Tribunal administratif Numéro 22623 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er mars 2007 Audience publique du 3 octobre 2007 Recours formé par Monsieur … et son épouse, Madame …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale (art.19, L.5.5.2006)
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 22623 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 1er mars 2007 par Maître Joram MOYAL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Ukraine), et de son épouse, Madame …, née le … (Russie), en leur propre nom, ainsi qu'au nom et pour compte de leurs enfants mineurs … , demeurant actuellement ensemble à L- … , tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 29 janvier 2007 portant refus de leur demande de protection internationale ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 27 avril 2007 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Vanessa AROSIO, en remplacement de Maître Joram MOYAL, et Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRÜCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 septembre 2007.
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Le 26 mai 2006, Monsieur … et son épouse, Madame …, ci-après « les époux … », introduisirent oralement auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection.
Les époux … furent entendus séparément respectivement les 8 juin, 3 juillet et 12 juillet 2006 ainsi que les 8 juin, 22 juin, 11 juillet, 18 juillet, 29 août et 31 août 2006 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur leur situation et sur les motifs se trouvant à la base de leur demande de protection internationale.
Par décision du 29 janvier 2007, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ci-après dénommé « le ministre », informa les époux … que leur demande avait été rejetée comme étant non fondée. Cette décision est libellée comme suit :
« J'ai l'honneur de me référer à vos demandes en obtention d'une protection internationale relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection que vous avez présentées auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration en date du 26 mai 2006.
En application de la loi du 5 mai 2006 précitée, vos demandes de protection internationale ont été évaluées par rapport aux conditions d'obtention du statut de réfugié et de celles d'obtention du statut conféré par la protection subsidiaire.
En mains les rapports d'entretiens de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration des 8 juin 2006, 3 juillet 2006, 24 juillet 2006, 22 juin 2006 et 13 septembre 2006.
Il résulte des rapports de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration que vous auriez quitté Moscou le 21 mai 2006 en prenant la place dans la remorque d'un camion. Vous ne pouvez donner aucune précision concernant votre trajet. Vous auriez déjà quitté la Russie en 2003 pour aller déposer une demande d'asile en France. Au bout de quelques jours et sans attendre le résultat vous seriez rentrés en Russie.
Vos ennuis proviendraient de vos origines juives. Vous auriez été agressés à votre domicile après que vous, Monsieur, ayez pris la parole lors d'une réunion du personnel chez votre employeur. A cette occasion, vous aviez, en public, pris la défense des Juifs qui étaient attaqués par des membres du Parti Nationaliste Bolchévique. Vous ajoutez que le directeur de la société qui vous employait - la STAR - était sympathisant de ce parti. Après cette agression, vous auriez été hospitalisé. Par la suite, le 15 février 2006 et le 2 avril 2006, ces mêmes personnes vous auraient encore attaqué chez vous. Vous auriez porté plainte à la milice, mais les miliciens vous auraient chaque fois frappé. Vous auriez aussi porté plainte contre ces miliciens. Vous précisez que vous aviez déjà tenté de quitter la Russie en 2003 car vous étiez agressé par des membres du RNE.
Vous, Madame, vous confirmez ces agressions à votre domicile. Vous confirmez aussi que ces problèmes seraient dus à votre nationalité juive.
Vous faites tous les deux état également d'injures de la part des membres du Parti National Bolchévique.
Il y a lieu d'abord de relever que la reconnaissance du statut de réfugié n'est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d'origine, mais aussi et surtout par la situation particulière des demandeurs qui doivent établir concrètement que leur situation individuelle est telle qu'elle laisse supposer une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève.
Or, les faits que vous alléguez ne sauraient constituer un motif justifiant la reconnaissance du statut de réfugié, puisqu'ils ne peuvent, à eux seuls, fonder dans votre chef une crainte justifiée d'être persécuté dans votre pays d'origine du fait de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social ou de vos convictions politiques ainsi que le prévoit l'article 1er, section 1, § 2 de la Convention de Genève ainsi que les articles 31 et 32 de la loi précitée du 5 mai 2006.
En effet, d'après vous, vos problèmes proviendraient de vos origines juives. Vous dites n'avoir jamais caché vos origines à ceux qui vous entouraient mais par contre il est clair que vous ne savez que très peu de choses de la religion juive et que vous ne la pratiquiez pas. Vous éprouvez davantage un sentiment d'insécurité commun aux minorités qu'une réelle crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève.
Quant au Parti National Bolchévique, il vient d'éclater début 2006 et Edouard LIMONOV en a été exclu. Relevons aussi que ce parti est contre la politique de Vladimir PUTIN et qu'il est donc peu probable que toutes les milices et tous les Parquets soient infiltrés par des membres de ce parti. De plus, ce parti est surtout centré sur la défense des minorités russes dans les Ex-
Républiques Soviétiques et son influence est de toute façon faible.
Ainsi, vous n'alléguez aucun fait susceptible de fonder raisonnablement une crainte de persécution en raison d'opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l'appartenance à un groupe social, susceptible de rendre votre vie intolérable dans votre pays.
Les conditions permettant l'octroi du statut de réfugié ne sont par conséquent pas remplies.
En outre, vos récits ne contiennent pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire que vous courez un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 37 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection. En effet, les faits invoqués à l'appui de vos demandes ne nous permettent pas d'établir que a) vous craignez de vous voir infliger la peine de mort ou de vous faire exécuter, b) vous risquez de subir des actes de torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants, c) vous êtes susceptibles de faire l'objet de menaces graves et individuelles contre votre vie en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.
En l’espèce, un sentiment d'insécurité est insuffisant pour vous voir octroyer le bénéfice de la protection subsidiaire.
Vos demandes en obtention d'une protection internationale sont dès lors refusées comme non fondées au sens de l'article 19§ 1 de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d'asile et à des formes complémentaires de protection.
La présente décision vaut ordre de quitter le territoire.
La décision de rejet de vos demandes de protection internationale est susceptible d'un recours en réformation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d'un avocat à la Cour dans un délai d'un mois à partir de la notification de la présente.
Un recours en annulation devant le Tribunal administratif peut être introduit contre l'ordre de quitter le territoire, simultanément et dans les mêmes délais que le recours contre la décision de rejet de votre demande de protection internationale. Tout recours séparé sera entaché d'irrecevabilité.
Je vous informe par ailleurs que le recours gracieux n'interrompt pas les délais de la procédure. (…) » Par requête déposée le 1er mars 2007, les époux … ont fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du ministre du 29 janvier 2007 en ce qu’elle porte rejet de leur demande en obtention du statut de réfugié comme étant non fondée.
En effet, en l'absence d'intention manifeste contraire, les termes juridiques employés par un professionnel de la postulation sont à appliquer à la lettre, ce plus précisément concernant la nature du recours introduit, ainsi que son objet, tel que cerné à travers la requête introductive d'instance et précisé, le cas échéant, à travers le dispositif et le mémoire en réplique.
Or en l'espèce, force est de constater que les demandeurs ne sollicitent, au terme du dispositif de leur requête, complété par leurs moyens développés dans leur requête, que la réformation de la décision en ce qu'elle leur a refusé le statut de réfugié.
Il y a donc lieu de retenir que le recours introduit est limité en ce qui concerne la décision déférée au seul volet du refus du statut de réfugié, à l’exclusion de la question du bénéfice éventuel de la protection subsidiaire telle que prévue par la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection et de la question de la légalité de l’ordre de quitter le territoire inclus dans la même décision.
Etant donné que l’article 19 (3) de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection prévoit un recours en réformation en matière de demandes de protection internationale déclarées non fondées, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit, lequel est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi. Le recours subsidiaire en annulation est en conséquence irrecevable dans cette mesure.
A l’appui de leur recours, les époux … relatent avoir été exposés en Russie à des persécutions du fait de leur religion juive, persécutions perpétrées par des membres du parti national bolchévique. Ils affirment avoir été obligés de quitter de ce fait une première fois la Russie en 2003, mais, « la volonté de retourner en Russie et d’essayer encore une fois de vivre dans un autre quartier de la ville avec un autre travail » ayant été plus forte, ils auraient quitté la France après quelques jours sans attendre la réponse des autorités françaises par rapport à leur demande d’asile.
Ils relatent que Monsieur … s’étant opposé à des propos antisémites tenus lors d’une réunion de travail, des membres du parti national bolchévique, dont un milicien, se seraient rendus le 22 novembre 2005 à leur domicile où il aurait été passé à tabac, ce qui aurait entraîné son hospitalisation pendant onze jours. Les demandeurs ayant porté plainte, les mêmes personnes auraient tenté le 15 février 2006 d’incendier leur appartement et le lendemain, des membres de la milice, auprès de qui ils auraient voulu porter plainte, les auraient à leur tour insultés et battus.
Finalement, ils auraient encore été battus et leur appartement mis à sac le 2 avril 2006, ce qui aurait précipité leur fuite vers le Luxembourg.
Ils affirment faire encore actuellement l’objet de persécutions, puisque en février 2007, un membre du parti national bolchévique leur aurait adressé une lettre de menace à leur ancien domicile en Russie.
Ils se prévalent par ailleurs de divers rapports pour exposer la situation des Juifs et l’inaction de la police, voire la complicité de la police et de la milice dans des attaques antisémites dans l’ancienne Union Soviétique et récusent toute possibilité de fuite interne.
Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs et que leur recours laisserait d’être fondé.
Aux termes de l’article 2 c) de la loi précitée du 5 mai 2006, la notion de « réfugié » comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner (…) ».
En l’espèce, l’examen des faits et motifs invoqués par les demandeurs à l’appui de leur demande en obtention d’une protection internationale lors de leurs auditions respectives, ainsi qu’au cours de la procédure contentieuse, amène le tribunal à conclure que les demandeurs n’établissent pas à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leur appartenance religieuse.
Il échet de rappeler que le tribunal, statuant en tant que juge du fond en matière de demandes de protection internationale, doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur, tout en prenant en considération la situation générale existant dans son pays d’origine. Cet examen ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur, la crédibilité d’un demandeur de protection internationale constituant en effet un élément d’appréciation fondamental dans l’appréciation de la justification d’une demande d’asile, spécialement lorsque des éléments de preuve matériels font défaut1.
Or le tribunal se doit de prime abord d’émettre des doutes quant à la réalité des motifs de fuite mis en avant par les demandeurs.
En effet, le tribunal constate à la lecture des déclarations des demandeurs telles qu’actées aux divers procès-verbaux d’audition que si ceux-ci affirment avoir dû quitter une première fois la Russie en 2003 parce qu’ils étaient persécutés par le parti fasciste de l’Unité Russe à cause de leur religion juive, ils sont cependant retournés en Russie de leur propre chef, sans même attendre la décision des autorités françaises par rapport à leur demande d’asile, et ce parce que les conditions matérielles de leur séjour en France ne les satisfaisaient pas. A ce sujet, le tribunal constate que les explications des demandeurs ne sont pas cohérentes, Monsieur … affirmant 1 Cour adm. 21 juin 2007, n° 22858C, non encore publié.
qu’ils auraient quitté la France parce qu’ils étaient obligés de vivre dans la rue, tandis que son épouse affirme qu’ils devaient vivre dans un hôtel où ils devaient payer leur séjour.
Force est de retenir que ce comportement des demandeurs est difficilement compatible avec le risque de persécution mis en avant par eux, étant donné qu’il n’est guère compréhensible que des personnes, qui affirment craindre pour leur vie, sinon pour leur intégrité physique, décident de retourner dans leur pays d’origine sans même attendre l’issue de la procédure d’asile prétendument entamée, et ce uniquement pour des considérations matérielles, par ailleurs peu crédibles eu égard à l’aide accordée en France aux demandeurs d’asile sur base des textes français ainsi que des normes internationales et européennes.
Force est encore de constater que si, d’une part, les demandeurs affirment avoir fait l’objet de persécutions en Russie du fait de leur religion, ils affirment, d’autre part, ne jamais avoir caché leur religion juive, le demandeur affirmant au contraire avoir ouvertement revendiqué sa religion juive, ce qui semble encore contradictoire dans le chef de personnes prétendument persécutées pour leur religion.
D’un autre côté, le tribunal relève que si les demandeurs en général, et Monsieur … en particulier, revendiquent leur appartenance à la communauté juive, leurs connaissances des rites juifs sont extrêmement limitées, les demandeurs n’ayant ni fréquenté de synagogue ni respecté le sabbat, les seules connaissances de Madame … de la religion juive se limitant apparemment à la cuisine juive.
Enfin, le tribunal est encore amené à constater que si le demandeur affirme que sa nationalité juive aurait été inscrite sur son certificat de naissance et affirme pouvoir produire des documents prouvant sa confession et nationalité juives (voir page 3 du rapport d’audition du 8 juin 2006), il n’a pas donné de suites à cette affirmation, les demandeurs restant en défaut de produire un quelconque élément tangible rapportant la preuve de leur appartenance à la communauté juive, de sorte que celle-ci doit être considérée, en l’état actuel d’instruction du dossier, comme sujette à caution.
Le tribunal relève par ailleurs un certain nombre d’incohérences dans les déclarations des demandeurs susceptibles de mettre en doute la crédibilité de leur récit. Ainsi, notamment, les demandeurs restent en défaut d’expliquer de manière crédible la présence de cachets sur le passeport de Madame … selon lesquels elle se serait rendue en 2005 en Ukraine, les demandeurs niant tout séjour en Ukraine. Par ailleurs, si Madame … affirme que son époux aurait déposé une dernière plainte contre les personnes les persécutant le 21 février 2006, son époux ne mentionne pas cette plainte. De même, si Madame … relate avec force détails la mise à sac de leur appartement en date du 2 avril 2006, au cours de laquelle tout le mobilier de leur appartement aurait été cassé et eux-mêmes violemment roués de coups, la demanderesse affirmant encore lors de son audition en date du 31 août 2006 porter des traces des coups reçus (voir page 24 du rapport daté du 22 juin 2006), son époux, pour sa part, ne relate cet incident que de manière très laconique, sans même mentionner les coups portés à son épouse (voir page 16 du rapport daté du 3 juillet 2006 : « Et le 2 avril ils sont venus encore une fois. Ils ont cassé la porte et ils m’ont frappé »).
Par ailleurs, au-delà du caractère incohérent et douteux du récit des demandeurs, à supposer que celui-ci soit véridique, force est de constater que les demandeurs avancent en substance comme motifs les ayant amené à fuir la Russie des persécutions émanant d’un petit groupe de mêmes personnes, appartenant au parti national bolchévique, dont certaines seraient membres de la milice. Force est par conséquent de constater que les auteurs allégués de cette persécution ne relèvent pas de l’Etat, même si certaines de ces personnes exercent également par ailleurs des fonctions au sein de l’Etat russe, les demandeurs eux-mêmes excluant d’ailleurs une infiltration totale de la milice par ce parti, en limitant leurs craintes à la milice de leur quartier et en admettant qu’ « on ne peut pas dire que toute la milice de Moscou ne fasse que des choses comme ça ».
Il résulte par ailleurs des documents versés en cause par l’Etat que le parti en question ne comptait avant 2006 que 20.000 membres pour toute la Fédération de Russie et qu’il a éclaté début 2006, de sorte à perdre toute influence. Au vu de ces circonstances, le tribunal retient que les persécutions avancées par les demandeurs, à les supposer établies, n’émanent en tout état de cause que de quelques membres ou sympathisants locaux d’un parti d’opposition minoritaire, de sorte qu’ils restent en défaut d’établir des raisons crédibles suffisantes pour lesquelles ils n’auraient pas été en mesure de s’installer dans une autre partie de l’agglomération de Moscou, ou de la région moscovite, voire de la Fédération de Russie, hors de portée de ces membres, et de profiter ainsi, compte tenue de l’étendue du territoire moscovite, de l’importance de sa population - la seule ville de Moscou comptant plus de 10 millions d’habitants -, ainsi que du fait que leur appartenance à la confession juive – à la supposer établie – n’est pas apparente, d’une possibilité effective de fuite interne.
A partir des éléments ci-avant relatés, il y a lieu de retenir que les demandeurs n’ont pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans leur chef.
Il y a encore lieu de relever que cette conclusion n’est pas énervée par les documents rédigés en langue russe et de surcroît en alphabète cyrillique et versés par les demandeurs sans la moindre traduction qui ne sauraient être pris en considération par le tribunal, étant souligné que la pièce censée être une lettre de menace datée de février 2007, loin de conforter le récit des demandeurs, ne fait que le rendre davantage incrédible. En effet, il résulte non seulement des explications du délégué du Gouvernement que le parti national bolchévique a éclaté début 2006, mais il appert encore plus que douteux que ce parti, ayant prétendument eu connaissance de la fuite des demandeurs à l’étranger, ait expédié une lettre de menace au domicile que les demandeurs n’occupent plus depuis près d’un an. Enfin, il paraît encore douteux que les demandeurs, qui ne parviennent prétendument pas à contacter la mère du demandeur pour se faire envoyer des documents attestant de leur nationalité juive, ont obtenu de manière inexpliquée, communication d’un courrier qui leur aurait été adressé à leur ancienne adresse à Moscou.
Par ces motifs ;
le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit en la forme le recours en réformation contre la décision ministérielle portant refus d’une protection internationale ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
condamne les demandeurs aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 octobre 2007 par :
Mme Lenert, vice-président, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.
s. Schmit s. Lenert 8