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23/11/2005 | LUXEMBOURG | N°19831

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 novembre 2005, 19831


Tribunal administratif N° 19831 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 mai 2005 Audience publique du 23 novembre 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Transports en matière de permis à points

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19831 du rôle et déposée le 20 mai 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation, sinon à la réf

ormation d’une décision du ministre des Transports du 20 avril 2005, l’informant que 2 points...

Tribunal administratif N° 19831 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 mai 2005 Audience publique du 23 novembre 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Transports en matière de permis à points

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19831 du rôle et déposée le 20 mai 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation, sinon à la réformation d’une décision du ministre des Transports du 20 avril 2005, l’informant que 2 points ont été retirés du capital dont est doté son permis de conduire en raison d’un avertissement taxé dressé pour une infraction au code de la route ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 18 août 2005 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 10 octobre 2005 par Maître Fernand ENTRINGER pour compte de Monsieur … ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Françoise EBERHARD et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

Par courrier recommandé du 20 avril 2005, le ministre des Transports, ci-après désigné par le « ministre », informa Monsieur …, préqualifié, de ce qui suit :

« Monsieur, Conformément aux dispositions légales régissant le permis à points, je tiens à vous informer que 2 points ont été retirés du capital dont est doté votre permis de conduire pour l’infraction suivante au Code de la Route.

Libellé de l’infraction :

Inobservation de la limite de vitesse de 90 km/h à l’extérieur d’une agglomération par un autre véhicule – le dépassement étant supérieur à 20 km/h Nombre de points déduits : 2 Date du fait :

14.04.2005 08 :55 Lieu du fait :

BUEDERSCHEID Date du paiement :

14.04.2005 N15 Nombre de points restants : 10 Une reconstitution de 3 points pourra vous être accordée, une fois dans un délai de trois ans, après avoir participé à un cours de formation complémentaire au Centre de Formation pour Conducteurs à Colmar-Berg (…) sans que pour autant le capital de points de votre permis de conduire puisse excéder 12 points.

La présente est susceptible d’un recours en annulation devant le Tribunal administratif, à exercer par le ministère d’avocat inscrit endéans les trois mois à partir du jour de la notification de la présente.

Veuillez agréer, …. ».

Par requête déposée en date du 20 mai 2005, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation, sinon à la réformation de la décision ministérielle prévisée du 20 avril 2005.

Une décision du ministre des Transports ayant pour objet de retirer le nombre de points prévu par la loi s’analyse en une décision administrative (cf. doc. parl. 4712, relatif au projet de loi modifiant la loi du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques, page 16 et s.), de sorte que le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours introduit.

Encore que le demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation contre la décision critiquée, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision.

Aucune disposition légale ne conférant compétence à la juridiction administrative pour statuer comme juge du fond en la matière, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître de la demande en réformation de la décision critiquée.

Le recours en annulation est cependant recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur fait valoir que la décision critiquée du 20 avril 2005 n’aurait été précédée d’aucune information préalable lui indiquant l’intention de l’administration de lui enlever des points du capital dont est doté son permis de conduire, ce qui serait contraire à l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes. Pour le surplus, Monsieur … conteste avoir dépassé la vitesse maximale autorisée de plus de 20 km/h et il affirme que les agents verbalisants seraient dans l’impossibilité de prouver pareil dépassement de vitesse.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement soutient que Monsieur … aurait été informé au préalable du retrait de points engendré par l’infraction relevée à son encontre, étant donné que l’avertissement taxé indiquerait le nombre de points à retirer et que par l’apposition de sa signature, le demandeur aurait reconnu avoir été avisé de la réduction de points résultant de l’application dudit avertissement taxé. Pour le surplus, l’article 4bis du règlement grand-ducal modifié du 26 août 1993 relatif aux avertissements taxés, aux consignations pour contrevenants non résidents ainsi qu’aux mesures d’exécution de la législation en matière de mise en fourrière des véhicules et en matière de permis à points n’exigerait pas que le contrevenant recopie à la main les mots « lu et approuvé » imprimés sur le formulaire de l’avertissement taxé et la réduction du nombre de points dont été doté le permis de conduire interviendrait de plein droit au moment du paiement de l’avertissement taxé. A partir du moment où la réalité d’une infraction serait établie en conformité avec les dispositions légales, le ministre procéderait à une réduction conséquente du nombre de points sans disposer de marge d’appréciation quant aux conditions ayant conduit à l’avertissement taxé.

Dans son mémoire en réplique, Monsieur … conteste formellement que par l’apposition de sa signature sur l’avertissement taxé il aurait reconnu « quoi que ce soit ». De même, le demandeur affirme que la mention « lu et approuvé » ne serait d’aucune valeur et qu’il n’aurait pas été informé de façon correcte préalablement à l’enlèvement des points dont est doté son permis. Dans ce contexte, Monsieur … relève que l’avertissement taxé litigieux serait très illisible et que la rubrique « nature de l’infraction » serait indéchiffrable, de sorte qu’il aurait ignoré « quelle infraction on lui reprochait d’avoir commise » et que partant la décision ministérielle critiquée serait à annuler.

Concernant en premier lieu le reproché tiré de la violation alléguée de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, il convient de noter, d’une part, que la matière spécifique du retrait de points du capital de points d’un permis de conduire est régie par les dispositions inscrites à la loi du 2 août 2002 modifiant la loi du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques, respectivement par le règlement grand-ducal du 26 août 1993 relatif aux avertissements taxés, aux consignations pour contrevenants non résidents ainsi qu’aux mesures d’exécution de la législation en matière de mise en fourrière des véhicules et en matière de permis à points, tel que modifié par règlement grand-ducal du 2 août 2002, c’est-à-dire des disposition légales et réglementaires spéciales postérieures au règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, et, d’autre part, qu’une mesure de retrait de points du capital de points dont est affecté un permis de conduire est prise dans un but d’intérêt général et de maintien de l’ordre public et n’est partant pas conciliable avec les exigences d’information préalable de l’administré, telles qu’inscrites audit article 9.

Il s’ensuit que le moyen tiré d’une violation de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, laisse d’être fondé.

L’article 2bis de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques, telle qu’elle a été modifiée en dernier lieu par la loi du 2 août 2002, dispose notamment que :

« (…) La réduction de points suite à un avertissement taxé a lieu au moment du paiement de la taxe. Avant de décerner un avertissement taxé en relation avec une contravention donnant lieu à une réduction de points, le membre de la police grand-ducale ou de l’administration des douanes et accises avise le contrevenant de la réduction de points qu’entraîne le règlement de cet avertissement taxé. Les modalités de cette information sont arrêtées par règlement grand-

ducal.

Lorsque la réalité d’une infraction entraînant une perte de points est établie dans les conditions qui précèdent, le ministre des Transports fait procéder à une réduction conséquente du nombre de points dont le permis de conduire de l’auteur de l’infraction se trouve en ce moment affecté.

Toute réduction de points donne lieu à une information écrite de l’intéressé sur la ou les infractions à l’origine de la réduction de points, ainsi que sur le nombre de points dont le permis de conduire concerné reste affecté. Les modalités de cette information sont arrêtées par règlement grand-ducal ».

Concernant plus particulièrement les modalités de cette information, l’article 4bis 1. du règlement grand-ducal modifié du 26 août 1993, précité, dispose que « lorsque le paiement de l’avertissement taxé est susceptible d’entraîner une réduction des points, le membre de la police grand-ducale ou de l’administration des douanes et accises informe le contrevenant de la réduction de points qu’entraîne le règlement de la taxe. Il fait en outre signer par celui-ci la déclaration sur les formules spéciales publiées en annexe du présent règlement moyennant laquelle le contrevenant déclare avoir été avisé dans les termes de la loi de la réduction de points résultant de l’application de l’avertissement taxé en cause, la formule étant complétée par les mots « lu et approuvé » ».

S’il y a certes lieu d’admettre à partir du libellé ainsi retenu que l’apposition de la mention « lu et approuvé » est destinée à assurer que le signataire de l’avertissement taxé saisit la portée de son engagement, il n’en demeure cependant pas moins que l’apposition de cette formule n’est pas une fin en soi, mais constitue un élément de preuve de nature à écarter tout doute quant à la prise de connaissance effective par l’intéressé des conséquences du paiement en matière de retrait de points à intervenir.

En l’espèce, il se dégage des pièces versées au dossier que le demandeur a apposé sa signature sur la formule spéciale afférente prévue sur l’avertissement taxé même, laquelle comporte l’information que le contrevenant était avisé dans les termes de la loi de la réduction de points résultant de l’application de l’avertissement taxé en question.

Il se dégage du libellé de l’article 2bis de la loi modifiée du 14 février 1955 précitée que la réduction de points est une mesure administrative qui intervient de plein droit, chaque fois que les conditions d’application en sont réunies. C’est la raison pour laquelle l’information du conducteur relative à l’existence de la réduction des points et au nombre afférent est substantielle afin de garantir ses droits, cette information devront par ailleurs être préalable afin de mettre le conducteur en mesure de payer et de signer l’avertissement taxé en connaissance de cause.

Le paiement de la taxe dans un délai de 45 jours, à compter de la constatation de l’infraction, s’analyse en effet en une transaction, laquelle a pour effet d’arrêter toute poursuite avec, comme corollaire, la conséquence d’enlever au conducteur la possibilité de voir contrôler devant le juge pénal, seul compétent à cet égard, la réalité des faits à l’origine de l’infraction en cas de contestation.

Il se dégage des considérations qui précèdent que lorsque le conducteur a été informé en bonne et due forme de la réduction de points encourue en cas de paiement de l’avertissement taxé, le paiement de la somme due est à lui seul suffisant pour déclencher la réduction afférente au nombre de points affectés au permis de conduire, cette réduction intervenant en effet de plein droit.

Cette conclusion n’est pas énervée par les considérations tenant à l’ignorance de Monsieur … quant à la nature de l’infraction commise et à la réalité du dépassement de la vitesse autorisée de plus de 20 km/h, étant donné que le paiement de l’avertissement taxé a pour effet de mettre fin à toute possibilité de voir contrôler la réalité des faits à l’origine de l’infraction et les autres éléments constitutifs et que le retrait de points est un acte administratif à compétence liée rattaché à la seule existence d’un avertissement taxé acquitté par le contrevenant.

Le demandeur ne saurait pas non plus être suivi en ses contestations relatives au caractère lisible de l’avertissement taxé établi en date du 14 avril 2005 et aux informations suffisantes fournies par l’agent verbalisant au moment de décerner ledit avertissement taxé, étant donné que l’avertissement litigieux comporte, d’une part, dans la rubrique « nature de l’infraction » la mention « inobservation de la limite de vitesse » suivie du code de l’infraction constatée et, d’autre part, le nombre de points à retirer en raison de ladite infraction. A cela s’ajoute que par le fait non-contesté d’avoir signé ledit avertissement taxé, Monsieur … a précisément acquiescé avoir « été avisé dans les termes de la loi de la réduction de points résultant de l’application du présent avertissement taxé ». Or, en l’absence de toute précision susceptible d’établir un manque de discernement dans son chef, voire une absence du sens des responsabilités ayant pu justifier l’apposition de sa signature sans pour autant avoir assimilé le sens de la phrase précédant l’endroit d’apposition de sa signature et comme le demandeur ne conteste pas non plus que le nombre de points à retirer figurait sur ledit avertissement taxé, le moyen afférent du demandeur n’est pas de nature à affecter la régularité de la décision litigieuse.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours subsidiaire en réformation ;

reçoit le recours principal en annulation en la forme ;

au fond le dit non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président M. Spielmann, juge Mme Gillardin, juge et lu à l’audience publique du 23 novembre 2005 par le vice-président en présence de M. Legille, greffier.

Legille Campill 6


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19831
Date de la décision : 23/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-11-23;19831 ?

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