Tribunal administratif N° 24056 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 11 février 2008 Audience publique du 24 septembre 2008 Recours formé par Monsieur XXXXX XXXXX contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers (art. 22, L.5.5.2006)
__________________________________________________________________________
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 24056 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 11 février 2008 par Maître Gilles PLOTTKÉ, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur XXXXX XXXXX, né le XXX XXX XXX à XXX XXX, de nationalité XXX, demeurant actuellement à XXX.XXX, XXX, rue XXXXX, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du XXXXX portant rejet de sa demande en obtention d’une décision de tolérance ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 16 avril 2008 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Valérie FERSING, en remplacement de Maître Gilles PLOTTKE, et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline JACQUES en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 7 juillet 2008.
___________________________________________________________________________
En date du 15 décembre 2004, Monsieur XXXXX XXXXX introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971.
Cette demande fut rejetée comme non fondée par une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 24 novembre 2006.
Le recours contentieux introduit par Monsieur XXXXX à l’encontre de cette décision ministérielle fut définitivement rejeté en instance d’appel par un arrêt de la Cour administrative du 11 octobre 2007 (n° 23032C du rôle).
Par courrier de son mandataire du 31 octobre 2007, Monsieur XXXXX présenta au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration une demande en obtention d’un statut de tolérance conformément à l’article 22 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après dénommée « la loi du 5 mai 2006 ».
Par décision du 16 novembre 2007, le ministre refusa de faire droit à cette demande au motif énoncé comme suit : « (…) qu’il n’existe pas de preuves que l’exécution matérielle de l’éloignement de votre mandant serait impossible en raison de circonstances de fait conformément à l’article 22 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection (…). » Par requête déposée le 11 février 2008, Monsieur XXXXX a fait introduire un recours en réformation à l’encontre de la décision ministérielle précitée du 16 novembre 2007.
Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
A l’appui de son recours, le demandeur reproche au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration d’avoir eu une appréciation manifestement erronée des faits, en ce sens que les faits en cause ne fonderaient pas une crainte justifiée de persécution dans son chef. Il estime en effet qu’il ne pourrait pas retourner dans son pays d’origine, à savoir, le XXX puisqu’il y serait menacé de mort en raison de son opposition au Gouvernement.
Il invoque encore la situation générale régnant actuellement au XXX et précise qu’eu égard à sa confession chrétienne, il y serait exposé à des menaces de la part de certaines communautés musulmanes particulièrement agressives.
Le délégué du gouvernement estime que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que les conditions de l’article 22 (2) de la loi du 5 mai 2006 ne seraient pas remplies en l’espèce.
Aux termes de l’article 22, paragraphe (1) de la loi du 5 mai 2006, « si le statut de réfugié est refusé au titre des articles 19 et 20 qui précèdent, le demandeur d'asile sera éloigné du territoire » et aux termes du paragraphe (2) du même article « si l'exécution matérielle de l'éloignement s'avère impossible en raison de circonstances de fait, le ministre peut décider de le tolérer provisoirement sur le territoire jusqu'au moment où ces circonstances de fait auront cessé ».
Il s’ensuit que le bénéfice du statut de tolérance est réservé aux demandeurs d’asile déboutés dont l’éloignement se heurte à une impossibilité d’exécution matérielle.
Or, en l’espèce, force est au tribunal de constater que le demandeur, au-delà de réitérer des arguments qui ont déjà été toisés par les juridictions administratives dans le cadre de sa demande d’asile, reste en défaut d’établir avec la précision requise que son retour se heurterait à une impossibilité d’exécution matérielle justifiant une décision de tolérance dans son chef.
En effet, il se contente de faire état de sa peur des forces gouvernementales nigérianes et se réfère de façon générale à la situation au XXX, sans cependant soumettre au tribunal suffisamment d’éléments concrets permettant de retenir que son retour serait impossible en raison de circonstances de fait.
Force est également de constater que la question de la compatibilité du délai d’instruction administrative et contentieuse de sa demande d’asile avec les exigences en matière de délai raisonnable fondées sur l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales est étrangère à l’objet de la décision déférée, à savoir le refus du ministre de tolérer provisoirement Monsieur XXXXX au Luxembourg, de sorte que le tribunal ne saurait analyser cette question dans le cadre de la présente procédure.
Au vu de ce qui précède, la légalité de la décision ministérielle litigieuse n’est pas utilement énervée par les moyens présentés par le demandeur, de sorte que son recours est à rejeter comme étant non fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 24 septembre 2008 par :
Paulette Lenert, vice-président, Catherine Thomé, premier juge, Claude Fellens, juge en présence de Luc Rassel, greffier.
s. Rassel s. Lenert 3