La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/11/2005 | LUXEMBOURG | N°19794

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 novembre 2005, 19794


Tribunal administratif N° 19794 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 mai 2005 Audience publique du 9 novembre 2005 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19794 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 mai 2005 par Maître Sandra VION, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Irak), de nationalité iraqu

ienne, demeurant actuellement à L- … , tendant à l’annulation d’une décision du ministre...

Tribunal administratif N° 19794 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 12 mai 2005 Audience publique du 9 novembre 2005 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19794 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 12 mai 2005 par Maître Sandra VION, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Irak), de nationalité iraquienne, demeurant actuellement à L- … , tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 9 février 2005 rejetant sa demande en obtention d’un statut de tolérance lui permettant de rester sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 juillet 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sandra VION et Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline GUILLOU-JACQUES en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 octobre 2005.

Le 31 mars 2003, Monsieur … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Par décision du 2 décembre 2003, le ministre de la Justice a rejeté sa demande comme étant non fondée, le recours contentieux par lui introduit à l’encontre de cette même décision ayant été définitivement rejeté comme étant non fondé par un arrêt de la Cour administrative du 21 octobre 2004.

Monsieur … a sollicité par la suite une autorisation de séjour au Grand-Duché de Luxembourg, laquelle fut refusée par le ministre compétent en date du 6 décembre 2004.

Par l’intermédiaire de son mandataire il sollicita alors, par courrier du 25 janvier 2005, l’octroi du statut de tolérance sur base de l’article 13(3) de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire.

Par décision du 9 février 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration refusa de faire droit à cette demande au motif « qu’il n’existe pas de preuve que l’exécution matérielle de l’éloignement de votre mandant serait impossible en raison de circonstances de fait ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 12 mai 2005, Monsieur … a fait introduire un recours contentieux tendant à l’annulation de ladite décision ministérielle du 9 février 2005.

Aucune disposition légale ne conférant compétence à la juridiction administrative pour statuer comme juge du fond en la présente matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en annulation introduit. Ledit recours en annulation, non autrement contesté sous ce rapport, est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur conclut à l’annulation de la décision ministérielle litigieuse au motif que compte tenu de la situation particulièrement explosive en Irak, ainsi que des très nombreux attentats qui y sont perpétrés, il éprouverait des craintes justifiées que sa sécurité n’y soit actuellement pas garantie. Il relève dans ce contexte que malgré le fait qu’il soit membre de la communauté sunnite, il aurait toujours été un fervent opposant au régime de Saddam Hussein et ce en dépit du fait que son beau-père aurait fait partie des services secrets de Saddam Hussein. Ainsi, en raison non seulement de son appartenance à la communauté musulmane sunnite, mais aussi de son opposition à l’ancien régime et à son beau-père, il se trouverait à la fois menacé par les membres de sa propre communauté avec lesquels il se trouverait en totale opposition, mais également par son beau-père qui, avant son départ d’Irak , l’aurait arrêté et torturé en raison de ses convictions politiques. Il s’y ajouterait que compte tenu de l’appartenance de son beau-père aux services secrets de Saddam Hussein, il serait également exposé à des représailles de la part des gens ayant subi des persécutions sous l’ancien régime.

Le délégué du Gouvernement rétorque que les moyens invoqués pour demander le statut de tolérance en l’espèce seraient les mêmes que ceux invoqués dans le cadre de la demande d’asile de l’intéressé. Dans la mesure où ces moyens ont été toisés par le tribunal administrative et la Cour administrative, il estime qu’ils ne sauraient dès lors plus être utilement invoqués dans le contexte sous examen. Pour le surplus, le représentant étatique fait valoir que Monsieur … ne prouverait pas en quoi son éloignement serait actuellement impossible, tout en relevant qu’il a toujours vécu à Kirkouk, et que ses craintes se seraient toujours concentrées sur cette même région, étant entendu qu’une impossibilité de s’établir ailleurs n’aurait jamais été établie par l’intéressé.

Force est de constater que la Cour administrative, dans son arrêt du 21 octobre 2004 inscrit sous le numéro 18337C du rôle a retenu que les craintes de persécutions que Monsieur … « évoque comme étant justifiées, d’une part, par le comportement que son père pourrait avoir à son égard du fait de ne pas avoir collaboré avec lui dans le cadre de ses activités policières, et d’autre part, par les actes de vengeance que des victimes des activités de son père pourraient manifester à son encontre, il échet de constater que ces actes font essentiellement ressortir un sentiment général de peur dans le chef de l’appelant, sans que ces faits ne soient d’une gravité suffisante pour justifier la reconnaissance du statut de réfugié », et que « en outre, même à supposer que l’appelant puisse raisonnablement faire état d’un sentiment général d’insécurité dans son pays d’origine, il n’a pas établi ni même allégué, que les autorités actuellement en place dans son pays d’origine ne soient pas en mesure de lui fournir une protection appropriée ou qu’elles lui refusent une telle aide et qu’il n’est pas en mesure de profiter d’une possibilité de fuite interne en Irak ».

La Cour a retenu en outre que « s’il est vrai qu’à l’heure actuelle la situation politique et sécuritaire en Irak est loin d’être stabilisée il n’en demeure pas moins que cette situation générale n’est pas à elle seule suffisante pour justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans le chef de l’un des résidents dudit pays. Il est vrai aussi que le seul fait de ne pas se voir reconnaître le statut de réfugié n’entraîne pas automatiquement le refoulement du demandeur d’asile en Irak, puisque d’autres raisons que celles qui sont susceptibles de justifier la reconnaissance dudit statut peuvent amener le gouvernement luxembourgeois à ne pas procéder à son éloignement vers l’Irak tant que cette situation n’est pas stabilisée ».

En effet, le ministre a valablement pu refuser l’octroi d’un statut de tolérance en transposant et en faisant sienne l’appréciation des juges ayant eu à connaître du recours contre le refus de la demande d’asile de l’intéressé et qui ont retenu que le récit du demandeur était insuffisant pour admettre un risque légitime de persécution, d’une part, tout en retenant que le demandeur n’avait pas apporté d’élément permettant de retenir une menace réelle et concrète en cas de retour dans son pays d’origine, et qu’il y serait exposé à des traitements ou peines inhumains ou dégradants ou encore à des actes contraires à la Convention européenne des droits de l’homme, voire un autre empêchement légitime d’un éloignement de sa part vers l’Irak, d’autre part.

De tout ce qui précède, il convient de conclure que le recours en annulation est à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié partant en déboute ;

condamne le demandeur aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 9 novembre 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19794
Date de la décision : 09/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-11-09;19794 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award