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27/11/2006 | LUXEMBOURG | N°21141

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 novembre 2006, 21141


Tribunal administratif N° 21141 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 mars 2006 Audience publique du 27 novembre 2006 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision de la commune de Walferdange en matière de fonctionnaires et d’agents publics

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 21141 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 20 mars 2006 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant principalement à

la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du collège échevinal de W...

Tribunal administratif N° 21141 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 mars 2006 Audience publique du 27 novembre 2006 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision de la commune de Walferdange en matière de fonctionnaires et d’agents publics

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 21141 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 20 mars 2006 par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du collège échevinal de Walferdange du 17 juin 2005 modifiant ses attributions et supprimant la prime d’astreinte dont il bénéficiait depuis le 21 décembre 1990 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 23 mars 2006 portant signification de ce recours à l’administration communale de Walferdange ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 juin 2006 par Maître Pierre METZLER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg pour compte de l’administration communale de Walferdange ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 18 septembre par Maître Jean-Marie BAULER au nom de Monsieur … ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 16 octobre 2006 par Maître Pierre METZLER pour compte de l’administration communale de Walferdange ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Nadia JANAKOVIC, en remplacement de Maître Jean-Marie BAULER et Maître Catherine DELSEMME, en remplacement de Maître Pierre METZLER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 8 novembre 2006.

Lors de sa séance du 17 juin 2005, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Walferdange a décidé à l’unanimité d’accepter le nouvel organigramme de la régie communale et de supprimer la prime d’astreinte accordée à Monsieur …, en retenant au titre de motivation ce qui suit :

« Vu la délibération du conseil communal du 21 décembre 1990, approuvée par le Ministre de l’Intérieur en date du 29 janvier 1991, référence L/1953/91, accordant une prime d’astreinte de 22 points indiciaires à Monsieur …, que sa fonction de responsable du chantier et des ouvriers ainsi que de l’entretien de l’infrastructure communale obligeait à se tenir à la disposition de l’administration communale en dehors des heures normales de bureau, Vu l’article 19 du règlement grand-ducal du 4 avril 1964 portant assimilation des traitements des fonctionnaires des communes, syndicats de communes et établissements publics placés sous la surveillance des communes, à ceux des fonctionnaires de l’Etat, tel qu’il a été modifié par la suite et notamment par le règlement grand-ducal du 2 octobre 1992 qui change fondamentalement les conditions d’attribution d’une prime d’astreinte, Vu que par sa lettre du 11 mai 1999, Monsieur … avait informé le collège échevinal qu’en raison des suites d’une grave maladie il n’arrivait plus à assumer le volume de travail toujours croissant et avait demandé à n’être chargé que de quelques tâches bien précises et adaptées à son état de santé, Vu que pour ces raisons M. … n’a plus été sollicité pour des interventions en dehors des heures normales de fonctionnement de la régie communale, Vu que le nouvel organigramme de la régie communale présenté en date de ce jour par M…, ingénieur technicien chargé entre autres de l’organisation et du contrôle de la régie communale et de la surveillance des chantiers, prévoir prioritairement des tâches administratives pour M. …, Vu que pour toutes ces raisons, la liquidation d’une prime d’astreinte en faveur de M.

… n’a plus de raison d’être, ».

Cette décision fut portée à la connaissance de Monsieur … par courrier de l’administration communale datant du 1er août 2005 dans les termes suivants :

« Par sa décision du 21 décembre 1990, le conseil communal vous avait accordé une prime d’astreinte de 22 points indiciaires, vu que vos fonctions de responsable du chantier vous obligeaient à vous tenir à la disposition de l’administration communale les soirées et les week-ends pour pouvoir parer aux problèmes urgents d’infrastructure et pour organiser pendant la saison hivernale le service de salage. Cette décision fut approuvée par M. le Ministre de l’Intérieur en date du 29 janvier 1991, référence L/1953/91.

Or, depuis un certain nombre d’années mais au plus tard depuis l’engagement de Monsieur … aux fonctions d’ingénieur-technicien, responsable de la gestion de la régie communale, vous n’assumez plus ces fonctions de sorte que vous n’êtes plus sollicité pour des interventions en dehors des heures normales de fonctionnement de la régie communale.

Par ailleurs, l’article 19 du règlement grand-ducal du 4 avril 1964 portant assimilation des traitements des fonctionnaires des communes, syndicats de communes et établissements publics placés sous la surveillance des communes, à ceux des fonctionnaires de l’Etat, tel qu’il a été modifié par la suite et notamment par le règlement grand-ducal du 2 octobre 1992, ne prévoit plus de prime d’astreinte fixe de 22 points que pour les sapeurs-

pompiers professionnels, les agents de transport, les gardes champêtres et les agents des 7 grades inférieurs chargés du service de concierge, impliquant la surveillance dans les bâtiments communaux, c’est-à-dire pour des carrières différentes de la vôtre ou pour des tâches que vous n’assurez pas.

C’est pourquoi le collège échevinal, ne voyant plus de base légale pour continuer le versement de ladite prime d’astreinte fixe de 22 points indiciaires, a décidé de cesser son paiement à partir du 1er septembre 2005 ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 mars 2006, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision prérelatée du collège échevinal du 17 juin 2005.

L’administration communale de Walferdange ayant conclu à titre principal à l’incompétence du tribunal pour connaître du recours introduit au motif qu’aucune décision susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux n’aurait été rendue et que celle déférée ne serait pas de nature à faire grief à Monsieur …, il y a d’abord lieu de déterminer la nature de l’acte déféré avant d’examiner les autres moyens d’irrecevabilité présentés en défense tendant à faire admettre que l’intéressé aurait été forclos pour agir.

Il se dégage des pièces versées au dossier que Monsieur … s’est vu accorder une prime d’astreinte de 22 points indiciaires par décision du conseil communal de Walferdange du 21 décembre 1990 au motif qu’il était responsable du chantier et des ouvriers, ainsi que de l’entretien de l’infrastructure communale et qu’il devait se tenir à la disposition de l’administration communale les soirées et les weekends pour pouvoir parer aux problèmes urgents d’infrastructure et pour organiser le service de salage, de sorte à avoir bénéficié depuis cette date d’une décision ayant créé des droits à un avantage d’ordre pécuniaire dans son chef.

S’il est encore constant que par courrier du 11 mai 1999, l’intéressé, à la suite d’une lourde maladie, s’est adressé au collège échevinal pour lui faire part que la prise continue, - à cette époque -, de médicaments entraînait un état de fatigue dans son chef l’exposant à des difficultés à accomplir ses fonctions, ainsi qu’à solliciter l’attribution « de quelques tâches bien précises et adaptées à (son) état actuel », il n’en demeure cependant pas moins constant aussi qu’en dépit de cette demande, ainsi que d’éventuelles modifications au niveau des tâches effectivement confiées à Monsieur … par la suite, la décision de supprimer la prime d’astreinte lui accordée par décision du 21 décembre 1990 ne fut prise qu’en date du 17 juin 2005, de sorte à ne plus être rattachable dans le temps à la demande de Monsieur … du 11 mai 1999, ceci même indépendamment du fait que ledit courrier du 11 mai 1999 n’avait pas pour objet une demande en suppression de la prime d’astreinte, mais tendait d’une manière beaucoup plus générale à l’attribution de quelques tâches précises et adaptées à l’état de santé de l’intéressé, tel qu’il se présentait à cette époque-là.

La décision déférée du 17 juin 2005, en ce qu’elle supprime concrètement un avantage financier dont l’intéressé bénéficiait jusque lors, s’analysant pour le surplus clairement en un acte de nature à faire grief en ce qu’il est susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle et patrimoniale de Monsieur …, le moyen avancé pour conclure à l’incompétence du tribunal pour connaître du recours introduit faute de porter sur une décision susceptible de faire de grief, laisse d’être fondé.

Pour conclure ensuite à l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté, la commune se prévaut du fait qu’à la date de l’introduction du recours, Monsieur … aurait eu connaissance de la décision litigieuse depuis plus de trois mois, de sorte que par application des dispositions de l’article 3 (1) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le recours aurait été déposé en dehors du délai de recours contentieux prévu par la loi.

Si la prise de connaissance par Monsieur … de la décision litigieuse remonte certes au mois d’août 2005, il n’en demeure cependant pas moins que le demandeur a valablement pu se référer, dans sa requête introductive d’instance, aux dispositions de l’article 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes pour attirer l’attention du tribunal sur le fait que ni la délibération litigieuse du 17 juin 2005, ni le courrier du 1er août 2005 par lequel cette délibération fut portée à sa connaissance ne comportent une quelconque indication des voies de recours ouvertes contre eux, le délai dans lequel le recours doit être introduit, l’autorité à laquelle il doit être adressé, ainsi que la manière dans laquelle il doit être présenté.

Or, l’omission d’informer l’administré sur les voies de recours, conformément audit article 14, ayant pour effet d’empêcher que le délai du recours contentieux ne commence à courir1, le moyen d’irrecevabilité proposé ne saurait être utilement retenu.

L’administration communale se prévaut encore du fait que le recours sous examen est daté du 20 mars 2005 tandis que l’exploit de signification se réfère à un recours du 20 mars 2006, pour soutenir que le recours daté du 20 mars 2005 n’aurait pas été signifié en bonne et due forme, étant entendu que conformément à l’article 4 (2) de la loi du 21 juin 1999 précitée, cette absence de signification devrait entraîner la caducité du recours.

Compte tendu du fait que la décision déférée par le recours sous examen est clairement déterminée comme étant celle datant du 17 juin 2005 portée à la connaissance de l’intéressé par courrier du 1er août 2005 et que partant la date figurant en bas de la requête introductive, en l’occurrence le 20 mars 2005, ne peut raisonnablement s’analyser autrement qu’en une simple erreur matérielle, aucune conséquence utile ne saurait en être tirée sous peine de verser dans l’absurde. Le recours ayant en effet été déposé en date du 20 mars 2006 et l’exposé des faits ne permettant aucun doute sur l’agencement dans le temps des actes déférés ainsi que des suites y réservées par Monsieur …, le moyen de la partie défenderesse fondé, à l’exclusion de tout doute, sur une simple erreur matérielle au niveau de la date inscrite sur la requête introductive d’instance est à écarter pour manquer de pertinence.

La contestation sous examen ayant trait à la fixation du traitement de Monsieur … en ses accessoires, le tribunal, conformément aux dispositions de l’article 41 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, est compétent pour connaître du recours principal en réformation introduit. Ledit recours ayant pour le surplus été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Il s’ensuit que le recours subsidiaire en annulation est irrecevable.

1 cf. trib. adm. 26 janvier 1998, n° 10244 du rôle, Pas. adm. 2005, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 131 et autres références y citées A l’appui de son recours, le demandeur conclut principalement à l’annulation de la décision déférée pour violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité en faisant valoir qu’elle porterait une atteinte grave à sa situation individuelle et que dès lors l’administration aurait été tenue de le mettre en mesure de présenter utilement sa défense avant la prise de décision en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l’amènent à agir, tout en lui accordant un délai minimum de huit jours pour présenter ses observations.

La commune de Walferdange entend résister à cette argumentation en se prévalant du fait que c’est Monsieur … lui-même qui, moyennant son courrier prévisé du 11 mai 1999, aurait initié la décision litigieuse en ce sens qu’il a fait part à la commune de sa crainte de ne plus pouvoir assumer pleinement son travail. La commune aurait ainsi simplement répondu favorablement à une demande qui lui avait été présenté.

Tel que relevé déjà ci-avant, le courrier adressé en date du 11 mai 1999 par Monsieur … à la commune avait un objectif d’ordre général, ciblé concrètement sur l’obtention d’une précision des tâches lui attribuées, ainsi que sur une adaptation de ces tâches à son état de santé de l’époque, de sorte à ne pas s’analyser en une demande ayant conduit concrètement à la suppression des tâches ayant justifié en 1990 l’octroi d’une prime d’astreinte de 22 points indiciaires dans son chef, voire à la suppression, par voie de conséquence, de cette même prime.

Il s’y ajoute qu’au-delà du fait que ce courrier du 11 mai 1999 ne saurait être interprété dans le sens préconisé par la commune, le raisonnement présenté en défense laisse encore de persuader en fait, étant donné qu’en dépit d’une modification alléguée au niveau des tâches effectivement accomplies par l’intéressé à la suite de sa demande formulée en 1999, il n’est pas contesté en cause que l’intéressé a néanmoins continué à bénéficier de la prime d’astreinte jusqu’à la prise de la décision litigieuse du 17 juin 2005. Dans ces conditions, le tribunal ne peut que constater que le lien, que la commune veut faire admettre à Monsieur …, entre sa demande introduite le 11 mai 1999 et une perte automatique de la prime d’astreinte, n’a manifestement pas non plus été perçu dans le sens préconisé par la commune dans la mesure où elle a elle-même continué à allouer cette prime à l’intéressé nonobstant un changement allégué au niveau de ses attributions.

Conformément aux dispositions de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, « sauf s’il y a péril en la demeure, l’autorité qui se propose de révoquer ou de modifier d’office pour l’avenir une décision ayant créé ou reconnu des droits à une partie, ou qui se propose de prendre une décision en dehors d’une initiative de la partie concernée, doit informer de son intention la partie concernée en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l’amène à agir.

Cette communication se fait par lettre recommandée. Un délai d’au moins 8 jours doit être accordé à la partie concernée pour présenter ses observations.

Lorsque la partie concernée le demande endéans le délai imparti, elle doit être entendue en personne. (…) » Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision litigieuse s’analyse clairement en une décision révoquant ou modifiant d’office pour l’avenir une décision ayant créé ou reconnu des droits à Monsieur … au sens de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 précité, de sorte que les formalités y prévues devant précéder une décision de ce type auraient dû être respectées en l’espèce.

Or, le non-respect allégué de ces formalités n’étant pas utilement contesté en fait par l’administration communale de Walferdange, il y a partant lieu d’annuler la décision litigieuse pour violation dudit article 9, sans qu’il y ait lieu d’examiner plus en avant les autres moyens avancés à l’appui du recours en réformation introduit.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant, dans le cadre du recours en réformation introduit, prononce l’annulation de la décision litigieuse ;

condamne la commune de Walferdange aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 27 novembre 2006 par :

Mme Lenert, vice-président, Mme Thomé, juge, M Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 21141
Date de la décision : 27/11/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2006-11-27;21141 ?

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