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09/02/2009 | LUXEMBOURG | N°24593

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 février 2009, 24593


Tribunal administratif N° 24593 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 juillet 2008 2e chambre Audience publique du 9 février 2009 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24593 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 juillet 2008 par Maître Aurore Gigot, avocat à la Cour, inscrite au tableau

de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Guneku (Cameroun), de n...

Tribunal administratif N° 24593 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 juillet 2008 2e chambre Audience publique du 9 février 2009 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24593 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 juillet 2008 par Maître Aurore Gigot, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Guneku (Cameroun), de nationalité camerounaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration du 9 juin 2008 ayant rejeté sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et lui ayant refusé le bénéfice de la protection subsidiaire ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 18 septembre 2008 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Aurore Gigot et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline Guillou-Jacques en leurs plaidoiries respectives.

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Le 17 février 2003, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Monsieur … fut entendu en date des 13 juin, 3 juillet et 18 juillet 2003 par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 9 juin 2008, notifiée par remise en mains propres le 10 juin 2008, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, dénommé ci-après « le ministre », informa l’intéressé que sa demande en obtention du statut de réfugié avait été rejetée comme non fondée et que le bénéfice de la protection subsidiaire lui était refusé. Cette décision est libellée comme suit :

« J'ai l'honneur de me référer à votre demande en obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 que vous avez présentée auprès du service compétent du Ministère de la Justice en date du 17 février 2003.

En mains le rapport le rapport (sic !) d'audition de l'agent du Ministère de la Justice du 13 juin 2003.

Il résulte de vos déclarations que vous seriez originaire de Guneku, Momo Division, se situant dans la province du nord-ouest du Cameroun. Jusqu'en 2001 vous auriez vécu dans votre maison parentale et après que votre père, selon vos suppositions, aurait été assassiné par le Gouvernement camerounais, vous auriez déménagé dans sa maison. Il résulte de vos propos que votre père aurait été un membre du Southern Cameroon National Council (S.C.N.C.) et que le chef de votre village, Chief Fomuki Patrick Nji, aurait révélé des informations sur votre père au Gouvernement camerounais. Selon vos dires, votre père aurait eu des problèmes en raison de cette adhésion et il aurait été emprisonné à plusieurs reprises par la gendarmerie. Vous précisez que des fois il aurait été emprisonné au poste de la gendarmerie de Mbengui et une fois il aurait été emprisonné à la prison de Bamenda. Cependant, vous ignorez quand et pour combien de temps votre père aurait été détenu.

Vous indiquez que pendant la nuit du 3 décembre 2001, cinq personnes masquées seraient entrées dans votre maison et auraient fusillé votre père. Vous précisez que deux personnes masquées auraient bloqué votre chambre et celle de votre frère et les trois autres masqués auraient été dans la chambre de vos parents. Vous auriez appelé la gendarmerie le lendemain, laquelle serait venue pour prendre des photos du lieu du crime. Selon vos dires, vous supposeriez que le Gouvernement serait responsable de cet attentat et que l'assassinat de votre père serait lié à son poste de secrétaire de votre village du S.C.N.C..

Selon vos déclarations, vous aussi auriez été membre du S.C.N.C. depuis l'année 2000 et vous précisez que vous auriez été le coordinateur des jeunes entre 2002 et 2003. Vous auriez organisé des réunions et « enseigné » aux jeunes et vous auriez organisé des manifestations pour le mouvement. Dans ce contexte vous auriez été arrêté par la gendarmerie à quatre reprises, à savoir entre le 12 février 2002 et le 28 mars 2002, entre le 22 mai et le 14 juillet 2002, entre le 2 octobre 2002 et le 14 décembre 2002 et entre le 26 décembre 2002 et le 18 janvier 2003.

Vous ajoutez que vous auriez également été un Human-Right-Member et que le président de cette Organisation des Droits de l'Homme vous aurait fait libérer une fois quand la gendarmerie vous aurait arrêté pour avoir organisé des manifestations illégales, ce qui ne correspondrait pas à la réalité, selon vos propres dires. La gendarmerie n'aurait pas eu de raisons pour vous emprisonner et ainsi le président des Droits de l'Homme aurait pu vous faire sortir de la cellule de la gendarmerie de Mbengui. Vous racontez que la gendarmerie vous aurait arrêté tant de fois, comme elle n'aurait pas voulu que vous organiseriez des manifestations. Vous expliquez que les anglophones du Cameroun voudraient être indépendants et qu'ils voudraient «retourner » au fédéralisme. Vous déclarez que le commandant de la gendarmerie vous aurait demandé de lui fournir des informations à propos du chef, des membres et des actions du S.C.N.C., ce qui (sic) vous auriez fait, comme il vous aurait garanti qu'ainsi vous ne seriez pas transféré à la prison de Kondengui. Ainsi, tous les lundis et vendredis vous l'auriez vu pour lui donner les informations souhaitées. Cependant, vous auriez été au courant de diverses informations lesquelles vous n'auriez pas voulu révéler ce que le commandant de la gendarmerie aurait su. Ainsi il aurait pris la décision de vous emprisonner à Kondengui.

Un jour, vous ignorez la date exacte, vous auriez été arrêté. Après un certain temps, en date du 18 janvier 2003, vous auriez dû être transféré au prison (sic), mais en cours de route, une foule de gens aurait arrêté le convoi et vous auriez pu vous échapper avec quatre autres personnes. Vous expliquez que des membres du S.C.N.C. vous auraient rendu visite à plusieurs reprises à la cellule et ils vous auraient déjà prévenu que vous seriez transféré à Kondengui et ils vous auraient promis d'organiser une manifestation, afin de pouvoir arrêter le convoi en cours de route vers le prison(sic). Selon vos dires, après votre fuite, vous vous seriez caché pendant trois jours et nuits dans la brousse de Mbengui. Vous dites que des amis, ainsi que votre mère, auraient été au courant de votre cachette. Vote mère aurait organisé votre fuite et avec l'aide de votre oncle, policier de profession, vous auriez pu vous enfuir à Douala. Ici, vous auriez vécu chez un ami, cependant vous ignorez pour quelle durée. Vous dites que vous n'auriez pas contacté votre ami que vous viendriez (sic), cependant, lors de votre arrivée, ce dernier aurait été au courant de tous ce qui se serait passé dans votre village natal. Vous expliquez que vous n'auriez pas pu rester à Douala, comme vous seriez recherché dans tout le pays. Vous ajoutez que votre oncle vous aurait prévenu que votre photo aurait été publiée dans tout le pays et que vous ne seriez plus en sécurité au Cameroun. Ainsi, il aurait organisé votre fuite du continent africain. Vous auriez été accompagné par un européen et avec un passeport de couleur rouge, vous auriez passé les contrôles pour prendre l'avion dans une direction inconnue. Pendant le vol, vous auriez bu beaucoup d'alcool, comme vous auriez eu peur et ainsi vous ne pourriez plus vous souvenir des moindres détails. Vous ignorez où vous auriez atterri, cependant vous expliquez que vous n'auriez pas eu de problèmes lors des contrôles à l'aéroport et que 15 minutes après l'atterrissage vous auriez déjà été dans un train en direction du Luxembourg.

Selon vos dires, vous auriez dû quitter votre pays d'origine comme votre vie aurait été en danger. Vous n'auriez plus eu de vie privée comme vous auriez été arrêté et emprisonné à maintes reprises dans une cellule de la gendarmerie de Mbengui. Vous expliquez que si vous seriez resté au Cameroun, la situation serait restée pareille. Vous dites que des adhérents du S.C.N.C. auraient été tués, cependant vous affirmez ne connaître ni les personnes et ni leurs noms.

Il ressort de vos déclarations que vous auriez également été un simple membre du parti Social Democratic Front (SDF) depuis 1993. Cependant, vous admettez n'avoir pas connu des problèmes en raison de cette adhésion.

La reconnaissance du statut de réfugié n'est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d'origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d'asile qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est, telle qu'elle laisse supposer une crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève.

Il y a d'abord lieu de relever que depuis le 18 juin 2004 vous ne vous êtes plus présenté au Service des Réfugiés pour prolonger votre attestation de demandeur d'asile. En outre, vous vous êtes rendu au Royaume-Uni, vous précisez en 2005, où vous auriez vécu depuis lors. Vous y aviez été arrêté pour séjour illégal au mois de mai 2008 et le Luxembourg, compétent pour connaître de votre demande d'asile, a accepté votre transfert au Luxembourg. Le fait de se rendre hors territoire luxembourgeois pendant votre procédure d'asile est contraire à l'article 6 (11) de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection.

Il convient de souligner qu'à défaut de pièces, un demandeur d'asile doit au moins pouvoir présenter un récit crédible et cohérent. Or, il convient de relever que vos déclarations sont de manière générale peu cohérentes, comme vous vous contredisez à maintes reprises, lorsque l'agent du Ministère de la Justice est entré dans les détails de vos déclarations.

Ainsi, en premier lieu, il convient de relever vos déclarations de la fiche de données personnelles. Vous y indiquez de manière manuscrite que vos soeurs et frères se seraient enfuis, tout comme votre femme enceinte. Force est de constater que vous ne mentionnez lors de l'audition auprès du Ministère de la Justice en aucun mot que votre femme serait enceinte et se serait enfuie. Vous déclarez uniquement à la page 2 de l'audition que votre femme vivrait chez ses parents. Il en est de même en ce qui concerne vos frères et soeurs. Vos déclarations faites sur votre fiche de données personnelles sont complètement contradictoires à celles faites lors de l'audition.

Ensuite, quant aux déclarations concernant votre père, vous expliquez que les personnes des provinces françaises, inculpées pour des raisons politiques, seraient transférées à « BMM » et celles des provinces anglophones seraient incarcérées à Kondengui. Par conséquent, il est surprenant que vous déclarez que votre père aurait été emprisonné à Bamenda et que vous dites que vous auriez risqué de vous voir emprisonné à Kondengui. Force est de constater que vos déclarations ne donnent pas de sens. Ensuite, il est assez surprenant que vous n'êtes pas capable de vous souvenir quand et pour quelle durée votre père aurait été détenu à Bamenda et vous ne pouvez même pas donner des indications approximatives quant à ce sujet.

Par la suite, vous racontez que votre père aurait été fusillé par cinq personnes masquées qui seraient entrées dans votre maison pendant la nuit. Vous auriez appelé la police le lendemain, laquelle serait venue pour prendre des photos du lieu du crime. Selon vos dires, vous supposeriez que le Gouvernement serait responsable de cet attentat et que l'assassinat de votre père serait lié à son appartenance au mouvement du S.C.N.C.. De plus, vous indiquez que le chef de votre village, Chief Fomuki Patrick Nji, aurait révélé des informations sur votre père au Gouvernement camerounais.

En premier lieu, force est de constater que vous ne revenez lors de l'audition entière plus jamais à cette dernière déclaration. En deuxième lieu, vous avez dit que votre père aurait été détenu à plusieurs reprises à la gendarmerie de Mbengui et vous dites, sans preuves et sans pouvoir donner des explications, que vous soupçonnez que le Gouvernement serait le responsable. Or, il demeure complètement invraisemblable et illogique que vous auriez appelé la gendarmerie qui serait responsable des arrestations de votre père et responsable en tant qu'organe gouvernemental de la mort de votre père. Pour le surplus, il est encore moins crédible que la gendarmerie serait venue sur les lieux pour mener une enquête, si elle aurait vraiment été responsable de l'assassinat de votre père. Force est de constater que vous avez inventé tout un récit autour des soi-disant activités politiques de votre père et que vous vous perdez dans les détails, ne remarquant pas que vos déclarations ne donnent pas de sens et sont complètement illogiques, sinon erronées.

Ensuite, avant tout autre développement concernant vos déclarations sur votre personne et vos problèmes, il convient de mettre en évidence que pour répondre à quelques questions il vous a fallu beaucoup de temps de réflexion, ou bien vous avez eu besoin de consulter des documents que vous avez porté sur vous, pour être en mesure de répondre aux questions de l'agent du Ministère de la Justice. Ainsi, la personne responsable de l'entretien a constaté que vous aviez inscrit les dates de votre emprisonnement sur une feuille tirée de l'internet, laquelle contenait en outre des informations de BBC NEWS sur l'histoire et la vie politique du Cameroun.

Après que l'agent du Ministère vous a demandé de lui remettre cette feuille, vous n'étiez plus capable de répondre à beaucoup de questions, il vous a fallu réfléchir pendant un certain temps avant de pouvoir répondre aux questions, ou bien il vous a fallu consulter un calendrier pour répondre à certaines questions, concernant des dates-clé de vos déclarations.

En ce qui concerne vos déclarations sur votre adhésion au parti politique SDF, en premier lieu, force est de constater que vous déclarez être membre depuis 1993. Il est assez étonnant que vous auriez déjà adhéré à un parti politique quand vous auriez eu à peine 15 ans.

De plus, vous dites qu'il s'agirait d'une carte de membre annuelle, ce qui est faux. En effet, les cotisations au parti politique sont à payer trimestriellement et non annuellement. A cela s'ajoute que vous déclarez que les cotisations s'élèveraient à 400 francs camerounais par an, ce qui est surprenant, comme sur la carte de membre, laquelle vous a été envoyée du Cameroun après l'audition, est inscrit la somme totale de 20.000 francs camerounais par an. En deuxième lieu, force est de constater que sur la carte d'affiliation est inscrit que vous seriez devenu membre en date du 18 février 1991. Ainsi, vous ne vous êtes pas trompé en quelques jours, mais en deux ans.

De plus, est-il encore plus frappant que vous seriez devenu membre d'un parti politique à l'âge de 13 ans ! Il convient de citer les statuts du parti1 qui prévoient dans l'article 6 (1) que : « Peut être membre du Parti tout(e) Camerounais(e), de toute race, couleur, croyance, religion, de groupe ethnique, lieu de naissance, sexe, statut économique et social qui: A au moins 18 ans et n'est pas membre d'un autre parti politique, ou a préalablement démissionné de cet autre parti dont il était membre. (…) » En outre, il convient de faire remarquer qu'il n'y a pas de tampon officiel du parti sur la carte de membre, ce qui est étonnant. Même si pour le moment il n'existe pas de preuve officielle qu'il s'agit d'un faux document, il convient toutefois de citer le parti lui-même dans sa lettre adressée à l'ambassadeur américain de Yaoundé, qui décrit en détail la carte de membre du parti2. Force est de constater qu'il est indiqué qu'en 1997, la cotisation s'élevait à 300 francs camerounais et il est en outre indiqué que cette somme est insérée par un tampon sur la carte de membre. Or, sur votre soi-disant carte d'affiliation, établei en 1991, figure de manière manuscrite la somme de 5.000 francs camerounais, ce qui est assez étonnant. Il est peu probable que la cotisation, un an après la fondation du mouvement, aurait été de 5.000 francs et 6 ans plus tard, la cotisation mensuelle n'aurait coûté que 300 francs.

1 http://www.sdfparty.org, consulté en date du 5 juin 2008 2 http://www.sdfparty.org, consulté en date du 5 juin 2008 De plus, il convient encore de citer l'Organisation Suisse d'Aide aux Réfugiées (OSAR) dans son rapport du 1er octobre 20073 qui dit : „In Kamerun ist die Fälschung von Dokumenten ein sehr verbreitetes Phänomen, und es existiert ein richtiger Markt für gefälschte Dokumente, welche «doki» genannt werden. (…)" Enfin, il est surprenant qu'une carte de membre, issue il y a plus que 10 ans, donne l'impression qu'elle vient d'être imprimée récemment, comme elle ne montre aucune tâche et aucun pli, en d'autres mots, elle a l'air être toute neuve.

Pour le surplus, lors des questions sur la date de la fondation du parti, vous dites croire que ce serait en 1993 que le parti se serait formé. En premier lieu, il convient de mettre en exergue, que sur la carte de membre laquelle vous avez remis aux autorités luxembourgeoises est inscrit que vous seriez devenu membre en 1991, ce qui serait étrange, comme d'après vos dires le parti n'aurait pas encore existé. Quoi qu'il en soit, il convient de noter que la fondation du parti date du 26 mai 1990, date à laquelle Ni John Fru Ndi a prononcé un discours à l'occasion du lancement du SDF à Bamenda. Enfin, vous n'êtes même pas capable de citer le slogan du parti, à savoir « Pouvoir au Peuple 4».

Quoi qu'il en soit, il convient d'émettre de sérieux doutes quant à votre soi-disant affiliation au parti et quant à l'authenticité de cette soi-disant carte de membre.

Quant à vos déclarations sur votre affiliation au S.C.N.C. et au South Cameroon's Youth Ligue (S.C.Y.L.), vous déclarez que vous seriez membre de ces organisations depuis l'année 2000. Vous dites que cette organisation comptait environ 7.000.000 de membres dans le pays entier, ce qui est remarquable comme la population totale du Cameroun compte environ 17.5 millions d'habitants, dont 20 % d'anglophones, ce qui est égal à environ 3.5 millions habitants.

De plus, vous expliquez que pour devenir membre du S.C.N.C il fallait être : "You need to be popular and courageous. You need to have a facility to speak to a crowd. The members of the S.C.N.C. vote you. You also need to have a certain level of education." Il est assez impressionnant que 20 % de la population camerounaise et donc la totalité des Anglophones du Cameroun sont des personnes éduquées, courageux, populaires et avec une aisance de parler en public. Par conséquent, selon vos dires, tous les anglophones ont étés (sic !) élu au sein du S.C.N.C.. Force est à nouveau de constater que vos déclarations sont tellement superficielles et que vous (sic !) vos indications deviennent complètement contradictoires, aussitôt qu'on vous demande de vous expliquer en détail et d'aller au fond des choses. Toutes vos déclarations sur vos affiliations au S.C.N.C. et au S.C.Y.L. ne sont que des indications vagues, sans importance.

Pour le surplus, vous dites que le S.C.N.C. serait autorisé par l'Etat, ce qui est complètement faux et que vous deviez savoir en tant que soi-disant membre actif et persécuté de cette organisation. En effet, le S.C.N.C. a été interdit en mai 2001 suite à l'auto-proclamation de la «République du Cameroun Méridional5 ».

Vous expliquez par la suite que vous auriez été un membre actif du S.C.N.C., en disant 3 www.osar.ch 4 http://www.sdfparty.org, consulté en date du 5 juin 2008 5 www.commission-refugies.fr IMG/pdf Cameroun_internet.pdf : consulté en date du 5 juin 2008 que vos tâches auraient été d'organiser des manifestations publiques, « éduquer la population », « sponsoriser » des T-shirts et des drapeaux pour le S.C.N.C. et vous précisez que vous auriez été le coordinateur des jeunes entre 2002 et 2003. A nouveau, il convient de remarquer que vos réponses sur les questions assez détaillées de l'agent du Ministère de la Justice restent assez vagues et vous n'êtes pas capable de démontrer que vous auriez vraiment été un membre actif de l'organisation en question. Cependant, vous devenez assez précis quant aux multiples détentions dans une cellule de la gendarmerie de Mbengui. Ainsi, vous énumérez, à l'aide de vos aide-

mémoires manuscrites que vous aviez apportées à l'audition, en détail les dates auxquelles vous auriez été détenu à Mbengui. Vous ne pouvez par ailleurs pas donner des raisons précises pourquoi la gendarmerie vous aurait détenu. Quant à votre dernière arrestation, vous dites d'abord que la gendarmerie vous aurait arrêté en date du 26 décembre 2002 au 18 janvier 2003, pour dire par après que vous auriez été arrêté en date du 18 janvier 2003 pour être transféré à Kondengui et pour le surplus vous déclarez également que vous auriez été arrêté environ une semaine avant qu'on aurait eu l'intention de vous transférer à la prison de Kondengui. Force est de constater qu'à nouveau vous vous perdez dans les détails.

Ainsi, il convient également de relever qu’il ne ressort pas très clairement de vos déclarations confuses si vous auriez fourni des informations au commandant de la gendarmerie à propos les actions du S.C.N.C. ou non.

Ensuite, vous dites que lors d'une de ces nombreuses détentions, le Président de la "Human Right Organization of the North-west province" vous aurait fait libérer comme il "didn't find anything against me in the charge so he asked to let me free". En premier lieu, force est de constater que vous avez du mal à vous souvenir du nom de ce président, ce qui est étonnant comme il vous a libéré et en deuxième lieu, il est curieux qu'un président pouvait entrer tout simplement au poste de la gendarmerie et demander la libération d'un prisonnier, sans que les autorités gouvernementales ne s'opposeraient à ce souhait.

Sans revenir aux contradictions concernant votre dernière arrestation, il convient de relever que la description de votre fuite est peu convaincante. Vous dites que lors de votre arrestation, non seulement votre mère, mais aussi d'autres partisans du S.C.N.C. auraient pu vous rendre visite, ce qui semble difficilement concevable. Ainsi, vos camarades vous auraient confié que vous seriez transféré à la prison de Kondengui, mais qu'ils vous libéreront sur le chemin entre le poste de la gendarmerie et la prison. Vous dites qu'ils auraient organisé une manifestation et auraient ainsi bloqué la route au convoi de la gendarmerie. La foule aurait jeté des pierres sur les gendarmes et ces derniers auraient alors pris la fuite. Vous vous seriez caché pendant quelques jours dans la brousse, toujours à Mbengui, pour attendre que votre fuite à Kumba serait organisée. A Kumba, votre oncle, un policier, vous aurait attendu et il vous aurait aidé de continuer votre fuite jusqu'à Douala. Il convient de mettre en évidence que vos déclarations sur votre fuite sont peu convaincantes et pour le surplus, il est difficilement concevable que votre oncle, en tant que policier de profession, vous aurait aidé à fuir. De plus, il est surprenant que vous n'auriez jamais demandé l'aide de votre oncle lors de vos innombrables arrestations. Vous continuez votre récit en disant que vous auriez séjourné pendant un certain temps chez un ami à Douala, cependant vous dites ne plus vous souvenir pour quelle durée, ce qui semble peu crédible.

Pour le surplus vous dites que votre oncle à Kumba et votre ami à Douala auraient été au courant de votre fuite, comme vous seriez recherché dans tout le pays. Force est de constater qu'il est complètement invraisemblable que tout le pays, et donc 17.5 millions d'habitants, aurait été au courant de votre fuite et connaîtrait votre photo, comme vous l'avez expliqué à l'agent du Ministère de la Justice.

Quant à vos déclarations de la fuite du continent africain, il convient de souligner que vos indications sur votre voyage du Cameroun au Luxembourg sont difficilement concevables. Ainsi, vous prétendez de ne plus pouvoir vous souvenir des moindres détails quant au lieu d'atterrissage, comme vous auriez été ivre, ce qui est peu crédible. De plus, vous dites que 15 minutes après avoir atterri, vous auriez déjà été dans un train en direction du Luxembourg.

Force est de constater que cette déclaration demeure complètement invraisemblable, comme le trajet entre l'avion, les contrôles, les bagages et la gare ferroviaire prend certainement plus de temps que 15 minutes.

Par la suite, il convient de relever que vous avez remis aux autorités luxembourgeoises non seulement votre soi-disant carte de membre du parti SDF, mais aussi beaucoup d'autres documents, qui vous ont été envoyés du Cameroun. En premier lieu, il convient de rappeler que vous avez déclaré à la page 17 de l'audition qu'il serait impossible d'avoir envoyé notamment votre passeport, comme "Before any letter leaves the country it is checked. When they see a passport, they are not going to let it through. Maybe I can get my birth certificate. I try to get something here." Il est assez étonnant que vous dites que votre passeport ne pouvait pas être envoyé, cependant, vous êtes capable de vous faire envoyer une convocation, une carte de membre du parti politique SDF, une carte de membre de la « Human Rights Defence Group », une copie illisible d'une ancienne carte d'identité camerounaise, un témoignage du « High Court of Mesam Division », un acte de naissance, un témoignage du mouvement S.C.N.C., défendue par l'Etat et beaucoup d'autres documents moins relevants. Il est assez surprenant que les autorités camerounaises n'auraient pas retenu une lettre contenant un acte de naissance et des papiers d'un parti en opposition. De plus, il est encore moins crédible que l'Etat camerounais n'aurait pas retenu des documents d'une organisation, laquelle fut défendue il y a quelques années. A nouveau, il convient de mettre en évidence que vos déclarations sont assez contradictoires et qu'elles ne donnent aucun sens.

Quant à votre carte d'affiliation du « Human Rights Defence Group » :

Tout d'abord il convient de rappeler que vous avez déclaré qu'un « Président d'une Organisation des Droits de l'Homme » vous aurait fait libérer de la cellule de la gendarmerie, sans que vous étiez capable de donner le nom exact de cette organisation et quand l'agent vous avait redemandé sur l'identité de cette personne, il vous a fallu longtemps pour vous souvenir de son nom, lequel vous n'aviez même pas cité de manière exacte. Cependant, une carte de membre du Human Rights Defence Group vous a été envoyée, sur laquelle figure de manière manuscrite votre nom et une photo de votre personne qui est beaucoup trop petite pour l'encadrement prévu sur la carte et en plus la carte a été mal coupée. Force est de constater qu'il s'agit d'un document recto-verso, lequel peut être fait sur tout ordinateur ordinaire. Mais, le plus frappant est que vous n'avez jamais parlé de vos activités au sein de cette organisation non-gouvernementale et pour le surplus, vous avez uniquement mentionné que vous auriez été un « Human-Right Member » et vous n'étiez pas capable de citer cette organisation par son nom exact. Pour le surplus, le directeur Albert Mukong, et non le président Abel Mukong comme vous l'appelez, a été détenu sans inculpation au poste de gendarmerie de Mamfe dans la province du Sud-ouest.

Force est de constater que vous n'êtes absolument pas au courant sur la personne d'Albert Mukong et en plus, ce dernier travaillait dans la province du Sud-ouest et non dans la province du Nord-ouest, d'où vous dites être originaire. Ainsi, il convient de faire remarquer qu'il existe de sérieux doutes quant à l'authenticité de la carte de membre, mais il est aussi peu crédible que vous auriez été membre du « Human Rights Defence Group », d'autant plus que la carte a été délivrée en date du 5 janvier 2002, date à laquelle vous dites avoir été détenu dans une cellule de la gendarmerie.

Quant au témoignage « Human Rights Defence Group » :

Force est de constater en premier lieu que votre date de naissance est fausse et que de manière manuscrite il a été écrit prés (sic !) de la fausse année « Error ». Non seulement que cette correction, sans rectification, n'est pas très professionnelle et ne donne pas un caractère officiel à ce témoignage, mais en outre, il convient de faire remarquer que les déclarations ne sont que très superficielles et vagues et ne peuvent pas corroborer vos déclarations.

Quant à votre carte de membre « Human Rights Eye Education Center » :

Il convient de souligner que cette soi-disant carte de membre a l'air d'avoir été bricolée et elle ne donne pas l'impression d'une véritable carte de membre. De plus, il est surprenant que selon la numérotation de la carte, vous seriez le 40ème membre de cette organisation. En outre, la carte est recto-verso et elle contient sur les deux côtés une signature du chairman, cependant force est de constater que les deux signatures ne sont pas identiques ce qui est étonnant.

Quant à votre carte de membre « S.C.N.C. » :

En premier lieu, force est de constater que la carte de membre a été délivrée en 2000.

Cependant, il y lieu de faire remarquer que la carte en papier n'a pas l'air comme si elle aurait été délivrée, il y a 8 ans. En effet, la carte n'est pas pliée et elle n'a pas de tâches, tout court elle a l'air neuve. En plus, il est surprenant que sur cette carte, tout comme sur les autres cartes, est inscrit que vous seriez étudiant. Selon vos déclarations durant l'audition vous auriez dû travailler à la station service de votre père. De plus, en comparant le tampon du S.C.N.C. sur la carte de membre à celui du témoignage de la même organisation, lequel vous avez remis aux autorités, force est de constater que les deux tampons sont tout à fait différents.

Quant au témoignage du « S.C.N.C. » :

Il convient de relever que le contenu du document est un texte qui explique la situation politique du Cameroun, ainsi que le but du S.C.N.C et à deux reprises, votre nom y a été inséré, dans des phrases disant que vous seriez persécuté. Force est de constater que ce soi-disant témoignage ne reflète en aucun point votre situation individuelle et ne peut par conséquent ne (sic !) pas être utilisé comme preuve pour vos déclarations. De plus, il est étonnant que ce document a été fait en date du 20 août 2003, date à laquelle vous étiez déjà au Luxembourg.

Quant à la convocation d'une certaine NDENGE Cecilia Kemig :

La convocation que vous présentez aux autorités luxembourgeoises est adressée à une certaine Madame Cecilia Kemig NDENGE. En supposant qu'il s'agisse de votre mère, laquelle vous avez déclaré comme Cecilia Keng NDENGE-FROMBAD, force est quand même de constater qu'une simple convocation de la gendarmerie, sans autre détail, ne saurait étayer vos déclarations.

Quant au document, signé par William E. MOMAH :

Force est de constater qu'il s'agit d'un document sur lequel sont inscrits 20 points et que dans 7 points votre nom a été inséré. Il ne s'agit pas d'une preuve pour témoigner vos déclarations, mais il s'agit plutôt d'un « manifeste » qui inclut d'innombrables exemples de persécutions possibles en raison d'une affiliation au S.C.N.C.. Quoi qu'il en soit, ces 20 points n'ont rien à avoir avec votre situation particulière au Cameroun.

Au vu de ce qui précède, il convient de conclure que tous les documents que vous avez remis aux autorités luxembourgeoises sont à considérer comme de faux documents, des «doki», comme cité du rapport de l'OSAR à la page 5 de cette décision ministérielle.

Il convient de résumer au vu de ce qui a été élaboré au cours de la présente, que vous essayez par tous les moyens d’ inventer un récit pour motiver votre demande d'asile.

Ainsi, vous déclarez - être membre d'un parti politique;

- être membre d'une organisation défendue par le Gouvernement ;

- être membre du « Human Rights Defence Group » ;

- être membre du « Human Rights Eye Education Center ».

Force est de constater que toutes ces organisations, ainsi que le parti politique, peuvent faire valoir que leurs membres actifs, et non les simples membres, peuvent être discriminés et persécutés par le Gouvernement.

Quoi qu'il en soit, il convient de mettre en exergue que le caractère confus, incohérent et peu vraisemblable de vos déclarations en altère la crédibilité, de sorte que la totalité des faits que vous décrivez à l'appui de votre demande d'asile peut être mis en cause.

Ainsi, vous n'alléguez aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays. Une crainte fondée de persécution en raison d'opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l'appartenance à un groupe social n'est par conséquent pas établie.

En outre, votre récit ne contient pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 37 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection. En effet, les faits invoqués à l'appui de votre demande ne nous permettent pas d'établir que a) vous craignez de vous voir infliger la peine de mort ou de vous faire exécuter, b) vous risquez de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, c) vous êtes susceptible de faire l'objet de menaces graves et individuelles contre votre vie en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

Votre demande en obtention du statut de réfugié est dès lors refusée comme non fondée au sens de l'article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d'une procédure relative à l'examen d'une demande d'asile ; 2) d'un régime de protection temporaire, de sorte que vous ne saurez bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève. Le bénéfice de la protection subsidiaire tel que prévu par la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection doit également vous être refusé. (…)».

Par requête déposée le 9 juillet 2008 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision ministérielle du 9 juin 2008 en ce qu’elle lui a refusé la reconnaissance d’un statut de réfugié.

Le tribunal constate de prime abord que le demandeur n’a pas attaqué la décision de refus du 9 juin 2008 en ce qu’elle lui a refusé le bénéfice de la protection subsidiaire, de sorte que le tribunal n’est pas saisi d’un recours contre ce volet de la décision.

Etant donné que tant l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1.

d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire, que l’article 19 (3) de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection prévoient un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seul un recours en réformation a valablement pu être dirigé contre la décision ministérielle entreprise.

Le recours subsidiaire en annulation doit partant, à l’instar des conclusions afférentes du délégué du gouvernement, être déclaré irrecevable.

Le recours en réformation, introduit par ailleurs dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fournit un certain nombre d’explications pour rencontrer les différents reproches soulevés par le ministre quant à la crédibilité de son récit.

Ainsi, quant au reproche du ministre suivant lequel le demandeur n’aurait pas fait état de sa femme enceinte lors de son audition, le demandeur relève qu’il aurait déclaré ne pas être marié, en expliquant qu’il aurait eu une relation avec une femme, qui vivrait encore chez ses parents et dont il n’aurait appris la grossesse qu’après son départ du pays. Il ne se serait par ailleurs pas enfui avec celle-ci, puisqu’ils n’auraient pas entretenu une relation sérieuse.

Quant aux incohérences du récit soulevées par le ministre quant aux frères et sœurs du demandeur, ce dernier expose que contrairement à ce qui a été relevé par le ministre, ses frères et sœurs n’auraient pas été mentionnés sur la fiche de données personnelles. Il soutient encore que le ministre n’aurait pas précisé dans sa décision quelle serait cette incohérence.

Quant aux dates d’incarcération de son père, le demandeur fait valoir qu’il ne s’agirait que d’un simple détail et qu’il serait inconcevable que le statut de réfugié lui soit refusé compte tenu du simple fait qu’il ne se souviendrait pas avec exactitude des dates auxquelles son père aurait été incarcéré.

Quant à l’incohérence soulevée par le ministre en ce que le demandeur attribue le meurtre de son père au gouvernement camerounais, tandis que sa famille aurait appelé la gendarmerie suite au dit meurtre, le demandeur conteste toute contradiction à ce sujet, en précisant que sa famille n’avait pas d’autre choix que de signaler le meurtre à la gendarmerie, même si elle était convaincue que le gouvernement était à l’origine de ce meurtre. Contrairement aux indications contenues dans la décision litigieuse, il n’aurait par ailleurs jamais déclaré que la gendarmerie aurait correctement mené une enquête.

Le demandeur explique le fait qu’il a souvent réfléchi, respectivement a consulté des documents lors de son audition, avant de répondre aux questions lui posées, par la longue durée des auditions et le caractère extrêmement détaillé des questions posées.

Le demandeur reproche au ministre de s’être basé sur des points de détail pour considérer la carte d’adhésion au parti politique Social Democtratic Front, « SDF », comme un faux.

D’après le demandeur, on ne saurait lui reprocher de ne pas se souvenir avec précision de la date exacte de son inscription au parti, en insistant que, par ailleurs, il aurait répondu correctement à de nombreuses questions en rapport avec ce même parti.

Quant à son affiliation au Southern Cameroon National Council, « SCNC », et au South Cameroon’s Youth Ligue, « SCYL », le demandeur réfute les reproches soulevés par le ministre y relatifs, en insistant sur ce qu’il aurait décrit de manière précise ses tâches au sein du SCNC, tout en soutenant que l’agent chargé de son audition ne lui aurait pas posé d’autres questions à ce sujet.

Quant aux reproches du ministre tirés du défaut de préciser les raisons de sa détention par la gendarmerie, le demandeur fait valoir que ce serait justement puisqu’il n’y aurait aucune raison justifiant cette détention qu’il ferait état d’actes de persécution dans son pays.

Quant à l’ignorance du nom exact du président de l’association « Human Rights Organisation of North-West province », le demandeur fait valoir que ce ne serait pas là un motif de lui refuser le statut de réfugié.

Le demandeur expose encore qu’il serait compréhensible qu’il ne se souvienne pas de tous les détails du trajet de son pays d’origine au Luxembourg, puisqu’il aurait été accompagné par la personne ayant organisé sa fuite, et que, par ailleurs, le ministre se serait concentré sur des points de détail pour lesquels le demandeur n’ait pas pu fournir une réponse.

Quant à la carte d’affiliation au « Human Rights Defense Group », le demandeur fait valoir que les reproches soulevés par le ministre n’emporteraient pas la conviction que cette carte soit fausse, en faisant plus particulièrement valoir un défaut de moyens technologiques au Cameroun de nature à permettre l’émission de cartes d’affiliation d’une certaine qualité. Quant aux incohérences soulevées par le ministre en rapport avec la date indiquée sur la carte d’affiliation, le demandeur fait remarquer qu’il ne s’agirait pas de la date à laquelle sa demande d’affiliation aurait été faite, mais de la date d’émission de la carte, qui aurait pu être faite au cours de sa détention, étant entendu qu’il aurait demandé la carte d’affiliation avant sa détention.

Le demandeur attribue l’erreur au niveau de sa date de naissance contenue dans le témoignage du « Human Rights Defense Group » à l’insuffisance des moyens disponibles au Cameroun par rapport à ceux disponibles au Luxembourg. L’aspect des cartes de membre « Human Rights Eye Education Center » et SCNC, s’expliquerait également par les modestes moyens à la disposition de ces associations au Cameroun. Le fait que la carte de membre du SCNC paraisse neuve s’expliquerait par le fait qu’il ne l’aurait pas conservée en permanence sur lui. L’indication du titre d’étudiant y figurant résulterait du fait que celle-ci a été établie sur base de sa carte d’identité, qui aurait une validité de 10 ans et qui renseignerait encore sa qualité d’étudiant. Ensuite, le demandeur explique une différence du cachet du SCNC, en fonction de la section nationale ou de la section régionale de cette association.

Le demandeur insiste encore sur le fait que le témoignage du SCNC ferait état de sa situation individuelle, de sorte qu’il devrait être pris en compte.

Le demandeur fait valoir que tant la convocation par la gendarmerie qui aurait été adressée à une dame qui serait sa mère, que le document signé par un dénommé William E.

Momah confirmeraient ses déclarations relatives aux persécutions subies par sa famille de la part du gouvernement camerounais.

Enfin, le demandeur fait état d’un évènement survenu après son audition, en l’occurrence l’assassinat de son frère par un membre de la police en raison des convictions politiques de sa famille.

Le demandeur conclut que l’ensemble des reproches formulés par le ministre par rapport aux documents fournis par lui et par rapport à ses déclarations ne porteraient que sur des points de détails, et ne sauraient dès lors justifier un refus du bénéfice du statut de réfugié. Il donne encore à considérer que la circonstance que des faux documents seraient régulièrement réalisés au Cameroun, n’entraînerait pas automatiquement la justification de la remise en cause des documents produits par lui.

Le délégué du gouvernement, dans son mémoire en réponse, insiste sur le manque de crédibilité du récit du demandeur.

Quant aux explications données par le demandeur en rapport avec la femme à laquelle il aurait été lié, le délégué du gouvernement renvoie à une mention manuscrite de la part du demandeur sur la fiche des données personnelles, suivant laquelle celui-ci serait marié et suivant laquelle son épouse, enceinte, serait en fuite. Au regard de ces déclarations du demandeur, le délégué du gouvernement met en cause les explications de celui-ci suivant lesquelles il n’aurait jamais entretenu une relation sérieuse avec cette femme.

Le délégué du gouvernement relève par ailleurs que le demandeur aurait mentionné sur la fiche de données personnelles ses frères et sœurs, ceci contrairement à ses affirmations dans la présente instance.

Le représentant étatique fait encore valoir que le statut de réfugié n’aurait pas été refusé au demandeur compte tenu du simple fait qu’il ne se souviendrait plus des dates d’incarcération de son père, mais en raison des innombrables contradictions, incohérences, voire mensonges du demandeur, tels qu’énoncés de façon détaillée dans la décision ministérielle litigieuse.

Le délégué du gouvernement insiste également sur le manque de crédibilité du récit relatif au dépôt d’une plainte après l’assassinat du père du demandeur, compte tenu du fait que la famille aurait estimé que les autorités sont coupables de cet assassinat. Il précise que, par ailleurs, contrairement à l’argumentation du demandeur, le fait que la gendarmerie soit venue sur les lieux pour analyser le meurtre et prendre des photos, démontrerait qu’une enquête a été introduite.

Exposant ne pas vouloir rentrer dans tous les détails des contradictions et invraisemblances du récit du demandeur, le délégué du gouvernement conclut qu’en l’espèce, une crainte raisonnable de persécutions dans le chef du demandeur ne serait pas établie, en raison des nombreuses remarques citées dans la décision ministérielle litigieuse quant au manque de crédibilité du demandeur. A ce titre, il renvoie aux documents, cartes de membre et convocation remises aux autorités luxembourgeoises, dont l’authenticité serait douteuse. Le délégué du gouvernement renvoie encore aux énonciations de la décision litigieuse en ce qui concerne les montants des cotisations aux partis politiques, l’âge du demandeur lors de son adhésion aux différents partis et la présentation des cartes.

Le délégué du gouvernement fait finalement valoir que suivant la jurisprudence, la situation générale du pays d’origine ne justifierait pas la reconnaissance du statut de réfugié.

Il en conclut que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation, en refusant le statut de réfugié au demandeur.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

Cette notion de réfugié est encore précisée par les articles 2, 31 et 32 de la loi du 5 mai 2006 qui, en vertu des dispositions de l’article 74 (1) de la même loi et à l’exception des dispositions énumérées à l’article 74 (2), est applicable aux demandes de protection internationale en cours d’instruction au moment de l’entrée en vigueur de ladite loi, telle la présente demande qui a été introduite en 2003 et dont l’instruction était encore en cours au moment de l’entrée en vigueur de la loi du 5 mai 2006.

Le tribunal, statuant en tant que juge du fond en matière de demande d'asile, doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur d'asile, tout en prenant en considération la situation générale dans son pays d’origine. Cet examen ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur, la crédibilité d’un demandeur d’asile constituant en effet un élément d’appréciation fondamental dans l’appréciation de la justification d’une demande d’asile, spécialement lorsque des éléments de preuve matériels font défaut6.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de ses auditions, ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse, ainsi que les pièces produites en cause amènent le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit et de manière crédible des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Rappelons que la décision ministérielle déférée est basée essentiellement sur le manque de crédibilité du récit du demandeur, plus particulièrement en raison d’incohérences et d’invraisemblances affectant son récit. Les reproches du ministre à cet égard portent sur les contradictions des déclarations faites sur la fiche de données personnelles par rapport à celles faites lors de l’audition du demandeur en date du 13 juin 2003, et plus particulièrement en rapport avec une femme à laquelle il serait lié et en rapport avec ses frères et sœurs, sur l’invraisemblance du récit en ce qui concerne les instigateurs supposés de l’assassinat de son père, ainsi que sur les incarcérations de son père, sur le temps de réflexion mis par le demandeur avant de répondre aux questions lui posées lors de ses auditions, ainsi que sur le fait d’avoir consulté des documents lors de ces auditions, sur ses déclarations en rapport avec son adhésion au parti politique SDF et aux organisations SCNC et SCYL, aux déclarations du demandeur en rapport avec l’intervention du président du « Human Rights Organisation of North-West Province » dans le cadre d’une de ses détentions alléguées, sur les circonstances de sa dernière arrestation et de la fuite qui s’en serait suivie, sur les circonstances de la fuite du continent africain vers le Luxembourg, et enfin, sur l’authenticité, respectivement la pertinence des différents documents remis par le demandeur que celui-ci aurait pu faire venir du Cameroun.

S’il est exact que la moindre petite incohérence dans un récit, à elle seule, ne saurait justifier un refus d’accorder le statut de réfugié, il n’en reste pas moins qu’en l’espèce, le tribunal est amené à constater que l’accumulation des incohérences est telle que le récit du demandeur, dans son ensemble, manque de crédibilité. Ces incohérences sont corroborées en l’espèce par le comportement général du demandeur lors de son audition, en ce qu’il ressort des rapports d’audition que celui-ci réfléchissait longuement avant de répondre aux questions, respectivement consultait des documents écrits, parfois des textes imprimés sur internet, avant de répondre. Cette attitude ne saurait être expliquée par la longueur de l’audition, respectivement par le nombre des questions posées, étant donné que, d’une part, les questions posées sont celles posées à tout demandeur d’asile, et, d’autre part, l’audition dans son ensemble était certes longue, mais s’est étalée sur plusieurs jours.

Les explications fournies par le demandeur pour excuser les invraisemblances et incohérences de son récit ne sont pas de nature à rencontrer utilement les conclusions du ministre, telles qu’exposées de façon très détaillée dans la décision litigieuse.

6 Cour adm. 21 juin 2007, n° 22858C, non publié.

Les craintes de persécutions du demandeur reposent, d’après ses déclarations recueillies lors des auditions, essentiellement sur son appartenance au SCNC et ses activités dans cette organisation, ainsi que sur son appartenance à une association « Human Rights » (voir page 5/24 du rapport d’audition : « Because I chaired and supported the SCNC. (…) and because I am a Human-Right member »).

Notons cependant tout d’abord qu’il ne ressort pas des déclarations du demandeur recueillies lors de ses auditions quel serait le lien de ses différentes arrestations alléguées avec une activité dans le cadre d’une organisation défendant les droits de l’homme, alors que le demandeur relate uniquement des événements en rapport avec son activité alléguée au SCNC.

Dès lors, les références à une activité dans le domaine de la protection des droits de l’homme et les pièces afférentes produites par le demandeur, indépendamment de la question de la véracité de ces explications et de celle de l’authenticité des pièces versées, ne permettent pas de faire conclure à une crainte de persécution dans le chef du demandeur.

Le seul rapprochement fait par le demandeur dans son récit avec une organisation défendant les droits de l’homme est l’intervention personnelle pour sa libération, suite à une de ses arrestations, par le président de la « Human Rights Organisation of North-West » (voir page 5/24 du rapport d’audition). Or, cette déclaration du demandeur est sujette à caution, compte tenu d’un certain nombre d’incohérences dans son récit. Si on a égard aux explications du demandeur suivant lesquelles le président de la prédite organisation aurait été son libérateur en juillet 2002 suite à une arrestation arbitraire, il est alors assez étonnant que le demandeur ne se souvienne plus du nom de ce président et qu’il le nomme, après longue réflexion, Abel Mukong, alors qu’en réalité ce président s’appelle Albert Mukong, tel qu’il ressort du rapport de la commission des recours des réfugiés sur le Cameroun, déposé par le délégué du gouvernement. De l’autre côté, tel qu’il a été relevé à juste titre par le ministre, il est hautement improbable que le président de cette organisation, qui de surcroît, et contrairement aux déclarations du demandeur, semble avoir concentré ses activités plutôt au sud-ouest du pays, étant donné qu’il a été arrêté en septembre 2002 dans une province du sud-ouest (voir rapport de la commission des recours des réfugiés précité), alors que le demandeur serait originaire du nord-ouest du pays, se déplace personnellement en prison pour obtenir la libération du demandeur.

Quant à la prétendue activité du demandeur pour le SCNC, ainsi que celle de son père pour cette même organisation, le récit du demandeur contient des incohérences de nature à mettre en doute sa crédibilité.

Plus particulièrement, quant au volet du récit du demandeur au sujet de l’assassinat de son père, c’est à juste titre que le ministre a relevé qu’il est pour le moins incohérent que le demandeur et sa famille aient appelé justement la gendarmerie suite à l’assassinat, s’ils attribuent cet assassinat à l’Etat, dont la gendarmerie est pourtant une émanation, et si, d’après les propres déclarations du demandeur, le père aurait été détenu plusieurs fois à cette même gendarmerie (voir page 12/24 du rapport d’audition). Il est par ailleurs invraisemblable que le demandeur ne puisse pas donner des explications plus précises quant aux détentions et incarcérations de son père, si l’on tient par ailleurs compte de ses déclarations suivant lesquelles il aurait à cette époque déjà été engagé dans le SDF et le SCNC, de sorte qu’il aurait été logique qu’il suive de très près les activités de son père (d’après les déclarations du demandeur il aurait été membre du SCNC depuis 2000 ; il aurait été membre du SDF depuis 1991, sur base d’une carte d’affiliation versée par le demandeur, sinon depuis 1993, suivant ses propres déclarations lors de son audition, sinon depuis 1996, tel qu’il ressort d’une des attestations versées par le demandeur).

Quant à ses propres activités pour le SCNC, il est frappant que le demandeur est resté très vague dans ses explications. Ce constat n’est pas énervé par les explications du demandeur suivant lequel l’agent chargé de son audition ne lui aurait pas posé d’autres questions à ce sujet. Il est frappant que les seules indications concrètes données par le demandeur se rapportent aux dates de ses arrestations alléguées – qu’il a de surcroît pris soin de noter sur des papiers qu’il a consultés pendant son audition (voir page 16/24 du rapport d’audition). Au regard du fait que le demandeur a donné des indications détaillées sur les dates de ses détentions, il est d’autant plus surprenant qu’il n’a pas pu donner des indications plus concrètes quant aux circonstances de ses arrestations, quant aux conditions de ses détentions (à part des déclarations tout à fait générales), quant au contenu des interrogatoires dont il fait état, et quant au rapprochement de ses activités pour le SCNC avec ses arrestations. Il est encore révélateur que le demandeur ne savait pas que le SCNC a été interdit en mai 2001, bien que d’après ses propres déclarations il aurait été un membre actif de cette organisation et aurait ainsi organisé des manifestations et aurait été le coordinateur des jeunes (voir pages 5/24 et 13/24 du rapport d’audition).

Quant aux documents produits par le demandeur pour établir son appartenance au SCNC et ses activités pour cette organisation (plus particulièrement la carte de membre, l’attestation signée par un avocat dénommé William E. Momah, une attestation du SCNC du 14 juillet 2002 et une attestation du 20 août 2003), il convient de prime abord de relever qu’il est étonnant que le demandeur ait pu faire parvenir ces documents au Luxembourg après son départ de son pays d’origine, étant donné qu’il a déclaré lors de son audition qu’il serait absolument impossible de faire envoyer son passeport au Luxembourg, compte tenu des contrôles rigoureux qui seraient faits des envois postaux au Cameroun. Il est pareillement surprenant que le demandeur, qui pourtant, d’après ses propres déclarations, serait recherché dans tout le pays, ait pu faire établir des attestations, dont l’une aurait été faite par un avocat devant un tribunal de grande instance au Cameroun, postérieurement à son départ du pays, étant entendu que l’attestation dactylographiée qui émanerait du SCNC porte la date du 20 août 2003 et le certificat du dénommé Momah porte la date du 19 mars 2003. Notons encore que les différentes attestations produites par le demandeur se rapprochent plutôt d’un manifeste préétabli dans lequel un nom peut être inséré, que d’une déclaration visant la situation particulière du demandeur. Le certificat portant la date du 14 juillet 2002 est un formulaire préétabli, qui semble d’ailleurs avait été rempli par le demandeur lui-même. De plus, il y a lieu de relever que ledit document porte certes un cachet, mais, d’après la copie à la disposition du tribunal, il ne semble pas avoir été signé. La différence de l’aspect des cachets du SCNC relevée par le ministre sur la carte de membre par rapport aux attestations versées par le demandeur n’est par ailleurs pas utilement rencontrée par ce dernier. A ce titre, notons que la carte de membre fait ressortir à la fois la signature du président national, que celle du trésorier régional. Pourtant, le même cachet, qui se distingue sensiblement de celui apposé aux attestations litigieuses, a été apposé près de ces deux signatures, de sorte que les explications du demandeur, qui fait état d’une différence des cachets pour les sections régionales et nationales, peuvent être mises en doute.

Les incohérences relevées ci-dessus, combinées avec les pièces versées par le délégué du gouvernement qui accusent d’une manière générale une pratique courante au Cameroun de falsifier des documents, combinées avec la présentation matérielle des différentes attestations, amènent le tribunal à rejoindre les doutes émis par le ministre quant à l’authenticité de ces documents.

Les critiques du ministre quant à l’authenticité de ces documents ne sont pas sérieusement rencontrées par le demandeur, qui se limite à reprocher au ministre de se concentrer sur des points de détail. Par ailleurs, le défaut de moyens techniques disponibles au Cameroun ne peut pas non plus expliquer toutes les incohérences soulevées par le ministre.

Quant à la convocation à la police, dont fait état le demandeur, indépendamment de la question de l’authenticité de ce document, et indépendamment de la question de savoir si c’est effectivement la mère du demandeur qui est visée, il convient de relever qu’il ne ressort pas de ce document quelles sont les raisons de la convocation, de sorte que celle-ci n’est pas de nature à établir la réalité d’un risque de persécution dans le chef du demandeur.

Quant à son appartenance alléguée au SDF, le demandeur, s’il déclare avoir participé à des démonstrations organisées par ce parti, confirme cependant qu’il n’a personnellement jamais eu de problèmes avec les autorités de ce fait ou du fait d’une appartenance audit parti (voir page 8/24 du rapport d’audition : « Did you face any problems because you were member of that political party [SDF]? Personally no, but generally all members of the SDF suffer »). Or, la circonstance à elle seule d’appartenir à un parti politique, même à supposer que des membres de ce parti soient opprimés par le pouvoir en place, n’est pas de nature à convaincre que le demandeur risque, en cas de retour dans son pays d’origine, de subir des actes de persécutions de ce fait, étant donné que chaque cas d’un demandeur d’asile doit être apprécié individuellement et le demandeur doit pouvoir faire état de raisons propres et concrètes, de nature à convaincre qu’il risque, en cas de retour dans son pays d’origine, de subir des actes de persécutions au sens de la Convention de Genève, respectivement au sens de la loi du 5 mai 2006, du fait de son appartenance à ce parti politique. Au demeurant, il n’est pas établi que le demandeur ait été membre actif du SDF et non pas seulement un simple membre de ce même parti, et il ne ressort aucunement du récit du demandeur en quoi concrètement son appartenance à ce parti soit de nature à l’exposer à un risque de persécutions. L’appartenance alléguée au parti SDF ne saurait dès lors être retenue en l’espèce afin de justifier un risque de persécutions. Dès lors, il devient sans pertinence d’examiner la question de l’authenticité des documents produits par le demandeur en rapport avec ses activités alléguées pour le SDF.

Le demandeur fait encore état de l’assassinat de son frère après son départ de son pays d’origine, qui, d’après lui, serait à attribuer aux convictions politiques de sa famille. Même à supposer que le dénommé Elvis Ndengue, qui est renseigné sur les pièces versées par le demandeur, soit son frère, étant donné que la victime est nommée Elvis Ndengue et non pas Ndenge, qui est le nom de famille du demandeur, force est de constater que les circonstances de ce décès, qui sont certes condamnables, ne sont pas de nature à établir un lien avec la crainte de persécutions dont fait état le demandeur en raison de son appartenance au SCNC, respectivement avec les convictions politiques de sa famille, étant donné qu’il ressort de l’extrait du Country Report on Human Rights Practices 2006 versé par le demandeur, que le dénommé Elvis Ndengue aurait été tué par un membre de la police puisqu’il aurait refusé de transporter à la station de police une jeune femme qui venait d’être arrêtée.

Au vu des éléments qui précèdent, et en particulier compte tenu des incohérences, respectivement invraisemblances entachant les explications du demandeur, compte tenu du fait que l’authenticité des pièces produites par celui-ci est plus que douteuse, il convient de constater que le récit du demandeur n’emporte pas la conviction du tribunal quant à la réalité des persécutions ou craintes de persécution alléguées, de sorte que le ministre a valablement pu retenir que le demandeur n’a pas fait état de façon crédible de persécutions vécues ou de craintes de persécutions au sens de la Convention de Genève susceptibles de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.

Dans ces conditions il devient superfétatoire d’examiner les critiques soulevées par le demandeur tenant à ses explications relatives à son « épouse », à ses frères et sœurs et sur son itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;

déclare irrecevable le recours en annulation ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Martine Gillardin, premier juge, Annick Braun, juge, et lu à l’audience publique du 9 février 2009 par le premier vice-président, en présence du greffier Claude Legille.

s. Claude Legille s. Carlo Schockweiler 19


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 24593
Date de la décision : 09/02/2009

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2009-02-09;24593 ?

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