La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/03/2006 | LUXEMBOURG | N°20666

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 mars 2006, 20666


Tribunal administratif N° 20666 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 novembre 2005 Audience publique du 13 mars 2006 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 20666 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 novembre 2005 par Maître Chris SCOTT, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Tanzanie), de nationali

té tanzanienne, déclarant élire domicile en l’étude de Maître SCOTT, tendant à l’annulati...

Tribunal administratif N° 20666 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 novembre 2005 Audience publique du 13 mars 2006 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 20666 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 novembre 2005 par Maître Chris SCOTT, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Tanzanie), de nationalité tanzanienne, déclarant élire domicile en l’étude de Maître SCOTT, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 2 septembre 2005 lui refusant l’entrée et le séjour au Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 19 décembre 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 6 mars 2006, Maître Chris SCOTT et Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline JACQUES s’étant rapportés aux écrits de leurs parties.

En date du 5 mars 2001, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève.

Par une décision du 21 octobre 2003, confirmée le 8 décembre 2003, le ministre de la Justice refusa à Monsieur … le statut de réfugié.

Par un arrêt du 7 octobre 2004 (n° du rôle 18184C) la Cour administrative a confirmé un jugement du tribunal administratif du 12 mai 2004 (n° du rôle 17429) déclarant le recours introduit par Monsieur … à l’encontre la décision ministérielle lui refusant le statut de réfugié non fondé.

Le 28 octobre 2004, l’association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI) introduisit auprès du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration une demande tendant à l’obtention d’une autorisation de séjour pour raisons humanitaires en faveur de Monsieur … au motif qu’au vu de la situation actuelle en Tanzanie, il serait impossible de le renvoyer dans son pays d’origine et qu’il serait capable de s’intégrer sur le marché du travail luxembourgeois, une fois en possession d’une autorisation de séjour.

Le 6 janvier 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration refusa l’autorisation de séjour à Monsieur … aux motifs qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels suffisants et que, par ailleurs, il n’a pas fait état de raisons humanitaires justifiant dans son chef l’octroi d’une autorisation de séjour.

Par requête déposée en date du 24 février 2005 au greffe du tribunal administratif, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision ministérielle du 6 janvier 2005.

Par jugement du 8 juin 2005 (n°19365 du rôle), confirmé par un arrêt de la Cour administrative datant 29 novembre 2005 (n°20059 du rôle), il fut débouté de sa demande en obtention d’une autorisation de séjour.

En date du 26 juillet 2005, Monsieur … reçut une lettre de la part du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’invitant à quitter volontairement le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, dans la mesure où il a été définitivement débouté de sa demande d’asile et que tous les moyens de recours y relatifs seraient épuisés.

Le mandataire de Monsieur … informa le ministre en date du 1er août 2005 de ce qu’il avait introduit une demande en obtention d’une autorisation de séjour en faveur de son client et que l’affaire serait actuellement pendante devant la Cour administrative, de sorte que toutes les voies de recours ne seraient pas encore épuisées.

En vertu des dispositions de l’article 2 de la loi du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers, le ministre refusa, par arrêté du 2 septembre 2005, l’entrée et le séjour à Monsieur … aux motifs qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels, qu’il est dépourvu du visa requis et qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays.

Par requête déposée en date du 18 novembre 2005, Monsieur … fit introduire un recours en annulation à l’encontre de la décision ministérielle précitée du 2 septembre 2005.

Le délégué du Gouvernement soulève en premier lieu l’irrecevabilité du recours pour libellé obscur, en soutenant qu’il serait « difficile de saisir quel moyen d’annulation est invoqué et contre quelle décision ».

L’action susceptible d’être portée devant le tribunal administratif n’est pas dirigée contre les personnes ou autorités auteurs de la décision entreprise, mais contre l’acte attaqué en tant que tel. Pour que le tribunal soit saisi valablement d’un recours contre une décision administrative, il suffit que l’acte attaqué soit identifié dans la requête avec toute la précision voulue (cf. trib. adm. du 30 juillet 1997, n° 9937 du rôle, Pas. adm. 2005, V° Procédure contentieuse, n° 230).

En l’espèce, force est de constater que la demande formulée au dispositif de la requête introductive d’instance de voir dire fondée le recours et partant, annuler « la décision a quo », doit être entrevue en combinaison avec l’indication précise dans le corps de la requête introductive de la décision du 2 septembre 2005 portant refus d’entrée et de séjour au demandeur, suivie de la mention que le présent recours est dirigé contre cette décision, de sorte que le tribunal est amené à retenir que le recours en annulation introduit par la partie demanderesse est utilement dirigé contre la décision ministérielle du 2 septembre 2005. Le recours n’encourt dès lors pas l’irrecevabilité pour désignation insuffisante de la décision déférée.

En ce qui concerne le moyen d’irrecevabilité se rapportant aux moyens d’annulation invoqués à l’appui du recours, il y a lieu de retenir que conformément aux dispositions de l’article 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, la requête introductive d’instance doit contenir notamment l’exposé sommaire des faits et des moyens invoqués. Il appartient à cet égard au tribunal saisi d’apprécier in concreto si l’exposé sommaire des faits et des moyens, ensemble les conclusions s’en dégageant, est suffisamment explicite ou non.

Force est de constater en l’espèce que le demandeur conclut à l’annulation de la décision litigieuse, d’une part, pour erreur manifeste d’appréciation des faits, alors qu’une procédure, en matière d’autorisation de séjour, serait encore en cours et, d’autre part, que la situation actuelle en Tanzanie ne permettrait pas un rapatriement du demandeur, de sorte que le ministre devrait lui accorder une autorisation de séjour « jusqu’à l’amélioration de la situation en Tanzanie ». Il est vrai qu’en l’espèce, la requête introductive d’instance ne précise pas quelle disposition légale ou réglementaire aurait été violée par le ministre compétent. Toutefois, il se dégage des développements faits par le mandataire du demandeur dans la requête introductive, que celui-ci reproche au ministre compétent d’avoir commis une erreur d’appréciation des éléments qui lui ont été soumis et qui auraient dû aboutir à la reconnaissance dans son chef d’une autorisation de séjour pour raisons humanitaires. D’ailleurs, le délégué du Gouvernement ne s’est pas mépris sur l’objet et les moyens du recours, dans la mesure où il a pu prendre position, en connaissance de cause, quant au fond, pour justifier le bien-fondé de la décision ministérielle critiquée.

Il s’ensuit que le moyen d’irrecevabilité est à déclarer non fondé.

A titre subsidiaire, le représentant étatique conclut à l’irrecevabilité du recours, dans la mesure où il y aurait identité d’objet entre cette affaire et l’affaire en matière d’autorisation de séjour pourtant définitivement toisée par l’arrêt de la Cour administrative du 29 novembre 2005. Il estime dès lors que le présent recours remet clairement en question l’autorité de la chose jugée.

Il est constant que le demandeur avait engagé une procédure en obtention d’une autorisation de séjour en date du 28 octobre 2004. Le ministre refusa définitivement l’autorisation au demandeur en date du 6 janvier 2005, décision à l’encontre de laquelle le mandataire du demandeur introduisit un recours devant le tribunal administratif. Au jour de l’introduction du présent recours, l’appel devant la Cour administrative était encore pendant. Force est cependant de constater que l’appel n’a pas d’effet suspensif et que le ministre pouvait soit prendre une nouvelle décision soit confirmer son refus antérieur.

Il convient en l’espèce d’analyser la nature de la décision du 2 septembre 2005, qui est intervenue, sans que le demandeur ait adressé une nouvelle demande en obtention d’une autorisation de séjour au ministre.

Il ne s’agit pas d’une nouvelle décision si elle confirme purement et simplement la décision antérieure. Il en est autrement dans l’hypothèse où la décision confirmative est basée au moins partiellement sur des éléments nouveaux à l’égard desquels l’administration prend position. (cf. trib. adm. 18 juin 1997, n°9458 du rôle, Pas. adm.

2005, V° Procédure contentieuse, n° 113 et autres références y citées).

Il résulte de l’exposé des faits ci-avant repris que la décision du 2 septembre 2005 repose sur un même fondement juridique, ainsi qu’en substance sur les mêmes considérations en fait que celle invoquées à l’appui de la demande initiale du 28 octobre 2004. Il ne s’agit dès lors pas d’une nouvelle décision reposant sur des circonstances nouvelles susceptibles de lui ôter son caractère purement confirmatif, mais de la réitération de la précédente décision de refus, de sorte que le délégué du Gouvernement a valablement pu conclure à l’irrecevabilité du recours sous examen.

Il se dégage de l’ensemble des éléments qui précèdent que la décision ministérielle litigieuse ne fait que confirmer purement et simplement la décision antérieure définitivement toisée par le ministre en date du 6 janvier 2005, confirmée par la suite par un arrêt de la Cour administrative, de sorte à ne pas avoir ouvert de nouveau délai de recours contentieux en l’espèce. Le recours sous examen est partant irrecevable ratione temporis.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais, Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 13 mars 2006 par :

Mme Lenert, vice président, Mme Lamesch, premier juge, M. Sünnen, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 20666
Date de la décision : 13/03/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2006-03-13;20666 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award