Tribunal administratif Numéro 22537 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 février 2007 Audience publique du 21 février 2007 Recours formé par Monsieur XXX contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative
JUGEMENT
Vu la requête, inscrite sous le numéro 22537 du rôle, déposée le 12 février 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à XXX, au nom de Monsieur XXX, né le XXX à XXX, de nationalité XXX, actuellement placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière de XXX, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 1er février 2007 ordonnant son placement audit Centre pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification de la décision ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 février 2007 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;
Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, en remplacement de Maître Louis TINTI, et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 21 février 2007.
Le 1er février 2007, Monsieur XXX fut interpellé par la police grand-ducale, étant donné qu’il se trouvait en situation irrégulière au pays.
Par décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 1er février 2007, Monsieur XXX fut placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à XXX pour une durée maximale d'un mois à partir de la notification de ladite décision dans l'attente de son éloignement du territoire XXX.
1 Ladite décision repose sur les considérations suivantes :
« Vu l'article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l'entrée et le séjour des étrangers ;
Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;
Vu le procès-verbal no 1096/07 du 1er février 2007 établi par la Police XXX ;
Vu mon arrêté de refus d’entrée et de séjour du 1er février 2007 ;
Considérant que l'intéressé est démuni de toute pièce d’identité et de voyage valable ;
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qu'il ne dispose pas de moyens d'existence personnels légalement acquis ;
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qu'il se trouve en séjour irrégulier au pays ;
Considérant qu’en attendant le résultat des recherches quant à l’identité et à la situation de l’intéressé, l’éloignement immédiat de l’intéressé n’est pas possible ;
Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement ».
Par requête déposée le 12 février 2007 au greffe du tribunal administratif, Monsieur XXX a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation à l’encontre de la décision ministérielle de placement du 1er février 2007.
Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.
l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal contre la décision litigieuse. Ledit recours ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est dès lors irrecevable.
A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir qu’il n’existerait aucun empêchement légal quant à son renvoi dans son pays, sous réserve du respect d’un délai minimal pour l’exécution matérielle du refoulement.
S’il est certes établi en cause que Monsieur XXX dispose d’un passeport valable et qu’il a déclaré vouloir retourner volontairement au XXX, il n’en reste pas moins qu’il y a lieu d’organiser matériellement le transfert, de sorte que le demandeur ne saurait valablement soutenir que du fait qu’il dispose d’un passeport valable, il existerait une possibilité effective de refoulement.
Le demandeur estime par ailleurs que s’il est clair que les démarches du ministre compétent en vue de l’éloigner du territoire XXX ont été appropriées quant à la saisine de la police judicaire, celles-ci auraient été insuffisantes quant à l’exécution matérielle de son éloignement.
Quant aux démarches entreprises, il résulte des pièces du dossier que le service de police judiciaire a été chargé en date du 13 février 2007 afin d’organiser le rapatriement de Monsieur XXX au XXX et que les autorités XXX compétentes ont été informées en date du 214 février 2007 que la date prévue pour le rapatriement est fixée au mercredi 21 février 2007 avec un vol de XXX vers XXX et puis avec un vol de XXX vers XXX.
Au vu des diligences ainsi déployées qui se solderont, d’après les informations fournies en cause par le délégué du Gouvernement, par l’exécution du transfert du demandeur dans un court laps de temps s’étant étalé du 14 février 2004 au 21 février 2007, le ministre a entrepris des démarches suffisantes en vue d’un transfert rapide du demandeur vers le XXX.
Monsieur XXX conclut encore au caractère inapproprié du placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière. Il affirme à ce sujet être soumis au même régime que les détenus, qu’il ne bénéficierait que d’une heure de promenade par jour et qu’il serait enfermé dans des cellules 23 heures sur 24 heures, de sorte que sa liberté lui aurait été ôtée en violation de l'article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3. l’emploi de la main-d’œuvre étrangère et de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Etant donné que l’article 15 paragraphe 1er de la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée, dispose que le placement d’un étranger doit avoir lieu dans un établissement « approprié » et que la Cour administrative a retenu dans un arrêt du 15 février 2007 (n° 22534C) qu’en « l’état actuel du dossier le Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière n’est pas à considérer comme constituant une structure fermée appropriée», il y a lieu de conclure que le Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ne constitue en l’espèce pas un établissement approprié au vu de la restriction excessive de la liberté de circulation mise en cause par le demandeur et non utilement contesté par le délégué du Gouvernement. Le tribunal est partant amené à réformer la décision querellée et à ordonner la libération immédiate du demandeur.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit le recours en réformation en la forme ;
au fond, le déclare justifié ;
partant, par réformation de la décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 1er février 2007, ordonne la mise en liberté de Monsieur XXX ;
déclare le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire irrecevable, condamne l’Etat aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 21 février 2007 par :
M. Schroeder, premier juge, Mme Thomé, juge, Mme Gillardin, juge, 3en présence de M. Rassel, greffier.
s. Rassel s. Schroeder 4