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23/11/2006 | LUXEMBOURG | N°21856C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 novembre 2006, 21856C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 21856 C Inscrit le 21 août 2006

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Audience publique du 23 novembre 2006 Recours formé par Monsieur XXX XXX, XXX contre une décision du collège échevinal de la commune de XXX en matière de mandat communal - Appel -

(jugement entrepris du 13 juillet 2006 (n° 20835 du rôle)

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Vu la requête d

’appel, inscrite sous le numéro 21856C du rôle, et déposée au greffe de la Cour administ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 21856 C Inscrit le 21 août 2006

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Audience publique du 23 novembre 2006 Recours formé par Monsieur XXX XXX, XXX contre une décision du collège échevinal de la commune de XXX en matière de mandat communal - Appel -

(jugement entrepris du 13 juillet 2006 (n° 20835 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 21856C du rôle, et déposée au greffe de la Cour administrative le 21 août 2006 par Maître Georges Pierret, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur XXX XXX, directeur de l’Administration des Services Techniques de l’Agriculture (ASTA), déclarant agir en sa qualité de conseiller communal élu de la commune de XXX, demeurant à L-XXX, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 13 juillet 2006 (n° 20835 du rôle) ayant déclaré non justifié son recours en annulation dirigé contre une décision du collège échevinal de la commune de XXX du 14 décembre 2005 confirmative d’une décision du même collège du 7 novembre 2005, l’ayant mis en demeure de mettre fin à la situation incompatible avec son mandat de conseiller, avec déclaration qu’il est considéré comme se désistant de son mandat s’il ne met pas fin à cette situation ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Patrick Kurdyban, agissant en remplacement de l’huissier de justice Carlos Calvo, les deux demeurant à Esch-sur-

Alzette, du 25 août 2006, portant signification de cette requête d’appel à l’administration communale de la commune de XXX ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 13 septembre 2006 par Maître Roger Nothar, avocat à la Cour, au nom de l’administration communale de XXX ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réponse en appel à Maître Georges Pierret ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 12 octobre 2006 par Maître Georges Pierret, au nom de Monsieur XXX XXX ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en réplique à Maître Roger Nothar ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 6 novembre 2006 par Maître Roger Nothar, au nom de l’administration communale de XXX ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du même jour portant notification de ce mémoire en duplique à Maître Georges Pierret ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le premier conseiller en son rapport, ainsi que Maîtres Pierre Medinger, en remplacement de Maître Georges Pierret, et Steve Helminger, en remplacement de Maître Roger Nothar en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 novembre 2006.

A l’occasion des élections communales du 9 octobre 2005, Monsieur XXX XXX fut réélu en tant que membre du conseil communal de la commune de XXX .

Par courrier du 11 octobre 2005, Monsieur Arnaud Mersch, demeurant à XXX , a adressé au collège échevinal de sa commune de résidence une réclamation contre les élections prédites en ce que, d’après les dispositions de l’article 194(2) 3 de la loi électorale du 18 février 2003, Monsieur XXX XXX, membre élu au nouveau conseil communal, serait frappé d’une incompatibilité au vu de la fonction par lui revêtue de directeur de l’Administration des Services Techniques de l’Agriculture (ASTA).

Suivant courrier recommandé avec accusé de réception du 12 octobre 2005, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de XXX s’est adressé à Monsieur XXX XXX, sur base des dispositions de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, pour le mettre en demeure, en vertu de l’article 9, alinéa 2 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, de mettre fin à la situation incompatible avec le mandat de conseiller communal. Le collège de relever qu’il résulterait de la combinaison des articles 194(2) 3 de la loi électorale précitée et de l’article 3(2) de la loi du 30 novembre 1976, ayant trait à l’organisation de l’Administration des Services Techniques de l’Agriculture que l’intéressé paraîtrait être dans une situation d’incompatibilité entre ses fonctions étatiques et le mandat d’élu communal. Il a été accordé à l’intéressé un délai de huit jours à partir de la réception du courrier en question pour présenter ses observations éventuelles.

Par courrier du 20 octobre 2005, Monsieur XXX XXX a fait valoir qu’il n’existerait plus aucune incompatibilité dans son chef au sens de l’article 194(2) de la loi électorale concernant sa fonction de directeur de l’ASTA, en ce que, d’un côté, il y aurait eu un transfert de compétences de l’ASTA vers l’administration de la gestion des eaux, concernant l’aménagement et la police des cours d’eau non navigables ni flottables, le curage et l’entretien des cours d’eau et l’évacuation des eaux de pluies, opéré en 2004 et que, d’un autre côté, en matière de voirie rurale l’ASTA n’exercerait plus de pouvoir décisionnel à l’égard des communes et se limiterait à leur fournir un appui technique et organisationnel y relativement.

Par décision du 7 novembre 2005, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de XXX a retenu, à l’unanimité, de mettre Monsieur WXXX en demeure de mettre fin à la situation incompatible avec son mandat, issue de ses fonctions de directeur de l’ASTA, avec déclaration que le candidat élu est considéré comme se désistant de son mandat si, dans les trente jours à dater de la présente mise en demeure, il n’a pas mis fin à la situation incompatible avec son mandat.

Suivant courrier recommandé de son mandataire du 2 décembre 2005, Monsieur WXXX a fait réitérer sa position suivant laquelle il n’existerait plus de situation incompatible avec son mandat du chef de sa fonction de directeur de l’ASTA, tout en ajoutant une attestation établie par le ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural du 24 novembre 2005 devant soutenir sa position.

Par courrier de son mandataire du 8 décembre 2005, Monsieur WXXX d’insister qu’il ne saurait être considéré comme se désistant de son mandat alors qu’il ne serait pas en situation incompatible avec ledit mandat de conseiller communal.

Par délibération du 14 décembre 2005, le collège échevinal de la commune de XXX , à l’unanimité, a décidé de recevoir le recours gracieux de Monsieur WXXX , daté du 2 décembre 2005, en la forme pour au fond le rejeter comme n’étant point justifié et confirmer purement et simplement sa décision précitée du 7 novembre 2005 et la mise en demeure y contenue ensemble les conséquences s’en dégageant.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2005 Monsieur XXX XXX a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision précitée du collège échevinal de la commune de XXX du 14 décembre 2005, confirmant sur recours gracieux celle précitée du 7 novembre 2005.

Par jugement du 13 juillet 2006 le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation, tout en recevant le recours en annulation en la forme pour, au fond, le déclarer non justifié et en débouter le demandeur XXX XXX avec charge des frais. Le même jugement a rejeté la demande de l’administration communale de XXX en allocation d’une indemnité de procédure.

Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 21 août 2006, Monsieur XXX XXX a entrepris le jugement précité du 13 juillet 2006 pour, par réformation de celui-ci, voir dire que sa fonction exercée de directeur de l’ASTA est compatible avec celle de conseiller communal, sinon voir annuler la décision du collège échevinal du 14 décembre 2005 et voir renvoyer l’affaire devant qui de droit avec condamnation de la commune intimée aux frais et dépens des deux instances.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant de faire valoir tout d’abord que l’article 194(2) 3 de la loi électorale devrait être lu en ce sens, que le législateur a voulu éliminer un agent public qui exerce une fonction de responsabilité qui comprend le territoire de sa commune, l’appelant soulignant expressément les termes de « fonction de responsabilité ». Il s’agirait par conséquent d’éviter une incompatibilité fonctionnelle, par laquelle le conseiller communal pourrait être en opposition (ou de complicité) avec les intérêts de la commune. Il s’agirait dès lors d’une sorte d’immixion fonctionnelle, où les intérêts personnels du conseiller ne seraient pas visés, mais ses intérêts, voire, orientations fonctionnelles. Sur ces constats l’appelant de proposer à la Cour un examen de ses fonctions, ainsi que de ses responsabilités en tant que fonctionnaire de l’Etat.

L’appelant de réitérer les termes de ses courriers des 20 octobre 2005 et 28 novembre 2005 adressés successivement au collège échevinal, précités et relatés in extenso dans le jugement entrepris.

L’appelant XXX XXX de conclure que si en tant que directeur de l’ASTA il avait certes des responsabilités au sein de son administration, sa situation face à la commune serait celle qu’il n’existerait à leur égard aucune fonction décisionnelle, seuls les ministres respectivement compétents prenant les décisions en question, le ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire pour ce qui concerne des questions de gestion de l’eau, le ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural concernant les compétences financières anciennement inscrites à l’ASTA et transférées au Fonds spécial d’orientation économique et sociale pour l’agriculture.

L’appelant de contester par conséquent être dans une situation incompatible avec son mandat de conseiller. Il fait valoir de surcroît que les incompatibilités établies par la loi électorale seraient à analyser comme exceptions à la règle générale et seraient dès lors de stricte application, étant donné que le principe démocratique de l’élection devrait rester la règle. Il ne saurait dès lors être mis fin à un mandat électif que pour des raisons extrêmement rigoureuses. L’appelant renvoie à ce sujet à l’attestation ministérielle du 28 novembre 2005 précitée.

L’appelant de faire encore valoir que pour ses fonctions exercées au comité directeur de l’Office National du Remembrement, il n’existerait point non plus d’incompatibilité.

Par ailleurs, les critiques formelles dirigées contre la prédite attestation pour ne pas être conformes à une circulaire n° 2508 du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire seraient sans fondement.

L’appelant de faire remarquer encore que si d’après l’ancienne loi électorale, sa fonction de directeur de l’ASTA avait été incompatible avec celle de membre d’un collège échevinal, mais compatible avec celle de conseiller communal, la nouvelle situation de fait issue de sa fonction ne devrait plus poser aucun obstacle ou incompatibilité. Il serait ainsi particulièrement inique si désormais le directeur de l’ASTA, avec moins de compétences que jadis, se trouvait exclu du conseil communal en vertu de la nouvelle loi dont le but n’aurait certainement pas été celui-là.

L’appelant de formuler par la suite dix observations ponctuelles concernant le jugement entrepris ayant trait à des passages d’analyse des premiers juges concernant plus particulièrement des aspects divers ayant trait aux fonctions exercées par le directeur de l’ASTA, à partir plus précisément de pièces versées en première instance se rapportant à différentes attributions exercées par ledit directeur ou ses services.

Suivant son mémoire en réponse déposé par Maître Roger Nothar, avocat à la Cour, au greffe de la Cour administrative le 13 septembre 2005, l’administration communale de XXX demande tout d’abord acte de ce qu’elle se rapporte à la sagesse de la Cour en ce qui concerne l’observation par l’appelant des délais et formalités pour l’introduction de l’appel. Au fond, elle demande confirmation du jugement entrepris par adoption des motifs des premiers juges et ceux non contraires développés audit mémoire en réponse en appel, sinon par substitution de motifs, l’appel devant être déclaré non fondé en toute occurrence. La commune intimée de demander encore acte qu’elle se rapporte en instance d’appel à ses mémoires de première instance et qu’elle invoque en appel les mêmes pièces que celles versées en première instance. La commune n’interjette point appel incident concernant le chef du jugement entrepris l’ayant déboutée de sa demande en allocation d’une indemnité de procédure, ni ne formule pareille demande en allocation en instance d’appel.

En substance, la commune de faire valoir que la situation d’incompatibilité du mandat communal de Monsieur WXXX avec sa fonction de directeur de l’ASTA se trouverait vérifiée sur base des termes même de l’article 194(2) 3 de la loi électorale de 2003. Dès lors ce serait à juste titre que son collège échevinal aurait rejeté le recours gracieux de Monsieur WXXX comme non fondé à travers sa décision déférée au fond du 14 décembre 2005, tout en confirmant purement et simplement celle du 7 novembre 2005. Par ailleurs, ce serait à bon droit que le tribunal administratif se serait déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation et aurait déclaré recevable le recours en annulation tout en le déclarant non fondé.

La commune intimée de reprocher à l’appelant de ne faire aucun effort pour admettre objectivement sa situation professionnelle et lui impute d’essayer de se faire passer, pour le chef superflu d’une administration qui ne serait pas nécessaire. Elle lui reproche encore de refuser de jouer le jeu fixé par la circulaire précitée n° 2508 du ministre de l’Intérieur du 27 juillet 2005 en affirmant, d’un côté, que ses fonctions seraient compatibles avec le mandat de conseiller communal dans sa commune et en s’appuyant sur une attestation ministérielle ne correspondant pas aux préoccupations de ladite circulaire. Ainsi, à la fois le ministre de tutelle et l’appelant ne s’exposeraient pas trop et l’appelant lui-même garderait l’occasion de brouiller les pistes.

A travers son mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 12 octobre 2005, l’appelant XXX XXX de demander à la Cour de statuer conformément à sa requête d’appel tout en rendant attentif au fait que les termes forts employés par la partie intimée dans son mémoire en réponse en appel ne devraient pas induire en erreur le lecteur, alors que l’appelant n’aurait nullement l’intention de minimiser son rôle de directeur de l’ASTA, mais plutôt celle de relater les compétences effectives exercées par celui-ci vis-à-vis des communes concernées.

L’appelant de réitérer que par rapport aux deux critères fixés par l’article 194(2) de la loi électorale, il conviendrait de répondre à chaque fois par la négative, en ce que le fonctionnaire XXX XXX ne serait, au sens strict de ses fonctions, pas responsable d’un ressort de service qui comprendrait le territoire de la commune de XXX et qu’il n’exercerait pas non plus des fonctions susceptibles de se recouvrir ou d’être en opposition avec les intérêts de ladite commune. L’appelant de reprocher à la commune que son interprétation des textes sèmerait le trouble. Ainsi, il n’y aurait pas de passage obligatoire par l’ASTA en matière de mise en état de la voirie rurale, tout comme il n’y aurait pas de rapport forcé avec les communes au regard des attributions de l’ASTA. Il serait encore faux d’admettre qu’une responsabilité sectorielle ou une compétence sectorielle existerait spécifiquement dans le chef du directeur de l’ASTA.

Concernant l’attestation du ministre du ressort, l’appelant de signaler que la loi électorale à la base du système ne prévoirait aucune attestation à verser, pareille exigence émanant tout au plus d’une circulaire ministérielle. En l’absence de prévisions légales, l’attestation versée par l’appelant aurait pour le moins la même valeur que celle produite par les autres élus concernés de la commune de XXX .

L’appelant de conclure que la Cour administrative aurait à déterminer si ses fonctions pouvaient contrarier, ne fût-ce que de façon minimale, le bon déroulement tant de la gestion politique, qu’administrative de la commune pour retenir qu’à aucun moment et par nul vote au conseil communal il n’y aurait eu, dans son chef, contradiction fonctionnelle avec l’essence d’une orientation communale, que par ailleurs il serait libre de soumettre à son esprit critique en qualité de conseiller élu.

A travers son mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative par Maître Roger Nothar le 6 novembre 2006 la commune de XXX insiste sur le rôle et l’importance de l’ASTA en matière de voirie rurale face aux communes concernées et souligne qu’elle apprécie les services de ses administrations qui sont, selon elle, de qualité tout comme ils sont gratuits. La commune intimée d’énoncer encore que l’appelant serait parfaitement conscient du conflit d’intérêts existant entre sa fonction de directeur de l’ASTA et celle de conseiller municipal, tout comme il l’aurait été par le passé, alors que ses absences ponctuelles aux délibérations du conseil communal en matière d’approbation des devis élaborés par l’ASTA ne s’expliqueraient nullement par des déplacements à l’étranger. Tout comme les autres directeurs d’administrations étatiques comprenant dans leur ressort le territoire de la commune de leur élection, l’appelant tomberait sous l’incompatibilité prévue par l’article 194 (2) 3 a). De même, il tomberait sous le coup de l’incompatibilité visée par le point b) dudit article à la fois comme membre de l’Office National du Remembrement et du fait de la délégation de signature lui conférée par le ministre de l’Agriculture en ce qui concerne les propositions d’ordonnancement de la participation financière de l’Etat en matière de voirie rurale.

Considérant que l’appel est recevable pour avoir été interjeté dans les formes et délai prévus par la loi ;

Considérant qu’au fond la question soumise aux juridictions administratives est celle de la compatibilité de la fonction étatique de l’appelant avec son mandat de conseiller communal élu de la commune de XXX au regard des dispositions de l’article 194(2) 3 de la loi électorale modifiée du 18 février 2003 ;

Considérant que l’article 194(2) 3 porte que « ne peuvent faire partie du conseil communal d’une commune déterminée : … 3) les fonctionnaires et employés de l’Etat, de ses administrations ou services, si, de par leurs fonctions, a) ils sont responsables d’un ressort de service qui comprend le territoire de la commune en question ;

b) ils exercent des compétences sectorielles à portée nationale, qui sont susceptibles de se recouvrir ou d’être en opposition avec les intérêts de la commune en question » ;

Considérant qu’aucune des parties ne met en doute ni l’applicabilité au cas d’espèce de la disposition légale prérelatée, ni sa conformité par rapport aux normes hiérarchiquement supérieures ;

Considérant que la Constitution, en son article 107(2), dispose qu’ « il y a dans chaque commune un conseil communal élu directement par les habitants de la commune ; les conditions pour être électeur ou éligible sont réglées par loi » ;

Considérant que les conditions d’éligibilité tiennent à des droits démocratiques fondamentaux dans un Etat de droit où la liberté d’être élu est le principe, emportant que les restrictions à cette liberté, dont les incompatibilités, sont l’exception ;

Que dès lors la Cour partage l’opinion de la partie appelante qui, eu égard à leur caractère exceptionnel à l’éligibilité d’un conseiller communal, souligne le cadre strict dans lequel sont à entrevoir les incompatibilités en question ;

Considérant que d’après l’article 107(2) de la Constitution les conditions pour être éligible sont réglées par la loi ;

Considérant que l’Etat de droit n’existe que si le citoyen peut se fier à la lettre du texte de loi, dans la mesure où celui-ci est clair et précis ;

Considérant que la juridiction saisie est tenue d’appliquer suivant sa lettre le texte légal, clair et précis, au-delà de ce qui a pu être la volonté intrinsèque du législateur ayant abouti au texte en question (Cour adm. 29 juin 2006 (nos 20513C et 21295C)) ;

Considérant que le texte de loi clair et précis dût-il, dans ses effets, outrepasser la volonté affichée par le législateur, il n’appartient point à la juridiction saisie d’en refuser l’application, sous peine d’enfreindre la loi, ni d’en modifier la teneur à travers son application, sous peine de faire, sinon de refaire la loi et d’outrepasser ainsi ses pouvoirs juridictionnels ;

Considérant qu’il s’ensuit, ainsi que l’ont correctement analysé les premiers juges, que tout l’argumentaire, réitéré devant la Cour par les parties au litige, tenant aux compétences effectivement exercées, aux attributions de fait revêtues et aux mécanismes appliqués par le directeur de l’ASTA face à la commune déterminée, qui est en l’occurrence celle de XXX , se trouve en dehors du champ d’analyse auquel doit avoir égard la Cour par rapport à la question litigieuse qui se limite à voir vérifier si l’une au moins des hypothèses a) et b) du point 3 de l’article 194(2) de la loi électorale prérelaté, se trouve vérifiée de sorte à justifier la décision communale déférée au fond ;

Considérant qu’avec les premiers juges il convient de constater qu’il est patent que le directeur de l’ASTA, qualitate qua, en tant que chef de l’administration qu’il est ainsi appelée à diriger, est responsable d’un service étatique qui comprend le territoire de la commune de XXX à la fois suivant des attributions ratione materiae et ratione loci ;

Que rien que cette constatation est de nature à justifier au fond la décision déférée du collège échevinal de XXX sur base de l’article 194 (2) 3 point a) de la loi électorale au-delà de toutes autres considérations - fussent-elles fondées sur un plan humain, moral ou même politique suivant les différents aspects évoqués à cet escient par l’appelant ;

Considérant que dans le contexte donné la Cour est amenée à renvoyer l’appelant aux principes généraux voulant, d’un côté, que là où le législateur n’a point distingué il n’appartient pas à la juridiction de distinguer (principe ubi lex non distinguit) et, d’un autre côté, que la disposition de la loi est à appliquer par la juridiction saisie, fût-elle dure dans le chef de la personne concernée (principe dura lex, sed lex) ;

Considérant que même si en tant qu’exceptions à l’éligibilité dans une démocratie représentative les incompatibilités afférentes prévues par la loi revêtent un caractère strict, leur application s’impose toutefois à la juridiction saisie dans la limite du texte clair et précis de la loi et suivant la portée ainsi prévue à travers lui, pour autant que les conditions légales qui encadrent ces incompatibilités soient vérifiées, tel étant le cas en l’espèce ;

Considérant qu’à titre superfétatoire, les premiers juges sont encore à confirmer dans leur analyse minutieuse ayant dégagé qu’également au regard du deuxième critère de l’article 194(2) 3 de la loi électorale modifiée, à savoir, celui prévu par son point b) prérelaté, l’incompatibilité dégagée par le collège échevinal de XXX est patente en ce qu’il est indéniable d’après les éléments soumis à la Cour, que l’appelant exerce des compétences sectorielles à portée nationale à travers sa fonction de directeur de l’ASTA dussent-elles se résumer, suivant le dernier état de législation afférente, à avoir trait à des compétences de conseil, de soutien et de guidance technique sans compétence directe d’ordre financier, étant donné que même si ici encore la loi ne distingue pas suivant les compétences attribuées, force est à nouveau de retenir avec les premiers juges que les compétences attribuées par la loi au directeur de l’ASTA sont susceptibles de se recouvrir, sinon d’être en opposition avec les intérêts de la commune de XXX dont il s’agit ;

Que cette conclusion s’impose même abstraction faite des attributions du directeur de l’ASTA siégeant en sadite qualité au comité directeur de l’Office National du Remembrement ;

Considérant qu’enfin, il convient de confirmer encore le jugement entrepris en ce que le tribunal s’est déclaré incompétent pour connaître du recours en réformation, aucun recours de pleine juridiction n’étant prévu en la matière, en sorte que c’est à juste titre que les premiers juges ont finalement débouté Monsieur XXX XXX du recours en annulation par lui introduit, le tout suivant une application correcte des dispositions claires et précises contenues en l’article 194 (2) 3 de la loi électorale modifiée du 18 février 2003 ;

Considérant que la commune de XXX n’ayant point entrepris le chef du premier jugement l’ayant déboutée de sa demande en allocation d’une indemnité de procédure et la même intimée n’ayant point formulé pareille demande en instance d’appel, il n’y a pas lieu pour la Cour de statuer plus en avant quant à ces aspects.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel en la forme ;

au fond, le dit non justifié ;

partant en déboute l’appelant ;

confirme le jugement entrepris ;

condamne l’appelant aux dépens d’appel.

Ainsi jugé et délibéré par :

Marion Lanners, présidente, Francis Delaporte, premier conseiller, rapporteur, Henri Campill, conseiller, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 9


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 21856C
Date de la décision : 23/11/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2006-11-23;21856c ?

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