Numéro 21944a du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 septembre 2006 Audience publique du 18 juin 2008 Recours formé par Madame …, … (CH) contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu
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JUGEMENT
Revu la requête inscrite sous le numéro 21944 du rôle et déposée le 18 septembre 2006 au greffe du tribunal administratif par Madame …, avocat, demeurant à CH-…, tendant à la réformation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 19 juin 2006 (n° C 12869 du rôle) portant rejet de sa réclamation contre un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2003, émis à son égard le 16 février 2005 par le bureau d'imposition Luxembourg 2 ;
Vu le jugement du tribunal administratif du 8 août 2007 par lequel a été reçu en la forme le recours en réformation dans la mesure où il a été dirigé contre la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 19 juin 2006 (n° C 12869 du rôle) portant rejet de la réclamation de Madame … contre un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2003, émis à son encontre le 16 février 2005 par le bureau d’imposition Luxembourg 2, le tribunal ayant nommé comme expert par ledit jugement, avant tout autre progrès en cause, tous autres droits et moyens des parties étant réservés, le professeur Dr Thomas RÜFNER, professeur de droit civil à l’université de Trèves, avec la mission d’examiner si, par application conjointe des §§ 1353, 1564, 1565, 1566 et 1567 BGB ou d’autres dispositions pertinentes de droit allemand, le mariage de la demanderesse était à considérer comme ayant échoué au 1er décembre 2002 ou toute autre date et à partir de quelle date la demanderesse était dispensée de son devoir au maintien de la communauté conjugale avec son époux par simple application des dispositions légales prévisées ;
Vu le procès-verbal d’assermentation du professeur Dr Thomas RÜFNER du 1er octobre 2007 ;
Vu le rapport d’expertise déposé au greffe du tribunal administratif le 4 décembre 2007 ;
Vu le mémoire supplémentaire déposé par Madame … au greffe du tribunal administratif le 7 janvier 2008 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport complémentaire, ainsi que Madame … en ses explications et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Marie KLEIN en sa plaidoirie.
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Au mois de février 2003, Madame …, préqualifiée, de nationalité allemande, établit son domicile au Luxembourg et y exerça une activité salariée.
Par jugement de l’Amtsgericht Frankfurt du 24 juin 2003, le divorce fut prononcé entre Madame … et son époux, Monsieur Robert …. Ce jugement mentionne entre autres que les époux avaient vécu séparément au domicile conjugal à partir de décembre 2001 et que Madame … avait quitté le domicile conjugal en avril 2002.
Par bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année 2003, émis le 16 février 2005 par le bureau d'imposition Luxembourg 2 de la section personnes physiques du service d’imposition de l’administration des Contributions directes, Madame … fut rangée, pour l’application du barème de l’impôt sur le revenu, dans la classe d’impôt 1A1.
Suite à la réclamation introduite le 23 mars 2005 par Madame … à travers laquelle elle prétendait au bénéfice de la classe d’impôt 2, le directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « directeur », prit le 19 juin 2006 une décision (n° C 12869 du rôle) à travers laquelle il rejeta cette réclamation aux motifs énoncés comme suit :
« Nach Einsicht der am 23. März 2005 eingegangenen Rechtsmittelschrift, mit welcher Frau …, mit Wohnsitz z.Z. in CH-…, den Einkommensteuerbescheid des Jahres 2003, ergangen am 16. Februar 2005, anficht;
Nach Einsicht der Steuerakte;
Nach Einsicht der §§ 228 und 301 der Abgabenordnung (AO);
In Erwägung, dass das Rechtsmittel form- und fristgerecht eingelegt wurde;
In Erwägung, dass sich die Rechtsmittelführerin dadurch beschwert fühlt, weil das Steueramt sie in der Klasse 1A1 besteuerte;
In Erwägung, dass gemäß § 243 AO die Rechtsmittelbehörden die Sache von Amts wegen zu ermitteln haben und nicht an die Anträge des Rechtsmittelführers gebunden sind;
In Erwägung, dass Art. 119, Ziff. 3 des Einkommensteuergesetzes vom 4. Dezember 1967 (LIR) die Klasse 2 vorbehält für:
a) Personen welche gemäss Art. 3 LIR zusammen veranlagt werden, b) verwitwete Personen, deren Ehe durch Tod während einem der drei dem Steuerjahr vorhergehenden Jahre aufgelöst wurde, c) geschiedene, von Tisch und Bett getrennt lebende sowie aufgrund einer Dispens des Gesetzes oder der Gerichtsautorität tatsächlich dauernd getrennt lebende Personen während der drei dem Steuerjahr vorhergehenden Jahre, wenn sie vor diesem Zeitraum und während fünf Jahren nicht in den Genuss dieser Bestimmung oder einer früheren ähnlichen Bestimmung gekommen sind;
In Erwägung, dass eine Zuteilung der Klasse 2 nach Art. 119, 3, litt. b LIR nicht in Betracht kommt, nach Art. 119, 3, litt. a LIR ebenfalls nicht, da nach Art. 3, litt. d LIR eine Zusammenveranlagung mit dem beschränkt steuerpflichtigen früheren Ehemann nur auf Antrag vorgenommen werden könnte, welcher nicht gestellt wurde;
In Erwägung, dass, insofern die Reklamantin am 24. Juni 2003 rechtskräftig geschieden wurde, ihr nach vorerwähntem Art. 119, Ziff. 3, litt. c die Klasse 2 für die Jahre 2004, 2005 sowie 2006 zusteht, jedoch nicht im Streitjahr;
dass, im Übrigen, einerseits kein Dispens eines Gesetzes oder einer Gerichtsautorität, getrennt zu leben, vorliegt;
dass andererseits die Trennung von Tisch und Bett eines Gerichtsurteils bedarf, welches aber nicht vorliegt;
In Erwägung, dass gemäß Art. 119 LIR zwecks Anwendung des Tarifs die Steuerpflichtigen in drei Klassen eingeteilt werden, wobei die Klasse 1A, laut Art. 119, Ziff.
2, folgende Personen begreift, soweit sie nicht Klasse 2 angehören:
a) die verwitweten Personen, b) Personen, die unter den Voraussetzungen des Artikels 123 LIR in den Genuss einer Kinderermässigung kommen, c) Personen, die zu Beginn des Steuerjahrs ihr 64. Lebensjahr vollendet haben;
dass im vorliegenden Falle bei der Besteuerung aufgrund von vorstehendem Art. 119, 2) litt. b die Klasse 1A1 zu Recht zuerkannt wurde;
In Erwägung, dass darüber hinaus die Besteuerung den gesetzlichen Bestimmungen entspricht und auch nicht beanstandet wurde ».
Par requête déposée le 18 septembre 2006, Madame … a introduit un recours contentieux visant le directeur comme partie défenderesse et concluant à son droit d’être rangée pour l’année d’imposition 2003 dans la classe d’impôt 2.
Par jugement du 8 août 2007, le tribunal administratif, après avoir reçu en la forme le recours en réformation dirigé contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 19 juin 2006 (n° C 12869 du rôle) par laquelle la classe d’impôt 1A1 a été retenue dans le chef de la demanderesse au lieu de la classe d’impôt 2, a tout d’abord retenu que la demanderesse ne tombe pas dans le champ d’application des hypothèses sub a) et b) de l’article 119 n° 3 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé « LIR », et il a été amené à examiner si la demanderesse pouvait rentrer dans les prévisions du point c) de cette même disposition légale. Dans le cadre de cette analyse, le tribunal a été amené à constater que l’article 119 n° 3. c) LIR s’insère dans le cadre du droit national relatif aux devoirs des personnes mariées et à la procédure de divorce et ne comporte pas de dispositions spécifiques quant aux procédures de divorce soumises à une loi étrangère. Ainsi, le droit luxembourgeois consacre à travers l’article 215 du Code civil à charge des époux un devoir de cohabitation qui subsiste tant que les époux n’auront pas été dispensés de ce devoir à travers une ordonnance judiciaire dans le cadre d’une procédure de divorce, sur base notamment des articles 268 ou 280 du Code civil, la loi luxembourgeoise ne prévoyant pas de dispense automatique de ce devoir de cohabitation par le seul effet de la loi. Le tribunal a encore constaté qu’au vœu de la loi prévisée du 4 décembre 1967, l’application de l’imposition collective des époux est liée à la seule persistance du devoir de cohabitation consacré par l’article 215 du Code civil sans tenir compte d’une séparation de fait – hormis l’hypothèse spécifique de l’article 3, d) LIR – et que l’extension de la classe d’impôt 2, de principe applicable aux époux imposables collectivement, aux personnes séparées de fait de leur conjoint est soumise à la condition supplémentaire que le devoir de cohabitation ait cessé, cette cessation devant être fondée en droit luxembourgeois sur une ordonnance judiciaire dans le cadre d’une procédure de divorce portant autorisation aux époux de résider séparément.
Dans le cadre de son analyse, le tribunal a retenu que la demanderesse a été divorcée sous l’empire du droit allemand à travers le jugement prévisé de l’Amtsgericht Frankfurt du 24 juin 2003. La demanderesse avait en effet invoqué les dispositions de droit allemand applicables à son divorce et avait estimé ainsi que le droit allemand consacrerait à travers le § 1353 (1) BGB un devoir de cohabitation pour les époux, mais que le § 1353 (2) BGB lèverait cette obligation à charge d’un époux notamment en cas d’échec du mariage. Le tribunal a encore constaté qu’au vœu du § 1565 (1) BGB, un mariage aurait échoué lorsque la communauté de vie n’existe plus et s’il ne peut pas être supposé qu’elle soit rétablie par les époux. En outre, dans son jugement précité du 8 août 2007, le tribunal a encore relevé que le § 1566 (1) BGB établirait de plus la présomption irréfragable d’un échec du mariage lorsque les époux vivent séparés depuis un an, que l’un des époux demande le divorce et que l’autre y consent, le § 1567 (1) BGB précisant encore que la communauté ne subsiste même plus lorsque les époux vivent séparément au domicile conjugal, en relevant qu’il paraît également que le § 620 ZPO prévoit une « einstweilige Anordnung » seulement sur demande afférente afin de régler des problèmes spécifiques relatifs à la séparation des époux, mais que l’accomplissement de cette procédure n’est pas requis pour que le devoir de communauté conjugale ne soit plus applicable.
Le tribunal a encore estimé pouvoir retenir que sur base des faits constatés par le jugement de l’Amtsgericht Frankfurt du 24 juin 2003 et du certificat de la même juridiction du 17 mars 2005, ensemble les textes susvisés du BGB, l’argumentation de la demanderesse suivant laquelle elle serait à considérer comme vivant séparée de son époux depuis décembre 2001, de sorte que son mariage serait à considérer comme ayant échoué à partir de décembre 2002 et qu’à partir de ce mois, elle ne serait plus tenue, par l’effet du § 1353 (2) BGB, au respect de son droit de cohabitation prévu par le § 1353 (1) BGB, paraissait plausible. Ainsi, d’après le tribunal, dans la mesure où l’article 119 n° 3. c) LIR ne précise pas que la dispense du devoir de cohabitation devrait résulter de la loi luxembourgeoise, la demanderesse serait dans cette hypothèse à considérer comme ayant bénéficié à partir de décembre 2002 d’une dispense de cohabitation de la loi allemande applicable, de manière qu’elle aurait satisfait au 1er janvier 2003 aux deux conditions cumulatives posées par l’article 119 n° 3. c) LIR, à savoir une séparation de fait de son époux et une dispense légale du devoir de cohabitation avec ce dernier, pour être rangée dans la classe d’impôt 2.
Toutefois, dans la mesure où la demanderesse n’avait légalement établi ni le contenu des dispositions de droit allemand invoquées, ni leur interprétation et application dans le sens avancé par elle, le tribunal, après avoir rappelé qu’il ne pouvait appliquer d’office que des dispositions de droit national ou international applicables au cas d’espèce, a estimé qu’il n’était pas en mesure de faire droit au recours de la demanderesse en l’absence d’une vérification du contenu du droit allemand applicable au cas d’espèce. Il a ainsi été amené à nommer un expert afin d’être renseigné sur le contenu des dispositions de droit allemand invoquées par la demanderesse, avec la mission d’examiner si, par application conjointe des §§ 1353, 1564, 1565, 1566 et 1567 BGB ou d’autres dispositions pertinentes de droit allemand, le mariage de la demanderesse était à considérer comme ayant échoué au 1er décembre 2002 ou toute autre date et à partir de quelle date la demanderesse était dispensée de son devoir au maintien de la communauté conjugale avec son époux par simple application des dispositions légales prévisées.
Il ressort du rapport d’expertise que la demanderesse n’était plus soumise à une obligation de cohabitation avec son mari, d’après le droit allemand, à partir du moment où leur mariage pouvait être considéré comme ayant échoué ou à partir du moment où le souhait du mari de la demanderesse en vue du rétablissement de la communauté conjugale pouvait être considéré comme étant abusif.
Sur base des faits et éléments soumis à l’expert, celui-ci est arrivé à la conclusion qu’il n’existait pas de raisons pouvant amener au constat que le souhait en vue du rétablissement de la communauté conjugale pouvait être considéré comme étant abusif. Il en a tiré la conclusion qu’à aucun moment antérieur au divorce de la demanderesse, celle-ci n’a plus été obligée à une cohabitation commune avec son mari, pour le motif que le souhait de son conjoint tendant à un éventuel rétablissement ou établissement d’une communauté conjugale ne pouvait être considéré comme étant abusif au sens du § 1353 alinéa 2 BGB.
Il s’ensuivait, d’après l’expert, qu’une dispense de la communauté d’habitation ne pouvait être retenue que sur base d’un échec du mariage, qui est défini par le § 1565 alinéa 1 s. 2 BGB comme étant la situation dans laquelle une communauté de vie n’existe plus entre les conjoints et qu’il peut être présumé que les conjoints n’ont plus l’intention de la rétablir.
Il a retenu que cette situation pouvait résulter soit immédiatement à partir de faits concluants (pouvant se dégager notamment du fait que l’un des conjoints s’est tourné vers un autre partenaire) soit conformément aux présomptions visées par le § 1566 BGB. En ce qui concerne cette dernière disposition légale, l’expert a retenu que pour que soit remplie la présomption légalement prévue par ladite disposition, il suffisait qu’était rapportée la preuve de vie séparée entre les conjoints. L’expert a encore retenu qu’à supposer que les conjoints vivaient séparément au plus tard à partir du mois de décembre 2001, la condition relative à la vie séparée des époux pendant la durée d’un an aurait été remplie au mois de décembre 2002.
En effet, d’après le § 1566 alinéa 1 BGB, un mariage est à considérer, de manière irrévocable, comme ayant échoué à partir du moment où les conjoints ont habité séparément pendant au moins un an. Après avoir procédé à une analyse détaillée de l’applicabilité éventuelle du § 1566 alinéa 1 BGB, l’expert est venu à la conclusion qu’il n’était pas en possession d’éléments suffisants permettant de conclure au fait que toutes les conditions étaient remplies pour permettre de retenir qu’il y avait lieu de faire application de la présomption prévue par ladite disposition légale.
L’expert a encore examiné s’il y avait lieu de faire application du § 1565 alinéa 1 s. 2 BGB pour constater un éventuel échec du mariage de la demanderesse au mois de décembre 2002. Il a relevé dans ce contexte que la vie séparée des conjoints pendant une période prolongée constituait un indice très fort permettant de conclure à l’échec du mariage.
Dans le cadre de cette analyse, l’expert a notamment retenu que sur base des éléments qui étaient en sa possession, il n’était pas possible de conclure à un échec du mariage de la demanderesse au mois de décembre 2002, étant donné qu’à partir des éléments de la cause il n’était pas possible de connaître la manière dont le divorce a été demandé ni s’il répondait au souhait des deux conjoints. Il ne pouvait partant pas retenir la conclusion suivant laquelle le mariage de la demanderesse pouvait être considéré comme ayant échoué avant le jugement de divorce.
En conclusion à son rapport d’expertise précité, l’expert a retenu qu’il n’existait aucun élément qui permettrait une dispense de l’obligation à une communauté conjugale conformément au § 1353 alinéa 2 BGB indépendamment de l’échec du mariage. Il s’ensuivrait, d’après l’expert, que l’obligation des conjoints à une communauté conjugale aurait pris fin au moment où le mariage pouvait être considéré comme ayant échoué. Les éléments de la cause ne permettraient toutefois pas de déterminer avec exactitude la date à laquelle le mariage de la demanderesse pouvait être considéré comme ayant échoué. Le fait que le mariage pouvait être considéré comme ayant échoué déjà à partir du mois de décembre 2002 ne pourrait être retenu qu’à condition qu’en plus d’une vie séparée de la demanderesse pendant un an, il devrait pouvoir être retenu qu’une demande en divorce a été introduite, correspondant aux conditions posées par le § 1566 alinéa 1er BGB et le § 630 ZPO ou s’il pouvait être retenu sur base d’éléments non communiqués qu’à ce moment les conditions d’application du § 1565 alinéa 1 S. 2 BGB étaient remplies.
Dans son mémoire complémentaire déposé à la suite du rapport d’expertise précité du professeur Dr Thomas RÜFNER, la demanderesse expose que s’il est vrai que ni l’identité de celui qui a introduit la demande en divorce, ni le fait de savoir si l’autre conjoint a marqué son accord avec ladite demande ne se dégageraient des pièces et éléments remis à l’expert, il ressortirait néanmoins du jugement de divorce, qui ne semblerait pas avoir été remis à l’expert, que la demande en divorce avait été formulée par elle et que son conjoint n’a pas formulé une telle demande, tout en déclarant accepter le divorce. Elle estime partant que les présomptions prévues par le § 1566 alinéa 1er BGB auraient été remplies, de sorte que son ex-
conjoint et elle-même devraient être considérés comme ayant vécu de manière séparée depuis le mois de décembre 2001 et qu’au plus tard à partir du mois décembre 2002, à savoir une année après ladite séparation l’intérieur du logement commun, leur mariage aurait dû être considéré comme ayant échoué. Elle expose encore qu’il se dégagerait d’un procès-verbal d’une audience du « Familiengericht » du 24 juin 2003 que les deux parties à l’instance en divorce auraient trouvé un accord non seulement quant à la séparation et quant au fait de quitter le logement commun et que le seul point qui restait à régler entre les parties avait trait aux indemnités compensatoires. Le fait que cette dernière question avait été séparée de l’instance en divorce elle-même, pour des raisons strictement personnelles, acceptées par le tribunal allemand, serait la raison pour laquelle le jugement de divorce ne contient aucune indication quant à des pensions alimentaires ou autres.
En conclusion, la demanderesse soutient que les conditions du § 1566 alinéa 1er BGB auraient été remplies en l’espèce, en ce sens que son mariage devrait pouvoir être considéré comme ayant échoué au plus tard à partir du mois de décembre 2002, tel que cela ressortirait du rapport d’expertise précité du professeur Dr RÜFNER, ensemble avec le jugement de divorce qui ne semblerait pas avoir été remis audit expert. Du fait que le § 1566 alinéa 1er BGB devrait trouver application en l’espèce, il devrait pouvoir être retenu qu’il n’aurait plus existé une obligation à maintenir une communauté conjugale, de sorte que cette conclusion devrait aboutir à son classement dans la classe d’impôt 2 pour l’année d’imposition litigieuse et partant les conditions de l’article 119, point 3 LIR seraient remplies.
Il se dégage du rapport d’expertise du professeur Dr RÜFNER du 30 novembre 2007 qu’il existe, en vertu du § 1566 (1) BGB une présomption irréfragable d’un échec du mariage lorsque les deux époux vivent séparés depuis un an à condition notamment que l’un des conjoints demande le divorce et que l’autre y consent. L’expert n’était toutefois pas en mesure, sur base des pièces et éléments se trouvant à sa disposition, de vérifier si les conditions d’application de ladite disposition de droit allemand étaient remplies dans le cas d’espèce.
Dans son mémoire complémentaire déposé au greffe du tribunal administratif le 7 janvier 2008, la demanderesse a toutefois pu estimer à bon droit que l’expert n’était pas en possession du jugement de divorce du 24 juin 2003 dont il ressort que les deux conjoints ont pu exposer aux juges allemands, de manière crédible, qu’ils ont vécu de manière séparée depuis le mois de décembre 2001 et qu’ils n’étaient plus d’accord à reprendre une vie commune. C’est encore à bon droit que la demanderesse se réfère à un procès-verbal d’une audience du « Familiengericht » de Frankfurt-am-Main du 24 juin 2003, dont il ressort que les deux conjoints ont exposé aux juges allemands, de manière concordante, avoir vécu de manière séparée à l’intérieur de leur domicile conjugal depuis le mois de décembre 2001 jusqu’au mois d’avril 2002, date à laquelle la demanderesse a quitté ledit logement conjugal et que l’ex-conjoint de la demanderesse ne s’est pas opposé à la demande en divorce. Il se dégage partant des éléments qui précèdent que les deux parties étaient d’accord non seulement quant à la séparation, à partir du mois de décembre 2001, mais également quant au fait que la demanderesse quitte le logement conjugal au mois d’avril 2002.
Au vu des éléments ci-avant retenus, il y a lieu de conclure au fait que les conditions d’application du § 1566 (1) BGB, établissant une présomption irréfragable d’échec du mariage à partir du moment où les époux vivent séparés depuis un an, sont remplies en l’espèce à partir de la date du 1er janvier 2003, de sorte qu’en ce qui concerne l’année d’imposition 2003, la demanderesse était présumée avoir vécu de manière séparée de son conjoint de l’époque, de sorte à rentrer dans le champ de l’hypothèse sub c) de l’article 119 n° 3 LIR et qu’elle doit bénéficier de la classe d’impôt 2 pour l’année 2003 actuellement litigieuse. En effet, suivant les dispositions de droit allemand, le mariage de la demanderesse est à considérer comme ayant échoué à partir de décembre 2002, de sorte qu’à partir de ce moment, elle n’était plus tenue, par l’effet du § 1353 (2) BGB au respect de son devoir de cohabitation tel que prévu par le § 1353 (1) BGB. Il s’ensuit que les deux conditions cumulatives posées par l’article 119 n° 3 c) LIR, à savoir une séparation de fait de son époux et une dispense légale du devoir de cohabitation avec ce dernier sont remplies en l’espèce.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de faire droit au recours en réformation introduit par la demanderesse à l’encontre de la décision du directeur de l’administration des Contributions du 19 juin 2006 et de décider que la demanderesse avait droit au bénéfice de la classe d’impôt 2 pour l’année d’imposition 2003.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
vidant le jugement interlocutoire du 8 août 2007 ;
déclare fondé le recours en réformation dirigé contre la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 19 juin 2006 (C 12869 du rôle) ;
partant, par réformation de ladite décision, déclare que la demanderesse a droit au bénéfice de la classe d’impôt 2 pour l’année d’imposition 2003 ;
renvoie le dossier en prosécution de cause au directeur de l’administration des Contributions directes pour attribution au bureau d’imposition compétent ;
condamne l’Etat aux frais.
Ainsi jugé par:
Carlo Schockweiler, premier vice-président, Martine Gillardin, premier juge, Françoise Eberhard, juge, et lu à l’audience publique du 18 juin 2008 par le premier vice-président, en présence du greffier Claude Legille.
Legille Schockweiler 8