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20/03/2008 | LUXEMBOURG | N°23320

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 20 mars 2008, 23320


Tribunal administratif N° 23320 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 août 2007 Audience publique du 20 mars 2008 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23320 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 août 2007 par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats

à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Okere (Nigeria), de nationalité nigériane, demeu...

Tribunal administratif N° 23320 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 août 2007 Audience publique du 20 mars 2008 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23320 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 août 2007 par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Okere (Nigeria), de nationalité nigériane, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 9 mai 2007 refusant de faire droit à sa demande tendant à se voir délivrer une autorisation de séjour, sinon un statut de tolérance ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 3 octobre 2007 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 5 novembre 2007 par Maître Frank WIES pour compte du demandeur ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Frank WIES, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Le 17 août 2004, Monsieur … formula une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, qui a été rejetée par une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ci-après dénommé « le ministre », du 12 septembre 2006. Aucun recours n’a été introduit contre ladite décision ministérielle.

Par courrier de son mandataire du 17 avril 2007, Monsieur … fit introduire auprès du ministre une demande en obtention d’une autorisation de séjour pour raisons humanitaires, sinon en obtention d’un statut de tolérance sur base de l’article 22 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection.

Par décision du 9 mai 2007, le ministre refusa de faire droit à la demande tendant à la délivrance d’une autorisation de séjour, au motif que Monsieur … ne disposerait pas de moyens d’existence personnels suffisants conformément à l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, et que l’intéressé ne ferait pas non plus état de raisons humanitaires valables justifiant une autorisation de séjour au Luxembourg. Il rejeta également la demande en obtention d’un statut de tolérance, au motif qu’il n’existerait pas de preuve que l’exécution matérielle de l’éloignement de Monsieur … serait impossible en raison de circonstances de fait.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 août 2007, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 9 mai 2007.

Aucun recours au fond n’étant prévu en matière d’octroi d’une autorisation de séjour sur base de l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972, ni en matière de refus d’un statut de tolérance sur base de l’article 22 de la loi précitée du 5 mai 2006, seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision litigieuse.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur déclare être de confession chrétienne et appartenir à la communauté ethnique des Itsekiri originaires de la région du Warri de l’Etat du Delta du Niger au Nigeria et avoir fui sa région d’origine en raison des persécutions dont il y aurait été victime en raison de son origine ethnique. Il fait ainsi état de ce que dans le village où il aurait habité, à savoir à Ogbe Okere Itsekiri, il y aurait eu une attaque de la part d’un groupe armé composé de personnes d’origine ethnique Ijaw, dans le cadre de laquelle sa maison familiale aurait été incendiée, en précisant que lesdits faits se seraient déroulés au cours de l’été 2004. Au moment où il se serait apprêté à aller à la recherche de membres survivants de sa famille, un groupe de jeunes d’origine Ijaw l’aurait pris en chasse, en le touchant à la jambe avec un sabre. Traumatisé par lesdits événements, il aurait réussi à prendre la fuite en quittant son pays d’origine par la voie maritime pour se rendre en Europe. Dans ce contexte, il fait encore état d’une manière générale de la situation politique et sécuritaire désastreuse régnant dans la région du Delta du Niger dans laquelle des membres de la majorité ethnique des Ijaw persécuteraient régulièrement des membres de sa communauté ethnique, les Itsekiri. Il déclare partant refuser de rentrer dans son pays d’origine, par crainte pour « son intégrité physique et psychologique, voire sa vie ». Il précise encore qu’il résiderait au Grand-Duché de Luxembourg depuis le mois d’août 2004 et qu’actuellement, il ne pourrait toujours pas envisager de rentrer dans son pays d’origine, ce qui l’aurait amené à poser une demande tendant à la délivrance d’une autorisation de séjour, voire d’un statut de tolérance.

En droit, le demandeur conclut tout d’abord à l’annulation de la décision attaquée dans la mesure où le ministre a refusé de lui délivrer une autorisation de séjour, en concluant à une violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce que sa vie et sa sécurité seraient menacées en cas de retour dans son pays d’origine. Il relève dans ce contexte, d’une part, que depuis son entrée sur le territoire luxembourgeois, il aurait eu un comportement irréprochable et, d’autre part, qu’il ne « posséde plus aucun bien, ni attache familiale ou amicale au Nigeria ». Il insiste dans ce contexte sur le fait que pendant son séjour au Luxembourg, il aurait fait des efforts pour s’intégrer au pays, en relevant notamment qu’il fréquenterait des cours pour jeunes adultes au lycée classique de Diekirch. Il se réfère encore à son état de santé, qui serait documenté par un certificat médical versé par lui à l’appui de son recours, dont il ressortirait qu’il souffrirait toujours « des blessures qui lui avaient été infligées par les Ijaws » et qu’il devrait suivre « un traitement médical aux antibiotiques ». Dans la mesure où il ne posséderait plus aucune famille dans son pays d’origine et qu’il serait dépourvu « de tous moyens », un tel traitement médical ne saurait être garanti en cas de retour au Nigeria, de sorte que son état de santé serait dans un tel cas compromis.

En deuxième lieu, le demandeur soutient que la décision lui refusant la délivrance d’une autorisation de séjour violerait encore l’article 14 de la loi précitée du 28 mars 1972 pour les mêmes motifs que ceux développés ci-avant.

En ce qui concerne le refus de lui délivrer un statut de tolérance, le demandeur rappelle son appartenance au groupe ethnique des Itsekiri et sa crainte de faire l’objet de persécutions en cas de retour dans son pays d’origine ou d’y voir sa vie menacée. Il rappelle également dans ce contexte la nécessité pour lui de suivre un traitement médical, à la suite des blessures qui lui auraient été infligées dans son pays d’origine où il ne posséderait d’ailleurs plus aucune famille, de sorte que ledit traitement médical risquerait d’être compromis en cas de retour dans son pays d’origine.

Le délégué du gouvernement rétorque que Monsieur … se trouverait en situation irrégulière sur le sol luxembourgeois depuis le 23 octobre 2006, date à laquelle sa demande d’asile pouvait valablement être considérée comme définitivement rejetée du fait de l’expiration des délais de recours contentieux. Le représentant étatique soutient encore que les éléments invoqués par le demandeur à l’appui du présent recours auraient déjà été toisés par la décision ministérielle par laquelle le statut de réfugié lui a été refusé, de sorte qu’il n’y aurait plus lieu d’y revenir.

Quant au reproche d’une prétendue violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, le délégué du gouvernement estime que le demandeur, en cas de retour dans son pays d’origine, ne se retrouverait pas face à un traitement inhumain tel que visé par ladite disposition de droit international, dans la mesure où des souffrances mentales ou physiques d’une intensité particulière ne risqueraient pas d’être provoquées volontairement à son encontre. Il conteste encore l’existence de raisons sérieuses de croire qu’en raison de la nature même du régime du Nigeria ou de la situation politique qui y règne, le demandeur court un risque réel d’être soumis à un traitement tel que prohibé par l’article 3 précité.

Quant à la décision par laquelle le demandeur s’est vu refuser la délivrance d’un statut de tolérance, le délégué du gouvernement, en retenant qu’il ressort du certificat médical versé par le demandeur que celui présente une « plaie avec croutes près du genou et qu’il a dû prendre des antibiotiques », estime que ce certificat ne serait plus d’actualité, puisque ledit certificat aurait été délivré en date du 13 novembre 2006 et qu’il ne ressortirait d’aucun élément du dossier que ce traitement médicamenteux devrait se poursuivre « à vie ». Par ailleurs, le demandeur n’aurait apporté aucune preuve suivant laquelle ledit traitement médical ne pourrait pas être poursuivi dans son pays d’origine, d’autant plus qu’il n’aurait pas établi qu’il souffrirait d’une maladie grave ou incurable nécessitant un traitement particulier.

Finalement, le représentant étatique soutient encore que l’exécution matérielle de l’éloignement de Monsieur … ne serait pas impossible en raison de circonstances de fait, de sorte que l’octroi d’un statut de tolérance ne se justifierait pas.

Dans son mémoire en réplique, le demandeur fait soutenir que le ministre méconnaîtrait les risques réels d’être soumis, en cas de retour dans son pays d’origne, à des traitements tels que définis par l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, en rappelant qu’il aurait échappé de justesse à la mort dans son village natal, de sorte que le fait de l’y renvoyer l’exposerait à un risque réel et certain d’y subir des actes de torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants, voire même de perdre sa vie. Il ajoute que le fait d’avoir eu une « conduite irréprochable au Grand-Duché » devrait être pris en considération au vu des dispositions légales figurant à l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972.

Quant à sa demande tendant à se voir reconnaître un statut de tolérance, le demandeur fait exposer qu’il serait toujours « sous traitement antibiotique pour les blessures qui lui ont été infligées au Nigeria », de sorte à remplir ainsi la condition de l’impossibilité de pouvoir procéder à son rapatriement « dans des conditions acceptables d’un point de vue humanitaire ».

Il convient de prime abord de préciser que le rôle du juge administratif, en présence d’un recours en annulation, consiste à vérifier le caractère légal et réel des motifs invoqués à l’appui de l’acte administratif attaqué1. En outre, la légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération de la situation de droit et de fait existant au jour où elle a été prise2.

En ce qui concerne tout d’abord le premier volet de la décision ministérielle déférée du 9 mai 2007, il échet de constater que conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972, « l’entrée et le séjour au Grand-Duché de Luxembourg pourront être refusés à l’étranger :

1 cf. trib. adm. 11 juin 1997, n° 9583 du rôle, Pas. adm. 2006, V° Recours en annulation, n° 13 et autres références y citées 2 cf. trib. adm. 27 janvier 1997, n° 9724 du rôle, Pas. adm. 2006, V° Recours en annulation, n° 20 et autres références y citées -

qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits, et de visa si celui-

ci est requis, -

qui est susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la santé publics, -

qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Il se dégage de la prédite disposition qu’une autorisation de séjour peut être refusée lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers3.

En l’espèce, le demandeur ne conteste pas qu’il ne dispose pas d’un permis de travail ou d’autres moyens personnels qui lui permettraient de financer son séjour au Luxembourg.

Si le refus ministériel se trouve dès lors, en principe, justifié à suffisance de droit par le défaut de moyens d’existence personnels suffisants, il convient cependant encore d’examiner le moyen d’annulation soulevé par le demandeur et tiré des raisons humanitaires invoquées par lui.

En ce qui concerne les raisons, qualifiées d’humanitaires, avancées par le demandeur aux fins de justifier l’obtention de l’autorisation de séjour sollicitée, il convient de rappeler que si le contrôle juridictionnel propre à un recours en annulation ne saurait en principe aboutir à priver l’autorité administrative de son pouvoir d’appréciation, il n’en reste pas moins que, confronté à une décision relevant d’un pouvoir d’appréciation étendu, le juge administratif, saisi d’un recours en annulation, est appelé à vérifier, d’après les pièces et éléments du dossier administratif, si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration, sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute et s’ils sont de nature à justifier la décision, de même qu’il peut examiner si la mesure prise n’est pas manifestement disproportionnée par rapport aux faits établis, en ce sens que cette disproportion laisse entrevoir un usage excessif du pouvoir par l’autorité qui a pris la décision, voire un détournement du même pouvoir par cette autorité4.

L’article 14, alinéa dernier de la loi précitée du 28 mars 1972 dispose que « l’étranger ne peut être expulsé, ni éloigné à destination d’un pays s’il établit que sa vie ou sa liberté y sont gravement menacées ou qu’il y est exposé à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ou à des traitements au sens des articles 1er et 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

3 cf. trib. adm. 17 février 1997, n° 9669 du rôle, Pas. adm. 2006, V° Etrangers, n° 168 et autres références y citées 4 Cf. trib. adm. 12 février 2003, n° 15238 du rôle, confirmé par Cour adm. 4 novembre 2003, n° 16173C du rôle, Pas. adm. 2006, V° Recours en annulation, n° 17 S’il est vrai que cette disposition ne vise expressis verbis que des mesures d’expulsion ou d’éloignement pour les interdire dans les hypothèses y visées, il n’en reste pas moins que le ministre, lorsqu’il est confronté à une demande d’autorisation de séjour de la part d’un étranger qui se prévaut valablement de menaces pour sa vie ou d’un risque d’être exposé à des traitements visés par cette disposition dans son pays d’origine et qui ne saurait partant faire l’objet d’une mesure de rapatriement, commettrait un excès de pouvoir en usant de la marge d’appréciation lui conférée par l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972, même dans l’hypothèse où un motif de refus y prévu se trouve vérifié, de manière à refuser à cette personne une autorisation de séjour et à la laisser, nonobstant son droit à ne pas être expulsée ou éloignée par les autorités luxembourgeoises vers son pays d’origine, dans une situation de séjour irrégulier.

En l’espèce, le demandeur invoque la situation prévalant actuellement dans sa région d’origine du Nigeria, à savoir dans la région du Warri, et les risques qu’il courrait pour sa sécurité en cas de retour au Nigeria du fait de son appartenance à la communauté ethnique des Itsekiri.

Il convient de relever que les craintes de persécutions invoquées par le demandeur ont déjà fait l’objet d’une analyse par le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration dans sa décision précitée du 12 septembre 2006, contre laquelle aucun recours contentieux ne fut introduit auprès des juridictions administratives, dans le cadre de la demande d’asile introduite par le demandeur, de sorte que la demande d’asile du demandeur est à considérer comme ayant été définitivement rejetée par les autorités luxembourgeoises. Ladite décision ministérielle a retenu que le demandeur était resté en défaut de démontrer concrètement et de façon crédible l’existence d’un risque de persécution au sens de la Convention de Genève et qu’il n’était pas non plus fondé à se prévaloir du statut conféré par la protection subsidiaire. Il s’ensuit qu’en l’absence d’éléments nouveaux apportés par le demandeur, il n’y a plus lieu de revenir dans le cadre de la présente instance sur les éléments soulevés par le demandeur quant à ses craintes de persécution dans son pays d’origine, conformément au principe de l’autorité de la chose décidée.

Il échet encore de relever que le demandeur reste en défaut de démontrer à suffisance de droit qu’un retour dans son pays d’origine risque de l’y exposer à l’une des menaces telles que prévues par l’article 14, alinéa dernier de la loi précitée du 28 mars 1972 ou à des traitements inhumains ou dégradants au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme ou à des traitements au sens des articles 1er et 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il échet dans ce contexte de relever que le demandeur n’a apporté le moindre élément permettant d’établir qu’en cas de retour dans son pays d’origine il risque d’y subir des traitements tels que prévus par les dispositions légales de droit national et international précitées de la part de la communauté ethnique des Ijaw. En outre, le demandeur n’a rapporté la preuve ni de la réalité et de l’origine de ses blessures et éventuels traitements médicaux au jour de l’introduction de son recours, le seul certificat médical versé par lui datant du 13 novembre 2006, partant d’une période trop éloignée pour pouvoir encore être valablement pris en considération pour évaluer son état de santé au jour de l’introduction de son recours, ni de l’impossibilité de poursuivre un éventuel traitement médical « aux antibiotiques », non autrement précisé, dans son pays d’origine. Dans ce contexte, il échet en outre de relever que les blessures et traitements médicaux dont le demandeur a fait état ne semblent pas être d’une gravité telle que le fait de ne pas lui accorder un droit de séjour au Luxembourg, ayant partant pour conséquence son éventuel éloignement vers son pays d’origine, risquerait de l’y exposer à des traitements contraires aux dispositions précitées.

Il suit de ce qui précède qu’une violation des articles 14, alinéa dernier, de la loi précitée du 28 mars 1972 et 3 de la Convention européenne des droits de l’homme ne peut être retenue en l’espèce.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de déclarer le recours non fondé quant au premier volet de la décision sous analyse portant sur le refus de délivrer une autorisation de séjour pour raisons humanitaires au demandeur, étant entendu que cette conclusion ne saurait être énervée par les développements du demandeur quant à son comportement prétendument irréprochable qu’il aurait eu au Luxembourg depuis son arrivée au pays, quant au fait qu’il ne posséderait plus aucun bien, ni attaches familiales ou amicales au Nigeria et quant à son intégration au pays, étant donné que ces éléments ne sauraient être de nature à justifier la délivrance d’une autorisation de séjour au pays, en l’absence de dispositions légales afférentes.

Concernant le deuxième volet de la décision litigieuse, portant refus de délivrer au demandeur un statut de tolérance, contre lequel le recours a également été introduit, il échet tout d’abord de rappeler qu’aux termes de l’article 22 (1) de la loi précitée du 5 mai 2006 « si le statut de réfugié est refusé au titre des articles 19 et 20 qui précèdent, le demandeur sera éloigné du territoire », tandis que l’article 22 (2) dispose que « si l’exécution matérielle de l’éloignement s’avère impossible en raison de circonstances de fait, le ministre peut décider de tolérer l’intéressé provisoirement sur le territoire jusqu’au moment où ces circonstances de fait auront cessé ».

Il se dégage du libellé de la disposition légale précitée que la faculté pour le ministre de tolérer provisoirement l’intéressé sur le territoire n’est susceptible d’être exercée que dans l’hypothèse spécifique où l’exécution matérielle de l’éloignement s’avère impossible en raison de circonstances de fait, de sorte que le ministre est tenu de vérifier au préalable si cette condition d’application est vérifiée dans le chef d’un demandeur en obtention d’un statut de tolérance.

Le demandeur entend en l’espèce se prévaloir en substance des mêmes faits que ceux soumis au ministre dans le cadre de sa demande tendant à se voir délivrer une autorisation de séjour pour raisons humanitaires, qui rendraient un retour dans son pays d’origine impossible en se basant, d’une part, sur ses craintes de persécution de la part de membres du groupe ethnique des Ijaw et, d’autre part, sur son état de santé.

Force est cependant de constater que le demandeur n’a pas fait état d’un quelconque obstacle qui rendrait l’exécution matérielle de son éloignement du territoire impossible, les arguments avancés en cause ayant trait à sa crainte de persécution et à son état de santé ne sauraient constituer des éléments de nature à établir que son retour dans son pays d’origine se heurterait à une impossibilité d’exécution matérielle justifiant l’octroi du statut de tolérance dans son chef, au vu, d’une part, de la décision ministérielle par laquelle un statut de protection internationale lui a été refusé et, d’autre part, de l’absence de la preuve rapportée par le demandeur suivant laquelle son état de santé ne lui permettrait pas d’être rapatrié au Nigeria. Le fait qu’il ne possède plus aucune famille au Nigeria, à le supposer établi, ne saurait pas non plus constituer un élément de nature à être pris en considération pour constater une éventuelle impossibilité matérielle de l’éloigner vers le Nigeria.

Il s’ensuit que le recours en annulation, dans la mesure où il est dirigé contre ce deuxième volet de la décision sous analyse, est également à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié, partant en déboute ;

donne acte au demandeur de ce qu’il déclare bénéficier de l’assistance judiciaire ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Martine Gillardin, premier juge, Françoise Eberhard, juge, et lu à l’audience publique du 20 mars 2008 par le premier vice-président, en présence du greffier Claude Legille.

Legille Schockweiler 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 23320
Date de la décision : 20/03/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2008-03-20;23320 ?

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