à l’avis du tribunal administratif du 15 juillet 2009 prononçant la rupture du délibéré, le délégué du gouvernement verse un courrier du 7 septembre 2009 du Procureur d’Etat adjoint selon lequel le demandeur aurait été entendu par le service de police judiciaire en mars 2009 et que cette audition vaudrait procès-verbal à charge. Cependant, il n’aurait pas de réquisitoire introductif à l’encontre du demandeur, ni a fortiori d’inculpation. Le demandeur rappelle à ce sujet que les preuves de son implication dans le réseau précité manqueraient, ce qui expliquerait qu’il n’aurait pas été inculpé, de sorte que le principe de la présomption d’innocence devrait s’appliquer en l’espèce.

Dans la mesure où aucun recours au fond n’est prévu par la loi d’établissement, qui, au contraire prévoit expressément en son article 2, alinéa 6, qu’en matière d’octroi, de refus ou de révocation d’autorisation d’établissement un recours en annulation est prévu, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives.

Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Force est de constater que lorsque le juge administratif est saisi d’un recours en annulation, il a le droit et l’obligation d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, de vérifier si les motifs dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée et de contrôler si cette décision n’est pas entachée de nullité pour incompétence, excès ou détournement de pouvoir, ou pour violation de la loi ou des formes destinées à protéger des intérêts privés1.

Force est au tribunal de constater en premier lieu que le moyen ayant trait au principe de la présomption d’innocence ne saurait être retenu en l’espèce. En effet, s’il est exact que le juge administratif ne saurait qualifier un comportement comme constituant une infraction pénale à défaut de pouvoir se rallier à un jugement pénal ayant acquis autorité de chose jugée, il n’en demeure pas moins qu’il lui appartient et qu’il a l’obligation de contrôler si un fait est 1 Cf Cour 4 mars 1997, n° 9517C, Pas. adm. 2008, V° Recours en annulation, page 470, n° 15, et les autres décisions y citées.

susceptible d’entraver l’honorabilité professionnelle de la personne concernée indépendamment de sa qualification pénale, pourvu que la matérialité du fait est établie à suffisance de droit.

En l’espèce, le ministre motive le retrait des autorisations d’établissement dont le demandeur est le titulaire par le fait qu’il aurait procuré ou aidé à procurer à un nombre indéfini de personnes des attestations CE falsifiées en vue de favoriser l’obtention de leur autorisation d’établissement. Le ministre se base plus particulièrement sur deux dossiers dont le premier est celui de Monsieur … et le deuxième celui de la compagne du demandeur, Madame ….

En premier lieu force est au tribunal de constater qu’aucune pièce versée en cause ne permet de vérifier l’allégation de la partie étatique selon laquelle le demandeur aurait procuré ou aidé à procurer à un nombre indéfini de personnes des attestations CE falsifiées en vue de favoriser l’obtention de leur autorisation d’établissement, de sorte que ce motif laisse d’être vérifié en l’espèce.

Concernant le dossier de Monsieur …, force est au tribunal de constater que la partie étatique entend prouver la matérialité de l’intervention du demandeur, d’un côté, par l’aveu du demandeur lors d’une entrevue au ministère et, de l’autre côté, par le biais d’une attestation testimoniale de Monsieur …. Finalement, la partie étatique entend encore se baser sur un courrier du mandataire du demandeur dans une affaire similaire soumis au tribunal portant le numéro 25537 du rôle. Dans la mesure où le demandeur conteste formellement qu’il ait avoué avoir joué un quelconque rôle dans le cadre de l’obtention de l’attestation CE de Monsieur … et à défaut de pièces documentant les prises de position du demandeur lors de l’entrevue alléguée, il y a lieu de retenir que le prétendu aveu du demandeur laisse d’être prouvé en l’espèce.

Concernant, l’attestation testimoniale de Monsieur …, force est au tribunal de constater que si cette dernière révèle l’intervention du demandeur dans le cadre de l’obtention de l’attestation CE de Monsieur …, aucun élément de cette attestation testimoniale ne permet cependant de conclure que le document que le demandeur s’apprêtait à fournir constitue un faux ou qu’il aurait transmis au demandeur des documents que ce dernier savait être des faux.

Il en est de même du prétendu aveu de Monsieur … lors d’une entrevue qui se serait déroulée en date du 2 juillet 2008 au sein du ministère, qui, sur la toile de fond des contestations formelles du demandeur et à défaut de pièces versées à cet égard, ne saurait être retenu en l’espèce.

Quant au courrier du mandataire du demandeur envoyé à la partie étatique dans le cadre de l’affaire similaire précitée, force est de constater qu’elle se limite à corroborer l’intervention du demandeur sans néanmoins mettre en évidence son intention de se procurer un document falsifié.

A cet égard force est encore au tribunal de constater qu’à défaut de jugement ayant acquis autorité de chose jugée et retenant le caractère falsifié des attestations CE de Monsieur … et de Madame … et à défaut d’une demande d’inscription en faux afférente au cours de la procédure contentieuse, le ministre n’a pas pu appuyer sa décision sur le caractère falsifié de ces documents.

Il s’ensuit que la matérialité des faits ayant constitué la base des motifs de la décision déférée n’est, en l’état actuel de l’instruction du dossier, pas établie en espèce.

Cependant, force est au tribunal de constater d’autre part que les déclarations du demandeur au cours de l’instruction administrative des dossiers en cause furent contradictoires. En effet, le demandeur conteste dans un premier temps par courrier du 13 octobre 2008 avoir entrepris une quelconque démarche dans le cadre de la demande de l’attestation CE de Monsieur …, il y conteste même connaître cette personne. Cependant, par courrier du 13 février 2009, son litismandataire dans l’affaire similaire précitée, admet que le demandeur est intervenu pour le compte de Monsieur … en vu de l’obtention de l’attestation CE en contactant une connaissance au Portugal, mais conteste avoir reçu une quelconque rémunération à cet égard, de sorte qu’il ne s’agirait que d’un service d’ami. Malgré cet aveu, le demandeur revient une fois de plus sur ses paroles en contestant formellement au cours de la présente procédure être impliqué dans le cadre la demande de l’attestation CE de Monsieur … auquel il reproche de tenir des propos fallacieux. Les explications du demandeur selon lesquelles il n’aurait jamais soutenu de ne pas connaître Monsieur … et que le malentendu afférant serait dû à une erreur au niveau du nom du dernier, sont également contredites par le courrier du demandeur du 13 octobre 2008. En effet, dans ce courrier il conteste connaître l’auteur de l’attestation testimoniale alors que ce dernier y est mentionné avec son nom intégral.

Force est dès lors au tribunal de constater que le demandeur a violé son obligation de collaborer loyalement avec l’administration en induisant l’administration en erreur. En effet, le demandeur a sciemment caché son intervention en faveur de Monsieur …, de sorte que le tribunal est amené à conclure que les manquements retenus à l’égard du demandeur sont suffisants pour témoigner du défaut d’honorabilité professionnelle dans son chef.

Il s’ensuit que dans la mesure où une décision administrative fondée sur des motifs entachés d’une erreur de droit ou d’une inexactitude matérielle n’est pas à annuler si elle se justifie par d’autres motifs conformes à la loi, même non invoqués par l’administration et il appartient à la juridiction administrative de substituer, le cas échant, des motifs exacts aux motifs erronés, le recours laisse d’être fondé.2 Quant au recours en réformation introduit à titre subsidiaire, force est au tribunal de constater qu’aucun texte légal ne prévoit un tel recours en la matière, de sorte qu’il est incompétent pour en connaître.

Il découle de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours sous analyse est à rejeter comme n’étant pas fondé.

2 TA 10 janvier 1997, n° 9755 du rôle, Pas. adm. 2008, v° Recours en annulation, page 473, n° 38.

Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

quant au fond, le déclare non fondé et en déboute ;

déclare le recours en réformation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais de l’instance.

Ainsi jugé par :

Catherine Thomé, premier juge, Claude Fellens, juge, Françoise Eberhard, juge, et lu à l’audience publique du 24 novembre 2009 par le premier juge Catherine Thomé en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Catherine Thomé Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 25.11.2009 Le Greffier du Tribunal administratif 8


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 25327
Date de la décision : 24/11/2009

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2009-11-24;25327 ?

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