Tribunal administratif N° 20419 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 septembre 2005 Audience publique du 22 mai 2006
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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle et une décision du Conseil de discipline des Fonctionnaires de l’Etat en matière de discipline
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 20419 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 29 septembre 2005 par Maître Claude PAULY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, fonctionnaire, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’un arrêté ministériel pris par le ministre de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle en date du 28 juin 2005, prononçant à l’égard de Monsieur … la sanction disciplinaire de la mise à la retraite d’office pour inaptitude professionnelle et disqualification morale, suite à une décision rendue par le Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat en date du 21 juin 2005, sous le numéro 6/2005 de son registre, ainsi que de ladite décision du Conseil de discipline du 21 juin 2005 ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé le 14 décembre 2005 au greffe du tribunal administratif ;
Vu le mémoire en réplique, intitulé « mémoire en réponse » déposé le 16 janvier 2006 au greffe du tribunal administratif pour compte du demandeur ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 février 2006 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Yves KASEL, en remplacement de Maître Claude PAULY, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.
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Entré aux services de l’Etat en qualité d’ouvrier au Lycée classique d’Echternach en 1979, Monsieur …, né le 19 avril 1951, fut admis par arrêté du ministre de l’Education Nationale et de la Jeunesse du 14 juin 1989 au stage de garçon de salle audit lycée avec effet au 1er juillet 1989 et il fut définitivement nommé à la fonction de garçon de salle par arrêté du ministre de l’Education Nationale du 28 juin 1991.
Par arrêté du ministre de l’Education Nationale du 29 juillet 1994, Monsieur … fut nommé concierge auprès du Lycée classique d’Echternach, ci-après désigné par le « LCE », à partir du 1er septembre 1994.
Par courrier du 4 novembre 2003, le ministre de l’Education Nationale, de la Formation Professionnelle et des Sports, ci-après désigné par « le ministre », saisit le commissaire du gouvernement chargé de l’instruction disciplinaire afin de procéder à une instruction disciplinaire à l’encontre de Monsieur ….
Suivant courrier du 19 novembre 2003, ledit commissaire du gouvernement informa Monsieur … des faits lui reprochés et de ce qu’une instruction disciplinaire avait été ordonnée à son encontre.
Par lettre datée du 20 février 2004, la direction du LCE communiqua au commissaire du gouvernement de nouveaux faits libellés à charge de Monsieur ….
Par courrier du 2 mars 2004, le commissaire du gouvernement retransmit les pièces relatives aux faits nouveaux au directeur du LCE aux fins de saisine du ministre.
Par courrier du 6 juillet 2004, le ministre saisit le commissaire du gouvernement afin d’instruire les faits nouveaux renseignés dans le courrier du 20 février 2004.
Par lettre du 12 juillet 2004, Monsieur … fut informé par le commissaire du gouvernement qu’une instruction disciplinaire avait été ouverte à son encontre du chef de faits nouveaux, laquelle était jointe à celle déjà en cours du chef des faits lui notifiés par courrier du 19 novembre 2003.
Par courrier du 27 juillet 2004, le ministre saisit le commissaire du gouvernement de nouveaux faits imposant l’ouverture d’une instruction disciplinaire à l’encontre de Monsieur ….
Par courrier du 28 juillet 2004, le commissaire du gouvernement informa Monsieur … qu’une instruction disciplinaire avait été ouverte à son encontre du chef de nouveaux faits et qu’il était procédé à la jonction de l’instruction avec celles déjà en cours.
Le commissaire du gouvernement clôtura le 19 août 2004 l’instruction disciplinaire et décida de transmettre le dossier au Conseil de discipline des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désigné par le « Conseil de discipline », conformément à l’article 56, paragraphe 5, sub. 5 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après désignée par le « statut général ».
Monsieur … ayant contesté lors de l’instruction disciplinaire tous les manquements qui lui étaient reprochés à l’exception de celui en relation avec l’hébergement d’une famille polonaise en situation irrégulière dans son logement de service, le Conseil de discipline, à son audience du 22 mars 2005, décida de procéder à l’audition du directeur du LCE et des témoins mentionnés dans le dossier disciplinaire.
A son audience du 21 juin 2005, le Conseil de discipline, statuant à l’unanimité de ses membres, conclut que « les faits reprochés à Monsieur … constituent des manquements graves aux articles 9 point 1, 10, points 1 et 3, 12, point 1 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat ainsi qu’à l’article 17 du règlement grand-ducal du 22 août 1985 fixant le régime des congés pour fonctionnaires et employés de l’Etat » et prononça à l’encontre de Monsieur … la sanction disciplinaire de la mise à la retraite d’office pour inaptitude professionnelle et disqualification morale.
Par arrêté du 28 juin 2005, le ministre mit à exécution la sanction disciplinaire prononcée par le Conseil de discipline avec effet à partir du 1er juillet 2005.
Par requête déposée le 29 septembre 2005 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation du prédit arrêté du ministre du 28 juin 2005, ainsi que de la décision du Conseil de discipline du 21 juin 2005.
A l’appui de son recours, le demandeur fait exposer qu’il serait entré aux services de l’Etat en 1979, qu’il serait fonctionnaire de l’Etat depuis 1991 et qu’il serait actuellement âgé de 54 ans.
Il critique en premier lieu la décision du Conseil de discipline dans la mesure où il n’en ressortirait « aucun motif de nature à laisser conclure à une inaptitude professionnelle, respectivement à une disqualification morale justifiant une peine aussi grave telle que la mise à la retraite d’office ».
Il conteste ensuite formellement les faits qui lui sont reprochés, lesquels, même à les supposer établis, ne justifieraient pas la peine prononcée, laquelle serait disproportionnée.
Dans ce contexte, il fait valoir qu’il aurait atteint l’âge de la pension, qu’il aurait presté loyalement de nombreuses années au service de l’Etat, que les faits reprochés seraient très récents et que la mise à la retraite aurait pour conséquence de le « ruiner ». Ainsi, il découlerait de l’article 3 I. 6 de la loi modifiée du 26 mai 1954 réglant les pensions des fonctionnaires de l’Etat qu’il ne pourrait bénéficier d’une pension qu’après avoir atteint l’âge de 65 ans et cela malgré le fait d’avoir travaillé durant 15 ans pour le compte de l’Etat.
Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement reprend, en se référant au rapport d’instruction établi en date du 19 août 2004 par le commissaire du gouvernement chargé de l’instruction disciplinaire, les faits reprochés au demandeur, à savoir :
- les absences répétées du demandeur de son lieu de travail sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique et, notamment le lundi 14 avril 2003 à partir de 15.30 heures, le mardi 15 avril 2003 à partir de 14.45 heures, le mardi 15 juillet 2003 à partir de 10.00 heures et le jeudi 17 juillet 2003 à partir de 14.00 heures. Cette dernière absence aurait eu comme conséquence qu’un fournisseur aurait déposé sa livraison d’une valeur de plusieurs millions d’euros devant la loge du concierge où elle risquait d’être volée.
Il est encore reproché au demandeur d’avoir été absent sans autorisation le 20 février 2004 et d’avoir laissé le 29 avril 2004 la garde de la loge à un agent de sécurité étranger au service du LCE, ainsi que le 20 avril 2004 à partir de 14.05 heures. Le représentant étatique ajoute que le demandeur n’aurait pas, concernant ces deux dernières absences, répondu aux ordres de justification que le directeur du LCE lui aurait adressés ;
- d’avoir causé de troubles majeurs au niveau de la gestion du personnel technique, en raison de ses absences, dans la mesure où son remplacement aurait nécessité des réorganisations improvisées de dernière minute, entraînant une surcharge de travail pour les autres agents du personnel technique, ainsi que des troubles au niveau des services d’entretien (extérieur et intérieur) et des polycopies ;
- de s’être présenté à plusieurs reprises dans un état de « (post-)ébriété inquiétant » à son lieu de travail. Ainsi, en date du 19 février 2004, vers la fin de son service, il se serait présenté dans la loge du concierge en sous-vêtement affichant des signes manifestes d’ébriété.
De même, il se serait présenté en état d’ébriété le vendredi 30 avril 2004 entre 13.30 et 14.00 heures. L’ordre de justification que le directeur du LCE lui aurait notifié le 30 avril 2004 serait resté sans réponse ;
- d’avoir négligé son devoir de veiller à la fermeture des portes et fenêtres du LCE le samedi 14 juin 2003 à midi, alors qu’une tempête faisait rage et menaçait de causer des dégâts majeurs à l’intérieur des bâtiments. Le directeur se serait immédiatement rendu au logement de service du concierge, où une dame d’origine polonaise lui aurait indiqué que Monsieur … se trouvait au bistrot d’en face (« Kneipe gegenüber »). Cette omission aurait eu pour conséquence que des élèves logés à l’Institution Saint-Willibrord ont pu pénétrer librement dans le bâtiment scolaire vers 20.00 heures. Le même scénario se serait répété dans la suite, entre autres le mercredi 9 juillet 2003 (Bâtiment central, Rotonde) et le 9 septembre 2003 (Chimie, Foyer des élèves, imprimerie) ;
- d’avoir fait preuve, en date du 21 juillet 2003, d’un manque flagrant de politesse à l’égard de son directeur et du directeur adjoint, lorsque ceux-ci lui auraient demandé des explications au sujet de son absence du 17 juillet 2003 ;
- d’avoir menacé devant témoin le 19 février 2004 vers 17.00 heures Monsieur R. F.
avec les mots « Du kriss der op Schnëss » ;
- d’avoir, au cours de l’après-midi du jeudi 4 septembre 2003, eu recours aux services de trois femmes de charge employées par le LCE pour nettoyer son appartement privé pendant les heures de service de celles-ci, et ce malgré l’assurance faite la veille au directeur que l’appartement serait nettoyé par une personne étrangère au LCE ;
- d’avoir établi une « facture » à une société privée pour des services rendus (« nettoyage du cloître et de la Salle des Glaces avant le dîner, 2 personnes de surveillance et de sécurité et 2 personnes pour les vestiaires et hygiène des locaux sanitaires ») d’un montant de 460,- EUR à régler au crédit de son CCP privé ;
- d’avoir signé une fiche de travail émise par la société K. de Mertert pour des travaux d’entretien et de réparation au LCE, alors qu’il n’y était plus habilité en vertu d’une décision prise d’un commun accord par la direction du LCE et les responsables de l’Administration des Bâtiments publics ;
- d’avoir, malgré les injonctions répétées de son directeur, continué à héberger dans son logement de service une famille polonaise en séjour irrégulier au pays ;
- d’avoir omis d’assister à la réunion de service du 12 septembre 2003 à 9.30 heures, à laquelle il avait été invité par écrit, sans excuser son absence, et sans avoir été présent à son poste de travail à l’heure de ladite réunion ;
- d’avoir remis en date du 20 avril 2004 à Monsieur H. H. de la menuiserie G.
d’Echternach un jeu de serrures avec les clés correspondantes, dont certaines auraient permis d’avoir accès au secrétariat du LCE et d’avoir accepté en contrepartie six bouteilles d’eau-de-
vie ;
- d’avoir violé l’article 17 du règlement grand-ducal du 22 août 1985 fixant le régime des congés des fonctionnaires et employés de l’Etat en omettant d’informer son supérieur hiérarchique de son empêchement d’exercer ses fonctions par suite de maladie, et de ne pas avoir présenté de certificat de maladie dans les formes requises et ce à de nombreuses reprises. Dans ce même contexte, il lui est encore reproché de ne pas avoir signalé ses congés, mais de les avoir simplement marqués sur le carnet de bord de la loge et ceci en dépit des rappels fréquents ordonnant au personnel technique de déclarer leurs absences directement à un membre de la direction et de ne pas avoir indiqué tous les congés dans sa déclaration pour le calcul de l’allocation de repas ;
- d’avoir effectué une sortie non autorisée le lundi 3 mai 2004, alors qu’il se trouvait en arrêt-maladie sans autorisation de sortie et de ne pas avoir donné une suite à l’ordre de justification lui adressé par le directeur du LCE le 5 mai 2004 ;
- d’avoir laissé courir son chien dans la cour du LCE malgré l’ordre du directeur adjoint de le faire rentrer dans sa loge et d’avoir à cette occasion adopté un comportement désobligeant et inapproprié vis-à-vis du directeur adjoint et ce en la présence d’élèves.
Le délégué du gouvernement conclut que l’ensemble des faits reprochés au demandeur constitueraient des manquements graves aux articles 9, point 1, 10 points 1 et 3, 12 point 1 du statut général.
Il donne encore à considérer que le Conseil de discipline aurait procédé à l’audition de témoins suite aux contestations du demandeur des faits lui reprochés et que le Conseil de discipline aurait relevé que l’attitude intolérable et la conduite du demandeur résulteraient à suffisance des déclarations du prédécesseur de l’actuel directeur du LCE qui aurait déclaré devant le Conseil de discipline que depuis sa nomination à la fonction de concierge, le demandeur n’aurait jamais fait le moindre effort pour accomplir correctement sa tâche. Il ajoute que, contrairement à l’affirmation du demandeur, l’ancien directeur aurait demandé une instruction disciplinaire à l’égard du demandeur du fait de ne pas avoir suivi les recommandations de l’installateur de chauffage lors des inondations de la Sûre de janvier 2003 et du fait d’avoir hébergé chez lui une famille polonaise en situation irrégulière.
Il soutient ensuite que la question des conséquences de la mise à la retraite du demandeur serait irrelevante, eu égard aux agissements du demandeur auquel il aurait appartenu de réfléchir à deux fois avant d’agir. Il donne à considérer que le Conseil de discipline aurait relevé que le demandeur aurait menti et contesté sans raison tous les faits lui reprochés et qu’il aurait noté chez le demandeur l’absence d’une véritable prise de conscience de la gravité de ses manquements.
Il conclut que ce serait à bon droit que le ministre aurait pris l’arrêté ministériel litigieux prononçant la sanction disciplinaire de la mise à la retraite d’office pour inaptitude professionnelle et disqualification morale.
Concernant l’argument du demandeur fondé sur sa prestation de nombreuses et loyales années de service, le délégué du gouvernement estime cet élément sans pertinence eu égard à la gravité des manquements du demandeur, le Conseil de discipline ayant à juste titre considéré que cette ancienneté ne pouvait constituer une circonstance atténuante.
Le représentant étatique fait finalement valoir que l’affirmation du demandeur qu’il aurait été sur le point d’accéder à la pension ne serait non seulement irrelevante, mais également inexacte puisqu’il serait né en 1951.
Dans son mémoire en réplique, le demandeur revient sur les faits qui lui sont reprochés, tels que repris dans le mémoire en réponse du délégué du gouvernement.
Ainsi, quant aux absences non autorisées, il fait valoir que son absence du 14 avril 2003 à partir de 15.30 heures aurait été légitime, dès lors que ses horaires de travail auraient consisté le matin de 7.00 heures à 12.15 heures et l’après-midi de 12.45 à 15.30 heures.
Concernant l’absence sans autorisation de son poste le 15 avril 2003 à partir de 14.45, il soutient qu’il se serait absenté pour ouvrir une porte à un enseignant.
Il justifie encore la prétendue absence sans autorisation du mardi 15 juillet 2003 par l’ouverture des portes et fenêtres du bâtiment scolaire et qu’il aurait laissé des notes à ce sujet dans le carnet de bord tenu à la loge du concierge, voire des messages sur la boîte vocale du téléphone portable du directeur. Il relève dans ce contexte que l’ancien directeur du LCE n’aurait pas objecté quant à l’enregistrement de ses absences dans ledit carnet de bord.
Concernant la prétendue absence du jeudi 17 juillet 2003, s’il admet qu’il s’est absenté à 14.00 heures de sa loge pour quelques minutes pour ouvrir à clé certaines portes de l’établissement scolaire (salles de chimie, biologie, sports, histoire), il conteste toutefois le fait qu’un fournisseur, n’ayant pas réussi à le contacter, aurait déposé sa livraison d’une valeur de plusieurs millions d’euros devant la loge du concierge. Il signale que, contrairement à l’affirmation du délégué du gouvernement, le rapport d’instruction renseignerait une livraison d’une valeur de plusieurs milliers d’euros, et qu’aucun des témoins n’aurait été en mesure de préciser en quoi ladite livraison aurait consisté et dont l’existence même ne serait pas prouvée.
Dans ce contexte, il reproche au Conseil de discipline de ne pas avoir cherché à en savoir plus et d’avoir considéré comme établis les faits reprochés et examinés par le commissaire du gouvernement dans son rapport d’instruction préalable, tout en demandant acte de ce que le reproche lié au dépôt d’une livraison de plusieurs millions d’euros devant la loge du concierge ne serait pas établi pour ne pas être crédible. Même à supposer qu’une telle livraison ait eu lieu, quod non, la responsabilité d’une telle négligence incomberait exclusivement au fournisseur. Il ajoute qu’il ne serait pas habilité à signer des fiches et donc à réceptionner des livraisons.
Quant à la prétendue absence sans autorisation du 20 février 2004, le demandeur affirme qu’il ressortirait des pièces versées qu’il aurait laissé une note dans le carnet de bord et un message sur la boîte vocale du téléphone portable du directeur.
Concernant l’absence du 29 avril 2004, il fait valoir que ce serait par conscience professionnelle qu’il aurait demandé à un employé de la société P., également aux services du LCE, d’assurer la surveillance dans la loge du concierge pendant qu’il aurait procédé à l’ouverture des portes à 7.30 heures avant le début des cours à 8.00 heures.
Il reproche ensuite au directeur du LCE de lui avoir adressé en date du 30 avril 2004 un ordre de justification pour une absence du 30 avril 2004 de 13.30 à 14.00 heures, alors qu’il lui reprocherait également dans le même ordre de justification d’avoir été présent à son travail en état d’ébriété. Il reconnaît toutefois s’être absenté vers 14.00 heures de sa loge pour ouvrir les portes d’entrée du bâtiment scolaire.
Il conteste encore le fait que le 3 mai 2004, il serait sorti de manière non autorisée pendant son congé de maladie.
Il conclut finalement qu’il ne pourrait pas procéder à l’ouverture des portes et fenêtres du LCE et être en même temps présent dans sa loge. S’il résulterait certes de l’ensemble des prédits reproches qu’il aurait parfois été momentanément absent de sa loge, il ne serait pas établi qu’il aurait été absent de son lieu de travail.
Quant au reproche de ne pas avoir donné suite aux ordres de justification, le demandeur rétorque qu’il aurait amplement pris position dans une note de plaidoiries déposée par son mandataire le jour des plaidoiries devant le Conseil de discipline, et il critique ledit Conseil de ne pas avoir examiné la question de la nullité des ordres de justification.
Le demandeur entend ensuite réfuter le reproche de s’être présenté dans sa loge le 19 février 2004 vers la fin de son service « en sous-vêtements » et en affichant des signes manifestes d’ébriété, en faisant valoir qu’il ne ressortirait pas des pièces versées par le délégué du gouvernement qu’il se serait présenté en sous-vêtements mais uniquement en tenue « peu correcte », que ledit incident aurait eu lieu vers 17.00 heures, c’est-à-dire après ses heures de service et qu’il aurait revêtu une « tenue de sport (Jogginganzug) ». Il ajoute qu’il se serait trouvé dans la loge du concierge après ses heures de service uniquement sur demande de la direction en raison de la tenue d’une réception au LCE, de sorte qu’aucun reproche ne saurait lui être adressé de ce chef. Dans ce contexte, il soutient qu’il aurait appartenu à ses supérieurs hiérarchiques de le soumettre à un contrôle médical en vue de déterminer de manière précise son taux d’alcoolémie. Il précise qu’il souffrirait de diabète entraînant des vertiges et des problèmes d’articulation, ce dont la direction du LCE aurait été au courant. De même, il résulterait d’un certificat établi par le médecin de contrôle du 26 janvier 2005 que lors d’un contrôle médical le 6 janvier 2005 à 14.30 heures, son état d’alcoolémie aurait été négatif, de sorte que les reproches formulés à son égard concernant son prétendu état d’ébriété laisseraient d’être fondés.
Quant au reproche de ne pas avoir veillé à la fermeture des portes et fenêtres du LCE le samedi 14 juin 2003 à midi, alors qu’il y avait une tempête et de s’être trouvé dans une « Kneipe » en face du LCE, le demandeur s’étonne d’être la seule personne à qui on aurait fait le reproche, alors que tout le personnel y compris les femmes de ménage lesquelles seraient en service le samedi matin jusqu’à midi auraient les clés d’accès. Il ajoute qu’il n’aurait pas consommé de l’alcool dans une « Kneipe » durant son service, comme le laisserait sous-
entendre le délégué du gouvernement, mais qu’après son service, il serait parti manger dans le café-restaurant en face du LCE.
Il résiste ensuite au reproche d’un manque de politesse, en faisant valoir qu’il ressortirait du courrier adressé par Monsieur R. F. au directeur du LCE en date du 20 février 2004 que ce ne serait pas lui mais son fils qui aurait menacé verbalement Monsieur R. F.
Quant au reproche d’avoir eu recours le 4 septembre 2003 au service des femmes de ménage employées au LCE pour nettoyer son logement de service, il soutient, d’une part, que les déclarations des femmes de charge n’auraient pas la valeur d’une attestation testimoniale, et, d’autre part, qu’il en résulterait qu’il leur avait demandé de nettoyer le vestiaire du LCE et non pas son appartement privé. Il admet toutefois qu’il leur aurait demandé de nettoyer la cuisine et la salle de bains, souillées à la suite de travaux de réparation effectués au niveau des tuyauteries à l’initiative du LCE.
Concernant le reproche d’avoir établi une facture à une personne privée, le demandeur expose qu’il serait depuis de nombreuses années d’usage que le concierge soit présent en dehors de ses heures de travail et de ses fonctions et sans être payé, lors des manifestations se déroulant dans le bâtiment principal du LCE, afin de veiller au bon déroulement et au nettoyage des lieux en organisant une équipe de femmes de ménage. Il aurait également été un usage connu et approuvé par les prédécesseurs de l’actuel directeur, qu’en contrepartie de ses services, il se fasse payer une indemnité compensatrice par l’organisateur des activités, laquelle indemnité aurait été redistribuée par ses soins aux personnes présentes sur les lieux. Il fait encore valoir qu’il résulterait clairement du rapport d’instruction qu’il ne s’agirait pas d’une facture « contrefaçonnée » de nature à faire croire à son destinataire qu’il s’agirait d’une facture officielle du LCE.
Il résiste ensuite au reproche formulé à son égard d’avoir signé le 5 septembre 2003 une fiche de travail émise par une entreprise à l’égard du LCE en violation d’une décision prise par la direction du LCE lui ôtant le pouvoir de signature, en arguant qu’on lui reprocherait d’un côté d’avoir signé une fiche de travail et d’un autre côté de ne pas avoir été présent le 17 juillet 2003 pour signer la fiche de livraison de matériel d’une prétendue valeur de plusieurs millions d’euros.
Quant à l’hébergement d’une famille polonaise dans son logement de service, le demandeur expose qu’il aurait logé ladite famille, formée des parents et de leur fils dont il serait le parrain, durant quelques semaines afin de leur permettre de trouver un nouveau logement tout en ignorant qu’ils se trouvaient en séjour irrégulier. Ce n’est que lors d’un contrôle de police en date du 12 septembre 2003, qu’il aurait appris leur situation et qu’il leur aurait demandé de quitter les lieux, ce qu’ils auraient fait deux jours après.
Il justifie encore son absence de la réunion de service du 12 septembre 2003 par le fait de ne pas avoir vu la convocation à ladite réunion.
Concernant le reproche de la remise d’un jeu de serrures et de clés du LCE à une personne étrangère au LCE, le demandeur donne à considérer qu’une plainte aurait été déposée à son égard sur base de l’article 240 du Code pénal, de sorte qu’en vertu du principe que le « criminel tient le civil en l’état » ou en l’espèce plutôt « le criminel tient l’administratif en l’état », il y aurait lieu de surseoir à statuer en attendant que la chambre de conseil du tribunal d’arrondissement de Diekirch ait statué.
Quant au non-respect des formalités relatives aux congés, le demandeur fait plaider que les prédécesseurs de l’actuel directeur auraient accepté la pratique consistant pour lui à marquer ses congés sur le carnet de bord déposé dans sa loge et qu’il n’aurait pas été invité à procéder autrement. Il donne encore à considérer que le fait de lui reprocher d’avoir laissé des messages sur la boîte vocale du téléphone portable du directeur constituerait en fait la preuve qu’il aurait déclaré ses absences à un membre de la direction.
Enfin, quant au chien errant dans la cour du LCE, il affirme que son chien serait de petite taille, qu’il se serait échappé de sa loge, mais qu’il l’aurait rattrapé après deux minutes.
Il affirme encore qu’il n’aurait pas été dans ses intentions de se moquer du directeur adjoint qui se trouvait dans la cour, ni de le discréditer devant les élèves présents et si tel avait été le cas, il tient à s’en excuser solennellement auprès de ce dernier.
En droit, le demandeur fait valoir qu’il aurait été concierge au LCE durant 26 années, au cours desquelles il ne se serait vu infliger aucune sanction disciplinaire et que tous les faits reprochés se situeraient entre mai 2003 et mai 2004, c’est-à-dire postérieurement à l’entrée en fonctions en date du 1er avril 2003 de l’actuel directeur.
Il reproche ensuite au Conseil de discipline, en ce que celui-ci a estimé que malgré l’absence d’antécédents judiciaires, il n’y avait pas lieu de tenir compte de circonstances atténuantes du fait de son ancienneté en raison de la gravité des faits commis, d’avoir violé l’article 53 du statut général, au motif que les circonstances atténuantes seraient données indépendamment de la gravité des faits commis.
Quant au reproche de ne pas avoir donné suite aux ordres de justification, le demandeur fait valoir que les ordres de justification litigieux lui auraient été adressés peu de temps après l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 5 mars 2004 fixant les conditions et les modalités de l’ordre de justification à adresser aux fonctionnaires de l’Etat, et qu’il n’en aurait pas encore pris connaissance. Il soutient encore que ledit règlement, en disposant en son article 3, alinéa 1er que le refus ou l’abstention de prendre position dans le délai imparti vaut aveu du ou des faits reprochés, serait contraire à la Convention européenne des droits de l’homme et à la Constitution garantissant toutes les deux les droits de la défense des justiciables.
Il conclut ensuite à la nullité des ordres de justification pris à son encontre, au motif que l’expédition de l’ordre de justification, qui se fait suivant la formule annexée au règlement grand-ducal précité du 5 mars 2004, n’indiquerait pas que le silence gardé par l’agent équivaut à un aveu ni les voies de recours et ce en violation de la procédure administrative non contentieuse qui prévoirait que l’administration, en vertu de son obligation de motiver ses décisions, devrait également motiver quelles sont les conséquences du non-
respect d’un délai et indiquer quelles sont les voies de recours.
En ordre subsidiaire, le demandeur se base sur l’article 3 du règlement grand-ducal précité du 5 mars 2004, aux termes duquel le refus ou l’abstention de prendre position dans le délai imparti vaut aveu du ou des faits reprochés, sauf circonstances exceptionnelles, pour soutenir qu’en l’espèce, on serait en présence de telles circonstances exceptionnelles dès lors que cette mesure serait d’application récente et que l’ordre lui adressé aurait gardé le silence sur les conséquences d’une absence de prise de position.
En ordre plus subsidiaire, il soutient que les faits relatés dans les ordres de justification ne seraient pas établis.
En ordre encore plus subsidiaire, il fait valoir que l’ordre de justification du 5 mai 2004 ne saurait être pris en considération à défaut d’être signé.
En dernière subsidiarité, le demandeur, en s’emparant de l’article 1er, alinéa 2 du prédit règlement grand-ducal du 5 mars 2004, selon lequel un ordre de justification doit sous peine de nullité être envoyé dans les 7 jours ouvrables de la connaissance du fait fautif, invoque la nullité de l’ordre de justification du 2 juillet 2004 au motif qu’il ne renseignerait aucune date à laquelle les faits reprochés auraient été commis. De même, d’autres ordres de justification seraient relatifs à des faits datant de plus de 7 jours de l’établissement de l’ordre de justification en question.
Il conclut ainsi à la nullité de la décision du Conseil de discipline, en ce que celui-ci a estimé, d’une part, que l’examen du moyen de la nullité des ordres de justification était superflu eu égard à la gravité des faits commis et, d’autre part, que les faits reprochés et examinés par le commissaire du gouvernement seraient établis, c’est-à-dire sans prendre en considération ses observations, ce qui serait contraire à l’article 51 du statut général, selon lequel aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée sans que l’intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense.
Finalement, quant à la nature de la sanction disciplinaire prononcée, le demandeur soutient qu’il s’agirait en l’espèce de la sanction la plus sévère, à réserver aux cas d’une extrême gravité. Or, les faits lui reprochés ne seraient que partiellement fondés et ne seraient pas suffisamment graves pour justifier une mise à la retraite d’office, tout en faisant valoir que les faits reprochés seraient situés dans un intervalle de temps assez bref, ce qui constituerait un indice d’une volonté de l’évincer. Il donne encore à considérer que le Conseil de discipline n’aurait pas tenu compte de sa défense relativement aux ordres de justification et qu’il n’aurait pas retenu de circonstances atténuantes malgré son ancienneté et son grade.
Dans son mémoire en duplique, le délégué du gouvernement rétorque concernant l’absence non autorisée du lundi 14 avril 2003 à partir de 15.30 heures, que les horaires de travail du demandeur seraient ceux applicables à tous les fonctionnaires, à défaut d’horaire mobile, à savoir de 8h00 à 12h00 et de 14h00 à 18h00. Dans la mesure où l’horaire de travail du demandeur applicable le 14 avril 2003 n’aurait pas été modifié et que l’aménagement de l’horaire de travail entrepris par le directeur du LCE lors de la réunion de service du 12 mai 2003 n’aurait opéré que pour l’avenir, ses absences se situant avant cette réunion de service ne seraient pas justifiées.
Quant à l’absence de Monsieur … de son service le mardi 15 avril 2003 à partir de 14.45 heures, il fait valoir que l’affirmation du demandeur consistant à soutenir qu’il se serait absenté pour ouvrir une porte à un enseignant ne serait pas prouvée et d’ailleurs improbable dans la mesure où à cette heure, les enseignants se trouvent en classe, étant relevé qu’il n’aurait pas laissé de note dans le carnet de bord, ni informé un membre de la direction.
Concernant l’absence du demandeur de sa loge en date des 15 et 17 juillet 2003, le représentant étatique conteste l’allégation du demandeur qu’il se serait absenté pour ouvrir des portes et fenêtres non autrement définies, alors qu’il n’aurait pas laissé de note dans le carnet de bord, ni informé un membre de la direction. Il ajoute que même si de tels messages avaient été laissés, ils n’auraient pas été suffisants dans la mesure où l’actuel directeur n’acceptait pas cette manière de procéder.
Le délégué du gouvernement conteste encore l’affirmation du demandeur justifiant son absence du 17 juillet 2003 par la nécessité d’ouvrir à clé les salles de chimie, biologie, sports et histoire, dans la mesure où non seulement les enseignants disposeraient des clés nécessaires pour ouvrir ces salles, mais qu’en plus il n’y avait pas cours, le 17 juillet ayant été un jeudi et qu’il tombait dans la période des vacances scolaires. Il critique encore le demandeur lorsque celui-ci soutient que le fournisseur aurait été « négligent » en déposant la livraison devant la loge sans avertir personne, estimant que le fournisseur ne pouvait pas faire autrement.
Concernant la valeur de la livraison, le représentant étatique reconnaît que la valeur n’aurait été que de quelques milliers d’euros, mais il conteste que l’indication erronée de quelques millions d’euros aurait été faite à dessein afin de faire paraître le fait commis par Monsieur … plus grave. Concernant l’affirmation du demandeur qu’il n’aurait pas été habilité à signer des fiches de livraison, il rétorque que même si tel avait été le cas, cela ne l’aurait pas dispensé à être présent dans sa loge et à accueillir les livreurs ou à s’organiser de manière à garantir une présence dans la loge du concierge lorsqu’il devait s’en absenter dans l’exercice de ses fonctions.
Quant à l’absence sans autorisation en date du 20 février 2004, le délégué du gouvernement relève que le demandeur aurait admis son absence sans en indiquer les raisons et sans suivre la procédure applicable à l’époque des faits qui lui aurait été communiquée par lettre du 12 septembre 2003, c’est-à-dire sans en informer personnellement son directeur.
Le représentant étatique soutient ensuite que le demandeur aurait reconnu qu’il avait été absent le 29 avril 2004 vers 7.20 heures et qu’il aurait demandé à une personne étrangère au service de le remplacer. Or, même si ce remplaçant était un employé de la société P., engagée par l’administration des Bâtiments Publics, il n’était pas habilité à le remplacer. Il relève encore que l’affirmation du demandeur qu’il aurait ouvert à clé les portes des salles de classe quelques 40 minutes avant le début des cours serait peu crédible, d’autant plus qu’il ne produirait cette justification que dans le cadre de son mémoire en réplique.
Concernant la sortie non autorisée du 3 mai 2004, il signale que le demandeur n’aurait pas donné suite à l’ordre de justification, de sorte que le reproche afférent serait légalement établi conformément à l’article 3 du règlement grand-ducal précité du 5 mars 2004.
Le délégué du gouvernement soutient ensuite que ce serait à tort que le demandeur verrait une contradiction entre les faits reprochés dans l’ordre de justification du 30 avril 2004, alors que deux faits distincts seraient reprochés au demandeur, à savoir celui d’avoir été présent à son service en état d’ébriété de 13.30 heures à 14.00 heures et celui d’avoir été absent de son travail à partir de 14.05 heures. Il conteste encore l’affirmation - qui resterait à l’état de simple allégation – que le demandeur se serait absenté pour ouvrir des portes, étant donné que les cours débuteraient à 14.00 heures.
Finalement, il conclut que les absences reprochées au demandeur seraient toutes établies par application de l’article 3 du règlement grand-ducal précité du 5 mars 2004 et par les aveux du demandeur en cours d’instance. Il ajoute qu’il appartiendrait au demandeur de justifier ses absences et d’en rapporter la preuve. Or, en l’espèce, les justifications produites resteraient à l’état de simples allégations.
Par rapport au reproche adressé au demandeur d’avoir causé des troubles majeurs au niveau de la gestion du personnel technique, le délégué du gouvernement expose que le fait de s’être présenté à son poste de travail en sous-vêtements et en état d’ébriété serait établi par les attestations testimoniales. Il serait inutile dans ce contexte de savoir si ces faits se sont déroulés en dehors des heures de service, au motif qu’un fonctionnaire serait en principe en service dès lors qu’il donne suite à une demande de son supérieur de se présenter à son poste en dehors des heures de travail régulières et que l’article 10 paragraphe 1er du statut général ne ferait pas de distinction selon que le comportement incriminé ait eu lieu endéans ou en dehors des heures de service. Il relève que l’état d’ébriété de Monsieur … aurait été constaté par trois témoins et qu’il serait faux de soutenir qu’il aurait appartenu aux supérieurs hiérarchiques de le soumettre à un contrôle médical en vue de déterminer son taux d’alcoolémie, au motif que l’article 12, point 1 du règlement grand-ducal du 5 mars 2004 concernant la santé et la sécurité du travail et le contrôle médical dans la fonction publique subordonnerait un tel contrôle à la présentation d’un certificat médical, ce qui n’aurait pas été le cas.
Quant au reproche de la non-fermeture des portes d’entrée du LCE à midi le samedi 14 juin 2003, le délégué du gouvernement fait valoir que ce fait ne serait pas contesté par le demandeur et lui reproche de se décharger de ses responsabilités sur les femmes de charge dont le travail ne commencerait le samedi qu’à 13.00 heures. Il ajoute que la citation « in der Kneipe gegenüber » ne saurait être imputée au directeur qui n’aurait fait que citer la dame polonaise.
Le délégué du gouvernement, s’il reconnaît que les menaces proférées à l’encontre de Monsieur R. F. l’ont été par le fils du demandeur, insiste toutefois sur le fait que le père aurait pris le parti de son fils et aurait adopté une attitude agressive et impolie vis-à-vis de Monsieur R. F.
Concernant le nettoyage du logement de service par des femmes de charge du LCE, le représentant étatique, tout en relevant que le demandeur aurait admis ce fait, soutient que contrairement à l’assertion du demandeur, l’inondation du logement n’aurait pas été causée par des réparations au niveau d’un raccord des tuyauteries d’eau potable du côté allemand de la Sûre, mais elle aurait été la suite d’une infiltration d’eau par le système des égouts provenant de la crue de la Sûre, laquelle aurait pourtant eu lieu en janvier 2003, alors que les faits reprochés remonteraient au mois de septembre 2003. Il précise qu’en septembre 2003, seuls les filtres des robinets auraient été remplacés et le boiler aurait été nettoyé. Enfin, le demandeur n’aurait pas tenu sa promesse faite au directeur du LCE de faire nettoyer son logement par une personne étrangère au LCE.
Quant au reproche de l’établissement d’une facture à l’égard d’une personne privée, le représentant étatique soutient que seule la direction du LCE serait habilitée à facturer la mise à disposition de ses institutions et que l’emploi d’agents de l’Etat pour surveiller les lieux, garder le vestiaire et veiller à l’hygiène des toilettes serait rémunéré par la mise en compte d’heures supplémentaires. Il précise que le demandeur bénéficierait, depuis le 1er septembre 1994, d’une prime d’astreinte de 22 points indiciaires, alors que « de par ses fonctions, il a à assurer une surveillance générale des installations », même en dehors des heures de service normales. Il conteste encore que le demandeur ait partagé ces rentrées d’argent avec les autres agents, à part le cas du marathon de 1991 à l’occasion duquel une femme de charge, Madame V. R., affirme avoir reçu du demandeur 1.000.- francs dans une enveloppe du LCE. Il ajoute que ces faits auraient été soumis au Parquet de Diekirch.
Il fait ensuite valoir que le demandeur serait en aveu d’avoir signé la fiche de travail émise par la société K. de Mertert, malgré l’interdiction formelle du directeur du LCE. Il affirme qu’il n’existerait aucune contradiction dans les reproches adressés au demandeur, dès lors qu’il ne serait pas reproché au demandeur de ne pas avoir signé le 17 juillet 2003 un bordereau de livraison, mais de ne pas avoir été présent lors du passage du livreur.
Quant à l’accueil dans le logement de service du demandeur d’une famille polonaise, le délégué du gouvernement fait valoir que le demandeur aurait reconnu ce fait, de sorte que le manquement disciplinaire à l’article 9 paragraphe 1er, alinéa 2 du statut général serait établi.
Il estime que l’allégation du demandeur, qu’il n’aurait pas été au courant de la situation irrégulière de cette famille, serait peu crédible au vu des liens étroits unissant le demandeur à cette famille et n’aurait une incidence que dans le cadre du volet pénal du dossier.
Le délégué du gouvernement fait encore valoir que le demandeur ne contesterait pas son absence de la réunion de service du 12 septembre 2003 et que sa justification pour excuser cette absence en dirait long sur sa conscience professionnelle.
Quant au reproche de la remise de serrures et de clés du LCE, le représentant étatique soutient que le demandeur ne saurait être suivi dans son affirmation que le criminel tient l’administratif en l’état, dans la mesure où un tel principe de droit général n’existerait pas, le droit disciplinaire étant d’après une jurisprudence constante un droit autonome.
Le délégué du gouvernement soutient ensuite que le demandeur n’aurait pas été affranchi des formalités relatives à la demande et à la motivation des congés pour raisons de santé, les dispositions des articles 17 et suivants du règlement grand-ducal modifié du 22 août 1985, précité, s’imposant également à ce dernier. Il conteste que le demandeur n’ait à aucun moment été invité à procéder autrement que par annotation du carnet de bord, alors qu’il résulterait au contraire du dossier que le directeur du LCE lui aurait adressé de nombreux rappels à l’ordre. Il insiste encore sur la gravité des manquements constatés qui concerneraient 89,5 jours d’absence dont 16 jours n’auraient pas été déclarés sur la fiche relative à l’allocation de repas, ce qui aurait entraîné une désorganisation du service et la perte de confiance de la direction dans le demandeur.
Il fait ensuite valoir que le demandeur aurait admis le fait que son chien aurait circulé dans la cour et sa confrontation avec le directeur adjoint à ce sujet.
En droit, le représentant étatique conteste tout d’abord que le demandeur ait été concierge au LCE durant 26 années, alors qu’il n’aurait été nommé à cette fonction qu’à partir du 1er septembre 1994, et qu’il n’aurait été inquiété disciplinairement qu’à partir de l’entrée en fonctions du nouveau directeur en la personne de Monsieur H. T., alors que le prédécesseur de ce dernier, Monsieur F. B., aurait déjà en date du 21 janvier 2003 ordonné une instruction disciplinaire à l’encontre du demandeur.
Il estime que ce serait à bon droit que le Conseil de discipline n’aurait pas retenu de circonstances atténuantes, dans la mesure où aucune circonstance atténuante n’existerait dans le chef du demandeur, ce dernier ayant menti et contesté sans raisons les faits mis à sa charge en exigeant une instruction complémentaire qui n’aurait permis de renverser aucune des charges libellées à son égard. Le refus de tenir compte de circonstances atténuantes serait d’autant plus justifié que le Conseil de discipline aurait noté dans le chef du demandeur l’absence d’une prise de conscience réelle de la gravité de ses manquements et de regrets sincères.
Concernant le moyen tiré du refus d’analyser les observations du demandeur relatives aux ordres de justification lui adressés, le délégué du gouvernement soutient que les faits à l’origine des trois ordres de justification seraient établis en cause, soit par l’aveu du demandeur lui-même, soit par les déclarations de témoins, de sorte que ce serait à bon droit que le Conseil de discipline n’aurait pas jugé nécessaire d’analyser le moyen tiré de la nullité, par ailleurs contestée, des ordres de justification, lesquels seraient en tout état de cause à retenir comme commencement de preuve.
Finalement, il estime que la peine de la « révocation » ne serait pas une peine excessivement sévère, au regard, d’une part, de la gravité des faits tenant au nombre élevé de manquements constatés, et d’autre part, de la nature même des infractions qui viseraient les obligations les plus élémentaires de la fonction et donneraient lieu à des poursuites pénales en cours, et, encore d’autre part, en raison des troubles causés au niveau de la gestion du personnel technique et finalement du refus de collaboration du demandeur durant l’instruction disciplinaire, lors de laquelle il aurait omis de dire la vérité.
Quant à la recevabilité Le demandeur a fait déposer un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté du ministre du 28 juin 2005, ainsi que de la décision du Conseil de discipline du 21 juin 2005.
Sur question afférente du tribunal à l’audience des plaidoiries concernant la recevabilité du recours en tant que dirigé contre l’arrêté ministériel du 28 juin 2005 au regard de l’article 54 du statut général, le demandeur s’est rapporté à prudence de justice.
Le délégué du gouvernement, pour sa part, a conclu à l’irrecevabilité du recours en tant que dirigé contre l’arrêté ministériel du 28 juin 2005.
Aux termes de l’article 54 point 2. du statut général, « en dehors des cas où le Conseil de discipline statue en appel, le fonctionnaire frappé d’une sanction disciplinaire prononcée par le Conseil de discipline ou suspendu conformément à l’article 48, paragraphe 1er, peut, dans les trois mois de la notification de la décision, prendre recours au Tribunal administratif qui statue comme juge du fond. Le même droit de recours appartient au Gouvernement qui l’exerce par l’intermédiaire du délégué visé à l’article 59, alinéa 3. Les recours du fonctionnaire intéressé et du délégué du Gouvernement sont obligatoirement dirigés contre la décision du Conseil de discipline ».
Il se dégage de la disposition précitée que le recours contre une sanction disciplinaire est obligatoirement dirigé contre la décision prononcée par le Conseil de discipline et non pas contre l’arrêté du ministre qui ne fait qu’exécuter la décision prise par ledit conseil, conformément à l’article 52 du statut général, selon lequel « l'autorité de nomination est tenue d'appliquer la sanction disciplinaire conformément à la décision du Conseil de discipline visée à l’article 70 [du statut général] (…) ».
En effet, la décision, ainsi qualifiée par la loi, de l’autorité de nomination, en l’espèce le ministre, est, nonobstant sa dénomination, dépourvue de tout caractère décisoire dans le chef du ministre compétent, celui-ci étant légalement tenu d’appliquer la décision du Conseil de discipline, et ne constitue qu’un acte d’exécution non susceptible de recours, de sorte que le recours est à déclarer irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre l’arrêté ministériel du 28 juin 2005.
En ce qui concerne la décision du Conseil de discipline du 21 juin 2005, force est encore de constater que l’article 54 point 2. précité du statut général prévoit contre les décisions du Conseil de discipline un recours au tribunal administratif qui statue comme juge du fond, de sorte que le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal.
Le recours en réformation, non autrement critiqué sous ces aspects, est également recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi. Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est partant irrecevable.
Quant au fond Avant d’examiner si les faits reprochés à Monsieur … sont établis à suffisance de droit, il convient de prime abord d’examiner son moyen tiré de la violation de l’article 51 du statut général en ce que le Conseil de discipline n’a pas pris en considération ses observations relativement aux ordres de justification qui lui ont été adressés.
A cet égard, il convient de constater que le Conseil de discipline a estimé que les faits reprochés au demandeur étaient établis au vu des déclarations concordantes des différents témoins entendus, déclarations qui n’ont pas été ébranlées par celles des témoins de la contre-
enquête. Contrairement à ce qui est soutenu par le demandeur, il ne ressort pas de la décision litigieuse que le Conseil de discipline a retenu certains faits comme établis sur le seul fondement de l’absence de réaction de la part de Monsieur … par rapport aux ordres de justification lui adressés par la direction du LCE. Il ne ressort pareillement pas de ladite décision que le Conseil de discipline a imputé au demandeur un comportement fautif du fait de ne pas donner suite à ces ordres de justification.
Dans ce contexte, le tribunal ne saurait en tout état de cause pas suivre le demandeur en son raisonnement lorsqu’il prétend que la procédure des ordres de justification serait illégale en ce qu’elle violerait ses droits de la défense. En effet, loin de constituer une « nouvelle arme » à l’encontre des fonctionnaires, cette procédure permet au contraire de protéger les droits des fonctionnaires présumés fautifs, en leur permettant de prendre position par rapport à des faits qui leur sont reprochés par le chef de leur administration, sans que ce dernier ne recourt tout de suite à la procédure disciplinaire. La règle telle qu’édictée à l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal précité du 5 mars 2004, qui veut que l’abstention ou le refus de prendre position dans le délai imparti équivaut à un aveu, n’institue qu’une présomption simple que le fonctionnaire concerné pourra toujours combattre par la preuve contraire, et au plus tard, devant le juge administratif. Quant à l’argumentation du demandeur consistant à soutenir que la procédure des ordres de justification violerait les dispositions de la procédure administrative non contentieuse, elle est à rejeter pour ne pas être pertinente, étant donné que les règles édictées par la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse et plus particulièrement par son règlement d’application du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes ne concernent que les décisions administratives individuelles, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, étant donné que les ordres de justification ne comportent aucun élément décisionnel.
Au vu des considérations qui précèdent, aucun reproche ne saurait partant être adressé au Conseil de discipline du fait de ne pas avoir pris en considération les observations du demandeur relativement aux ordres de justification, étant relevé par ailleurs que le demandeur a eu à travers les enquêtes et contre-enquêtes largement la possibilité de présenter ses moyens de défense. Le moyen afférent du demandeur laisse partant d’être fondé.
En ce qui concerne la matérialité des faits reprochés au demandeur, il découle des pièces versées en cause et notamment des déclarations des témoins entendus lors de l’instruction disciplinaire et des attestations testimoniales de l’actuel directeur du LCE, du directeur adjoint, de l’ancien directeur et d’autres agents employés au LCE que notamment les faits suivants sont établis à suffisance de droit à l’égard du demandeur :
- les absences non autorisées de son poste de travail en date des 14 et 15 avril 2003, 15 et 17 juillet 2003, ainsi que 20 février 2004, 29 et 30 avril 2004.
Si le demandeur ne conteste pas en substance avoir été absent de la loge du concierge à des moments déterminés de la journée, il tente toutefois de justifier ces absences par le fait que sa tâche l’obligerait à s’absenter de sa loge pour procéder à l’ouverture des portes du lycée, respectivement par le fait que son service aurait été terminé. Or, les explications du demandeur, loin de justifier les absences de son poste de travail, confirment les absences retenues à sa charge, notamment pour ce qui est de son absence en date du 14 avril 2003 à partir de 15.30 heures, dès lors qu’il n’a pas établi qu’il bénéficiait à cette date d’une modification de son horaire de travail, telle qu’elle fut par la suite adoptée lors de la réunion de service du 12 mai 2003. De même, son affirmation selon laquelle il se serait absenté de sa loge le 15 avril 2003 à 14.45 heures, respectivement le 15 juillet 2003 à partir de 10.00 heures, le 17 juillet 2003 à partir de 14.00 heures, les 29 et 30 avril 2004 pour ouvrir des portes à des enseignants reste à l’état de simple allégation. Enfin, le demandeur n’a pas établi que le directeur actuel du LCE ait accepté le système de justifier les absences de la loge du concierge par des annotations au carnet de bord tenu dans ladite loge. Au contraire, il ressort d’un courrier du directeur du LCE en date du 12 septembre 2003, que celui-ni n’acceptait pas les notes au carnet de bord, ni les messages laissés sur la boîte vocale de son téléphone portable, de sorte que toutes les absences postérieures à cette date et pour lesquelles le demandeur prétend avoir laissé une note au carnet de bord respectivement un message sur la boîte vocale du téléphone portable du directeur sont à considérer comme absences non autorisées ;
- le fait de s’être présenté à son poste de travail en présentant des signes manifestes d’ébriété.
Il découle ainsi du rapport de l’instruction disciplinaire qui se base sur les dépositions de trois témoins, Messieurs B., F. et M., telles que confirmées par des attestations testimoniales afférentes, que le 19 février 2004, le demandeur s’est présenté vers la fin de son service dans sa loge en sous-vêtements, qu’il affichait des signes manifestes d’ébriété et qu’il a eu une attitude « agressive » à l’égard de Monsieur F.. Les explications du demandeur tendant à établir qu’il n’aurait pas été en sous-vêtement mais en jogging et que cela serait survenu en dehors de son service ne sont pas de nature à l’excuser de son comportement. Il ressort par ailleurs des attestations testimoniales de Messieurs N. et M. que le demandeur présentait également des signes manifestes d’ivresse le 30 avril 2004 vers 14.00 heures. Les explications justificatives du demandeur tendant à établir que ses problèmes seraient la conséquence d’un diabète et d’une tension élevée n’emportent pas la conviction du tribunal pour ne pas être plausibles. Le tribunal ne saurait pas non plus suivre le demandeur dans son affirmation qu’il aurait appartenu à son supérieur hiérarchique de le soumettre à un contrôle médical en vue de déterminer son taux d’alcoolémie, étant relevé qu’aucune disposition légale ou réglementaire n’investit un supérieur hiérarchique de pareil pouvoir ;
- le défaut d’avoir veillé à la fermeture des portes d’entrée et des fenêtres du LCE le samedi 14 juin 2003 à midi lors d’une tempête.
En effet, le demandeur ne saurait excuser sa négligence par le fait que tout le personnel et notamment les femmes de ménage disposeraient d’un jeu de clés, étant donné qu’il lui appartient avant d’aller déjeuner de s’assurer que toutes les portes et fenêtres du LCE soient fermées et ce d’autant plus en cas de tempête risquant de provoquer des dégâts ;
- un certain manque de politesse envers ses supérieurs hiérarchiques et notamment envers le directeur et le sous-directeur, ainsi que cela résulte de la déposition du directeur et de l’attestation testimoniale du sous-directeur du LCE, non utilement rencontrées par le demandeur ;
- l’emploi des femmes de ménage employées par le LCE pour nettoyer son logement de service pendant leurs heures de service en date du 3 septembre 2003.
L’explication du demandeur tendant à établir que son logement aurait été souillé à la suite de travaux effectués à l’initiative du LCE n’est pas de nature à justifier son comportement, étant donné que les travaux en question tels que se dégageant de la facture de l’entreprise B. S.àr.l. de Mertert n’ont pas pu provoquer d’énormes salissures ;
- l’hébergement d’une famille polonaise dans son logement de service.
L’affirmation du demandeur qu’il aurait ignoré le fait que ladite famille se trouvait en séjour irrégulier au pays n’enlève non seulement rien au fait qu’il les a hébergés, mais est également peu crédible eu égard aux liens existant entre le demandeur et cette famille dans la mesure où le demandeur affirme être le parrain du fils de la famille hébergée ;
- la non-participation à la réunion de service du 12 septembre 2003, sans excuse et sans être présent à son poste de travail.
L’explication justificative du demandeur consistant à soutenir qu’il n’aurait pas aperçu la convocation du 8 septembre 2003 pour ladite réunion n’est pas de nature à excuser son absence ;
- la remise au mois d’avril 2004 d’un jeu de serrures avec les clés correspondantes permettant notamment l’accès au secrétariat du LCE à un menuisier de l’entreprise G.
d’Echternach en contrepartie de 6 bouteilles d’eau-de-vie.
Dans ce contexte, la circonstance que le demandeur fait de ce chef l’objet de poursuites pénales n’est pas de nature à justifier sa demande tendant à ce que tribunal surseoit à statuer en attendant l’issue de l’instance pénale, étant donné que, quelle que soit l’issue de l’instance pénale, elle ne saurait influer sur la solution du présent litige. En effet, l’autonomie du droit disciplinaire par rapport au droit pénal et les caractères propres à la faute disciplinaire font que celle-ci est déterminée selon des critères qui sont différents de ceux qui permettent de définir l’infraction pénale. Il s’ensuit que la chose jugée par les tribunaux répressifs quant à la qualification juridique des faits reprochés est sans incidence à l’égard du juge administratif ;
- la facturation prohibée à une entreprise privée.
Le demandeur ne conteste pas en l’espèce de s’être fait payer par les organisateurs de festivités au LCE, mais affirme que cette pratique aurait été acceptée par le directeur précédent du LCE et qu’il aurait redistribué les sommes reçues entre les autres personnes présentes lors de ces festivités. Or, ainsi que cela ressort de la déposition sous serment de l’ancien directeur du LCE, Monsieur F. B., celui-ci n’était pas au courant de cette pratique, affirmant au contraire qu’il était convenu avec le demandeur de compenser les heures de travail supplémentaires prestées lors de ces festivités par des jours de congé supplémentaires ;
- la signature d’une fiche de travail de la société B. S.àr.l. de Mertert en date du 5 septembre 2003, malgré une interdiction afférente de la direction, telle qu’arrêtée lors de la réunion de service du 12 mai 2003 ;
- le fait d’avoir laissé circuler son chien dans la cour du LCE en date du 2 juillet 2004, l’explication fournie par le demandeur tendant à établir que le chien serait de petite taille et qu’il se serait échappé de sa loge, n’est pas de nature à excuser cet incident, étant donné qu’il n’appartenait en tout état de cause pas au demandeur de tenir un chien dans sa loge ;
- la sortie non autorisée durant son congé de maladie le 3 mai 2004, la simple contestation du demandeur étant insuffisante eu égard à l’attestation testimoniale du directeur du LCE du 1er février 2006 ;
- la violation de l’article 17 du règlement grand-ducal précité du 22 août 1985.
Si le demandeur ne conteste pas les absences telles qu’elles ont été énumérées dans le rapport d’instruction, soit 89,5 jours d’absence s’étalant sur toute l’année 2003, il affirme toutefois avoir informé la direction de ses absences par le biais de notes laissées au carnet de bord. S’il ressort effectivement de la déposition de Monsieur J. S.-G. devant le Conseil de discipline que sous le régime de l’ancien directeur, Monsieur F. B., le demandeur s’occupait lui-même de ses congés, il restait néanmoins soumis à l’obligation de se conformer aux formalités prescrites par le prédit article 17 en cas de maladie. S’y ajoute que sous le régime du directeur actuel, Monsieur H. T., et au plus tard à partir de la réunion de service du 12 mai 2003, toute absence notamment pour raisons de santé était « à signaler personnellement à un membre de la direction et cela dans les meilleurs délais », ainsi que cela ressort du procès-
verbal de ladite réunion. Le demandeur n’a pas non plus contesté le reproche de ne pas avoir déclaré 16 jours d’absence sur la fiche relative à l’allocation de repas.
Il découle des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le Conseil de discipline a retenu à charge de Monsieur … une violation des articles 9 point 1 (obligation de remplir les devoirs de sa charge et devoir d’obéissance hiérarchique), 10, points 1 et 3 (devoir de bonne conduite et interdiction de recevoir des avantages matériels illicites), 12, point 1 (interdiction de quitter son lieu de travail) du statut général, ainsi que de l’article 17 du règlement grand-ducal précité du 22 août 1985 pour justifier la sanction prononcée à son encontre.
Il convient ensuite d’examiner le deuxième moyen du demandeur tiré de ce que la sanction prononcée serait injustifiée et disproportionnée par rapport aux faits retenus à sa charge.
Aux termes de l’article 53, alinéa 1er du statut général, « l’application des sanctions se règle notamment d’après la gravité de la faute commise, la nature et le grade des fonctions et les antécédents du fonctionnaire inculpé ».
Dans le cadre d’un recours en réformation, le tribunal est amené à apprécier les faits commis par le demandeur en vue de déterminer si la sanction prononcée par l’autorité compétente a un caractère proportionné et juste, en prenant notamment en considération la situation personnelle et les antécédents éventuels du demandeur (cf. trib. adm. 1er juillet 1999, n° 10936 du rôle, Pas. adm. 2005, V° Fonction publique n° 157).
Il est constant en cause d’après les pièces du dossier que le demandeur est entré au service de l’Etat en 1979, qu’il a été admis par arrêté ministériel du 14 juin 1989 au stage de garçon de salle au LCE, fonction à laquelle il a été définitivement nommé par arrêté ministériel du 28 juin 1991 et que par arrêté ministériel du 29 juillet 1994, il a été nommé concierge au LCE à partir du 1er septembre 1994. Il n’est pas non plus contesté que le demandeur est classé au grade 3 à l’échelon 12, ainsi que cela ressort du rapport d’instruction disciplinaire.
Comme toutefois aucune procédure disciplinaire formelle n’a été intentée antérieurement contre le demandeur, et comme il ne semble pas avoir fait l’objet de reproches disciplinaires par le passé, et compte tenu de son grade et de son ancienneté, la sanction de la mise à la retraite d’office pour inaptitude professionnelle et disqualification professionnelle, qui constitue une des sanctions les plus graves prévues par l’article 47 du statut général, apparaît disproportionnée par rapport aux faits commis, notamment dans la mesure où du fait de cette mesure, le demandeur perd non seulement son emploi, mais également le droit à la pension avant l’âge de 65 ans. Le tribunal arrive à la conclusion que la sanction de l’exclusion temporaire des fonctions avec privation totale de la rémunération, pour une période de trois mois est appropriée par rapport aux faits de l’espèce.
Il y a partant lieu à réformation de la décision du Conseil de discipline du 21 juin 2005 et de décider, qu’avec effet à partir de la date du 1er juillet 2005, le demandeur est à exclure temporairement de ses fonctions avec privation totale de la rémunération, pour une période de trois mois.
Au dispositif de son recours, le demandeur sollicite encore, en application de l’article 35 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives « l’effet suspensif du recours contre un jugement confirmatif pendant le délai et l’instance d’appel, le tout au regard du préjudice grave et définitif que créerait l’exécution de la décision attaquée ».
En l’espèce, le tribunal est amené à retenir que, d’une part, du point de vue de la décision déférée et plus particulièrement des effets par elle produits, et, d’autre part, dans la mesure où la décision litigieuse encourt partiellement la réformation, l’effet suspensif est susceptible d’être ordonné par le tribunal sur base de l’article 35 de la loi précitée du 21 juin 1999.
Il convient toutefois encore d’examiner si la seconde condition posée par ledit article 35 et tenant au risque du préjudice grave et définitif susceptible d’être causé au demandeur à travers la décision litigieuse est vérifiée en l’espèce.
Or, si l’exécution de la décision déférée est certes de nature à causer au demandeur un préjudice grave, étant donné qu’il se retrouve sans emploi et sans rémunération, le préjudice n’est cependant pas définitif, étant donné qu’il s’agit en l’occurrence d’un préjudice essentiellement pécuniaire résultant de la perte de traitement qui n’est pas difficilement réparable.
Les conditions d’application de l’article 35 n’étant pas toutes remplies, la mesure sollicitée tendant à voir accorder l’effet suspensif du recours est partant à rejeter.
Le demandeur est encore à débouter de sa demande tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure de 1.000.- euros au vu de l’issue du litige, étant donné que les conditions d'application de l'article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ne sont pas remplies.
Au vu de la solution du litige, les frais de la présente instance sont à laisser intégralement à charge du demandeur.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
déclare le recours en réformation irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre l’arrêté ministériel du 28 juin 2005 ;
pour le surplus, reçoit le recours en réformation en la forme ;
rejette la demande tendant au sursis à statuer comme non fondée ;
au fond, déclare le recours partiellement justifié, partant par réformation de la décision du Conseil de discipline du 21 juin 2005, prononce à l’encontre de Monsieur … la sanction disciplinaire de l’exclusion temporaire des fonctions avec privation totale de la rémunération, pour une période de trois mois, avec effet au 1er juillet 2005 ;
renvoie le dossier au ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle pour prosécution ;
déclare le recours subsidiaire en annulation irrecevable ;
rejette la demande en obtention de l’effet suspensif pendant le délai et l’instance d’appel ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par:
M. Schockweiler, premier vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 22 mai 2006 par le premier vice-président, en présence de M. Legille, greffier.
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