La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/11/2005 | LUXEMBOURG | N°20013

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 novembre 2005, 20013


Numéro 20013 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 juin 2005 Audience publique du 23 novembre 2005 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------


JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 20013 du rôle, déposée le 27 juin 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Nicky STOFFEL, avocat

à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …...

Numéro 20013 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 juin 2005 Audience publique du 23 novembre 2005 Recours formé par Monsieur …, Schrassig contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 20013 du rôle, déposée le 27 juin 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Libéria), de nationalité libérienne, actuellement détenu au Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 21 avril 2005 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 24 mai 2005 prise sur recours gracieux;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le12 octobre 2005;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport à l’audience publique du 21 novembre 2005, Maître Nicky STOFFEL, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH s’étant rapportés aux écrits respectifs de leur partie.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Le 25 mars 2004, Monsieur …, préqualifié, introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

En date du même jour, Monsieur … fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Il fut entendu en date du 2 juin 2004 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile. Il fut encore entendu en date du 12 avril 2005 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration, entre-temps en charge du dossier, afin de découvrir son identité réelle, alors qu’il résulte de recherches effectuées par la police judiciaire que Monsieur … serait encore connu sous le nom de …, né en Gambie, …, né en Guinée, … , né à Sembehun (?) et ….

En date du 24 novembre 2004, le demandeur fut condamné par jugement du tribunal d’arrondissement, siégeant en matière correctionnelle, à une peine d’emprisonnement de 30 mois ainsi qu’à une amende de 3.000 Euro pour infraction à la loi sur les stupéfiants. Ce jugement fut confirmé par un arrêt de la Cour d’appel, siégeant en matière correctionnelle, datant du 10 mai 2005.

Par décision datant du 21 avril 2005, lui notifiée en mains propres le 27 avril 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’informa de ce que sa demande avait été rejetée comme étant non fondée au sens de l’article 11 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, au motif qu’il ne ferait valoir aucune crainte raisonnable de persécution pour une des raisons prévues par la Convention de Genève.

Suite à un recours gracieux formulé par lettre du 19 mai 2005 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prit une décision confirmative le 24 mai 2005, notifiée à Monsieur … en date du 31 mai 2005.

Monsieur … a fait introduire par requête déposée en date du 27 juin 2005 un recours contentieux tendant à la réformation sinon à l’annulation des décisions ministérielles précitées.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1.

d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, le tribunal est compétent pour connaître en tant que juge du fond de la demande introduite contre les décisions ministérielles déférées. Le recours en réformation ayant été introduit par ailleurs dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Le recours subsidiaire en annulation est partant irrecevable.

A l’appui de son recours, le demandeur affirme avoir été persécuté au courant de l’année 2004 au Libéria par des rebelles appelés « LURD ». Il aurait été menacé de mort au cas où il ne joignerait pas ce mouvement, mais il aurait néanmoins réussi à échapper à ce mouvement, de sorte qu’il serait actuellement considéré comme déserteur risquant d’être tué en cas de retour dans son pays.

Il estime en conséquence qu’il devrait bénéficier du statut de réfugié.

Le délégué du Gouvernement estime pour sa part que le ministre a fait une saine appréciation de la situation et de la crédibilité du demandeur, de sorte que celui-ci serait à débouter de son recours.

Le délégué du Gouvernement relève en particulier le défaut de crédibilité du récit du demandeur, en soulignant que le demandeur serait connu des autorités françaises, allemandes, suisses et espagnoles, sous d’autres identités que celle déclarée au Luxembourg.

Le tribunal tient à relever à titre liminaire qu’il ressort en effet tant de la décision ministérielle du 21 avril 2005 que du mémoire en réponse de la partie étatique ainsi que du dossier administratif, et plus particulièrement d’un rapport de la police judiciaire, basé sur des recherches INTERPOL, que le dénommé … se trouvait sous une autre identité , à savoir … , né le … , et … , né le … , en France, où il fut interpellé le 24 mai 2002 ainsi que le 10 mars 2004 pour immigration clandestine, et qu’il aurait encore séjourné auparavant en Allemagne et en Suisse entre juin 2000 et 2001, sous le couvert d’autres identités, où il fut interpellé pour trafic de stupéfiants. Il résulte encore d’un écrit émanant du demandeur qu’il résidait en 1999 en Espagne où il aurait bénéficié d’une carte de résident au nom de … , né le ….

Force est au tribunal de constater que le demandeur se prévaut, tant dans le cadre de la procédure administrative que de la procédure contentieuse, de faits, qualifiés de persécutions au sens de la Convention de Genève, qui auraient justifié sa fuite vers l’Europe en mars 2004, c’est-à-dire à une époque où il résidait d’ores et déjà en Europe, et plus précisément en France.

Il est encore constant que le demandeur, confronté au rapport de police précité, n’a pas fourni d’explications y relatives, sauf à préciser par un écrit établi en date du 22 août 2005, qu’il aurait résidé en 1999 en Espagne, son mandataire restant en défaut de fournir la moindre explication relative à la contradiction flagrante afférente relevée par le délégué du Gouvernement.

Or, il appartient à un demandeur d’asile, à défaut de pièces, de présenter du moins un récit crédible et cohérent. En l’espèce cependant, à partir des éléments ci-avant relatés, à savoir du caractère manifestement incrédible du récit du demandeur, constellé d’incohérences et de contradictions, le tribunal est amené à constater que les déclarations et le récit du demandeur n’emportent pas sa conviction quant aux persécutions ou craintes de persécutions alléguées, de sorte que le ministre a valablement pu retenir que le demandeur n’a pas fait état, de façon crédible, de persécutions vécues ou de craintes au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.

Partant, le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 23 novembre 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 24.11.2005 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 20013
Date de la décision : 23/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-11-23;20013 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award