Tribunal administratif Numéro 25140 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 décembre 2008 3e chambre Audience publique du 7 juillet 2009 Recours formé par Madame … contre une décision du comité-directeur de la Caisse de maladie des employés privés en matière de contrat de travail Vu la requête inscrite sous le numéro 25140 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 décembre 2008 par Maître Carine Thiel, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, demeurant à D-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du 7 octobre 2008 du comité-directeur de la Caisse de maladie des employés privés portant résiliation de son contrat de travail à la même date ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 23 février 2009 par Maître Louis Berns, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la Caisse nationale de Santé, établissement public, représentée par son organe-directeur actuellement en fonctions, établie à L-1471 Luxembourg, 125, route d’Esch, substituée de plein droit, aux termes de l’article 15 de la loi du 13 mai 2008 portant introduction d’un statut unique, dans les droits et obligations e.a. de l’Union des caisses de maladie ainsi que de la Caisse de maladie des employés privés ;
Vu le mémoire en réplique déposé par Maître Carine Thiel au nom de Madame … au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2009 ;
Vu le mémoire en duplique déposé par Maître Louis Berns au nom de la Caisse nationale de Santé au greffe du tribunal administratif le 24 mars 2009 ;
Vu les pièces versées en cause ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Maître Anne Denoel, en remplacement de Maître Carine Thiel et Maître Yeliz Bozkir en remplacement de Maître Louis Berns en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 juin 2009.
Par décision du 7 octobre 2008, le comité-directeur de la Caisse de maladie des employés privés décida de résilier le contrat de travail de Madame ….
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 3 décembre 2008, Madame … a fait introduire principalement un recours en réformation et subsidiairement un recours en annulation contre ladite décision du comité-directeur de la Caisse de maladie des employés privés.
1 La Caisse nationale de Santé, ci-après « la CNS », fait valoir que le recours serait dirigé contre une certaine « Union des Caisses de maladie des Employés privés », tandis qu’il résulterait de la motivation du recours que celui-ci serait dirigé à l’encontre d’une décision du comité-directeur de la Caisse de maladie des employés privés. La CNS ajoute qu’elle serait substituée de plein droit aux termes de l’article 15 de la loi du 13 mai 2008 portant introduction d’un statut unique, dans les droits et obligations entre autres de l’Union des caisses de maladie ainsi que de la Caisse de maladie des employés privés ce qui lui conférerait la qualité de défenderesse dans le cadre du présent recours.
La CNS soulève ensuite la caducité du recours introduit pour défaut de signification.
En effet, ni l’Union des caisses de maladie, ni la Caisse de maladie des employés privés, ni la CNS ne se seraient vu signifier la requête introductive d’instance par exploit d’huissier de justice. Elle souligne que le simple fait que l’Union des caisses de maladie respectivement la Caisse de maladie des employés privés se sont vu transmettre, par voie de fax inofficiel et par les soins du ministère de la Sécurité sociale, une copie du recours ne répondrait pas à l’exigence de forme substantielle de l’obligation de signification de la requête à la partie défenderesse.
La demanderesse donne à considérer que le dépôt de la requête au greffe du tribunal administratif vaudrait signification à l’Etat, de sorte qu’il aurait été superflu de signifier la requête à des établissements publics de l’Etat. Elle ajoute qu’en application de l’article 29 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la partie défenderesse ne serait pas fondée à se prévaloir d’une quelconque atteinte à ses droits de la défense au motif qu’elle a reçu une copie de la requête introductive d’instance et a pu déposer des mémoires dans la présente instance.
La CNS rétorque que le recours devrait être signifié à un établissement public lequel constituerait une personnalité juridique distincte de l’Etat et souligne que la connaissance du recours respectivement le dépôt de mémoires ne saurait, au vu de la jurisprudence des juridictions administratives sur ce point, pallier à l’absence de signification du recours à la partie défenderesse.
Force est au tribunal de constater qu’il ressort de la requête introductive d’instance que le recours a été adressé contre « l’Union des Caisse de Maladie des Employés privés », tandis que le dispositif du recours précise qu’il est dirigé contre une décision du 7 octobre 2008 prise par le comité-directeur de la Caisse de maladie des employés privés, de sorte qu’il y a lieu d’admettre que le recours est dirigée à l’encontre d’une décision prise par le comité-directeur de la Caisse de maladie des employés privés et que la partie défenderesse, au moment de l’introduction du recours, a été la Caisse de maladie des employés privés. A partir du 1er janvier 2009, la CNS est substituée de plein droit dans les droits et obligations de la Caisse de maladie des employés privés en application de l’article 15 de la loi du 13 mai 2008 portant introduction d’un statut unique, de sorte qu’à partir du 1er janvier 2009, la CNS est à considérer comme partie défenderesse dans la présente instance.
En application de l’article 283 du Code des assurances sociales applicable au moment du dépôt de la requête introductive d’instance au greffe du tribunal administratif le 3 décembre 2008 et jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 13 mai 2008 portant introduction d’un statut unique le 1er janvier 2009, la Caisse de maladie des employés privés est un établissement public et jouit de la personnalité civile.
2En application de l’article 396 du Code de la sécurité sociale, en vigueur à partir du 1er janvier 2009, la CNS est également un établissement public et jouit de la personnalité civile.
Etant donné, dès lors, qu’aussi bien la Caisse de maladie des employés privés que la CNS, sont des établissements publics ayant une personnalité civile distincte de celle de l’Etat, la demanderesse ne saurait se prévaloir de l’article 4, paragraphe 2 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après « la loi du 21 juin 1999 », en ce qu’il dispose que le dépôt de la requête vaut signification à l’Etat.
En effet, la disposition pertinente applicable en l’espèce est l’article 4, paragraphe 1 de la loi du 21 juin 1999 qui est libellé comme suit :
« Sous réserve du paragraphe 2, le requérant fait signifier la requête à la partie défenderesse et aux tiers intéressés, à personne ou à domicile, par exploit d’huissier, dont l’original ou la copie certifiée conforme est déposée sans délai au greffe du tribunal… ».
Si la demanderesse admet elle-même que le recours n’a été signifié, par exploit d’huissier, ni à la Caisse de maladie des employés privés, ni à la CNS, les parties sont en désaccord sur la conséquence résultant du défaut de signification.
L’article 4, paragraphe 2 de la loi du 21 juin 1999 dispose que « faute par le requérant d’avoir procédé à la signification de son recours à la partie défenderesse dans le mois du dépôt du recours, celui-ci est caduc ».
En vertu des termes clairs dudit article, le tribunal doit prononcer la caducité du recours, dans la mesure où la signification du recours dans le délai d’un mois constitue une formalité substantielle tenant à l’organisation de la Justice (cf. TA 20 décembre 2007, n° 22108 du rôle, Pas. adm. 2008, V° Procédure contentieuse n° 268).
Par conséquent, le recours sous analyse, faute d’avoir été signifié à la partie défenderesse, est caduc.
Cette conclusion ne saurait être énervée par le simple fait que la Caisse de maladie des employés privés, respectivement la CNS ont eu connaissance du recours de façon inofficieuse de la part du ministère de la Sécurité sociale et ont déposé des mémoires en réponse et en duplique dans le cadre de la présente instance, étant donné que la disposition légale contenue à l’article 4, paragraphe 2 de la loi du 21 juin 1999 est formelle et ne prévoit aucune exception.
Par ailleurs, le fait pour la CNS d’avoir déposé deux mémoires dans le cadre de la présente instance, ne saurait se retourner contre elle, étant donné que dans la mesure où elle a eu connaissance du recours sous analyse, elle était en droit d’invoquer le vice de procédure en question.
En ce qui concerne encore l’argumentation de la demanderesse suivant laquelle la CNS ne saurait valablement invoquer la caducité du recours, dans la mesure où, du fait d’avoir eu connaissance du recours et d’avoir pu déposer des mémoires, elle n’aurait subi aucun préjudice, il y a lieu de retenir qu’en se basant sur cette argumentation, la demanderesse s’est référée à l’article 29 de la loi du 21 juin 1999, qui dispose que « l’inobservation des 3règles de procédure n’entraîne l’irrecevabilité de la demande que si elle a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense ».
Cette disposition légale ne saurait toutefois trouver application en l’espèce, dans la mesure où, d’une part, l’irrecevabilité d’un recours contentieux ne comprend pas l’hypothèse dans laquelle un recours est à déclarer caduc et, d’autre part, l’article 4, paragraphe 2 de la loi du 21 juin 1999 est formel et ne tolère aucune exception par rapport à la règle y contenue comme il a été relevé ci-dessus (cf. TA 3 avril 2006, n° 20367, Pas. adm. 2008, V° Procédure contentieuse n° 267).
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours sous analyse est caduc.
Par ces motifs, le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours caduc ;
condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi jugé et prononcé par :
Catherine Thomé, premier juge, Claude Fellens, juge, Françoise Eberhard, juge, et lu à l’audience publique du 7 juillet 2009 par le premier juge en présence du greffier Judith Tagliaferri.
s. Judith Tagliaferri s. Catherine Thomé Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 7.7.2009 Le Greffier du Tribunal administratif 4