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15/11/2005 | LUXEMBOURG | N°20158C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 novembre 2005, 20158C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 20158C Inscrit le 25 juillet 2005

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Audience publique du 15 novembre 2005 Recours formé par …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 27 juin 2005, no 19288 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour adminis...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 20158C Inscrit le 25 juillet 2005

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Audience publique du 15 novembre 2005 Recours formé par …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 27 juin 2005, no 19288 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 25 juillet 2005 par Maître Frank Wies, avocat à la Cour, au nom d’…, né le … (Kosovo/Etat de Serbie-et-Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 27 juin 2005, à la requête de l’actuel appelant tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration intervenue le 22 novembre 2004 rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, telle que cette décision a été confirmée par ledit ministre en date du 7 janvier 2005 suite à un recours gracieux du demandeur.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 3 août 2005 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et le délégué du Gouvernement Gilles Roth en ses observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 19288 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 9 février 2005 par Maître Frank Wies, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, …, né le … (Kosovo/Etat de Serbie-et-Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration intervenue le 22 novembre 2004 rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, telle que cette décision a été confirmée par ledit ministre en date du 7 janvier 2005 suite à un recours gracieux du demandeur.

Le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 27 juin 2005, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Frank Wies, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 25 juillet 2005.

L’appelant reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause, alors que ce serait à tort que ceux-ci ont considéré que l'actuel appelant serait resté en défaut d'établir une impossibilité de trouver refuge dans une autre ville du Kosovo dans la mesure où les persécutions dont il a fait l'objet aurait été territorialement limitées.

En premier lieu, il faudrait constater que les évènements du 17 mars 2004 avaient touché toute la province du Kosovo tel qu'il résulterait du rapport de l'UNHCR du 30 mars 2004 que l'actuel appelant avait versé à l'appui de son recours en réformation du 9 février 2005.

Dans la mesure où … aurait subi à Skenderaj de graves persécutions sous forme de coups et blessures pour avoir fait usage de son droit à la liberté d'expression et pour s'être opposé à des persécutions pour raisons religieuses, il risquerait de subir le même sort dans n'importe quelle autre ville du Kosovo.

La seule solution consisterait à se taire et de la sorte devoir renoncer à exprimer ouvertement son opinion à l'égard des persécutions ethniques et religieuses.

Dans cette hypothèse, on ne saurait cependant parler d'une possibilité raisonnable de fuite interne alors qu'il devrait renoncer à l'exercice d'un droit fondamental : la liberté d'expression.

En tout état de cause, il faudrait constater que la province du Kosovo, en raison de la situation de sécurité très précaire qui y règne, ne constituerait pas une alternative raisonnable de fuite interne.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 3 août 2005 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.

L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, précise que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur 2 d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à juste titre que le tribunal administratif a retenu que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de ses auditions, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, l’amène à conclure qu’… reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En effet, une crainte de persécution doit reposer nécessairement sur des éléments suffisants desquels il se dégage que, considéré individuellement et concrètement, le demandeur d’asile risque de subir des persécutions et force est de constater, comme l’ont fait à bon escient les premiers juges, que l’existence de pareils éléments ne se dégage pas des éléments d’appréciation soumis, alors que le récit du demandeur, qui n’est pas membre d’une minorité du Kosovo, mais fait partie de la majorité albanaise du Kosovo, le fait qu’il soit issu d’une famille mixte, le père étant musulman, la mère catholique, n’ayant qu’une incidence limitée dans sa ville d’origine, traduit tout au plus un sentiment général d’insécurité, sans qu’il n’ait fait état d’une persécution personnelle vécue ou d’une crainte qui serait telle que la vie lui serait, à raison, intolérable dans son pays d’origine.

C’est encore à juste titre que les premiers juges ont précisé dans ce contexte que le fait d’avoir été victime de menaces et de coups et blessures de la part de membres de la communauté musulmane, en raison de la manifestation de son opposition contre la destruction d’églises catholiques, à l’admettre comme étant vrai, ne saurait suffire à lui seul pour justifier un risque de persécution au sens de la Convention de Genève dans le chef du demandeur en raison du champ d’action territorialement limité des prétendus agresseurs, le demandeur ne justifiant pas l’existence d’une impossibilité de trouver refuge dans une autre ville du Kosovo, étant rappelé que la Convention de Genève vise le pays d’origine ou de nationalité du demandeur d’asile sans restriction territoriale et que le défaut d’établir les raisons suffisantes pour lesquelles un demandeur d’asile ne serait pas en mesure de s’installer dans une autre région de son pays d’origine et de profiter ainsi d’une possibilité de fuite interne doit être pris en compte pour refuser la reconnaissance du statut de réfugié.

Sous ce rapport, il importe encore de relever que l’argumentation de l’appelant relativement aux difficulté voire impossibilité de trouver refuge en Serbie ou au Monténégro manque de pertinence, la possibilité de fuite interne existant à l’intérieur de sa province d’origine.

Il suit de ce qui précède qu’… n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef de sorte que le jugement du 27 juin 2005 est à confirmer.

La procédure étant écrite, l’arrêt est rendu à l’égard de toutes les parties en cause, malgré l’absence du mandataire de l’appelant à l’audience publique fixée pour plaidoiries.

Par ces motifs 3 la Cour, statuant à l’égard de toutes les parties, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 25 juillet 2005, le déclare cependant non fondé confirme le jugement du 27 juin 2005 dans toute sa teneur, condamne la partie appelante aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Carlo Schockweiler, conseiller et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15 novembre 2005 Le greffier de la Cour administrative 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 20158C
Date de la décision : 15/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-11-15;20158c ?

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