Tribunal administratif Numéro 23760 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 décembre 2007 Audience publique du 14 avril 2008 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 23760 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 7 décembre 2007 par Maître Isabelle FERAND, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Nigeria), de nationalité nigériane, demeurant actuellement à L-…, tendant, d’une part, à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 7 novembre 2007 portant refus de sa demande de protection internationale et, d’autre part, à la réformation sinon à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire luxembourgeois inscrit dans la même décision ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 janvier 2008 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Isabelle FERAND et Madame le délégué du Gouvernement Marie-Anne KETTER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 11 février 2008.
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Le 7 mai 2007, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés.
Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire de voyage suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg.
Monsieur … fut entendu le 11 mai 2007 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.
Par décision du 7 novembre 2007, expédiée par lettre le 9 novembre 2007, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ci-après « le ministre », informa l’intéressé que sa demande de protection internationale avait été rejetée comme étant non fondée. Cette décision est libellée comme suit :
« J'ai l'honneur de me référer à votre demande en obtention d'une protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection que vous avez présentée auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration en date du 7 mai 2007.
En application de la loi précitée du 5 mai 2006, votre demande de protection internationale a été évaluée par rapport aux conditions d'obtention du statut de réfugié et de celles d'obtention du statut conféré par la protection subsidiaire.
En mains le rapport du Service de Police Judiciaire de la même date et le rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration du 11 mai 2007.
Il ressort du rapport du Service de Police Judiciaire que vous auriez quitté votre pays le 25 avril 2007 avec l'aide d'un ressortissant italien du nom de XXX. Ce dernier vous aurait fait quitter le continent africain en avion. L'argent ayant servi à payer votre voyage aurait été collecté par XXX auprès d'une organisation politique puisque vous n'auriez pas eu de moyens suffisants. Vous dites en outre avoir dû quitter votre pays à cause de votre appartenance au « People's Democrate Party » et de menaces subies par le parti opposé. Le dépôt de votre demande de protection internationale date du 7 mai 2007. Vous ne présentez aucune pièce d'identité.
Il résulte de vos déclarations que vous auriez été un membre actif du PDP chargé de la sensibilisation des jeunes à Benin City. Dans le cadre de cette activité, vous auriez eu des problèmes avec votre oncle, lui-même militant pour le parti d'opposition « Action Congress Party ». Ce dernier aurait tenté de vous embrigader dans son parti et votre objection aurait causé un différend entre vous. A la suite d'une altercation avec votre oncle durant un rallye, un groupe d'hommes armés de machettes et de fusils aurait tenté de vous approcher et aurait mis le feu à la maison où vous auriez trouvé refuge.
Vous dites craindre votre oncle qui, d'après les suppositions de votre mère, serait déjà à l'origine de la mort de 'votre père, et contre qui vous ne pourriez pas porter plainte étant donnés les contacts hauts placés qu'il aurait au Nigéria.
Enfin, vous admettez n'avoir subi aucune autre persécution ni mauvais traitement.
Il y a d'abord lieu de relever que la reconnaissance du statut de réfugié n'est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d'origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur qui doit établir, concrètement, que sa situation individuelle est telle qu'elle laisse supposer une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.
Force est cependant de constater qu'à défaut de pièces, un demandeur d'asile doit au moins pouvoir présenter un récit crédible et cohérent. Or, il convient de relever que les contradictions entre vos diverses déclarations entachent la crédibilité de votre récit. En effet, en ce qui concerne le motif de votre crainte, vous avez inscrit dans la fiche de données personnelles que le gouvernement pour lequel vous travailleriez chercherait à vous tuer. Vous déclarez en revanche à l'officier de police judiciaire que vous seriez menacé par le parti opposé au vôtre. Enfin, selon le rapport d'audition, un différend avec votre oncle, lui-même membre du parti d'opposition, aurait motivé votre fuite de votre pays.
De toutes façons, même à supposer les faits que vous alléguez comme établis, ils ne sauraient constituer un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu'ils ne peuvent, à eux seuls, fonder dans votre chef une crainte justifiée d'être persécuté dans votre pays d'origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques ainsi que le prévoit l'article 1er, section 1, § 2 de la Convention de Genève ainsi que les articles 31 et 32 de la loi précitée du 5 mai 2006. En effet, le fait d'avoir un différend avec votre oncle qui tenterait de vous enrôler au sein de son parti ne saurait entrer dans le cadre de la prédite Convention. Il s'agit en l'espèce d'un problème strictement personnel avec un membre de votre famille, n'émanant donc pas d'un agent étatique.
En outre, votre oncle tenterait de vous faire renoncer à votre appartenance au parti au pouvoir au Nigeria depuis 1999, reconfirmé lors des élections de 2003 et 2007, pour vous faire adhérer à son parti d'opposition. Or, il est peu probable que vous ne soyez pas en mesure de trouver une protection auprès des autorités que vous soutenez de part votre engagement politique, à l'encontre d'un membre de l'opposition. Malgré vos allégations selon lesquelles votre oncle aurait des contacts hauts placés, il paraît en effet peu crédible qu'un membre de l'opposition ait plus d'influence et de pouvoir qu'un militant du parti majoritaire.
Vous n'avez par ailleurs pas requis la protection des autorités de votre pays. Ainsi, en application de l'article 28 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection au cas de l'espèce, il ne ressort pas du rapport d'audition que l'Etat ou d'autres organisations étatiques présentes sur le territoire de votre pays ne peuvent ou ne veulent pas vous accorder une protection à l'encontre de votre oncle. Il n'est donc pas démontré que les autorités étatiques pour lesquelles vous travailleriez seraient dans l'incapacité de vous fournir une protection.
Notons par ailleurs qu'il n'est pas établi que l'attaque par un groupe armé dont vous auriez été victime aurait été commanditée par votre oncle. Même si cela avait été le cas, cette attaque est constitutive d'un crime de droit commun punissable par la police nigériane.
Enfin, vous n'apportez en l'espèce aucune raison valable justifiant une impossibilité de vous installer dans une autre région de votre pays d'origine pour ainsi profiter d'une fuite interne.
Ainsi, vous n'alléguez aucun fait susceptible d'établir raisonnablement une crainte de persécution en raison d'opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l'appartenance à un groupe social, susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays. Les conditions permettant l'octroi du statut de réfugié ne sont par conséquent pas remplies.
En outre, votre récit ne contient pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 37 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection. En effet, selon le même raisonnement que celui appliqué à l'évaluation de vos demandes d'asile, votre problème avec votre oncle ne justifie pas la reconnaissance du statut conféré par la protection subsidiaire parce qu'il ne nous permet pas d'établir la réalité de votre crainte de vous faire exécuter ni celle de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants. Enfin, la situation générale du Nigéria n'est pas telle qu'elle pourrait être qualifiée de « violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international » comme le prévoit l'alinéa c). Ainsi, les faits que vous alléguez ne justifient pas la reconnaissance du statut conféré par la protection subsidiaire.
Votre demande en obtention d'une protection internationale est dès lors refusée comme non fondée au sens de l'article 19§1 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection.
La présente décision vaut ordre de quitter le territoire. […] » Par requête déposée le 7 décembre 2007, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision du ministre du 7 novembre 2007 par laquelle il s’est vu refuser la reconnaissance d’un statut de protection internationale et un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision du même jour, incluse dans le même document, portant à son encontre l’ordre de quitter le territoire luxembourgeois.
1. Quant au recours tendant à la réformation de la décision du ministre du 27 juillet 2007 portant refus d’une protection internationale Le délégué de Gouvernement conclu à l’irrecevabilité du recours subsidiaire en annulation contre la décision du ministre du 7 novembre 2007 par laquelle il s’est vu refuser la reconnaissance d’un statut de protection internationale.
Etant donné que l’article 19 (3) de la loi précitée du 5 mai 2006 prévoit un recours en réformation en matière de demandes de protection internationale déclarées non fondées, une demande en réformation a valablement pu être dirigée contre la décision ministérielle déférée.
Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.
Il n’y a partant pas lieu de se prononcer sur le recours subsidiaire en annulation.
A l’appui de son recours, le demandeur expose qu’il aurait quitté le Nigeria le 25 avril 2007 en raison des persécutions subies du fait de ses idées politiques et de son appartenance au partie politique « People’s Democrate Party », ci-après « PDP » qui serait opposé au « Action Congress Party », ci-après « ACP », dans lequel militerait son oncle qui serait fortuné et jouirait d’une grande réputation et entretiendrait des liens très étroits avec certains membres du gouvernement nigérian. Son oncle aurait à plusieurs reprises essayé de l’enrôler dans son parti mais sans succès ; en conséquence, à la demande de son oncle, des membres du ACP aurait assailli des membres du PDP dont le demandeur. Ils auraient trouvé refuge dans une maison mais le groupe d’hommes armés aurait mis le feu à cette maison. Lors de cette attaque, deux militants du PDP seraient décédés.
Le demandeur relate que son père aurait été assassiné en 1990 par son oncle ainsi que sa mère qui aurait été empoisonnée par son oncle le 22 juin 2007.
Le demandeur qualifie la situation générale du Nigeria comme violence aveugle en raison de conflits internes du fait notamment que le MEND, qui serait un mouvement criminel d’émancipation du Delta du Niger aurait pour habitude de prendre des otages contre rançon.
Il fait encore valoir qu’il aurait porté plainte contre les attaques à son encontre devant le commissariat de sa région mais que les autorités n’auraient su protéger ni ses parents ni lui-
même.
Quant aux contradictions soulevées par le ministre le demandeur estime qu’il n’en est rien et qu’il aurait effectivement eu un différend avec son oncle qui chercherait à le tuer.
Le délégué du Gouvernement conteste que la situation au Nigeria serait à considérer comme violence aveugle en raison de conflits internes. Les conflits opposant chrétiens et musulmans dans le nord du pays et ceux explosant régulièrement dans la région du Delta ne toucheraient pas l’Etat d’Edo dont le demandeur serait originaire. En ce qui concerne l’incident invoqué par le demandeur, le délégué du Gouvernement souligne que depuis les élections le contexte politique aurait changé, de sorte que l’incident ne se reproduira plus.
D’autre part, il estime que l’argumentation du ministre selon laquelle la crainte de persécution d’un membre du parti au pouvoir par un membre de l’opposition apparaît peu crédible, serait confirmée par le fait que le parti du demandeur aurait été maintenu au pouvoir alors que celui de son oncle n’aurait atteint que la troisième place. Il estime en outre que l’affirmation que le père du demandeur aurait été assassiné par cet oncle serait contradictoire par rapport aux déclarations du demandeur lors de l’audition et l’empoisonnement de la mère serait un fait nouveau dépourvu d’éléments probants.
Aux termes de l’article 2 a) de la loi précitée du 5 mai 2006, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.
La notion de « réfugié » est définie par l’article 2 c) de ladite loi comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner (…) ».
En l’espèce, l’examen des faits et motifs invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande de protection internationale lors de son audition, ainsi qu’au cours de la procédure contentieuse, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, ainsi que le prévoit l’article 2 c) de la loi précitée du 5 mai 2006.
La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.
Il échet de rappeler que le tribunal, statuant en tant que juge du fond en matière de demande d'asile, doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur d'asile, tout en prenant en considération la situation générale existant dans son pays d’origine. Cet examen ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur, la crédibilité d’un demandeur d’asile constituant en effet un élément d’appréciation fondamental dans l’appréciation de la justification d’une demande d’asile, spécialement lorsque des éléments de preuve matériels font défaut1.
Or, à ce sujet il y a lieu de relever que la décision ministérielle du 7 novembre 2007, outre d’être motivée quant au fond par la considération que les motifs de persécution invoqués par le demandeur ne sauraient pas, de par leur nature, être utilement retenus pour justifier une demande en obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève, est basée principalement sur le constat d’un défaut de crédibilité et de cohérence au niveau du récit présenté par Monsieur … à l’appui de sa demande, le ministre, dans sa prédite décision, ayant fait état à cet égard d’incohérences et d’éléments mettant en doute la crédibilité des déclarations du requérant. De même le délégué du Gouvernement fait état d’une contradiction dans le récit du demandeur présenté lors de son audition et dans la requête introductive d’instance, à savoir la cause de mort de son père. En effet, lors de l’audition le demandeur déclare que son père serait décédé en 1990 de la maladie malaria alors que dans la requête il soutient que son oncle aurait assassiné son père sans apporter de précisions à son récit et sans expliquer cette contradiction.
Le tribunal constate en particulier à ce sujet que le ministre a relevé à bon droit que le demandeur a inscrit sur la fiche de données personnelles que le gouvernement pour lequel il travaillerait chercherait à le tuer alors qu’il soutient lors de l’instruction de son dossier par l’autorité ministérielle et durant la phase contentieuse qu’il craint d’être persécuté par des membres d’un parti opposé, à l’initiative de son oncle. D’autre part, le demandeur n’a pas présenté des explications quant à la contradiction de la cause du décès de son père.
Finalement, le demandeur, qui prétend avoir suivi un enseignement universitaire, est incapable d’indiquer, ne serait-ce que de manière approximativement, le nombre d’habitants de Lagos et du Nigeria. Finalement, le fait que le demandeur est incapable de fournir la moindre information sur son itinéraire depuis le Nigeria entache sérieusement la crédibilité de son récit.
Force est partant de constater qu’il n’a pas fourni d’explications satisfaisantes susceptibles d’élucider sa situation au regard des nombreuses interrogations pourtant clairement posées, de sorte que le tribunal ne peut que constater que lesdits motifs de refus n’ont pas été utilement combattus, le demandeur n’ayant tout simplement pas concrètement pris position y relativement, de manière à ne pas avoir mis le tribunal en mesure d’accorder une quelconque foi à son récit.
A partir des éléments ci-avant relatés, à savoir du caractère incohérent et douteux du récit du demandeur, il y a lieu de retenir que celui-ci n’a pas fait état de manière crédible d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.
En ce qui concerne le refus du ministre d’accorder au demandeur le bénéfice de la protection subsidiaire telle que prévue par la loi du 5 mai 2006, il y a lieu de rappeler qu’aux termes de l’article 2, e) de la loi du 5 mai 2006, est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire», « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un 1 Cour adm. 21 juin 2007, n° 22858C, non publié.
apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 37, l’article 39, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ».
L’article 37 de la même loi énumère en tant qu’atteintes graves, sous ses littéra a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution; ou la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine; ou des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».
Le tribunal constate à ce sujet que le demandeur a omis de prendre position par rapport au cadre spécifique de la protection subsidiaire telle que prévue par la loi du 5 mai 2006, de sorte qu’en l’état actuel du dossier et compte tenu des moyens figurant dans la requête introductive d’instance le tribunal ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité ni le bien-fondé de la décision déférée portant refus d’accorder au demandeur le bénéfice de la protection subsidiaire telle que prévue par la loi du 5 mai 2006.
Au vu de ce qui précède, le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.
2. Quant au recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision du ministre du 7 novembre 2007 portant ordre de quitter le territoire Etant donné que l’article 19 (3) de la loi du 5 mai 2006 prévoit un recours en annulation contre l’ordre de quitter le territoire, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation contre l’ordre de quitter le territoire. Le recours subsidiaire en annulation de pareil ordre contenu dans la décision déférée du 7 novembre 2007 a valablement pu être dirigée contre la décision ministérielle litigieuse. Le recours en annulation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.
Aux termes de l’article 19 (1) de la loi du 5 mai 2006, une décision négative du ministre en matière de protection internationale vaut ordre de quitter le territoire en conformité des dispositions de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère.
Force est de constater que le demandeur se contente à ce sujet de solliciter l’annulation de l’ordre de quitter le territoire en alléguant que sa vie serait en danger en cas de retour au Nigeria sans avancer cependant le moindre élément concret à l’appui de cette crainte.
Le tribunal vient cependant, tel que développé ci-dessus, de retenir que le demandeur ne remplit pas les conditions pour prétendre au statut conféré par la protection internationale, de sorte qu’en l’état actuel du dossier le tribunal ne saurait utilement mettre en cause la légalité de la décision déférée portant ordre de quitter le territoire.
Partant, le recours en annulation est à rejeter pour ne pas être fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 7 novembre 2007 portant refus d’une protection internationale ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
dit qu’il n’y a pas lieu de se prononcer sur le recours subsidiaire en annulation introduit contre la décision ministérielle du 7 novembre 2007 portant refus d’une protection internationale ;
reçoit en la forme le recours subsidiaire en annulation introduit contre la décision ministérielle du 7 novembre 2007 portant ordre de quitter le territoire ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation contre la décision ministérielle du 7 novembre 2007 portant l’ordre de quitter le territoire ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 14 avril 2008 par :
Mme Lenert, vice-président, M. Sünnen, juge, M. Fellens, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.
s. Schmit s. Lenert 8