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19/02/2009 | LUXEMBOURG | N°24884

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 février 2009, 24884


Tribunal administratif Numéro 24884 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 octobre 2008 2e chambre Audience publique du 19 février 2009 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24884 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 octobre 2008 par Maître Olivier Poos, avocat à la Cour, inscrit au table

au de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Gnjilane (Kosovo),...

Tribunal administratif Numéro 24884 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 octobre 2008 2e chambre Audience publique du 19 février 2009 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24884 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 octobre 2008 par Maître Olivier Poos, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Gnjilane (Kosovo), de nationalité kosovare, demeurant actuellement à L-…, tendant, d’une part, à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 5 septembre 2008 portant refus de sa demande de protection internationale et, d’autre part, à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire inscrit dans la même décision ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 octobre 2008 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Marianne Decker, en remplacement de Maître Olivier Poos, et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs plaidoiries respectives.

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Le 19 mai 2008, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après dénommée « la loi du 5 mai 2006 ».

Monsieur … fut entendu en date du même jour par un agent de la police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur son itinéraire de voyage suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg.

Monsieur … fut en outre entendu en date du 3 juin 2008 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par décision du 5 septembre 2008, notifiée par lettre recommandée expédiée le même jour, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ci-après dénommé « le ministre », informa Monsieur … que sa demande de protection internationale avait été rejetée comme étant non fondée. Cette décision est libellée comme suit :

« J'ai l'honneur de me référer à votre demande en obtention d'une protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection que vous avez présentée auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration en date du 19 mai 2008.

En application de la loi précitée, votre demande de protection internationale a été évaluée par rapport aux conditions d'obtention du statut de réfugié et de celles d'obtention du statut conféré par la protection subsidiaire.

En mains le rapport du service de police judiciaire du 19 mai 2008 et le rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration du 3 juin 2008.

Il résulte de vos déclarations que vous auriez été agressé par une bande d'albanais masqués en mars 2007 sur le chemin de Pasjane à Budriga. Vous auriez été frappé par un albanais avec une barre de fer et vous auriez été soigné au centre médical de Pasjane. Vous dites également avoir échappé à une autre agression fin mars 2007. Vous faites état d'insultes et de menaces. Votre vie serait en danger au Kosovo. Enfin, vous ne faites pas état d'autres problèmes et ne seriez pas membre d'un parti politique. Vous ajoutez ne pas avoir de travail au Kosovo.

Vous auriez quitté le Kosovo avec votre passeport serbe muni d'un visa valable du 31 janvier 2008 au 15 mai 2008. Il résulte de votre passeport que vous êtes entré en territoire hongrois le 6 février 2008. Vous dites être arrivé au Luxembourg le 6 ou 7 février 2008, votre frère séjourne au Luxembourg. Vous lui auriez rendu visite au Luxembourg pendant deux mois en 2007. Vous avez déposé votre demande de protection internationale le 19 mai 2008, à savoir 3 jours après expiration de votre visa.

La reconnaissance du statut de réfugié n'est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d'origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est telle qu'elle laisse supposer une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève et de la loi modifiée du 5 mai 2006.

Même si la situation générale des membres de la minorité ethnique serbe est difficile au Kosovo, elle n'est cependant pas telle que tout membre serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève. Selon la jurisprudence de la Cour administrative une crainte de persécution afférente doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considéré individuellement et concrètement, le demandeur risque de subir des traitements discriminatoires.

Force est de constater que même à supposer vos dires comme vrais, les faits que vous alléguez ne sauraient constituer un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu'ils ne peuvent, à eux seuls, établir dans votre chef une crainte fondée d'être persécutés (sic) dans votre pays d'origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques ainsi que le prévoit l'article 1er, section 1, § 2 de la Convention de Genève ainsi que les articles 31 et 32 de la loi modifiée du 5 mai 2006. En effet, votre agression de mars 2007 est certes condamnable, mais elle n'est pas d'une gravité telle pour fonder à elle seule une demande en obtention d'une protection internationale et doit être davantage considérée comme une infraction de droit commun qu'un acte de persécution. A cela s'ajoute que des albanais masqués non autrement identifiés ne sauraient être considérés comme agents de persécutions. En application de l'article 28 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection au cas de l'espèce, il ne ressort pas du rapport d'entretien que l'Etat ou d'autres organisations gouvernementales présentes sur le territoire de votre pays ne peuvent ou ne veulent pas vous accorder une protection. Les menaces et insultes ne sont également pas d'une gravité telle pour fonder davantage une demande en obtention d'une protection internationale.

Vous dites ne pas vous sentir en sécurité au Kosovo. Or, il y a lieu de soulever que votre village Pasjane est un village exclusivement composé de serbes faisant partie des 63 villages qui appartiennent à la commune de Gnjilane, enclave serbe. Selon un rapport du UK Home Office du 12 février 2007 « There is sufficiency of protection for Kosovan Serbs within Serb enclaves or when specifically under KFOR protection and UNMIK/KPS/KFOR are able and willing to provide protection for those that fear persecution and ensure that there is a legal mechanism for the detection, prosecution and punishment of persecutory acts ». Enfin, la situation des minorités est devenue plus stable. En règle générale, celles-ci ne doivent plus craindre des attaques directes contre leur sécurité. Plus particulièrement, les serbes commencent à bénéficier de la liberté de mouvement. S'il est vrai que leur situation économique est encore peu favorable dans les villes, ils ont accès à l'enseignement et aux soins de santé. De même, dans le processus actuel de définition du statut futur du Kosovo, les positions radicalement opposées des serbes et albanais sur la question engendrent certes une certaine tension au niveau politique. Cependant, les rapports de l'UNMIK continuent de constater une diminution considérable des crimes susceptibles d'avoir été motivés par des considérations ethniques et une amélioration constante de la situation sécuritaire en général.

Il ressort du Faktendokument du 7 mars 2008 du BAA (Bundesasylamt Republik Osterreich) que « Die Republik Kosovo wird im Verfassungsentwurf als "unabhängiger, souveräner, demokratischer, einheitlicher und unveräuβerlicher Staat aller seiner Bürger" definiert». Par ailleurs, la nouvelle République du Kosovo s'est engagée à respecter et à protéger toutes les minorités vivant sur son territoire. Ainsi, il ressort de ce même document que « Der Kosovo sei eine multiethnische Gesellschaft, die auf demokratische Weise verwaltet werde.

Albanisch und Serbisch seien die Amtssprachen, auf Kommunalebene stünden auch die türkische, bosniakische und die Roma-Sprache entsprechend den gesetzlichen Regelungen im Gebrauch ».

Les droits des requérants continuent donc à être garantis. Selon un document de BBC News du 15 février 2008 « Kosovo's Prime Minister Hashim Thaci has vowed to protect the rights of all minorities as the province prepares to declare independence from Serbia ». A cette même date, selon des informations de CNN « Thaci said he was establishing a new government office for minorities. `Not a single citizen of the new independent Kosovo will feel discriminated against or set aside,' he said ».

En ce qui concerne la situation actuelle au Kosovo, selon le « New Crisis Watch bulletin » du « International Crisis Group » du 1er mars 2008 « Die Situation im Kosovo verbesserte sich zusätzlich, nachdem die am 17.02.08 ausgerufene Unabhängigkeit von weit verbreiteten Feiern und meist friedlich verlaufenden Protesten in den serbischen Enklaven begleitet war ». De même, il ressort du « volet sécurité » du Faktendokument du 7 mars 2008 du BAA que :

« Derzeit haben die Ordnungskräfte die Lage weitgehend unter Kontrolle. Insbesondere im Südkosovo (Region südlich des Flusses IBAR) hat sich die Lage seit der Unabhängigkeitserklärung nicht wesentlich geändert. Die Sicherheitslage in den albanisch dominierten Gebieten kann als normal bezeichnet werden. (VB Pristina, Lagebild Kosovo, 05.03.2008) Die Demonstration 1244 der Serben in Nordmitrovica findet weiterhin statt, ebenso Demonstrationen gegen die Unabhängigkeit in den serbischen Enklaven, bisher allerdings ohne relevante Vorfälle. (VB Pristina, Lagebild Kosovo, 05.03.2008) Die serbischen Polizisten, die in den vergangenen Tagen angeblich aus Protest gegen die Unabhängigkeit des Kosovo ihren Dienst in der kosovarischen Polizei verweigert haben, sollen dies unter Druck getan haben. Dies ergibt sich aus einem Schreiben des Kommandanten der kosovarischen Polizeikräfte, Larry Wilson, und seines Stellvertreter Sheremet Ahmeti an die serbischen Polizisten. Wilson und Ahmeti fordern die rund 300 Beamten auf, ihren Dienst wieder aufzunehmen. (derStandard.at, Kosovo-Polizei: serbische Beamte quittierten Dienst "unter Druck", 06.03.2008) An den verschiedenen Gates an der Grenze Kosovo Serbien kommt es derzeit zu keinen Behinderungen. Der Personen- und Warenverkehr ist ohne Behinderung möglich. (VB Pristina, Lagebild Kosovo, 05.03.2008). » Selon un article paru dans The Guardian le 20 mars 2008 « One month after Kosovo declared independence, the sky has not fallen. As countries have one by one recognised the new state, the predictions of apocalypse have come to naught. Despite the violence in Mitrovica on March 17, massive displacement and regional instability that many said would occur simply never materialised ». Les débordements du 17 mars 2008 à Mitrovia (sic) sont à attribuer à des manifestants serbes liés à leur refus de reconnaître l'indépendance du Kosovo et dirigés directement contre l'UNMIK. Aucune minorité n'a été cible d'attaques quelconques.

Vos motifs traduisent donc plutôt un sentiment général d'insécurité qu'une crainte de persécution. Or, un sentiment général d'insécurité ne constitue pas une crainte fondée de persécution.

On peut également partir du constat que vous avez déposé votre demande de protection internationale dans le but de régulariser votre situation au Luxembourg étant donné que votre visa avait expiré trois jours avant le dépôt de votre demande et que vous vous trouviez en situation irrégulière sur le territoire luxembourgeois.

Ainsi, vous n'alléguez aucun fait susceptible de fonder raisonnablement une crainte de persécution en raison d'opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l'appartenance à un groupe social, susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays.

Les conditions permettant l'octroi du statut de réfugié ne sont par conséquent pas remplies.

En outre, votre récit ne contient pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 37 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection. En effet, les faits invoqués à l'appui de votre demande ne nous permettent pas d'établir que a) vous craignez de vous voir infliger la peine de mort ou de vous faire exécuter, b) vous risquez de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, c) vous êtes susceptible de faire l'objet de menaces graves et individuelles contre votre vie en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

En effet, vous ne faites pas état d'un jugement ou d'un risque de jugement vous condamnant à la peine de mort. Par ailleurs, la Serbie dont émane le Kosovo a aboli la peine capitale pour tous les délits en date du 26 février 2002. Vous ne faites également pas état de risque réel de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants ou de risques réels émanant d'une violence aveugle résultant d'un conflit armé interne ou international. La situation actuelle au Kosovo ne saurait être considérée comme conflit armé interne ou international.

Votre demande en obtention d'une protection internationale est dès lors refusée comme non fondée au sens de l'article 19§1 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection.

La présente décision vaut ordre de quitter le territoire (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 6 octobre 2008, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision précitée du ministre du 5 septembre 2008, par laquelle il s’est vu refuser la reconnaissance d’un statut de protection internationale, et un recours tendant à l’annulation de la décision du même jour, incluse dans le même document, portant à son égard l’ordre de quitter le territoire.

1. Quant au recours tendant à la réformation de la décision de refus d’une protection internationale Etant donné que l’article 19 (3) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en réformation en matière de demandes de protection internationale déclarées non fondées, un recours en réformation a valablement pu être dirigé contre la décision ministérielle déférée, lequel recours est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur expose qu’il aurait, à plusieurs fois, été agressé personnellement par des groupes de personnes appartenant à la population d’origine albanaise, en raison de son appartenance à la minorité serbe au Kosovo. Il fait état d’une certaine haine parmi la population d’origine albanaise à l’égard des ressortissants de l’ancien occupant serbe. En s’appuyant sur des certificats versés aux débats, le demandeur soutient qu’il aurait été frappé avec une tige en métal pendant qu’il aurait été sur le chemin de retour vers son village avec des amis.

Il invoque encore d’autres agressions à son égard. Il explique qu’au moment de la déclaration d’indépendance du Kosovo, il aurait séjourné au Luxembourg sous le couvert d’un visa « visiteur ». En voyant dans les médias les manifestations de personnes d’origine albanaise à cette occasion, il aurait perdu toute confiance en son pays d’origine. A cet égard, il fait valoir que l’Etat serbe ne pourrait plus protéger ses ressortissants sur le territoire du Kosovo.

Il relève encore que son village d’origine se situerait dans une enclave serbe au Sud du pays, entouré de populations d’origine albanaise. Il explique que cette situation serait plus difficile à vivre que celle des Serbes du Nord du Kosovo dont le territoire serait peuplé quasi exclusivement par des Serbes, et qui avoisinerait de plus celui de la Serbie. Il conclut que sa crainte aurait été renforcée par la nouvelle donne géopolitique dans sa région d’origine.

Il soutient que les Serbes n’oseraient plus quitter leurs villages, étant donné qu’ils seraient constamment agressés par la population albanaise. Sa région connaîtrait une réelle exode de la population serbe, ce qui affaiblirait encore davantage l’influence serbe et la sécurité de ces derniers dans cette région.

Il fait encore valoir qu’une dizaine de familles serbes de sa région d’origine se seraient vu accorder le statut de réfugié au Luxembourg au cours des derniers mois.

Il renvoie finalement à un article publié dans le journal « Le monde diplomatique » qui soulignerait les problèmes interethniques actuels au Kosovo. Il soutient que l’Etat du Kosovo ainsi que les institutions internationales ne seraient pas à mêmes de garantir la sécurité des populations minoritaires au Kosovo. Il fait valoir que cette défaillance équivaudrait à une tolérance des exactions commises par la population albanaise.

Quant à la protection subsidiaire, le demandeur fait valoir que la situation au Kosovo ne serait pas stabilisée et qu’il existerait un grand risque pour lui de retourner dans un pays dans lequel il serait exposé à des menaces graves et individuelles contre sa vie en raison d’une violence aveugle.

Il expose que des policiers serbes auraient refusé de travailler dans le corps de police du Kosovo, pour en conclure que les victimes serbes n’auraient plus aucun soutien, ni confiance dans les services de l’ordre. Le fait de déposer une plainte auprès de la police risquerait d’entraîner des représailles supplémentaires pour les victimes. Il en conclut que sa vie serait sérieusement en danger dans son pays d’origine.

Le délégué du gouvernement relève, dans son mémoire en réponse, que le demandeur, qui fait état d’une agression par une bande d’Albanais masqués en mars 2007 et argumente que sa vie serait en danger au Kosovo, aurait quitté le Kosovo muni d’un visa hongrois, valable jusqu’au 6 février 2008 (sic !). Il relève encore que le demandeur aurait déposé sa demande de protection internationale trois jours après l’expiration de ce visa.

Le délégué du gouvernement fait valoir, en citant une jurisprudence de la Cour administrative, que la situation générale du pays d’origine ne saurait suffire, à elle seule, pour emporter la reconnaissance du statut de réfugié. Il soutient que le village de Pasjane, commune de Gnjilane, serait un village exclusivement composé de Serbes et ferait partie des 63 villages qui appartiendraient à la commune de Gnjilane. Il renvoie à ce titre à un rapport du UK Home Office du 12 février 2007, duquel il ressortirait qu’il y aurait suffisamment de protection pour les Serbes du Kosovo à l’intérieur des enclaves serbes. Même si la municipalité de Gnjilane serait majoritairement composée d’Albanais, le délégué du gouvernement soutient que le village d’origine du demandeur, à savoir Pasjane, serait composé uniquement de Serbes, et devrait de ce fait être considéré comme une enclave serbe. Il renvoie encore à un rapport de l’OSCE sur Gnjilane, qui décrirait la situation des institutions et infrastructures de cette municipalité et qui laisserait apparaître une représentation importante des membres de la minorité serbe auprès de la police, des infrastructures judiciaires, sociales et sanitaires. Ce rapport prouverait les efforts de la municipalité de Gnjilane pour rendre toutes les infrastructures accessibles aux Serbes et pour ne pas les discriminer. Le délégué du gouvernement fait encore état d’un jugement du tribunal administratif du 20 juin 2007 qui aurait considéré Gnjilane comme une région où les Serbes disposent de la liberté de circulation et où ils auraient accès à l’enseignement et aux soins de santé. Tout en admettant que dans la dernière version actualisée du rapport UNHCR de juin 2006 sur la protection et le rapatriement de personnes du Kosovo, l’UNHCR continuerait à considérer les membres de la minorité serbe du Kosovo comme constituant un groupe exposé à un risque sérieux de persécution, la situation ne serait pas telle que tout membre de cette minorité serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la Convention de Genève et de la loi du 5 mai 2006. Il renvoie ensuite à un jugement du tribunal administratif du 27 août 2008 qui aurait analysé la situation de la minorité serbe au Kosovo et plus particulièrement ferait référence à la municipalité de Gnjilane. Le représentant étatique invoque finalement un jugement du tribunal administratif du 22 octobre 2007 qui aurait retenu que des menaces par téléphone et des insultes ne revêtiraient pas un degré de gravité telle que la vie des demandeurs aurait de ce fait été rendue intolérable dans leur pays d’origine.

Le représentant étatique souligne que l’agression de mars 2007, invoquée par le demandeur, ne serait pas d’une gravité telle pour fonder à elle seule une demande de protection internationale. Les auteurs de ces menaces ne sauraient, d’après le délégué du gouvernement, être considérés comme des agents de persécution au sens de la Convention de Genève et de l’article 28 de la loi du 5 mai 2006, d’autant plus qu’il ne ressortirait pas du dossier que les autorités compétentes auraient refusé ou seraient dans l’incapacité de fournir une protection quelconque au demandeur. A cet égard, il fait valoir que la notion de protection de la part du pays d’origine n’impliquerait pas une sécurité physique absolue, mais supposerait des démarches de la part des autorités en place en vue de la poursuite et de la répression des actes de violence commis, d’une efficacité suffisante pour maintenir un certain degré de dissuasion. Une persécution ne saurait être admise dès la commission matérielle d’un acte criminel, mais seulement dans l’hypothèse où les agressions commises par un groupe de population seraient encouragées par les autorités en place, voire où celles-ci seraient incapables d’offrir une protection appropriée. Le représentant étatique estime qu’en l’espèce, le demandeur n’aurait soumis aucun indice concret relativement à l’incapacité actuelle des autorités compétentes à lui fournir une protection adéquate. Le délégué du gouvernement cite encore un jugement du tribunal administratif du 20 juin 2007 qui a analysé la question d’agressions provenant de personnes d’origine albanaise. Le délégué du gouvernement conclut que ce serait à juste titre que le ministre a relevé que le demandeur éprouverait plutôt un sentiment général d’insécurité et non pas une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève.

Le délégué du gouvernement souligne ensuite que le récit du demandeur ne contiendrait pas non plus de motif sérieux et avéré permettant de croire qu’il courrait un risque réel de subir des atteintes graves définies à l’article 37 de la loi du 5 mai 2006. Un sentiment général d’insécurité ne justifierait pas la reconnaissance du statut conféré par la protection subsidiaire, étant entendu que le demandeur n’établirait pas qu’il doit craindre de se voir infliger la peine de mort ou de se faire exécuter, ou qu’il risque de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, ni encore qu’il serait susceptible de faire l’objet de menaces graves et individuelles contre sa vie en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. Le ministre aurait dès lors fait une saine appréciation de la situation du demandeur.

Aux termes de l’article 2 a) de la loi du 5 mai 2006, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.

La notion de « réfugié » est définie par l’article 2 c) de ladite loi comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner (…) ».

Le tribunal, statuant en tant que juge du fond en matière de demande d'asile, doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur d'asile, tout en prenant en considération la situation, telle qu’elle se présente à l’heure actuelle dans le pays de provenance du demandeur d’asile. Cet examen ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur.

En l’espèce, le demandeur fait état de craintes de persécutions émanant de personnes d’origine albanaise, en raison de son appartenance à la minorité serbe au Kosovo.

Il échet de prime abord de constater que le fait d’appartenir à une minorité ethnique ne suffit pas à lui seul pour établir à suffisance de droit une crainte de persécution personnelle. A l’appui de sa décision, le ministre cite un certain nombre de rapports émis plus particulièrement en 2008, desquels il a conclu que la situation des minorités au Kosovo est devenue plus stable et que plus particulièrement suite à la déclaration d'indépendance du Kosovo, les autorités font des efforts pour garantir suffisamment de protection aux minorités. Le tribunal est amené à constater que le demandeur, à qui il incombe d’établir que les conditions d’obtention du statut de réfugié sont données dans son chef, n’a pas apporté des éléments de preuve de nature à énerver les conclusions du ministre. Le constat du ministre quant à la situation sécuritaire au Kosovo ne saurait être infirmé par l’extrait du journal « Le Monde diplomatique » de mars 2007, seul élément de preuve versé par le demandeur pour étayer la situation sécuritaire au Kosovo. En effet, dans le cadre d’un recours en réformation, dont le tribunal est saisi en l’espèce, la situation doit être appréciée à l’heure actuelle, de sorte que le tribunal ne saurait se baser sur un article de presse remontant à mars 2007. Le demandeur reste dès lors en défaut de fournir des éléments de preuve établissant que la situation actuelle au Kosovo serait telle que tout membre de cette minorité serait de ce seul fait exposé à des persécutions au sens de la loi du 5 mai 2006. Dans ce contexte, il y a également lieu d’avoir égard au rapport de l’OSCE d’avril 2008 versé par le délégué du gouvernement, duquel il ressort certes que la commune de Gnjilane est majoritairement composée de personnes d’origine albanaise, mais qui établit une certaine représentation de la minorité serbe dans les institutions judiciaires et policières. Les parties s’accordent encore pour dire (même si elles en tirent des conclusions différentes) que le village d’origine du demandeur, à savoir Pasjane, est essentiellement peuplé de personnes d’origine serbe. La simple allégation du demandeur, d’ailleurs non autrement établie, que d’autres personnes d’origine serbe se seraient vu accorder le statut de réfugié, n’est pas de nature à entraîner de ce fait la reconnaissance de ce statut au demandeur, alors que chaque demande de protection internationale doit être examinée individuellement.

En ce qui concerne la situation particulière du demandeur, il ressort de ses déclarations, telles qu’actées au rapport d’audition, qu’il fonde sa crainte, à part un sentiment général d’insécurité, et à part des agressions sur lesquelles le demandeur est resté très vague, essentiellement sur un incident, qui aurait eu lieu en mars 2007. Or, outre le fait qu’il n’est pas établi que cet événement doit être vu devant un arrière-fond raciste ou ethnique au sens de l’article 2 c) de la loi du 5 mai 2006, étant entendu que le demandeur n’a pas pu identifier les auteurs, et qu’il est tout à fait possible qu’il s’agisse d’un délit de droit commun, qui n’ouvre pas un droit à une protection dans le cadre de la loi du 5 mai 2006, force est au tribunal de constater qu’il ressort de l’audition du demandeur que, suite à cet événement, il n’a plus fait l’objet d’agressions, à part quelques menaces isolées lancées de personnes passant en voiture (cf. page 7/10 du rapport d’audition). De même, le tribunal est amené à constater que cet événement, qui est évidemment condamnable, ensemble avec les autres faits dont se prévaut le demandeur, à supposer qu’ils soient établis, n’est pas d’une gravité telle que le demandeur puisse justifier, à raison, des craintes de persécution. Il ressort encore du rapport d’audition que suite à cet événement de mars 2007, le demandeur a passé deux mois en été 2007 chez son frère au Luxembourg, sans songer à déposer une demande d’asile, et que, par ailleurs, ledit frère vient régulièrement visiter le demandeur au Kosovo, ce qui contredit la thèse du demandeur suivant lequel sa vie serait en danger au Kosovo, ou du moins qu’elle y soit intolérable. La circonstance que le demandeur n’a pas déposé immédiatement à son arrivée au Luxembourg début 2008 une demande d’asile, mais a attendu l’expiration de son visa, après avoir habité chez son frère, avant de déposer une telle demande, met pareillement en doute l’imminence et le sérieux des craintes invoquées par le demandeur.

Le tribunal est partant amené à conclure que les craintes éprouvées par le demandeur en raison de son origine ethnique et de la situation sécuritaire prévalant au Kosovo constituent en substance l’expression d’un sentiment général d’insécurité, et que cette crainte de persécution invoquée ne repose pas sur des éléments actuels et suffisants desquels il se dégage que, considéré individuellement et concrètement, il risque de subir des persécutions en cas de retour dans son pays d’origine.

Compte tenu de ce constat, il devient sans pertinence d’examiner la question de savoir si les autorités au Kosovo sont disposées, respectivement à même d’offrir une protection suffisante au demandeur, au regard des dispositions de l’article28 de la loi du 5 mai 2006.

Il suit dès lors de l’examen des faits et motifs invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande de protection internationale lors de ses auditions, ainsi qu’au cours de la procédure contentieuse, que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, ainsi que le prévoit l’article 2 c) de la loi du 5 mai 2006.

Quant au volet de la décision litigieuse portant refus dans le chef du demandeur d’un statut de protection subsidiaire, il échet tout d’abord de rappeler qu’aux termes de l’article 2 e) de la loi du 5 mai 2006, est une «personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire », « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37, l’article 39, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ».

L’article 37 de la même loi énumère, en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution ; la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine ; des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

Force est au tribunal de constater que le demandeur renvoie en substance à la situation générale au Kosovo, qui serait telle que sa vie y serait en danger.

Or, le tribunal vient de constater que la situation au Kosovo n’est pas telle que la vie du demandeur soit en danger ou que sa vie y soit intolérable.

Au-delà d’explications d’ordre général quant à la situation au Kosovo, le demandeur reste en défaut de fournir au tribunal des éléments suffisamment concrets, de nature à établir l’existence d’un risque réel dans son chef de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 de la loi du 5 mai 2006, en cas de retour dans son pays d’origine. D’ailleurs, et à titre superfétatoire, il convient de relever que le tribunal vient de retenir que les faits invoqués par le demandeur ne sont pas, même considérés dans leur globalité, d’une gravité telle que sa vie lui serait rendue intolérable en cas de retour dans son pays d’origine.

Au vu de cette conclusion et en l’absence d’autres éléments, c’est à juste titre que le ministre a retenu que le demandeur n’a pas fait état de motifs sérieux et avérés permettant de croire qu’il courrait le risque de subir des atteintes graves au sens de l’article 37 de la loi du 5 mai 2006 et qu’il lui a partant refusé l’octroi d’une protection subsidiaire au sens de l’article 2 e) de ladite loi.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le ministre a, au terme de l’analyse de la situation du demandeur, déclaré la demande de protection internationale sous analyse comme non justifiée. Le recours en réformation est partant à rejeter comme étant non fondé.

2. Quant au recours tendant à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire Etant donné que l’article 19 (3) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre l’ordre de quitter le territoire contenu dans une décision statuant sur une demande de protection internationale, le recours en annulation introduit contre pareil ordre contenu dans la décision déférée du 5 septembre 2008 est recevable pour avoir été par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi.

Aux termes de l’article 19 (1) de la loi du 5 mai 2006, une décision négative du ministre en matière de protection internationale vaut ordre de quitter le territoire en conformité avec les dispositions de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ;

2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, cette loi, entretemps abrogée, ayant été applicable au jour de la prise de la décision litigieuse et elle est partant applicable à la présente instance.

Dans le cadre de son recours en annulation, le demandeur se prévaut en ordre principal du caractère injustifié du refus de la protection internationale, pour conclure à une erreur manifeste d’appréciation dans le chef du ministre. Or, dans la mesure où le tribunal vient de retenir que le recours en réformation est non fondé, le moyen invoqué en ordre principal à l’appui du recours contre l’ordre de quitter laisse d’être fondé.

En ordre subsidiaire, le demandeur fait valoir que l’ordre de quitter serait à annuler pour cause de rupture du principe d’égalité des citoyens devant la loi, au motif que les personnes appartenant à la minorité serbe du Kosovo se verraient accorder une tolérance provisoire puisque leur retour au Kosovo ne pourrait pas être considéré comme sûr.

Notons de prime abord que l’ordre de quitter le territoire ne constitue que la conséquence automatique et légale d’une décision de refus de la protection internationale (Cour adm. 11 novembre 2008, n° 24609 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu).

La circonstance, d’ailleurs non établie en l’espèce, que des personnes d’origine serbe se verraient accorder un statut de tolérance au sens de l’article 22 de la loi du 5 mai 2006, n’est pas de nature à mettre en cause la légalité de l’ordre de quitter le territoire, alors que la possibilité pour le ministre d’accorder le statut de tolérance vise justement les demandeurs d’asile définitivement déboutés, et qui donc par l’effet de la loi ont fait l’objet d’un ordre de quitter le territoire et qui, à défaut de se voir accorder un statut de tolérance, seront éloignés du territoire conformément à l’article 22 (1) de la loi du 5 mai 2006.

A défaut par le demandeur d’invoquer un moyen quant à la légalité intrinsèque de l’ordre de quitter le territoire, compte tenu des moyens figurant dans la requête introductive d’instance, le tribunal ne saurait mettre en cause la légalité de la décision déférée. Il s’ensuit que le recours en annulation est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 5 septembre 2008 portant refus d’une protection internationale ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

reçoit en la forme le recours en annulation introduit contre l’ordre de quitter le territoire contenu dans la même décision ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Martine Gillardin, premier juge, Annick Braun, juge, et lu à l’audience publique du 19 février 2009 par le premier vice-président, en présence du greffier Claude Legille.

Claude Legille Carlo Schockweiler 12


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 24884
Date de la décision : 19/02/2009

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2009-02-19;24884 ?

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