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09/01/2008 | LUXEMBOURG | N°23025

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 janvier 2008, 23025


Tribunal administratif N° 23025 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 juin 2007 Audience publique du 9 janvier 2008 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23025 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 juin 2007 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des a

vocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo), demeurant actuellement à L-…, te...

Tribunal administratif N° 23025 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 5 juin 2007 Audience publique du 9 janvier 2008 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23025 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 5 juin 2007 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo), demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de des Affaires étrangères et de l’immigration du 17 mars 2006 par laquelle ledit ministre a déclaré non fondée sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié, ainsi que d’une décision confirmative de rejet du même ministre du 4 mai 2007, suite à un recours gracieux du demandeur ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 11 septembre 2007 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Cathy ARENDT, en remplacement de Maître Nicky STOFFEL, et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 décembre 2007.

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En date du 10 octobre 2003, Monsieur … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Monsieur … fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Ne s’étant plus présenté à plusieurs reprises aux services luxembourgeois compétents afin que sa demande d’asile puisse être analysée, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration entre-temps en charge du dossier, par décision du 17 mars 2006, lui notifiée en mains propres le 22 mars 2007, l’informa de ce que sa demande avait été rejetée au motif qu’elle peut être considérée notamment comme étant manifestement infondée, le demandeur ayant omis de manière flagrante de s’acquitter d’obligations importantes imposées par les dispositions régissant les procédures d’asile, et, a fortiori, également comme non fondée sur base de l’article 11 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire. Le ministre fait ajouter que des raisons économiques ne sauraient pas non plus fonder une demande en obtention du statut de réfugié car elles ne rentrent pas dans le cadre d’un motif de persécution prévu par la Convention de Genève. Pour le surplus le Kosovo ne saurait être considéré pour un Albanais comme un territoire où des risques de persécutions sont à craindre.

Suite à un recours gracieux formulé par lettre de son mandataire le 23 avril 2007 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration confirma sa décision initiale le 4 mai 2007, notifiée au demandeur par lettre recommandée expédiée le 4 mai 2007.

Par requête déposée le 5 juin 2007, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation des décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration des 17 mars 2006 et 4 mai 2007.

Dans le cadre de ce recours contentieux, Monsieur … fait valoir qu’il n’aurait jamais pu être auditionné par un représentant du ministère. Il précise qu’il aurait quitté son pays car il n’aurait plus eu aucun espoir étant donné qu’il n’aurait pas pu faire d’apprentissage, respectivement trouver du travail. En prenant appui sur un rapport de l’UNHCR de mars 2005 sur la situation au Kosovo, il estime que les craintes par lui éprouvées ne constitueraient pas seulement l’expression d’un sentiment général de malaise au regard de la situation générale régnant dans son pays d’origine, mais constitueraient des craintes de persécutions au sens de la Convention de Genève.

Le délégué du Gouvernement estime que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre les décisions ministérielles entreprises, de sorte que la demande en annulation formulée à titre subsidiaire est à rejeter.

Le recours en réformation ayant été introduit par ailleurs dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ou si la demande repose sur une fraude (…) ».

En vertu de l’article 6 § 2 f) du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsque le demandeur d’asile a omis de manière flagrante de s’acquitter d’obligations importantes imposées par les dispositions régissant les procédures d’asile ».

En l’espèce, il est constant que Monsieur … ne s’est plus présenté au bureau d’accueil pour demandeurs asile après le dépôt de sa demande d’asile le 10 octobre 2003, qu’il a déposé le 30 octobre 2003 une demande d’asile en Suède, qu’il a été transféré au Luxembourg le 27 avril 2004, qu’en octobre 2005 il a été arrêté en France pour séjour irrégulier et qu’il a été reconduit à destination du Luxembourg le 22 mars 2007. C’est dès lors à bon droit que le ministre a pu déduire du comportement du demandeur un refus de ce dernier de collaborer activement à l’instruction de sa demande d’asile, c’est-à-dire un refus de s’acquitter d’une obligation importante dans le cadre de l’instruction de sa demande d’asile et ainsi, il a valablement pu faire application de l’article 6 §2 f) du règlement grand-ducal précité du 22 avril 1996. Il y a encore lieu d’ajouter que le demandeur n’a aucunement pris position par rapport à son comportement adopté.

Toute demande d’asile remplissant les conditions fixées par l’article 9 de la loi du 3 avril 1996, de sorte à pouvoir être rejetée comme étant manifestement infondée, peut également, et a fortiori, être considérée comme simplement non fondée au sens de l’article 11 de la même loi, la seule différence entre les deux dispositions légales consistant dans le fait que les procédures administrative et contentieuse à respecter en application de l’article 9 en question sont réglementées de manière plus stricte par rapport à celles applicables en application de l’article 11 précité, dans la mesure où non seulement seuls les recours en annulation sont susceptibles d’être introduits à l’encontre des décisions déclarant une demande d’asile manifestement infondée mais qu’en outre les délais d’instruction sont beaucoup plus courts par rapport à ceux applicables pour les décisions prises au sujet des demandes d’asile déclarées simplement non fondées.

C’est encore à bon droit que le ministre a retenu que des raisons économiques ne constituent pas un motif de persécution prévu par la Convention de Genève et que le Kosovo ne saurait être considéré pour un Albanais comme un territoire où des risques de persécutions sont à craindre, d’autant plus que Monsieur …, au-delà de se référer à la situation générale au Kosovo en s’appuyant sur le rapport, entre-temps actualisé, de mars 2005 de l’UNHCR, ne fait état d’aucun élément permettant au tribunal de retenir qu’il aurait persécuté personnellement et individuellement pour un des motifs prévus par la Convention de Genève.

A partir de ces considérations, le tribunal est amené à constater que la décision litigieuse est a fortiori justifiée dans son résultat en ce qu’elle a rejeté comme non fondée sur base de l’article 11 de la loi modifiée du 3 avril 1996 précitée la demande du demandeur en obtention du statut de réfugié.

Partant, le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, déclare le recours non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 9 janvier 2008 par :

Mme Lenert, vice-président, Mme Thomé, premier juge, M. Fellens, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 23025
Date de la décision : 09/01/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2008-01-09;23025 ?

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