Tribunal administratif N° 24789 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er septembre 2008 1re chambre Audience publique du 10 juin 2009 Recours formé par Madame …, … contre des décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers Vu la requête inscrite sous le numéro 24789 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 1er septembre 2008 par Maître Nicky Stoffel, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … (Cap-Vert), de nationalité capverdienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation de deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration datant respectivement du 25 février et du 30 mai 2008 et refusant de faire droit à sa demande en obtention d’une autorisation de séjour ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 20 octobre 2008 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 novembre 2008 par Maître Nicky Stoffel pour compte de Madame … ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Bouchra Fahime, en remplacement de Maître Nicky Stoffel et Madame le délégué du Gouvernement Claudine Konsbrück en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 19 janvier 2009 ;
Vu la rupture du délibéré prononcée en date du 21 avril 2009 ;
Vu la prise de position complémentaire de Maître Stoffel du 29 avril 2009 ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport complémentaire, ainsi que Maître Bouchra Fahime, en remplacement de Maître Nicky Stoffel et Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline Jacques en leurs observations complémentaires à l’audience publique du 18 mai 2009.
En date du 19 septembre 2007 Madame … , de nationalité capverdienne, s’est adressée au service des étrangers auprès du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration pour solliciter une carte de séjour au Grand-Duché de Luxembourg en indiquant qu’elle serait à charge de son grand-père, de nationalité luxembourgeoise.
Par décision du 25 février 2008 le ministre refusa de faire droit à cette demande en faisant valoir que selon l’article 1er, paragraphe (2) du règlement grand-ducal du 28 mars 1972 relatif aux conditions d’entrée et de séjour de certaines catégories d’étrangers faisant l’objet de conventions internationales, tel qu’il a été modifié, le regroupement familial se limiterait aux descendants directs. Par la même décision il releva que l’intéressée se trouvait en séjour irrégulier et l’invita à quitter le pays sans délai.
Par courrier de son mandataire du 6 mars 2008, Madame … a fait introduire un recours gracieux à l’encontre de la décision prévisée du 25 février 2008 en faisant valoir que la disposition légale invoquée par le ministre ne serait pas applicable à sa situation actuelle. Elle a précisé à cet égard être entrée au Grand-Duché de Luxembourg munie d’un visa d’entrée et avoir été accueillie et hébergée par son grand-père, de nationalité luxembourgeoise, tout en relevant que son arrivée au pays aurait été motivée par le désir de poursuivre ses études supérieures à l’Université de Luxembourg. Elle précisa par voie de conséquence que sa demande introduite en vue de se voir délivrer une autorisation de séjour aurait eu pour objet une autorisation de séjour provisoire en tant qu’étudiante et qu’elle n’aurait pas entendu poser une demande dans le cadre d’un regroupement familial.
Par décision du 30 mai 2008 le ministre confirma sa décision initiale du 25 février 2008 à défaut d’éléments pertinents nouveaux.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 1er septembre 2008, Madame … a fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation des deux décisions ministérielles ci-avant visées des 25 février et 30 mai 2008.
A l’appui de son recours, elle réitère les explications fournies au ministre dans le cadre de son recours gracieux ci-avant visé du 6 mars 2008 dans le sens de préciser que sa prétention initiale tendait à l’obtention d’une autorisation de séjour en tant qu’étudiante. Estimant que les décisions négatives déférées la perturberaient gravement en ce qu’elle serait coupée dans son « désir ardant » d’étudier et la mettraient dans une situation irrégulière qu’elle n’aurait pas choisie et à laquelle elle n’aurait jamais pensé, elle conclut en conséquence à l’annulation de ces décisions.
Le délégué du gouvernement relève d’abord le défaut de preuve d’une véritable prise en charge de la part du grand-père de l’intéressée ainsi que d’une habitation commune avec ce dernier pour conclure que l’intéressée ne pourrait bénéficier des dispositions du règlement grand-ducal précité du 28 mars 1972. Il fait valoir ensuite par rapport au désir exprimé de l’intéressée de poursuivre ses études à l’Université de Luxembourg qu’une personne qui désire faire des études supérieures serait censée faire une demande d’autorisation de séjour en ce sens depuis son pays d’origine, et devrait se renseigner auprès de l’université en question si elle remplit les conditions d’admission, ce qui ne serait visiblement pas le cas en l’espèce, alors que la requérante avouerait elle-
même mal maîtriser le français et l’allemand et fréquenter actuellement une classe de 10ème au Lycée technique de Bonnevoie, ce qui contredirait ses allégations dans le cadre du présent recours. Il demande partant à voir déclarer le recours irrecevable, sinon le rejeter comme non fondé.
Dans la mesure où il se dégage des pièces versées au dossier que la demanderesse, après s’être vue adresser la décision confirmative ci-avant visée du 30 mai 2008, s’était à nouveau adressée au ministre moyennant télécopies des 27 juin et 21 juillet 2008 et que le ministre par référence expresse, suivant décision du 15 septembre 2008 à ces deux fax des 27 juin et 21 juillet 2008 l’a informée qu’il ne saurait donner suite à sa demande, au motif qu’elle ne serait pas inscrite à l’Université du Luxembourg pour l’année académique 2008/2009 et que l’inscription auprès d’un établissement d’études secondaires ou secondaires techniques ne serait pas reconnue comme donnant droit à l’obtention d’une autorisation de séjour en tant qu’étudiante, le tribunal avait prononcé la rupture du délibéré afin de permettre aux parties de prendre position sur l’incidence de l’existence de cette décision du 15 septembre 2009 sur la recevabilité du recours.
La demanderesse a fait préciser à cet égard que la décision ci-avant visée du 15 septembre 2008 serait sans rapport avec le recours sous examen. Elle a relevé plus particulièrement que les fax des 27 juin et 21 juillet 2008 auxquels cette décision fait référence ne constitueraient pas des demandes, mais s’analyseraient en l’envoi de pièces supplémentaires au ministre.
Force est de relever liminairement que les explications écrites ainsi fournies par la demanderesse sont contredites par les pièces versées au dossier, étant donné que non seulement la décision ci-avant visée du 15 septembre 2008 prend expressément position par rapport à une demande en obtention d’une autorisation de séjour en tant qu’étudiante de la demanderesse, mais que celle-ci a encore clairement considéré cette décision du 15 septembre 2008 comme intervenue à ce titre, étant donné que par courrier de son mandataire du 18 septembre 2008, elle a fait introduire un recours gracieux à son encontre. Or, la demanderesse reprochant précisément au ministre de s’être mépris quant à l’objet de sa demande en ce qu’il aurait situé sa décision dans le cadre du regroupement familial et non dans celui, pertinent à son sens, d’une autorisation de séjour en tant qu’étudiante, cette décision, loin d’être sans rapport avec le recours, constitue en fait une réponse claire et explicite aux prétentions initiales de la demanderesse telles que précisées par ses propres soins. Dans la mesure où cette décision du 15 septembre 2008 existe dans l’ordonnancement juridique et produit partant ses effets, le constat s’impose que même dans l’hypothèse où la demanderesse obtenait gain de cause dans la présente instance, elle resterait confrontée aux effets de la décision de refus du 15 septembre 2008.
Force est dès lors de constater que le but escompté par la demanderesse moyennant l’annulation éventuelle des décisions de refus déférées des 25 février et 30 mai 2008 ne saurait être utilement atteint dans la mesure où elle n’a pas déféré au tribunal la décision de refus subséquente du 15 septembre 2008.
Dans ces conditions l’intérêt à agir de la demanderesse laisse d’être établi à suffisance.
Il s’y ajoute que conformément à l’article 1er de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives la requête introductive d’instance doit contenir l’exposé sommaire des faits et des moyens invoqués, mais qu’en l’espèce la requête introductive, au-delà de véhiculer le reproche d’une base légale erronée de son côté, n’énonce aucune base légale susceptible de sous-tendre la prétention de la demanderesse de remplir les conditions pour bénéficier d’une autorisation de séjour en tant qu’étudiante. La demanderesse se limite en effet à exposer sa situation et à soutenir que les décisions déférées la perturbent gravement et la mettraient dans une situation irrégulière, sans pour autant situer, ne serait-ce que sommairement, le cadre légal par rapport auquel elle souhaite voir constater l’illégalité des décisions déférées.
Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours est irrecevable à un double titre.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
déclare le recours en annulation irrecevable ;
condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 10 juin 2009 par :
Paulette Lenert, premier vice-président, Marc Sünnen, premier juge, Thessy Kuborn, juge, en présence de Arny Schmit, greffier en chef.
s. Schmit s. Lenert 4