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30/07/2008 | LUXEMBOURG | N°24654

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 30 juillet 2008, 24654


Tribunal administratif Numéro 24654 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 juillet 2008 Audience publique du 30 juillet 2008 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24654 du rôle et déposée le 22 juillet 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Barbara Najdi, avocat à la Cour, inscrite au

tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Maroc), de n...

Tribunal administratif Numéro 24654 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 22 juillet 2008 Audience publique du 30 juillet 2008 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24654 du rôle et déposée le 22 juillet 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Barbara Najdi, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Maroc), de nationalité marocaine, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d'une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration portant la date du 17 juin 2008, lui notifiée le 17 juillet 2008, prorogeant pour une nouvelle durée d’un mois à partir de la notification son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juillet 2008 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Yasmina Maadi, en remplacement de Maître Barbara Najdi, et Monsieur le délégué du gouvernement Marc Mathekowitsch en leurs plaidoiries respectives à l'audience publique du 30 juillet 2008.

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Par décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, désigné ci-après par « le ministre », du 14 décembre 2005, Monsieur …, alias …, fut débouté de sa demande d’asile qui fut déclarée manifestement infondée. Dans la mesure où aucun recours contentieux ne fut introduit contre ladite décision, celle-ci acquit autorité de chose jugée le 16 janvier 2006.

Une décision refusant l’entrée et le séjour sur le territoire du Grand-Duché, prise à l’encontre de Monsieur … en date du 5 janvier 2007, lui fut notifiée le 18 février 2008. Monsieur … fit l’objet d’une première mesure de rétention le 18 février 2008, mesure qui fut prolongée une première fois le 13 mars 2008 et une seconde fois le 15 avril 2008. Le 18 mai 2008 Monsieur … fut remis en liberté.

Le lendemain, à savoir le 19 mai 2008, Monsieur … fut de nouveau interpelé par la police et fut placé en rétention au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière.

Le 17 juin 2008, à l’aéroport du Luxembourg, le rapatriement de Monsieur … pour le Maroc ne fut pas possible à cause du refus de ce dernier d’embarquer, de sorte que l’éloignement du territoire luxembourgeois fut irréalisable.

Par une décision du ministre du 17 juin 2008, une nouvelle mesure de placement fut prise à l’égard de Monsieur … pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision sur base des motifs et considérations suivants :

« Vu l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu mon arrêté de refus d’entrée et de séjour du 5 janvier 2007 ;

Considérant que le rapatriement était prévu pour aujourd’hui ;

Considérant que l’intéressé s’est opposé au moment de l’embarquement de sorte que le rapatriement a dû être annulé ;

- qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels légalement acquis ;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Considérant que l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ;

Arrête :

Art.1er.- Le nommé …, né le … , de nationalité marocaine, alias …, né le …, de nationalité algérienne, dont l’éloignement immédiat n’est pas possible, est placé, dans l’attente de cet éloignement, au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification.(…) » Par requête déposée le 27 juin 2008 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation à l'encontre de la décision de placement du 17 juin 2008. Ce recours fut rejeté comme étant non fondé par jugement du tribunal administratif du 7 juillet 2008, inscrit sous le numéro 24542 du rôle.

Le 17 juillet 2008, Monsieur … s’est vu notifier une nouvelle décision de placement portant la date du 17 juin 2008 et libellé comme suit :

« Vu l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Considérant qu’un nouveau laissez-passer a été demandé auprès des autorités marocaines ;

- qu’en attendant l’émission de ce nouveau document, l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ;

Considérant qu’il y a nécessité absolue de reconduire la décision de placement ;

Arrête :

Art.1er.- Le nommé …, né le … , de nationalité marocaine, alias …, né le … , de nationalité algérienne, dont l’éloignement immédiat n’est pas possible, est prorogé pour une nouvelle durée d’un mois à partir de la notification » ;

Par requête déposée le 22 juillet 2008 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation, sinon à l’annulation à l’encontre de cette décision de placement datée du 17 juin 2008.

Etant donné que l'article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l'entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3. l'emploi de la main-d'œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, seul un recours en réformation a valablement pu être introduit contre la décision litigieuse.

Ledit recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Il s’ensuit dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que la décision déférée serait illégale, étant donné que la date qu’elle indique serait sans pertinence dans la mesure où il se trouvait déjà en rétention administrative sur base d’une autre décision portant la même date. Il en déduit que faute d’une prolongation en bonne et due forme dans les délais prévus par la loi, il devrait immédiatement être remis en liberté. Subsidiairement, même à supposer que la date indiquée du 17 juin 2008 ne soit qu’une simple erreur matérielle, le demandeur fait valoir que compte tenu de cette erreur, il serait dans l’impossibilité de savoir exactement à quelle date la décision était prise et d’apprécier par voie de conséquence si elle était légalement prise ou non. Dans ces circonstances, la décision déférée serait encore à considérer comme étant illégale et il devrait être immédiatement remis en liberté.

Finalement, à titre tout à fait subsidiaire, le demandeur relève qu’il est actuellement en rétention quasi ininterrompue depuis le 18 février 2008 dans des conditions équivalentes à une détention ce qui serait contraire aux textes de la loi et à l’esprit de la loi à la base d’une mesure de rétention administrative qui devrait rester strictement limitée dans le temps et se dérouler dans des conditions adaptées et différentes des conditions à la base d’un emprisonnement proprement dit.

Le délégué du gouvernement insiste que la date du 17 juin 2008 figurant sur la décision déférée relèverait d’une erreur purement matérielle et que la date qui aurait dû figurer sur l’arrêté ministériel déféré serait celle du 17 juillet 2008. Il relève que le requérant ne s’y serait d’ailleurs pas trompé puisque dans le dispositif de son recours il demande la réformation, sinon l’annulation d’une décision du 17 juillet 2008. Il signale pour le surplus que la prolongation de la mesure de rétention initiale aurait été nécessaire en l’espèce dans l’attente de l’émission d’un nouveau laissez-passer par les autorités marocaines, étant donné que l’intéressé avait refusé d’embarquer à la date initialement prévue pour son rapatriement. Par ailleurs la décision déférée, telle que cela serait documenté par les pièces du dossier, fut notifiée à l’intéressé le 17 juillet 2008 à 14.15 heures, de sorte qu’elle aurait été légalement prise dans les délais prévus par la loi et que partant les moyens d’illégalité soulevés laisseraient d’être fondés.

Quant au moyen du demandeur qu’il ferait l’objet d’une rétention depuis le 18 février 2008, le représentant étatique se prévaut du jugement du tribunal administratif du 7 juillet 2008 qui s’est prononcé déjà sur ce moyen et qui revêt entre-temps autorité de chose jugée.

Encore que la décision déférée ne soit pas des plus claires en ce que d’abord elle comporte une date erronée, qu’ensuite elle omet de faire référence à la décision initiale qu’elle entend reconduire et qu’enfin au niveau de son article 1er elle tend littéralement à proroger Monsieur … plutôt qu’une décision de placement initiale, il n’en demeure cependant pas moins que compte tenu des circonstances de l’espèce, ainsi que de la référence expresse dans le corps même de cette décision à une nécessité absolue de reconduire la décision de placement avec l’indication d’une nouvelle durée d’un mois à partir de la notification, le demandeur n’a raisonnablement pas pu se tromper sur les éléments décisionnels caractérisant cette décision. Le demandeur ayant pour le surplus utilement pu préparer sa défense par rapport à l’hypothèse vérifiée d’une décision prise le 17 juillet 2008, il n’a partant pas été lésé dans ses droits de la défense à cet égard.

Dans la mesure où l’intention du ministre de proroger le placement de l’intéressé pour une nouvelle durée d’un mois est dégageable à partir de la décision déférée et que celle-ci, telle que cela résulte du procès-verbal de notification versé en cause, fut notifiée à Monsieur … le 17 juillet 2008, elle s’inscrit partant dans les prévisions légales et ne saurait prêter utilement à critique sous ce rapport.

Quant au fond, c’est encore à juste titre que le délégué du gouvernement s’est référé au jugement du tribunal administratif du 7 juillet 2008 (n° 24542 du rôle) pour constater que les moyens du demandeur reposant sur la prémisse d’un placement quasi interrompu depuis le 18 février 2008 a été toisé et que le jugement en question est coulé en force de chose jugée, de sorte que le tribunal ne saurait y revenir dans la présente espèce.

Il découle de l’ensemble des développements qui précèdent qu’en l’absence d’autres moyens présentés par le demandeur, le recours sous analyse n’est pas justifié.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 30 juillet 2008 par :

Paulette Lenert, vice-président, Claude Fellens, juge, Lexie Breuskin, juge, en présence de Arny Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 5


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 24654
Date de la décision : 30/07/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2008-07-30;24654 ?

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