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28/07/2008 | LUXEMBOURG | N°24636

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 juillet 2008, 24636


Tribunal administratif Numéro 24636 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 juillet 2008 Audience publique du 28 juillet 2008 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24636 du rôle et déposée le 17 juillet 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Arnaud Ranzenberger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant êt

re né le … , alias …, déclarant être né le …, et être de nationalité guinéenne, actuel...

Tribunal administratif Numéro 24636 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 juillet 2008 Audience publique du 28 juillet 2008 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 24636 du rôle et déposée le 17 juillet 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Arnaud Ranzenberger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … , alias …, déclarant être né le …, et être de nationalité guinéenne, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 25 juin 2008 ordonnant la prorogation de son placement pour une nouvelle durée d’un mois à partir de la notification ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 21 juillet 2008 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Arnaud Ranzenberger et Monsieur le délégué du gouvernement Guy Schleder en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 juillet 2008.

En date du 25 juin 2008, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, désigné ci-après par : « le ministre », prit à l’encontre de Monsieur … un arrêté portant prorogation pour une nouvelle durée d’un mois de son placement initial au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière aux motifs énoncés comme suit :

« Vu l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu mon arrêté pris en date du 30 mai 2008 décidant du placement temporaire de l’intéressé ;

Considérant qu’un laissez-passer a été demandé à plusieurs reprises auprès des autorités guinéennes ;

- qu’en attendant l’émission de ce document de voyage, l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ;

Considérant qu’il y a nécessité absolue de reconduire la décision de placement ;(…) » Par requête déposée le 17 juillet 2008 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation à l'encontre de la décision de prorogation du 25 juin 2008.

Etant donné que l'article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l'entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.

l'emploi de la main-d'œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre la décision litigieuse. Ledit recours ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur soutient que la mesure de rétention ne serait pas justifiée, alors que l’éloignement, en vue duquel un placement dans un centre fermé serait ordonné, serait impossible en l’espèce. En effet, le fondement de la décision entreprise consisterait dans le fait « qu’un laissez-passer a été demandé à plusieurs reprises aux autorités guinéennes », à savoir, à l’Ambassade de Guinée à Bruxelles, en date des 3 juin 2006, des 3 et 11 octobre 2006, 9 août 2007 et 5 mai 2008. Dans la mesure où les autorités guinéennes n’auraient pas donné de réponse à ces courriers, il y aurait lieu de conclure à l’impossibilité matérielle des autorités luxembourgeoises à pouvoir procéder à son rapatriement. Il ajoute que la mesure de rétention constituerait une mesure de privation de liberté infligée volontairement par l’autorité administrative suite à sa peine d’emprisonnement de quatre ans qu’il viendrait d’avoir purgée, dans la mesure où le ministre serait parfaitement averti du fait que sa reconduite n’aboutirait pas faute de coopération des autorités guinéennes.

Le délégué du gouvernement signale que le ministre s’était déjà adressé à l’Ambassade de Guinée durant l’exécution de la peine de prison que le demandeur aurait purgée au Luxembourg, en vue de la délivrance d’un laissez-passer. Ainsi, le 3 octobre 2006, une fiche signalétique ensemble avec deux photos auraient été adressés à l’Ambassade, de même qu’une fiche de renseignement y aurait été transmise en date du 11 octobre de la même année. Deux rappels, à savoir en dates du 9 août 2007 et du 5 mai 2008, auraient été adressés aux autorités guinéennes pour réitérer la demande de délivrance d’un laissez-passer en vue du rapatriement de Monsieur …. Le ministre aurait signalé aux autorités guinéennes qu’il s’était avéré entretemps que Monsieur … auvait utilisé également une autre identité, à savoir, celle d’….

En date du 8 mai 2008, un Commissaire du service de Police Judiciaire se serait rendu au Centre Pénitentiaire en vue d’interroger le demandeur une nouvelle fois sur ses identité et nationalité. Ce serait au vu du refus total de collaboration aux fins de l’établissement de son identité que le ministre se serait vu contraint de proroger la mesure de placement initiale pris à l’encontre du demandeur le 30 mai 2008.

Par courriers des 3 et 17 juin 2008, le ministre se serait une nouvelle fois adressé aux autorités de Guinée, cette fois en leur faisant parvenir les empreintes digitales du demandeur.

En date du 3 juillet 2008, le ministre aurait essayé encore de contacter l’Ambassade de Guinée.

En ce qui concerne le reproche du demandeur que la prorogation de la mesure de placement constituerait une privation de liberté supplémentaire à la peine d’emprisonnement subie antérieurement, le délégué du gouvernement rétorque que si à l’heure actuelle le demandeur n’avait pas encore pu être rapatrié dans son pays d’origine, ce serait en raison de son refus de collaborer avec les autorités luxembourgeoises compétentes en vue de l’établissement de sa véritable identité.

D’après l’article 15, paragraphe (1), alinéa 1er de la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, « lorsque l’exécution d’une mesure d’expulsion ou de refoulement en application des articles 9 et 12 [de la loi du 28 mars 1972] est impossible en raison de circonstances de fait, l’étranger peut, sur décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, être placé dans un établissement approprié à cet effet pour une durée d’un mois ».

Ledit article exige la réunion de deux conditions légales sous-jacentes à une décision de placement, en l’occurrence 1) une mesure d’expulsion ou de refoulement en application des articles 9 ou 12 de la loi du 28 mars 1972, précitée, et 2) l’impossibilité de l’éloignement de l’étranger en raison de circonstances de fait.

A défaut de contestations avancées en cause relativement à la première de ces deux conditions légales, le tribunal, est tenu d’apprécier le moyen avancé en cause par le demandeur qui a trait à la condition de l’impossibilité de l’éloignement de l’étranger en raison de circonstances de fait. A cet égard, le tribunal est amené à constater qu’il y a en cause effectivement impossibilité de procéder à l’éloignement du demandeur, dans la mesure où, confrontées au refus opiniâtre du demandeur de révéler sa vraie identité, tel qu’il ressort du procès verbal du 13 mai 2008, les autorités luxembourgeoises se trouvaient dans l’impossibilité d’obtenir un laissez-passer permettant son rapatriement. D’après les informations fournies par le délégué du gouvernement lors de l’audience, ce n’était qu’en date des 3 et 17 juin 2008, que les autorités luxembourgeoises ont été en mesure d’adresser une nouvelle demande de laissez–passer à l’Ambassade guinéenne, cette fois sur base de son ultime identité indiquée comme étant véritable et avec ses empreintes digitales. Force est donc de constater que la raison principale des lenteurs au niveau de l’organisation de l’éloignement du demandeur réside non pas dans une impossibilité objective et vérifiée de procéder à cet éloignement, mais dans son refus de collaborer avec les autorités luxembourgeoises en vue d’établir son identité, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour ne pas être fondé.

Quant au moyen allégué que la mesure de rétention constituerait une mesure de privation de liberté infligée volontairement au demandeur par le ministre, il y a lieu de rappeler que le seul fait qu’une mesure de rétention suive chronologiquement une peine pénale purgée par l’intéressé au Centre pénitentiaire de Luxembourg, n’est pas de nature à rendre cette rétention administrative illégale ou arbitraire. Ce qui plus est, le ministre était valablement en droit de procéder à une prorogation de la mesure de placement initiale tel qu’il a été relevé précédemment, de sorte que le moyen afférent laisse d’être fondé.

C’est partant à juste titre que le ministre a ordonné la prorogation du placement de Monsieur … pour la durée d’un mois au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière.

Le recours sous analyse est partant à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 28 juillet 2008 par:

Paulette Lenert, vice-président, Françoise Eberhard, juge Lexie Breuskin, juge en présence de Arny Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 24636
Date de la décision : 28/07/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2008-07-28;24636 ?

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