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01/08/2007 | LUXEMBOURG | N°23268

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 01 août 2007, 23268


Tribunal administratif Numéro 23268 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2007 Audience publique du 1er août 2007 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23268 du rôle et déposée le 26 juillet 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … prétendant ê

tre né le 19 mai 1993 et être de nationalité éthiopienne, actuellement retenu au Centre...

Tribunal administratif Numéro 23268 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 26 juillet 2007 Audience publique du 1er août 2007 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 23268 du rôle et déposée le 26 juillet 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … prétendant être né le 19 mai 1993 et être de nationalité éthiopienne, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 19 juillet 2007 ordonnant son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée d’un mois à partir de la notification de cette décision ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 30 juillet 2007 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er août 2007.

Le 1er juillet 2007, Monsieur … fut intercepté sans papiers à l’ « Aire de Capellen », en tant que passager clandestin d’un poids lourds.

Par décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 3 juillet 2007, il fut placé en rétention administrative au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig.

Le 11 juillet 2007, il fut transféré suite à une demande de placement du Procureur d’Etat, à l’unité des adolescents difficiles au Centre hospitalier neuropsychiatrique d’Ettelbruck.

Par une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 19 juillet 2007, une nouvelle mesure de rétention fut prise à l’égard de Monsieur … pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision sur base des motifs et considérations suivants :

« Vu l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu le rapport médical du 18 juillet 2007 établi par le Centre Hospitalier Neuro-

Psychiatrique d’Ettelbrück ;

Considérant que l’intéressé n’est pas en possession d’un document de voyage valable ;

- qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels suffisants ;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Considérant que l’intéressé est signalé au système EURODAC comme ayant déposé une demande d’asile en Italie en date du 11 août 2006 ;

- qu’une demande de reprise en charge en vertu de l’article 16 § 1er du règlement (CE n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 a été adressé aux autorités italiennes en date du 18 juillet 2007 ;

- qu’en attendant l’accord de reprise en charge, l’éloignement immédiat n’est pas possible ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ».

Par requête déposée le 26 juillet 2007 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours en réformation sinon en annulation à l’encontre de la décision ministérielle du 4 janvier 2007 ordonnant son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière. A l’audience des plaidoiries, le mandataire du demandeur a encore déclaré renoncer au recours en annulation introduit en ordre subsidiaire, ce dont il échet de lui donner acte.

Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.

l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit contre ladite décision. Ledit recours ayant, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Le demandeur invoque en premier lieu l’exception d’illégalité du règlement grand-

ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière estimant que la loi modifiée du 27 juin 1997 portant réorganisation de l’administration pénitentiaire n’offrirait pas de base légale suffisante à la création d’une structure spécifique au sein du centre pénitentiaire.

Ce moyen n’est cependant pas fondé, étant donné que la base légale dudit règlement grand-ducal est donnée par l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée, tel que cela ressort d’ailleurs du libellé même dudit règlement grand-ducal. Dans ce contexte, il est indifférent que le Conseil d’Etat, au moment de l’élaboration de la loi du 27 juin précitée, a estimé que l’intervention du législateur serait de mise pour l’hypothèse d’une modification des attributions d’un établissement pénitentiaire, étant donné que le Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière n’est pas à considérer comme un établissement pénitentiaire1.

Le demandeur soulève encore la disproportionnalité de la décision de placement tant au regard de sa situation personnelle qu’au regard de la loi modifiée du 28 mars 1972. Il fait valoir qu’étant donné qu’il se trouverait dans un état de détresse psychologique, ayant déjà tenté de se suicider, son placement dans une cellule isolée ne serait guère adapté. Il estime dès lors que son placement serait contraire aussi bien à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme qu’à celui de l’article 7 de la même convention.

En l’espèce, le tribunal est saisi, d’une part, d’une décision émanant du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ayant pour seul contenu décisionnel le placement du demandeur au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière et, d’autre part, de griefs plus ou moins précis concernant non pas le principe même du placement de l’intéressé audit Centre, mais les modalités concrètes du régime de rétention telles qu’appliquées au demandeur.

Force est au tribunal de constater que les conditions de rétention résultent en leurs grandes lignes du régime spécifique tel qu’instauré par le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 précité, règlement qui renvoie en son article 5 directement pour toutes les questions qu’il ne règle pas lui-même au règlement grand-ducal modifié du 24 mars 1989 concernant l’administration et le régime interne des établissements pénitentiaires.

Or, l’autorité chargée de l’application de ces règlements grand-ducaux n’est pas le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, mais conformément à l’article 18 du prédit règlement grand-ducal modifié du 24 mars 1989 le ministre de la Justice, dont dépend l’administration des établissements pénitentiaires, ainsi qu’en application de l’article 19 du même règlement grand-ducal le procureur général d’Etat, chargé de la direction générale et de la surveillance des établissements pénitentiaires.

En ce qui concerne les modalités pratiques de la rétention, telles que par exemple la question litigieuse du placement en une cellule isolée, force est de constater que ces modalités, en ce qu’elles concernent la gestion journalière du centre de rétention intégré au centre pénitentiaire, relèvent conformément à l’article 68 du prédit règlement grand-ducal modifié du 24 mars 1989 des compétences du directeur de l’établissement qui, aux termes de cet article, assure, sous l’autorité du procureur général d’Etat, la direction et l’administration de l’établissement et qui est responsable du bon fonctionnement de l’établissement en question.

Force est par ailleurs de constater que le règlement grand-ducal modifié du 24 mars 1989 instaure une voie de recours spécifique auprès du procureur général d’Etat au profit des détenus et, en application de l’article 5 du règlement grand-ducal du 20 septembre 2002, également au profit des retenus, qui s’estiment lésés par une décision du directeur2.

Il se dégage dès lors de l’ensemble des considérations qui précèdent que le grief mis en avant par le demandeur, qui s’analyse en un grief relatif aux modalités concrètes et matérielles de son placement, est étranger à la décision du ministre des Affaires étrangères et 1 Cf. TA 7 mai 2003, n° du rôle 16363, Pas. adm. 2006, V° Etrangers, III. Rétention administrative n° 390, p.

326.

2 Cf. TA 13 juin 2007, n° 23011 du rôle et TA 18 juillet 2007, n° 23199 du rôle.

de l’Immigration telle que déférée et au cadre légal dans lequel la décision déférée a été prise, à savoir la loi modifiée du 28 mars 1972 précitée, de sorte que le recours est à rejeter comme étant non fondé.

Cette conclusion ne saurait être énervée par une référence générale aux dispositions des articles 3 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, étant donné qu’à défaut de précisions relatives au volet concrètement visé de cette disposition, le tribunal n’est pas mis en mesure de cerner le débat que le demandeur entend plus particulièrement engager dans ce contexte.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 1er août 2007 par :

M. Spielmann, juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Spielmann 4


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 23268
Date de la décision : 01/08/2007

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2007-08-01;23268 ?

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