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02/06/2006 | LUXEMBOURG | N°21450C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 juin 2006, 21450C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 21450C Inscrit le 26 mai 2006

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AUDIENCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE DU 2 JUIN 2006 Recours formé par XXX XXX, Schrassig contre le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative Appel (jugement entrepris du 24 mai 2006, no 21407 du rôle) Vu l’acte d’appel déposé à la date du 26 mai 2006 au greffe de la Cour administrative pa

r Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de XXX XXX, de nationalit...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 21450C Inscrit le 26 mai 2006

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AUDIENCE PUBLIQUE EXTRAORDINAIRE DU 2 JUIN 2006 Recours formé par XXX XXX, Schrassig contre le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative Appel (jugement entrepris du 24 mai 2006, no 21407 du rôle) Vu l’acte d’appel déposé à la date du 26 mai 2006 au greffe de la Cour administrative par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de XXX XXX, de nationalité turque, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, contre un jugement rendu par le tribunal administratif à la date du 24 mai 2006 en matière de rétention administrative, à la requête de XXX XXX contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 10 mai 2006 prononçant à son encontre une mesure de placement au prédit Centre pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative par la déléguée du Gouvernement Claudine Konsbruck à la date du 30 mai 2006 ;

Ouï le conseiller en son rapport à l’audience publique du 1er juin 2006 et Maître Ardavan Fatholahzadeh ainsi que le délégué du Gouvernement Gilles Roth en leurs observations orales.

Par requête inscrite sous le numéro 21407 du rôle et déposée le 18 mai 2006 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, XXX XXX, né le 27 juillet 1981 à Ankara (Turquie), de nationalité turque, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, a demandé la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 10 mai 2006 ordonnant son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification de cette décision.

Le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 24 mai 2006 a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 26 mai 2006.

L’appelant reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause alors qu’aucune circonstance de fait n’empêcherait l’autorité ministérielle de le renvoyer vers la Turquie alors qu’elle disposerait de l’original de son passeport en cours de validité depuis le 10 mai 2006.

L’appelant se réfère au rapport dressé par le Procureur d'Etat concernant les problèmes engendrés par le placement d'étrangers démunis de papiers d'identité valables pour souligner qu’il serait placé dans des conditions équivalant à une situation de détention.

Selon le Procureur Général d'Etat « la promesse d’un projet de construction d’un Centre de placement de retenus prévu pour l'automne 2007, même à la supposer sérieuse, ne saurait être acceptée vu qu'au moins pendant une année et demie à deux ans la situation actuelle au CPL continuerait à persister voir à empirer. » Il conviendrait partant, eu égard au récent rapport du Procureur Général d'Etat et de la situation actuelle du requérant, infligeant à ce dernier une situation de détention en violation de la loi, de réformer le jugement intervenu et d’ordonner sa libération immédiate respectivement son placement dans un établissement approprié au sens de l'article 15 de la loi précitée du 28 mars 1972.

Par ailleurs, la partie appelante invoque l'illégalité, respectivement la nullité du règlement du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière, sur base de l'article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif.

Elle estime que la loi modifiée du 27 juin 1997 portant réorganisation de l'administration pénitentiaire n'offrirait pas de base légale suffisante à la création par voie de règlement grand-

ducal d'une structure spécifique au sein du CPL destinée à accueillir tous les étrangers faisant l'objet d'une mesure de placement au titre de l'article 15 de la loi modifiée de 1972.

Comme le règlement du 20 septembre 2002 créerait un centre de séjour provisoire pour étranger en situation irrégulière, dans la mesure où il entend reconnaître compétence générale au CPL pour l'exécution de telles mesures, le susdit règlement ne saurait se prévaloir, en tant que base légale, des dispositions du prédit article 1er de la loi de 1997 de sorte qu’il devrait être annulé ou du moins être déclaré inapplicable pour défaut d'habilitation par une loi, ainsi que pour violation des dispositions constitutionnelles, au motif que le susdit règlement serait dépourvu de fondement juridique.

Le délégué du gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 30 mai 2006 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris tout en informant la Cour qu’au vu des démarches effectuées par le Gouvernement, un ticket vers Instanbul a été réservé avec billet départ le 7 juin 2006 via Frankfort, les autorités allemandes ayant donné leur accord pour prendre en charge le transit de XXX XXX à l’aéroport de Francfort à destination d’Istanbul.

Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les 2 éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

La légalité d’une mesure de placement est conditionnée essentiellement par la réunion des deux conditions prévues par l’article 15, paragraphe (1), alinéa 1er de la loi précitée du 28 mars 1972, à savoir le caractère exécutoire d’une mesure d’expulsion ou de refoulement en application des articles 9 ou 12 de la loi du 28 mars 1972, non litigieux en l’espèce, et l’impossibilité de l’éloignement de l’étranger en raison de circonstances de fait.

En l’espèce, comme retenu à bon escient par le tribunal, il est constant qu’à la date de la prise de la décision litigieuse, XXX XXX se trouvait en séjour irrégulier au pays, de sorte qu’il n’est pas contestable qu’il se trouvait sous le coup d’une mesure de refoulement au sens de la disposition légale précitée.

Quant à la prétendue absence de circonstances de fait ayant empêché son éloignement du territoire luxembourgeois et de l’existence d’une possibilité effective de refoulement vers l’Allemagne, c'est à bon droit que le délégué du gouvernement a soutenu en première instance que les faits tels qu’exposés par le demandeur dans sa requête introductive d’instance sont inexacts, étant donné qu’il ressort des éléments du dossier que le 6 mai 2006, le demandeur est entré irrégulièrement sur le territoire de l’Allemagne en provenance du Luxembourg, ainsi que cela ressort du rapport n° TGB. : 5230400/60-05-06/P1 du 6 mai 2006 de la police allemande de Trèves, et que ce sont les autorités allemandes qui ont adressé aux autorités luxembourgeoises une demande de reprise en charge de l’intéressé. Il s’ensuit que le moyen du demandeur tendant à faire établir que depuis le 10 mai 2006, il aurait existé dans son chef une possibilité de refoulement vers l’Allemagne est à écarter pour ne pas être fondé.

Quant à l’argument, invoqué pour la première fois en appel et tenant à l'illégalité, respectivement à la nullité du règlement du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière, sur base de l'article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif il y a lieu de retenir que la base légale du règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 est donnée par l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972.

Il est donc indifférent que le Conseil d’Etat, au moment de l’élaboration de la loi du 27 juillet 1997 portant réorganisation de l’administration pénitentiaire, a estimé que l’intervention du législateur serait de mise pour l’hypothèse d’une modification des attributions d’un établissement pénitentiaire, étant donné que le Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière n’est pas à considérer comme un établissement pénitentiaire.

Le demandeur est finalement d'avis que le Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ne constituerait pas un établissement approprié au sens de l’article 15 de la loi précitée du 28 mars 1972, au motif qu’il y subirait un régime de détention, de sorte que son placement audit centre constituerait une mesure disproportionnée.

Le délégué du gouvernement résiste à ce moyen en faisant valoir que le demandeur ne serait pas placé au Centre pénitentiaire de Schrassig, mais au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière.

Il n’est pas contesté que le demandeur est placé, non pas dans un établissement pénitentiaire, mais au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière, établissement qui 3 est distinct du Centre pénitentiaire à travers l’existence d’un bloc réservé à ces fins même s’il se trouve localisé matériellement dans l’enceinte du Centre pénitentiaire.

Or, force est de constater que le centre en question est a priori à considérer comme un établissement approprié au sens de la loi précitée de 1972 au vu notamment de la stricte séparation des retenus par rapport aux détenus de droit commun du Centre pénitentiaire à Schrassig et que l’appelant n’a soumis aucun élément personnel qui serait de nature à infirmer cette conclusion, la simple affirmation de XXX XXX à l’audience qu’il se trouverait en régime cellulaire isolé étant insuffisante à cet égard.

Quant à l’extrait du récent rapport du procureur général d’Etat versé par le demandeur en cause, force est de constater que la situation des détenus y est analysée suite aux événements du 30 janvier 2006 au Centre de séjour provisoire, mais que cette pièce ne contient pas d’indications concrètes quant aux conditions de rétention des étrangers en situation irrégulière audit Centre de séjour provisoire.

S’y ajoute que le placement des retenus dans un autre bloc du Centre pénitentiaire et le régime leur appliqué suite aux événements du 30 janvier 2006 ont été considérés comme une situation qui doit être reconnue comme restant acceptable (cf. Cour adm. 16 mars 2006, n° 21089C).

Il y a partant lieu de confirmer le jugement du 24 mai 2006 dans toute sa teneur.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 26 mai 2006, le déclare cependant non fondé, confirme le jugement du 24 mai 2006 dans toute sa teneur, condamne la partie appelante aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Marion Lanners, présidente Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Henri Campill, conseiller et lu par la présidente Marion Lanners en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 21450C
Date de la décision : 02/06/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2006-06-02;21450c ?

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