Tribunal administratif N° 20883 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 janvier 2006 Audience publique du 5 juillet 2006
=============================
Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Transports en matière de permis de conduire
------------------------------------------------------------------------------------------------------
JUGEMENT
Vu la requête, inscrite sous le numéro 20883 du rôle et déposée le 6 janvier 2006 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles UNSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Transports du 10 mai 2005, par laquelle celui-ci lui a refusé de renouveler la durée de validité du permis de conduire pour les catégories C et C + E et les sous-catégories C1 et C1 + E, en confirmant que ledit permis de conduire sera uniquement valable pour la conduite de véhicules des catégories A sous 2), 3), B et F et d’une décision confirmative du 9 décembre 2005 rendue suite à un recours gracieux ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 6 mars 2006 ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif pour compte de Monsieur … le 3 avril 2006 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Frédéric NOËL, en remplacement de Maître Charles UNSEN, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Jacqueline GUILLOU-JACQUES en leurs plaidoiries respectives.
_____________________________________________________________________
Suivant courrier du 21 mars 2005, le ministre des Transports, ci-après dénommé le « ministre », invita Monsieur …, conformément aux dispositions de l’article 90 modifié de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques, de se présenter devant la Commission médicale instituée auprès du ministère des Transports afin de procéder à une vérification de ses aptitudes physiques, en le priant d’« apporter à cette occasion les médicaments [qu’il prend] le cas échéant, ainsi que les radiographies éventuelles ».
Dans son avis du 6 avril 2005, ladite Commission médicale retint, après avoir entendu Monsieur …, et procédé à un examen médical de l’intéressé, que celui-ci présentait une acuité visuelle de 5/10e à OD (avec correction), de sorte qu’il « ne satisfait pas aux conditions minima prévues par l’article 77 de l’arrêté grand-ducal précité du 23 novembre 1955 et qu’il est dès lors établi qu’il souffre d’infirmités ou de troubles susceptibles d’entraver ses aptitudes ou capacités de conduire ». La Commission émit partant, à l’unanimité des voix, un avis favorable pour le renouvellement du permis de conduire de la catégorie B pour une durée normale, tout en émettant un avis défavorable pour le renouvellement du permis de conduire des catégories C, C + E. Le ministre se rallia à cet avis en date du 13 avril 2005.
Par arrêté du 10 mai 2005, le ministre, considérant que Monsieur … « souffre d’infirmités ou de troubles susceptibles d’entraver ses aptitudes ou capacités de conduire », prit à l’égard de celui-ci une décision dont l’article 1er est libellé de la façon suivante : « La durée de validité du permis de conduire des catégories C et C + E ainsi que des sous-catégories C1 et C1 + E délivré à Monsieur … préqualifié, n’est plus renouvelée. Le permis de conduire sera uniquement valable pour la conduite de véhicules des catégories A sous 2), 3), B et F ».
A la suite de l’introduction, en date du 27 juillet 2005, d’un recours gracieux par le mandataire de Monsieur … à l’encontre de l’arrêté ministériel précité du 10 mai 2005, et d’une nouvelle instruction du dossier, et notamment d’un nouvel avis émis par la Commission médicale instituée auprès du ministère des Transports, daté du 9 novembre 2005, par lequel ladite commission a retenu à l’unanimité des voix que Monsieur … « ne satisfait pas aux conditions minima prévues par l’article 77 sous 1) de l’arrêté grand-ducal [précité du 23 novembre 1955] et qu’il est dès lors établi qu’[il] souffre d’infirmités ou de troubles susceptibles d’entraver ses aptitudes ou capacités de conduire », de sorte qu’elle émit un avis défavorable quant à la restitution du permis de conduire des catégories C et C + E, le ministre confirma sa décision initiale du 10 mai 2005 par une décision du 9 décembre 2005 suivant laquelle il déclara se rallier à l’avis précité de la Commission médicale du 9 novembre 2005, en retenant que « cette décision se voit justifiée du fait que [son] acuité visuelle à l’œil droit est de 3 – 4/10e et à l’œil gauche de 10/10e, alors que le minima requis à l’article 77 de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 précité est de 8/10e pour l’œil le meilleur et de 6/10e pour l’œil le moins bon ».
Par requête déposée le 6 janvier 2006 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation des décisions ministérielles précitées des 10 mai et 9 décembre 2005.
Aucun texte de loi ne prévoyant un recours au fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation.
Il s’ensuit que seul un recours en annulation, recours de droit commun, a pu être introduit par le demandeur à l’encontre des décisions ministérielles litigieuses des 10 mai et 9 décembre 2005. Dans la mesure où le recours en annulation a été formé dans les formes et délai de la loi, il est recevable.
A l’appui de son recours, le demandeur soutient en premier lieu que la décision litigieuse du 10 mai 2005 serait « insuffisamment motivée », dans la mesure où elle ne ferait que reproduire les motifs légaux sans indiquer les raisons concrètes et inhérentes à sa situation personnelle qui ont amené le ministre à prendre la décision qui lui fait actuellement grief.
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement soutient que l’arrêté ministériel précité du 10 mai 2005 se baserait notamment sur l’avis du 6 avril 2005 émis par la Commission médicale, qui aurait pu être consulté tant par l’intéressé que par son avocat, dans la mesure où il fait partie intégrante de son dossier administratif. Il souligne toutefois qu’une copie de cet avis n’avait pas été sollicitée par le demandeur.
Dans son mémoire en réplique, le demandeur rétorque que la décision ministérielle en question manquerait « manifestement de motifs », puisqu’elle ne ferait que renvoyer à l’avis précité de la Commission médicale. Il insiste encore sur le fait que dans la mesure où ledit avis n’aurait pas été annexé à la décision ministérielle litigieuse, il y aurait lieu de retenir une absence d’indication de motifs dans la décision elle-même.
D’après l’article 6 (1) du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, une décision administrative doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, notamment lorsqu’elle révoque ou modifie une décision antérieure. – La sanction de l’obligation de motiver une décision administrative ne consiste cependant que dans la suspension des délais de recours. La décision reste valable et l’administration peut produire ou compléter les motifs postérieurement et même pour la première fois devant le juge administratif 1. - Les motifs sur lesquels repose l’acte, si l’acte lui-même ne les précise pas, peuvent être communiqués au plus tard au cours de la procédure contentieuse pour permettre à la juridiction administrative d’exercer son contrôle de légalité, étant donné qu’il est loisible à l’administration de présenter ses motifs en cours d’instance, à condition que la juridiction administrative puisse en contrôler la légalité au moment où elle est appelée à statuer 2.
En l’espèce, malgré une motivation succincte de l’arrêté ministériel litigieux, notamment en ce qui concerne la précision quant aux infirmités ou troubles dont souffre le demandeur, il appert néanmoins indubitablement à la lecture dudit arrêté, ensemble les explications et éléments d’information détaillés se dégageant du mémoire en réponse du délégué du gouvernement, et dont le demandeur a pu prendre examen, de sorte que ses droits de la défense n’ont pas été affectés de ce chef, que le ministre s’est notamment basé sur les constatations faites par la Commission médicale auprès du ministère des Transports et contenues dans l’avis de cette dernière du 6 avril 2005, avis duquel il ressort que le demandeur souffre d’un important problème d’acuité visuelle à l’œil droit, susceptible d’entraver ses aptitudes ou capacités de conduire.
1 cf. Cour adm. 8 juillet 1997, n° 9918C du rôle, Pas. adm. 2005, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 47 et autres références y citées 2 cf. trib. adm. 26 avril 2004, n° 17153 du rôle, Pas. adm. 2005, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 47 et autres références y citées La motivation indiquée dans l’arrêté critiqué, ensemble les éléments communiqués au cours de l’instruction de l’affaire sous examen, suffisent en conséquence aux exigences de l’article 6 (1) du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979, de sorte que le moyen relatif à l’absence de motivation est à rejeter.
Le demandeur critique encore le fait que l’avis précité de la Commission médicale du 6 avril 2005 n’a pas été annexé à la décision ministérielle du 10 mai 2005 et que pour le surplus, le contenu de l’avis en question n’a pas été indiqué dans la décision elle-même.
S’il est vrai que l’article 4 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979 énonce les règles quant à la régularité formelle et à la motivation des avis des organismes consultatifs, aucune disposition de la procédure administrative non contentieuse n’impose cependant à l’administration de communiquer ses avis en toute hypothèse aux administrés concernés. Il ne saurait en être autrement que dans des matières spéciales où une disposition légale ou réglementaire prescrit une telle communication3. Ainsi, à défaut d’un texte l’y obligeant expressément, l’administration n’est pas tenue de communiquer les avis recueillis aux personnes concernées, en l’absence d’une demande de communication de l’intéressé, à moins que dans sa décision, elle ne renvoie à la motivation contenue dans l’avis4.
En l’espèce, en ce qui concerne plus particulièrement la matière des permis de conduire, il n’existe aucune disposition suivant laquelle le ministre doit d’office, sans demande de communication de la part du destinataire de sa décision, communiquer l’avis de la Commission médicale sur lequel il s’est basé pour prendre la décision afférente. Par ailleurs, une telle obligation n’existe pas non plus dans son chef en ce que dans la décision litigieuse du 10 mai 2005 il n’a pas expressément renvoyé à la motivation contenue dans l’avis de la Commission médicale du 6 avril 2005. Il suit de ce qui précède qu’en l’espèce, il n’y avait aucune obligation dans le chef du ministre de communiquer l’avis de la Commission médicale du 6 avril 2005 au demandeur.
Le demandeur formule dans son mémoire en réplique le même reproche à l’encontre de la décision confirmative du 9 décembre 2005 et pour les motifs énoncés ci-avant au sujet de la décision initiale du 10 mai 2005, il y a lieu de rejeter le moyen en question tiré de ce que la décision confirmative en question serait insuffisamment motivée dans la mesure où l’avis de la Commission médicale du 9 novembre 2005 n’y a pas été annexé.
Quant au fond, le demandeur conclut à l’annulation des arrêtés ministériels en cause, au motif qu’il n’y aurait aucune raison de lui retirer son permis de conduire pour les catégories C et C + E, ainsi que pour les sous-catégories C1 et C1 + E. Dans ce contexte, il fait état de ce qu’il souffrirait d’un défaut de la vue au niveau de son œil droit depuis son enfance et qu’il serait régulièrement suivi et soigné par un ophtalmologue depuis plus d’une vingtaine d’années. Il soutient que son acuité visuelle ne se serait jamais dégradée et que malgré ce problème de vue, il se serait vu 3 cf. trib. adm. 27 février 1997, n° 9599 du rôle, Pas. adm. 2005, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 20 et autres références y citées 4 cf. trib. adm. 11 juin 1997, n° 9641 du rôle, Pas. adm. 2005, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 20 in fine, et autres références y citées délivrer successivement les permis de conduire de la catégorie B, des catégories et sous-catégories C, C1, E + B, C + C1 et E + C. Il fait encore exposer qu’il serait employé auprès de l’administration des Ponts et Chaussées et que dans le cadre de ses fonctions, il serait affecté à l’entretien du réseau autoroutier grand-ducal, ainsi qu’à la mise en place de la signalisation adéquate en cas d’accident, ce qui comporterait la conduite d’un véhicule particulier afin d’accomplir le travail lui confié. Dans le cadre de cette fonction, il se serait soumis à des visites médicales régulières et qu’à chaque fois, il aurait été déclaré apte à accomplir le travail lui confié. Il estime partant que son problème de défaillance visuelle ne l’empêcherait nullement à accomplir les tâches qui lui sont confiées, et il expose que son supérieur hiérarchique n’aurait pas eu à se plaindre de son travail.
D’une manière générale, il reproche aux décisions attaquées de ne pas indiquer en quoi son état visuel constituerait une infirmité ou un trouble de nature à entraver ses aptitudes ou capacités de conduire.
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement énumère un nombre impressionnant de certificats médicaux versés au ministre par le demandeur dans le cadre de l’obtention voire du renouvellement de ses différents permis de conduire, couvrant une période allant de 1977 à fin 2005, dont il ressort pour le moins que les différents médecins ayant établi les certificats médicaux en question ne semblent pas avoir abouti au même diagnostic quant à l’acuité visuelle du demandeur.
Les différences importantes entre les différents diagnostics établis par les différents médecins ayant établi les certificats médicaux afférents peuvent être dues soit à une évolution irrégulière de l’acuité visuelle du demandeur soit à des critères différents se trouvant à la base des différentes analyses médicales. C’est ainsi que le délégué du gouvernement s’est lui aussi interrogé sur la question de savoir si les certificats médicaux établis au cours de la période litigieuse « ont été correctement établis et si le patient a communiqué toutes les informations utiles à ses médecins ».
C’est encore à bon droit qu’il y a lieu de rejeter l’affirmation du demandeur suivant laquelle il n’aurait jamais causé d’accident, puisque, comme l’a relevé à bon droit le délégué du gouvernement, et comme cela ressort du dossier administratif, et plus particulièrement des différents extraits du casier judiciaire du demandeur, celui-
ci a causé un accident de la circulation en date du 3 décembre 1983 alors qu’il a circulé avec un taux d’alcool dans le sang d’au moins 0,8 g/l, en causant un homicide involontaire et qu’il a causé un accident le 8 janvier 1991 en circulant avec un taux d’alcool dans le sang d’au moins 1,2 g/l en ayant causé des lésions corporelles involontaires, même s’il est vrai qu’il n’est pas établi en cause que lesdits accidents aient eu un lien avec l’acuité visuelle du demandeur.
Le délégué du gouvernement a encore fait ressortir que le demandeur a été condamné le 15 avril 2005 par le tribunal correctionnel de Luxembourg pour avoir circulé en date du 29 octobre 2004 avec un taux d’alcool d’au moins 0,55 mg/l d’air expiré.
En conclusion à ces développements, le délégué du gouvernement constate que le demandeur a causé deux accidents très graves, de sorte qu’il ne remplirait ni les conditions physiques nécessaires ni les conditions morales requises en vue de la conduite d’un poids lourd, en estimant que lesdits antécédents du demandeur ne permettraient pas d’écarter le risque d’un nouvel accident.
Dans son mémoire en réplique, le demandeur insiste sur le fait que contrairement à ce que le délégué du gouvernement tenterait de faire croire, il ne se dégagerait d’aucun des certificats médicaux versés en cause que son état de santé se serait amélioré ou dégradé au cours des années 1977 à 2005. Il essaie d’expliquer les différences importantes constatées entre les différents certificats médicaux par le fait que les deux premiers certificats établis en 1977 et 1980, faisant état d’une acuité visuelle sans correction de 10 à l’œil droit devrait résulter d’une erreur de diagnostic médical alors que son acuité visuelle n’aurait jamais été de 10 sans correction à l’œil droit. Il estime au contraire qu’au vu des certificats médicaux délivrés postérieurement à ces dates, il n’aurait eu qu’une acuité visuelle sans correction de 3/10, et ce depuis au moins l’année 1982. Cette déficience visuelle s’expliquerait à son avis par l’existence d’une amblyopie (vision faible depuis la naissance ) en soutenant que cette déficience visuelle n’aurait pas empêché le ministre de lui délivrer les permis de conduire dont il bénéficiait avant les décisions litigieuses sous analyse, de sorte qu’il n’existerait aucun élément qui serait de nature à s’opposer au renouvellement desdits permis de conduire.
En ce qui concerne les accidents causés par lui ainsi que la condamnation pénale encourue par lui, tels que relevés par le délégué du gouvernement, auxquels il est fait référence ci-avant, le demandeur estime que ceux-ci n’auraient aucun lien avec sa déficience visuelle, de sorte que ces faits ne devraient pas être pris en considération pour justifier les décisions attaquées. Il estime en outre que ces faits ne sauraient plus être pris en considération afin de justifier les décisions sous analyse, dans la mesure où ces faits et éléments ne seraient pas suffisamment récents pour être de nature à contenir des renseignements utiles sur son aptitude actuelle.
Pour le surplus, il fait état de ce que dans le cadre de l’exercice de sa profession, il est amené à conduire des véhicules pour lesquels le permis de poids lourd est nécessaire, en ce que ces véhicules seraient classifiés dans une catégorie particulière, alors même qu’ils n’auraient pas un gabarit plus important qu’une camionnette. Il soutient encore que le véhicule professionnel en question ne serait conduit par lui qu’à une vitesse très limitée, puisqu’il participerait au salage, balisage, en cas d’accident et remise en peinture des lignes blanches des autoroutes.
Enfin, dans le dispositif de son mémoire en réplique, le demandeur suggère, à titre subsidiaire, de faire nommer un expert par le tribunal en la personne du docteur Yves NOSBUSCH, médecin spécialiste en ophtalmologie avec la mission de se prononcer dans un rapport écrit sur les points y plus particulièrement énoncés.
Lorsque le juge administratif est saisi d’un recours en annulation, il lui appartient d’examiner l’existence et l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, ainsi que de vérifier si les éléments de fait dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée.
En l’espèce, s’il est vrai que le dossier administratif contient des éléments ainsi que des indices quant à l’existence d’infirmités ou de troubles dans le chef du demandeur susceptibles d’entraver ses aptitudes ou capacités de conduire un véhicule, tel que ressortant notamment des avis de la Commission médicale des 6 avril 9 novembre 2005 se trouvant à la base de la décision confirmative, le tribunal estime néanmoins, au vu notamment des multiples certificats médicaux auxquels le délégué du gouvernement a fait référence dans son mémoire en réponse, qui contiennent des diagnostics très différents quant à l’acuité visuelle du demandeur, qu’il y a lieu d’ordonner une expertise médicale afin de voir établir à suffisance de droit si le demandeur souffre effectivement de déficiences visuelles de nature à justifier le non-
renouvellement des permis de conduire précités.
En effet, le tribunal n’étant pas à même, à défaut de connaissances médicales et techniques adéquates, de procéder lui-même aux évaluations par rapport aux valeurs et données retenues dans les différents certificats médicaux, il échet de nommer, avant tout autre progrès en cause, un homme de l’art avec la mission plus amplement détaillée au dispositif du présent jugement, mesure d’instruction avec laquelle tant le mandataire du demandeur que le représentant étatique se sont déclarés d’accord à l’audience à laquelle l’affaire a été plaidée, tous autres droits et moyens étant réservés.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
avant tout autre progrès en cause, tous autres droits et moyens des parties étant réservés, nomme expert Monsieur le docteur Yves NOSBUSCH, médecin spécialiste en ophtalmologie, demeurant à L-1820 Luxembourg, 2, rue Antoine Jans, avec la mission de vérifier, dans un rapport écrit et motivé, si Monsieur … souffre d’infirmités ou de troubles susceptibles d’entraver ses aptitudes ou capacités de conduire justifiant le retrait de son permis de conduire pour les catégories C et C + E et les sous-
catégories C1 et C1 + E, en analysant plus particulièrement l’acuité visuelle actuelle de Monsieur … ainsi que les causes et origines possibles de cette déficience visuelle, en indiquant l’acuité visuelle de Monsieur … avec et sans correction ;
invite l’expert à remettre son rapport pour le 15 septembre 2006 au plus tard et à solliciter un report de cette date au cas où il n’arriverait pas à remettre son rapport dans le délai lui imparti ;
ordonne au demandeur de consigner la somme de 500 € ( cinq cents euros) à titre d’avance sur les frais et honoraires de l’expert à la Caisse des consignations et d’en justifier au tribunal ;
réserve les frais ;
fixe l’affaire au rôle général ;
Ainsi jugé par:
M. Schockweiler, premier vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge et lu à l’audience publique du 5 juillet 2006 par le premier vice-président, en présence de M. Legille, greffier.
Legille Schockweiler 8