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08/11/2007 | LUXEMBOURG | N°23278C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 novembre 2007, 23278C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 23278C Inscrit le 30 juillet 2007

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 8 NOVEMBRE 2007 Recours formé par M. XXX XXX, XXX contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale Appel (jugement entrepris du 27 juin 2007, no 22550 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cou...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 23278C Inscrit le 30 juillet 2007

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 8 NOVEMBRE 2007 Recours formé par M. XXX XXX, XXX contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale Appel (jugement entrepris du 27 juin 2007, no 22550 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 30 juillet 2007 par Maître Adrian SEDLO, avocat à la Cour, au nom de M. XXX XXX, né le 13 mars 1988 à XXX (Kosovo/République de Serbie), de nationalité serbe, demeurant à L-XXX, contre un jugement rendu en matière de protection internationale par le tribunal administratif le 27 juin 2007, déclarant non justifié son recours tant en ce qui concerne la réformation sollicitée de la décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 décembre 2006 lui refusant une mesure de protection internationale qu’en ce qui concerne l’annulation de l’ordre de quitter le territoire luxembourgeois contenu dans la même décision ministérielle ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 21 août 2007 par Mme le délégué du gouvernement Jacqueline GUILLOU-JACQUES ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Le conseiller rapporteur entendu en son rapport et Mme le délégué du gouvernement Jacqueline GUILLOU-JACQUES en sa plaidoirie.

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Par jugement rendu le 27 juin 2007, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, a débouté M. XXX XXX de son recours tendant à la réformation de la décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 décembre 2006 lui refusant une mesure de protection internationale, telles que lesdites mesures sont prévues par la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ainsi qu’à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire luxembourgeois contenu dans la même décision ministérielle.

Le 30 juillet 2007, Maître Adrian SEDLO, agissant en nom et pour compte de M. XXX, a interjeté appel contre le susdit jugement.

L’appelant conclut à la recevabilité de son appel et, au fond, il sollicite principalement la réformation du jugement entrepris en ce sens qu’il soit reconnu qu’il est en droit de se voir bénéficier d’une mesure de protection internationale et subsidiairement, il demande, moyennant la réformation du jugement, à ce que la décision ministérielle litigieuse soit annulée, avec renvoi du dossier en prosécution de cause devant le ministre compétent.

A l’appui de son appel, l’appelant soulève en premier lieu un moyen d’annulation nouveau à l’encontre de la décision ministérielle litigieuse, basé sur ce qu’elle ne contiendrait pas de motivation dans sa langue maternelle, le serbo-croate.

Il reproche ensuite au ministre le fait de ne pas avoir instruit avec impartialité et objectivité sa demande de protection, ce moyen n’ayant pas non plus été soulevé en première instance.

Enfin, l’appelant reproche tant au ministre qu’aux premiers juges d’avoir fait une mauvaise appréciation des motifs de persécution par lui invoqués à l’appui de sa demande de protection, soutenant que son appartenance à la minorité des bosniaques du Kosovo et les éléments de son vécu justifieraient qu’il se voie bénéficier d’une telle mesure de protection.

L’Etat a pris position dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 21 août 2007. A travers son mémoire, le délégué du gouvernement, à titre principal, se rallie pleinement aux développements et conclusions du tribunal administratif dans le jugement dont appel. Pour le surplus et pour autant que de besoin, le gouvernement déclare se référer également à son mémoire en réponse de première instance, ainsi qu’aux pièces versées en son annexe.

Il convient en premier lieu de se prononcer par rapport au moyen d’irrecevabilité de l’appel, soulevé d’office par la Cour lors de l’audience publique du 25 octobre 2007, le délégué du gouvernement s’étant rapporté à prudence de justice y relativement, étant précisé que cet examen s’impose au regard de ce que la décision ministérielle litigieuse du 27 décembre 2006 a été rendue dans le cadre légal tracé par la loi du 5 mai 2006 et, plus particulièrement, au regard de ce que l’article 19 (4) de ladite loi de 2006 délimite le pouvoir de la Cour administrative face à un appel contre un jugement du tribunal administratif rendu en la matière à celui d’un juge de l’annulation.

En général, aux termes de l’article 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif « le tribunal administratif statue sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements », l’article 2 (3) de ladite loi du 7 novembre 1996 précisant que « sauf dispositions contraires de la loi, appel peut être intenté devant la Cour administrative contre les décisions du tribunal administratif ».

Selon l’article 3 de la loi précitée du 7 novembre 1996 « 1) le tribunal administratif connaît en outre comme juge du fond des recours en réformation dont les lois spéciales attribuent connaissance au tribunal administratif » et « 2) sauf dispositions contraires de la loi, appel peut être interjeté devant la Cour administrative contre les décisions visées au paragraphe premier ».

En particulier, concernant la matière spécifique dont il est question en cause, l’article 19 (3) de la loi précitée du 5 mai 2006 dispose que « contre les décisions de refus de la demande de protection internationale, un recours en réformation est ouvert devant le tribunal administratif. Contre l’ordre de quitter le territoire, un recours en annulation est ouvert devant le tribunal administratif. Les deux recours doivent faire l’objet d’une seule requête introductive, sous peine d’irrecevabilité du recours séparé (…) ».

D’après le paragraphe (4) du même article 19 « contre les décisions du tribunal administratif, appel peut être interjeté devant la Cour administrative statuant comme juge de l’annulation (…) ».

Par essence l’appel remet la chose jugée en question devant les juridictions d’appel pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

Ainsi, sans préjudice de ce que l’appel peut être général ou partiel, suivant l’étendue des prétentions de la partie appelante formulées dans la requête d’appel – article 41 (1) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives –, le contrôle à exercer par la juridiction d’appel est donc a priori le même que celui exercé par les premiers juges, sauf à l’être par une juridiction d’un degré supérieur.

Il s’agit donc, en principe, pour la juridiction d’appel de statuer à nouveau en fait et en droit à l’instar des juges de première instance.

Il appert cependant que tant en ce qui concerne les décisions de refus de la demande de protection internationale que celles portant ordre de quitter le territoire, la loi prévoit à chaque fois que sur appel interjeté contre un jugement du tribunal administratif, la Cour administrative statue comme juge de l’annulation.

La mission de juge de l’annulation ne correspondant pas à la définition classique d’un appel, état des choses devenant d’autant plus apparent en matière de refus de la demande de protection internationale, où les premiers juges ont connu d’un recours en réformation, le bout de phrase de l’article 19 (4) suivant lequel « appel peut être interjeté devant la Cour administrative statuant comme juge de l’annulation » est dès lors sujet à interprétation, afin de circonscrire la mission attribuée en la matière spécifique à la Cour administrative.

L’intention du législateur peut être dégagée du commentaire des articles (doc. parl. 5437, page 33) aux termes duquel « les paragraphes 3 et 4 maintiennent le principe de double degré de juridiction tout en apportant certains aménagements à la procédure actuelle. L’appel peut être interjeté devant la Cour administrative qui statuera comme juge de l’annulation, c’est-à-

dire elle examinera uniquement les moyens de légalité mais ne se prononcera pas sur le fond.

Le Gouvernement s’inspire notamment de la loi française qui prévoit un recours et une possibilité de cassation devant le Conseil d’Etat. Les délais de recours, ainsi que l’effet suspensif des recours sont maintenus. » Par référence à l’article 2 (1) de loi précitée du 7 novembre 1996, la juridiction administrative appelée à statuer comme juge de l’annulation connaît des moyens tirés de l’incompétence, de l’excès et détournement de pouvoir, de la violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, par opposition au recours en réformation prévu par l’article 3 (1) de la même loi, suivant lequel la juridiction administrative statue comme juge du fond.

Afin de ménager à l’appel ainsi désigné par l’article 19 (4) de la loi du 5 mai 2006 précitée un caractère effectif, compte tenu de l’intention exprimée par le législateur, il convient de le considérer comme étant dirigé, en tant que recours en annulation suivant les 5 cas d’ouverture prévus par l’article 2 (1) de la loi précitée du 7 novembre 1996 non pas à l’encontre de la décision déférée au fond, mais du jugement entrepris.

Par conséquent la mission de la Cour – dans la limite des prétentions formulées – consiste, d’une part, à contrôler la régularité externe du jugement entrepris comprenant les questions de compétence juridictionnelle, de procédure et de forme et, d’autre part, à contrôler le bien-

fondé dudit jugement comprenant, au titre essentiellement de la violation de la loi, un contrôle de l’erreur de droit avec détermination du champ d’application de la règle de droit et interprétation de cette dernière, ainsi qu’un contrôle de l’exactitude matérielle des faits pris en considération, en tenant compte de la situation de droit et de fait au jour où le jugement a été rendu, la vérification des faits matériels incluant le contrôle de la proportion entre la situation de fait telle qu’elle se présente et l’application du droit par le jugement entrepris.

Ceci étant, en l’espèce, au regard des développements qui précédent, dès lors que l’appel interjeté ne tend pas à l’annulation du jugement a quo, mais exclusivement à sa réformation moyennant remise en cause de l’appréciation en fait et en droit des premiers juges, d’une part, de même qu’il ne se dégage de l’acte d’appel un quelconque moyen d’annulation susceptible d’être considéré comme visant ledit jugement, étant précisé que les deux moyens d’annulation soulevés en appel tendent à l’annulation non pas du jugement, mais de la décision ministérielle, d’autre part, il incombe à la Cour de déclarer l’appel irrecevable.

Par ces motifs, la Cour, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

déclare l’appel du 30 juillet 2007 irrecevable ;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Francis Delaporte, premier conseiller, Henri Campill, conseiller rapporteur, et lu par la présidente Marion Lanners en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 23278C
Date de la décision : 08/11/2007

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2007-11-08;23278c ?

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