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16/06/2008 | LUXEMBOURG | N°23774

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 16 juin 2008, 23774


Tribunal administratif N° 23774 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 décembre 2007 Audience publique du 16 juin 2008 Recours formé par Madame …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23774 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 décembre 2007 par Maître Pascale PETOUD, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … (Ethiopie), de national

ité érythréenne, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères...

Tribunal administratif N° 23774 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 décembre 2007 Audience publique du 16 juin 2008 Recours formé par Madame …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23774 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 décembre 2007 par Maître Pascale PETOUD, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … (Ethiopie), de nationalité érythréenne, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 5 octobre 2007 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et lui ayant refusé le bénéfice de la protection subsidiaire, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 13 novembre 2007 prise sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 mars 2008 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 3 avril 2008 par Maître Pascale PETOUD ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 18 janvier 2008 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Pascale PETOUD et Monsieur le délégué du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 2 juin 2008.

Madame … introduisit en date du 16 janvier 2006 une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Elle fut entendue le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux de la police grand-ducale, sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg et sur son identité.

Elle fut entendue le 14 mars 2006 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa Madame … par décision du 5 octobre 2007, lui envoyée par courrier recommandé expédié en date du 9 octobre 2007, de ce qu’elle ne saurait bénéficier ni de la protection accordée par la Convention de Genève ni de la protection subsidiaire telle que prévue par la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection. La décision est libellée comme suit :

« En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 16 janvier 2006 et le rapport d’entretien de l’agent du Ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration du 14 mars 2006.

Il ressort du rapport du Service de Police Judiciaire que vous auriez quitté l’Ethiopie pour vous rendre à Nairobi / Kenya pour y prendre l’avion pour l’Europe. Un soudanais vous aurait accompagnée, ainsi que votre fille, pendant le voyage et vous aurait conduite au Luxembourg en voiture. Le dépôt de votre demande d’asile date du 16 janvier 2006. Vous ne présentez aucune pièce d’identité.

Il résulte de vos déclarations que vous auriez vécu en Ethiopie et votre fiancé aurait été membre de l’« Oromo liberation front » (OLF). Vous ne seriez par contre pas membre de cette organisation. Votre fiancé aurait été arrêté le 19 décembre 2005 en raison de son appartenance à l’OLF. La police serait venue à votre domicile le lendemain afin de chercher des documents en menaçant votre enfant en cas de non-collaboration de votre part. De peur, vous vous seriez rendue chez un ami de votre fiancé où vous auriez vécu jusqu’à votre départ de l’Ethiopie, soit le 5 janvier 2006. Cet ami aurait organisé votre voyage et l’aurait payé.

Il y a d’abord lieu de relever que la reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est telle qu’elle laisse supposer une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.

A supposer les faits que vous alléguez comme établis, ils ne sauraient constituer un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu’ils ne peuvent, à eux seuls, établir dans le chef du demandeur d’asile une crainte fondée d’être persécuté dans votre pays d’origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques ainsi que le prévoit l'article 1er, section 1, § 2 de la Convention de Genève. En effet, le fait d'avoir été une fois battue et menacée par la police dans le cadre d'une enquête concernant votre petit-ami n'est pas d'une gravité telle que le statut de réfugié doit être octroyée. Notons qu'il est de jurisprudence que des chicaneries, mêmes quotidiennes, faites par les autorités de police et les coups infligés lors d'un contrôle de police constituent des pratiques certes condamnables, mais ne sont pas d'une gravité telle qu'ils justifient une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève.

Force est de constater en outre que vous n'apportez aucune preuve qui puisse corroborer ce que vous avez raconté. De plus, il convient de mettre en exergue que vous n'êtes membre d'aucun parti politique et votre fiancé serait « juste membre » de l'OLF, selon vos indications. Il est ainsi peu vraisemblable qu'en dehors des menaces que vous auriez reçues vous risquiez par ricochet d'être persécutée, alors que votre petit-ami n'aurait pas de position particulièrement exposée au sein de cette organisation politique.

A cela s'ajoute que vous déclarez être de nationalité érythréenne, de sorte que vous auriez pu vous rendre en Erythrée même si vous indiquez ne connaître personne là-bas. Au contraire, vous avez précisé lors de l'entretien que votre oncle chez qui vous auriez vécu avant de vous installer chez votre petit-ami, aurait été rapatrié en Erythrée. Il convient d'ailleurs de souligner qu'à considérer l'Erythrée comme votre pays d'origine, il n'est absolument pas avéré que vous risquiez une quelconque persécution en cas de retour dans ce pays. L'affirmation selon laquelle les autorités érythréennes pourraient vous tuer seulement en raison de l'absence de documents n'est absolument pas crédible. En effet, il ressort du rapport de « Home Office » sur l'Erythrée du 4 septembre 2007 que tout d'abord au sujet des érythréens qui ont été rapatriés de l'Ethiopie vers l'Erythrée, ils ont reçu à leur arrivée une carte d'identification suivant un formulaire qu'ils ont rempli, de même qu'un logement provisoire, de la nourriture, une aide médicale et diverses autres prises en charge. Ensuite et surtout il convient de souligner que ce rapport explique que dans le cas de naissance mixte il n'est pas difficile d'obtenir la citoyenneté et la nationalité à partir du moment où il est possible de prouver l'existence de racines érythréennes. En l'espèce, vous ne seriez même pas issue de mariage mixte, vos deux parents auraient été érythréens. Même à admettre que ces derniers sont décédés et même si vous ne détenez aucun document, il est tout à fait possible de prouver aux autorités érythréennes, notamment avec l'aide de votre oncle rapatrié de l'Ethiopie, que vous avez toutes vos racines dans ce pays.

Il s'ensuit qu'une crainte de persécution en cas de retour dans le pays dont vous prétendez avoir la nationalité n'est absolument pas fondée.

Enfin, il n'est pas exclu que des raisons matérielles sous-tendent votre demande d'asile. En effet, vous avez indiqué ne jamais avoir travaillé de sorte qu'il est possible que vous ayez préféré venir en Europe également pour des raisons économiques. Or, de tels motifs ne sauraient davantage fonder une demande en obtention du statut de réfugié.

Ainsi, vous n'alléguez aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays. Une crainte fondée de persécution en raison d'opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l'appartenance à un groupe social n'est par conséquent pas établie.

En outre, votre récit ne contient pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 37 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection. En effet, les faits invoqués à l'appui de votre demande ne nous permettent pas d'établir que a) vous craignez de vous voir infliger la peine de mort ou de vous faire exécuter, b) vous risquez de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, c) vous êtes susceptible de faire l'objet de menaces graves et individuelles contre votre vie en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

Selon le même raisonnement que celui appliqué à l'évaluation de votre demande d'asile, le fait de prétendre sans aucun élément probant qu'en Ethiopie la police vous aurait menacée afin d'obtenir des documents appartenant à votre compagnon ne saurait justifier l'octroi d'une protection subsidiaire. A cela s'ajoute qu'en prenant en compte les éléments de votre dossier, une crainte de subir des traitements inhumains ou dégradants, ou bien des tortures en cas de retour dans le pays dont vous prétendez avoir la nationalité, à savoir l'Erythrée, n'est absolument pas établie.

Votre demande en obtention du statut de réfugié est dès lors refusée comme non fondée au sens de l'article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d'une procédure relative à l'examen d'une demande d'asile ; 2) d'un régime de protection temporaire, de sorte que vous ne saurez bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève. Le bénéfice de la protection subsidiaire tel que prévu par la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection doit également vous être refusé. » Madame … fit introduire en date du 5 novembre 2007 un recours gracieux à l’encontre de cette décision.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration confirma sa décision antérieure par une décision prise en date du 13 novembre 2007.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 13 décembre 2007, Madame … a fait déposer un recours en réformation à l’encontre des deux décisions ministérielles de refus des 5 octobre et 13 novembre 2007.

Etant donné que tant l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1.

d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire, que l’article 19, paragraphe 3 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection prévoient un recours en réformation en matière de demandes d’asile et de demandes de protection subsidiaire déclarées non fondées, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, Madame … fait valoir qu’elle serait de nationalité érythréenne, mère d’un enfant d’un père éthiopien, et qu’elle aurait toujours vécu depuis 1998 clandestinement en Ethiopie avec le père de son enfant. Elle relate que son ami aurait été commerçant à Addis Abeba et aurait eu parallèlement une activité politique au sein d’un mouvement politique soutenant la cause des Oromos et qu’en date du 19 décembre 2005 il aurait été arrêté par la police éthiopienne. Suite à cette arrestation, la police serait venue à leur domicile pour chercher des documents en relation avec l’activité politique de son ami et qu’à cette occasion elle aurait été battue et sa fille aurait été menacée avec une arme. Suite à cet épisode fortement traumatisant elle aurait décidé de fuir l’Ethiopie. Elle estime que le ministre n’aurait pas apprécié à leur juste valeur les faits par elle relatés, de sorte qu’elle devrait bénéficier du statut de réfugié. Elle fait encore ajouter qu’un rapatriement en Erythrée ne serait pas envisageable dans la mesure où son enfant, né d’une union mixte avec un père éthiopien, serait considéré de par sa filiation paternelle comme éthiopienne.

Le délégué du Gouvernement fait valoir que dans la mesure où la demanderesse est de nationalité érythréenne, elle ne saurait faire valoir en tant que crainte de persécution des évènements vécus en Ethiopie. A ce titre, le délégué du Gouvernement se réfère à un jugement du tribunal administratif du 31 décembre 2007 (n° 22920 du rôle). Il ajoute que sa fille pourrait aisément acquérir la nationalité érythréenne, de sorte que rien ne s’opposerait à ce qu’elle-même et son enfant puissent se rendre en Erythrée. Pour le surplus, il estime que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation de la demanderesse.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse fait valoir que ni la loi, ni la directive, ni la Convention de Genève n’exigeraient que les persécutions invoquées par un demandeur d’asile aient eu lieu dans le pays dont il a la nationalité. Pour étayer ses affirmations, la demanderesse se réfère à un jugement du tribunal administratif du 3 avril 2003 (n° 15179 du rôle). Dans ce contexte, elle demande encore au tribunal de poser pour autant que de besoin une question préjudicielle à la Cour de justice des Communautés européennes.

Le délégué du Gouvernement fait valoir que la jurisprudence invoquée par la demanderesse n’aurait rien à voir avec le cas actuellement soumis au tribunal et qu’il serait évident que la Convention de Genève se référerait au pays dont le demandeur a la nationalité pour examiner si un risque de persécutions existe.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

L’examen des déclarations faites par la demanderesse lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que la demanderesse reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Madame … affirme être de nationalité érythréenne mais avoir toujours vécu en Ethiopie. Les craintes de persécutions dont elle fait état se limitent à l’Éthiopie.

Etant donné que la question de savoir si l’intéressée craint avec raison d’être persécutée doit être examinée par rapport au pays dont celle-ci a la nationalité, c’est à juste titre que le délégué du Gouvernement a relevé que les problèmes rencontrés en Ethiopie ne sont pas pertinents. Même si l’article 1er de la Convention de Genève ne précise pas expressément que les persécutions dont se prévaut un demandeur d’asile doivent avoir lieu dans le pays dont il a la nationalité, cette exigence découle cependant de l’esprit même du texte et du bout de phrase précisant que la personne se prévalant du statut de réfugié doit se trouver « hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays », à savoir précisément le pays dont elle a la nationalité. En effet tant que l’intéressé n’éprouve aucune crainte vis-à-vis du pays dont il a la nationalité, il est possible d’attendre de lui qu’il se prévale de la protection de ce pays. Il n’a pas besoin d’une protection internationale et par conséquent il n’est pas un réfugié1. Il n’y a dès lors pas lieu de poser une question préjudicielle à la Cour de justice des communautés européennes.

Le jugement du 3 avril 2003 (n° 15179) du rôle invoqué par la demanderesse n’est pas non plus pertinent en l’espèce pour avoir trait à une toute autre situation de fait et de droit. En effet il s’agissait d’analyser la demande d’asile posée par un ressortissant congolais ayant obtenu au Niger le statut de réfugié à cause de sa situation vécue au Congo. Dans ce cas il appartenait au ministre d’analyser sa demande par rapport à sa situation au Niger, dernier pays dans lequel il a résidé pendant quelques années avant de se rendre au Luxembourg, et non pas par rapport au Congo, son pays d’origine initial, par rapport auquel il s’était déjà vu reconnaître le statut de réfugié au Niger et ce en application des Conclusions n° 58 relatives au « Problèmes des réfugiés et des demandeurs d’asile quittant de façon irrégulière un pays où la protection leur a déjà été accordée », adoptées par le Comité Exécutif du programme du HCR lors de sa 40e session qui précisent qu’une personne qui s’est vue accorder l’asile dans un pays n’est pas éligible au statut de réfugié dans un autre pays à moins que le pays dans lequel elle avait trouvé asile ne constitue plus pour elle un pays sûr.

Au vu de ce qui précède, les faits et craintes de persécutions que la demanderesse a invoqués par rapport à sa situation en Ethiopie ne sont pas de nature à affecter la régularité de la décision litigieuse.

En ce qui concerne sa situation en Erythrée, la demanderesse n’a pas fait état d’une persécution au sens de la Convention de Genève mais se limite à affirmer qu’un retour en Erythrée ne serait pas possible à cause de la nationalité de sa fille ayant un père éthiopien.

Les considérations avancées par la demanderesse à ce titre ne sont cependant pas non plus fondées. En effet il résulte d’un rapport du Home Office du 4 septembre 2007 « in the case of a mixed birth a person would generally not have too many problems as long as they can prove that they have Eritrean roots. This would make them eligible for Eritrean nationality under the normal procedures of the nationality proclamation » 2. A ce titre the “Eritrean Nationality Proclamation No. 21/1992 précise sous le titre “Nationality by birth” “Any person born to a father or a mother of Eritrean origin or abroad is an Eritrean national by birth”. A cela s’ajoute que la demanderesse n’a même pas essayé de se rendre en Erythrée, de sorte que les difficultés par elle invoquées restent pour le surplus dans un état purement hypothétique.

Le moyen que l’analyse ministérielle de la situation de Madame … serait contraire à l’article 26 (3) c de la loi du 5 mai 2006 laisse à son tour d’être fondé dans la mesure où il résulte aussi bien de la décision ministérielle que des différents mémoires déposés que le ministre a tenu compte de la situation personnelle de la demanderesse. Le ministre a en effet pris en compte aussi bien la situation de la demanderesse en Ethiopie que celle en Erythrée et a par ailleurs analysé l’incidence particulière sur sa situation de la question de sa propre nationalité et de celle de sa fille.

1 Cf. Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié, HCNR, Genève Janvier 1992, p.44. et TA 31 décembre 2007, n°22920, TA 11 décembre 2006, n°21747 2 Home Office, Country of Origin Information Report, ERTIREA, 4 september 2007, p.97 Les déclarations de la demanderesse ne témoignent pas non plus d’une menace grave au sens de l’article 37 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et aux formes complémentaires de protection qui définit les atteintes graves comme suit:

« Les atteintes graves sont:

a) la peine de mort ou l’exécution; ou b) la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine; ou c) des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. ».

Partant, le recours est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 16 juin 2008 par :

Mme Lenert, vice-président, Mme Thomé, premier juge, M. Sünnen, juge en présence de M. Schmit greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 7


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 23774
Date de la décision : 16/06/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2008-06-16;23774 ?

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