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03/12/2008 | LUXEMBOURG | N°24657

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 décembre 2008, 24657


Tribunal administratif N° 24657 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 juillet 2008 Audience publique du 3 décembre 2008 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers (art. 22, L. 5.5.2006) Vu la requête inscrite sous le numéro 24657 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 juillet 2008 par Maître Arnaud RANZENBERGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le ….

(Libéri

a), de nationalité libérienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d...

Tribunal administratif N° 24657 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 juillet 2008 Audience publique du 3 décembre 2008 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers (art. 22, L. 5.5.2006) Vu la requête inscrite sous le numéro 24657 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 juillet 2008 par Maître Arnaud RANZENBERGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le ….

(Libéria), de nationalité libérienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 30 juin 2008 refusant de lui accorder un statut de tolérance au Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 26 septembre 2008 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Arnaud RANZENBERGER et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er décembre 2008.

Le 14 mars 2005, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Cette demande fut rejetée comme étant non fondée par le ministre le 23 octobre 2006 et le recours contentieux que Monsieur … avait fait introduire à l’encontre de cette décision ministérielle fut rejeté comme étant non fondé par jugement du tribunal administratif du 3 octobre 2008 confirmé par arrêt de la Cour administrative du 29 janvier 2008.

Par courrier de son mandataire du 11 février 2008, Monsieur … s’est adressé au ministre pour solliciter une autorisation de séjour pour raisons humanitaires sinon, subsidiairement, un statut de tolérance au sens de l’article 22 (2) de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection. A l’appui de sa demande il a fait état du fait qu’il serait gravement atteint de diabète et qu’il nécessiterait un traitement soutenu ainsi qu’un contrôle clinique et biologique régulier qui ne seraient pas à sa disposition au Libéria.

Par courrier du 12 mars 2008, le ministre demanda à Monsieur … de fournir davantage de précisions concernant le type de diabète dont il souffre, ainsi qu’au sujet du traitement médical qu’il doit suivre.

Après avoir obtenu les renseignements afférents, le ministre, par décision du 30 juin 2008, a refusé de faire droit à la demande de Monsieur … en ce qu’elle a tendu à l’obtention d’un statut de tolérance dans les termes suivants :

« Maître, J’ai l’honneur de me référer à votre courrier du 24 avril 2008 dans lequel vous sollicitez le statut de tolérance pour votre mandant Monsieur ….

Je suis toutefois au regret de vous informer que je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à votre demande étant donné qu’il n’existe pas de preuves que l’exécution matérielle de l’éloignement de votre mandant serait impossible en raison de circonstances de fait conformément à l’article 22 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection. En ce qui concerne la maladie dont souffre Monsieur …, l’avis du contrôle médical a, à nouveau, constaté que votre mandant ne présentait pas de pathologie médicale empêchant le rapatriement dans son pays d’origine.

La présente décision est susceptible d’un recours en annulation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d’un avocat à la Cour dans un délai de trois mois à partir de la notification de la présente.

Je vous prie, Maître, … ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 23 juillet 2008, Monsieur … a fait introduire un recours en annulation à l’encontre de la décision ministérielle prérelatée du 30 juin 2008.

Ledit recours ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que son retour au Libéria serait impossible, alors qu’il souffrirait d’une maladie diabétique instable nécessitant un traitement par trois médicaments indispensable à sa survie, mais ne lui serait pas accessible dans son pays d’origine. Dans la mesure où un éventuel retour dans son pays d’origine engendrerait ainsi nécessairement une détérioration certaine de son état de santé au point de compromettre directement sa vie, il estime que des circonstances de fait rendant impossible son éloignement existeraient. Il reproche par voie de conséquence au ministre de s’être livré à une mauvaise appréciation des faits et d’avoir méconnu la portée des pièces versées en cause.

Le délégué du Gouvernement conclut au caractère non fondé du recours et se réfère, d’un côté, à l’avis du médecin de contrôle figurant au dossier administratif et retenant que Monsieur … ne présentait pas de pathologie médicale empêchant son rapatriement, ainsi que, d’un autre côté, aux renseignements émanant de la « World Health Organisation (WHO) » certifiant que le diabète dont souffre le requérant pourrait être pris en charge au Libéria. Le représentant étatique en déduit que rien ne s’opposerait dès lors au rapatriement de Monsieur … dans son pays d’origine.

L’article 22 de la loi du 5 mai 2006 relative aux droits d’asile et à des formes complémentaires de protection dispose en son point (1) que « si le statut de réfugié est refusé au titre des articles 19 et 20 qui précèdent, le demandeur sera éloigné du territoire » et en son point (2) que « si l’exécution matérielle de l’éloignement s’avère impossible en raison de circonstances de fait, le ministre peut décider de tolérer l’intéressé provisoirement sur le territoire jusqu’au moment où ces circonstances de fait auront cessé ».

Est donc visé un cas de figure tout à fait spécifique justifiant la reconnaissance d’un statut de tolérance, à savoir celui d’un demandeur du statut de réfugié débouté dont l’éloignement se heurte à une impossibilité d’exécution matérielle.

L’état de santé d’un candidat à l’éloignement est susceptible de s’analyser en une circonstance de fait rendant impossible l’exécution matérielle de l’éloignement dans l’hypothèse notamment où par le fait même de cet éloignement l’état de santé risquerait de se dégrader au point de compromettre sérieusement la vie de la personne concernée.

La preuve d’une éventuelle impossibilité matérielle de procéder à l’exécution de la mesure d’éloignement obéit cependant aux règles de preuve de droit commun, ce qui implique que pour tolérer l’étranger sur le territoire – auquel cas le ministre est effectivement obligé de délivrer à l’étranger une attestation de tolérance – le ministre doit vérifier l’existence de circonstances qui empêchent l’exécution matérielle de l’éloignement. L’application du droit commun entraîne encore qu’en cas de contestation de ces circonstances, il appartient à celui qui en revendique l’existence, en l’occurrence à l’étranger qui revendique cette tolérance, d’en établir l’existence. (cf. Cour adm. 11 novembre 2008, n° 24693C du rôle).

En l’espèce, il se dégage des pièces versées au dossier administratif que le ministre, à partir des renseignements fournis par le demandeur sur la nature exacte de sa maladie ainsi que sur le traitement qu’il doit suivre, s’est adressé à un médecin représentant la « World Health Organisation » à Monrovia au Libéria pour s’enquérir sur les possibilités de traitement du diabète des types 1 et 2. Cette demande ayant été rencontrée par l’information que les médicaments et infrastructures nécessaires pour le traitement du diabète des types 1 et 2 sont disponibles à Monrovia, le ministre, sans pour autant contester l’existence même de la maladie de Monsieur …, a motivé à suffisance sa décision de refus, ceci en l’absence de tout autre élément de preuve fourni en cause de la part du demandeur qui serait de nature à contredire l’affirmation du représentant de l’organisation WHO à Monrovia.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 décembre 2008 par :

Paulette Lenert, vice-président, Marc Sünnen, juge, Claude Fellens, juge, en présence du greffier en chef Arny Schmit.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 24657
Date de la décision : 03/12/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2008-12-03;24657 ?

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