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09/11/2005 | LUXEMBOURG | N°20249

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 novembre 2005, 20249


Tribunal administratif N° 20249 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 août 2005 Audience publique du 9 novembre 2005 Recours formé par Monsieur … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 20249 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 août 2005 par Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour, assisté de Maître Laëtitia BORUCKI, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au no

m de Monsieur …, alias …, né le … à Kaunas (Lituanie), de nationalité lituanienne, ayan...

Tribunal administratif N° 20249 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 août 2005 Audience publique du 9 novembre 2005 Recours formé par Monsieur … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 20249 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 août 2005 par Maître Marc ELVINGER, avocat à la Cour, assisté de Maître Laëtitia BORUCKI, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, alias …, né le … à Kaunas (Lituanie), de nationalité lituanienne, ayant été retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d'une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 8 juillet 2005 portant refus d’entrée et de séjour au Grand-Duché de Luxembourg, ainsi que d’une décision dudit ministre du même jour ordonnant son placement audit Centre de séjour pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 11 août 2005 ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 17 août 2005 ;

Vu le mémoire complémentaire du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 septembre 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Laëtitia BORUCKI et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

Le 11 mars 2003, Monsieur …, alias …, introduisit une demande en obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 auprès des autorités luxembourgeoises, laquelle demande fut rejetée comme non fondée par décision du ministre de la Justice du 8 juillet 2003. Cette décision fut confirmée sur recours par jugement du tribunal administratif du 22 mars 2004 (n° 17064 du rôle) et par arrêt de la Cour administrative du 6 juillet 2004 (n° 17928C du rôle).

Le 8 juillet 2005, Monsieur … fut interpellé lors d’un contrôle de police.

Par arrêté du 8 juillet 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ci-après dénommé le « ministre », refusa l’entrée et le séjour au Grand-Duché de Luxembourg à Monsieur …, arrêté motivé comme suit :

« Vu l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Attendu que l’intéressé - est dépourvu d’un titre de voyage valable ;

- ne dispose pas de moyens d’existence personnels ;

- se trouve en séjour irrégulier au pays ;

- constitue un danger pour l’ordre et la sécurité publics ».

Suivant arrêté du même jour, ledit ministre ordonna à l’encontre de Monsieur … une mesure de placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, ci-après le « Centre de séjour provisoire », pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification de la décision en question, dans l’attente de son éloignement du territoire luxembourgeois.

La décision de placement est fondée sur les considérations et motifs suivants :

« Vu l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu les rapports de police no 1147 du 8 juillet 2005, no 60498/2004 du 26 avril 2004, no 138 du 29 mars 2004 ; no 10442 du 26 mars 2004 ;

Vu le refus d’entrée et de séjour du 8 juillet 2005 ;

Considérant que l’intéressé est démuni de toute pièce de voyage valable ;

- qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels ;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays ;

- qu’un éloignement immédiat n’est pas possible ;

- que l’intéressé constitue un danger pour l’ordre et la sécurité publics ;

Considérant qu’il existe un risque de fuite, alors que l’intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement dans l’attente de l’établissement d’un titre de voyage par les autorités compétentes ».

Par requête déposée le 8 août 2005, Monsieur … introduisit un recours en réformation, sinon en annulation à l’encontre des deux décisions ministérielles de refus d’entrée et de séjour et de placement du 8 juillet 2005.

Monsieur … fut rapatrié en date du 10 août 2005.

Par jugement du 17 août 2005, le tribunal administratif reçut le recours en la forme pour autant qu’il est dirigé contre la décision de placement du 8 août 2005 et donna acte au demandeur qu’il déclare renoncer à ce volet du recours. Pour le surplus, le tribunal réserva le recours pour le volet ayant trait à la décision du ministre du 8 août 2005 portant refus d’entrée et de séjour au Grand-Duché de Luxembourg dans le chef du demandeur.

Aucune disposition légale n’instaurant un recours au fond à l’encontre d’une décision de refus d’entrée et de séjour, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation. Le recours subsidiaire en annulation est par contre recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur expose que, lors de son interpellation en date du 8 juillet 2005, il aurait présenté un titre de voyage officiel délivré par les autorités lituaniennes, qu’il se serait trouvé au Luxembourg pour des raisons touristiques, qu’à ce titre, il serait à considérer comme « citoyen européen » et qu’il n’aurait jamais eu l’intention de résider au Luxembourg. Sur ce, il estime être entré sur le territoire du Luxembourg en possession de papiers de légitimation suffisants et que, conformément à l’article 7 du règlement grand-ducal du 28 mars 1972 relatif au conditions d’entrée et de séjour de certaines catégories d’étrangers faisant l’objet de conventions internationales, il pourrait régulièrement séjourner au Luxembourg pour une période ne dépassant pas 3 mois. Comme pour le surplus, il ne constituerait pas un danger pour la sécurité, la tranquillité, l’ordre et la santé publics et qu’il disposerait de ressources suffisantes pour supporter ses frais de voyage et de séjour, le ministre n’aurait pas pu lui refuser l’entrée et le séjour au Luxembourg.

Le délégué du gouvernement signale en premier lieu que Monsieur … avait déposé au Luxembourg en date du 11 mars 2003 une demande d’asile sous une fausse identité et qu’un rapport de la police grand-ducale du 26 avril 2004 renseignerait sur de nombreux agissement délictueux du demandeur au pays. Sur ce, le représentant étatique estime que le demandeur est susceptible de compromettre l’ordre public luxembourgeois au sens de l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère et que ce serait partant à bon droit que le ministre a pris un arrêté de refus d’entrée et de séjour à son encontre.

L’article 2 de la loi prévisée du 28 mars 1972 dispose que « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger : – qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits, et de visa si celui-ci est requis, - qui est susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la santé publics, – qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ».

Force est de constater que le délégué du gouvernement a motivé la décision critiquée notamment par la susceptibilité du demandeur de compromettre l’ordre public en se prévalant d’un certain nombre de rapports de la police.

Il ressort des éléments du dossier administratif versé en cause que des procès-

verbaux de la police grand-ducale s’étalant sur une période allant d’avril 2003 à mars 2004 imputent au demandeur des faits constitutifs de vol à l’étalage, coups et blessures volontaires, violences domestiques, infractions à la législation sur les stupéfiants, usage de faux papiers et infractions à la législation sur la circulation routière. Or, le demandeur n’ayant ni utilement contredit ni invalidé les considérations en rapport avec le motif de refus lui ainsi opposé, le tribunal est amené à retenir que ces éléments, de par leur gravité apparente, sont de nature à justifier légalement la prise de l’arrêté ministériel déféré, indépendamment des autres motifs à la base dudit arrêté, le caractère éventuellement pertinent des autres moyens n’étant pas de nature à ébranler la légalité de la décision.

Il s’ensuit que le recours sous analyse est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

vidant le jugement du 17 août 2005 ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation en ce qu’il est dirigé contre la décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 8 juillet 2005 refusant au demandeur l’entrée et le séjour au Grand-

Duché de Luxembourg ;

reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 9 novembre 2005 par le vice-président en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 20249
Date de la décision : 09/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-11-09;20249 ?

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