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25/10/2007 | LUXEMBOURG | N°23267

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 octobre 2007, 23267


Numéro 23267 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2007 Audience publique du 25 octobre 2007 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre un arrêté du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23267 du rôle et déposée le 26 juillet 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Bertrand CHRISTMAN

N, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M...

Numéro 23267 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2007 Audience publique du 25 octobre 2007 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre un arrêté du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23267 du rôle et déposée le 26 juillet 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Bertrand CHRISTMANN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …. à Labé (Guinée), de nationalité guinéenne, actuellement détenu au Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’un arrêté du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 26 avril 2007 lui refusant l’entrée et le séjour sur le territoire luxembourgeois et lui ordonnant de quitter le territoire ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 8 août 2007 ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 5 septembre 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Bertrand CHRISTMANN pour compte du demandeur ;

Vu les pièces versées en cause et notamment l’arrêté critiqué ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Arnaud SCHMITT, en remplacement de Maître Bertrand CHRISTMANN, et Madame le délégué du gouvernement Marie-Anne KETTER en leurs plaidoiries respectives.

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La demande d’asile présentée le 27 août 2004 par Monsieur …, préqualifié, fut rejetée comme non fondée par une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministre », du 12 décembre 2005.

Aucun recours, ni gracieux, ni contentieux, ne fut introduit contre ladite décision de refus.

En date du 26 avril 2007, le ministre prit à l’encontre de Monsieur … un arrêté lui refusant l’entrée et le séjour au Luxembourg et lui enjoignant de quitter le territoire luxembourgeois dès la notification de cet arrêté. Cet arrêté est fondé sur les motifs suivants :

« Vu l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Attendu que l’intéressé ne dispose pas de moyens d’existence personnels légalement acquis ;

Attendu que l’intéressé se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Attendu que l’intéressé est susceptible de compromettre l’ordre et la sécurité publics ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 26 juillet 2007, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté ministériel du 26 avril 2007 lui refusant l’entrée et le séjour sur le territoire luxembourgeois et lui enjoignant de quitter le territoire.

Aucune disposition légale n’instaurant un recours au fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation. Le recours subsidiaire en annulation est par contre recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur conclut à une violation de l’article 14, alinéa dernier, de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ;

2) le contrôle médical des étramgers ; 3) l’emploi de la main d’œuvre étrangère, au motif qu’en cas de retour en Guinée il risquerait de faire l’objet de persécutions, « voire d’être tué ».

Pour le surplus, la décision critiquée méconnaîtrait certains faits relatifs à son état de santé, étant donné qu’une pleurésie tuberculeuse et une gastrite lui imposeraient « un traitement lourd composé de médicaments d’accès difficile dans son pays d’origine », d’autant plus qu’il devrait subir des visites de contrôle régulières au service de pneumologie afin de suivre l’évolution de sa pathologie et qu’il serait nécessaire qu’il puisse terminer le traitement prescrit dans des conditions à « garantir sa guérison complète ».

Le délégué du gouvernement relève en premier lieu que Monsieur …, suite au rejet de sa demande en obtention du statut de réfugié en date du 12 décembre 2005, aurait continué à séjourner au Luxembourg en situation irrégulière, qu’il aurait fait l’objet d’une arrestation pour infraction à la loi sur les stupéfiants et qu’en présence de ces faits le ministre aurait décidé le 26 avril 2007 de refuser l’entrée et le séjour sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg au demandeur.

Concernant la violation alléguée de l’article 14, alinéa dernier, de la loi précitée du 28 mars 1972, le représentant étatique signale que Monsieur … aurait accepté la décision de rejet du 12 décembre 2005 et qu’il ne saurait partant faire valoir à l’heure actuelle un risque pour sa vie en cas de retour en Guinée, d’autant plus qu’il n’apporterait aucun élément permettant de vérifier cette affirmation.

En relation avec l’état de santé de Monsieur …, le représentant étatique relève que les certificats médicaux produits par le demandeur serait postérieurs à la prise de la décision ministérielle critiquée, qu’il ne ressortirait d’aucune pièce du dossier que le traitement prescrit ne pourrait pas avoir lieu dans un autre pays que le Grand-Duché de Luxembourg et que de toute façon le tribunal saisi ne serait pas appelé à se prononcer sur la délivrance d’une autorisation de séjour au profit de Monsieur …, étant donné que le demandeur n’aurait jamais introduit pareille demande auprès du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration.

Dans son mémoire en réplique, Monsieur … soutient que son séjour irrégulier actuel sur le territoire luxembourgeois résulte de « la contrainte des autorités luxembourgeoises » en raison du fait qu’il serait détenu au Centre pénitentiaire à Schrassig, que le reproche qu’il représenterait un danger pour la sécurité et l’ordre publics violerait le « droit à la présomption d’innocence » et qu’au vu des circonstances il serait dans l’incapacité matérielle de contacter sa famille pour leur demander du soutien et pour rechercher un travail sur le territoire luxembourgeois.

L’article 2 de la loi prévisée du 28 mars 1972 dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché de Luxembourg pourront être refusés à l’étranger : (…) – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour », impliquant qu’un refus d’entrée et de séjour au pays peut être décidé notamment lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (cf. trib. adm. 17 février 1997, Pas. adm. 2006, V° Etrangers, n° 168 et autres références y citées).

Le tribunal tient de prime abord à rappeler qu’il statue dans la présente matière en tant que juge de l’annulation. Or, dans le cadre d’un recours en annulation, le tribunal statue par rapport à la décision administrative lui déférée sur base des moyens invoqués par la partie demanderesse tirés d’un ou de plusieurs des cinq chefs d’annulation énumérés à l'article 2, alinéa 1er de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, de sorte que son pouvoir de contrôle est essentiellement limité dans la mesure des griefs invoqués. En d’autres termes, l’examen auquel le tribunal doit se livrer ne peut s’effectuer que dans le cadre des moyens invoqués par le demandeur pour contrer les motifs de refus spécifiques à l’acte déféré; par contre, son rôle ne consiste pas à procéder indépendamment des motifs de refus ministériels à un réexamen général et global de la situation du demandeur.

Il appartient dès lors à Monsieur … d’établir que la décision ministérielle litigieuse est non fondée ou illégale pour l’un des motifs énumérés à l’article 2, alinéa 1er de la loi précitée du 7 novembre 1996 tant en ce qui concerne sa conclusion que sa motivation.

Force est au tribunal de constater que la décision litigieuse est fondée quant à ce volet sur le fait non utilement contesté en cause que le demandeur ne dispose pas de moyens d’existence personnels, de sorte que le ministre a valablement pu lui refuser une autorisation de séjour en se fondant sur le prédit motif. Il échet encore de retenir que le demandeur reste en défaut d’invoquer un quelconque moyen en fait ou en droit susceptible d’énerver la régularité de ce volet de la décision litigieuse, la simple affirmation que son emprisonnement l’empêcherait de trouver du travail et de contacter sa famille étant inopérante à cet égard, de sorte que la décision critiquée est en principe légalement motivée.

A cela s’ajoute qu’au jour de la prise de l’arrêté ministériel litigieux, Monsieur … était en séjour irrégulier au pays, sa demande d’asile ayant été rejetée suivant décision du ministre du 12 décembre 2005, non autrement entreprise.

Il s’ensuit que même en faisant abstraction d’une éventuelle susceptibilité dans le chef de Monsieur … de compromettre l’ordre et la sécurité publics, la décision ministérielle déférée est justifiée à suffisance.

Quant à la référence vague faite par le demandeur à la situation générale en Guinée pour conclure qu’il devrait bénéficier d’une mesure de protection de la part de l’Etat luxembourgeois, force est de constater que le moyen soulevé vise l’exécution de la décision d’éloignement et non pas la légalité de l’arrêté ministériel litigieux.

Il en est de même des raisons médicales avancées par le demandeur aux fins de justifier l’annulation de l’arrêté critiqué, en se référant à son état de santé et aux conséquences éventuelles pour sa santé en cas de retour dans son pays d’origine, étant relevé pour le surplus qu’il n’existe aucun élément soumis au tribunal suivant lequel l’état de santé de Monsieur …, tel que ressortissant des certificats médicaux versés, ne pourrait être traité dans son pays d’origine et qu’un retour du demandeur dans son pays d’origine risquerait de l’y exposer à l’une des menaces telles que prévues par l’article 14, alinéa dernier de la loi précitée du 28 mars 1972 ou à des traitements inhumains ou dégradants au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation laisse d’être fondé.

Par ces motifs le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schroeder, premier juge, M. Spielmann, premier juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 25 octobre 2007 par le premier juge Schroeder, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schroeder 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 23267
Date de la décision : 25/10/2007

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2007-10-25;23267 ?

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