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09/11/2005 | LUXEMBOURG | N°19781

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 novembre 2005, 19781


Tribunal administratif Numéro 19781 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 mai 2005 Audience publique du 9 novembre 2005 Recours formé par les époux … et … et consorts contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19781 du rôle et déposée le 6 mai 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, a

u nom de Monsieur …, né le … à Podgorica (Monténégro/Etat de Serbie-et-Monténégro), et de so...

Tribunal administratif Numéro 19781 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 6 mai 2005 Audience publique du 9 novembre 2005 Recours formé par les époux … et … et consorts contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19781 du rôle et déposée le 6 mai 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Podgorica (Monténégro/Etat de Serbie-et-Monténégro), et de son épouse, Madame …, née le … à Berane (Monténégro/Etat de Serbie-et-Monténégro), agissant tant en leur nom personnel qu’en celui de leurs enfants mineurs …, tous de nationalité serbo-monténégrine, tous demeurant actuellement ensemble à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d'une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 14 février 2005, par laquelle la délivrance d’une autorisation de séjour leur a été refusée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 août 2005 ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en sa plaidoirie.

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Par décision du 14 février 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, ci-après dénommé le « ministre », refusa d’accorder une autorisation de séjour à la famille …-… dans les termes suivants :

« J’ai l’honneur de me référer à votre demande d’autorisation de séjour du 3 février 2005 en faveur de famille …-….

Je suis cependant amené à constater que vos mandants ne disposent pas de moyens d’existence personnels suffisants conformément à l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers.

Par ailleurs, je suis amené à constater que vos mandants ne font pas état de raisons humanitaires justifiant une autorisation de séjour au Luxembourg.

Par conséquent, je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à votre demande (…) ».

Le recours gracieux que les consorts …-… ont fait introduire à l’encontre de ladite décision par courrier de leur mandataire datant du 14 mars 2005 ayant été rejeté suivant décision ministérielle du 22 mars 2005, ils ont fait introduire, par requête déposée en date du 6 mai 2005, un recours contentieux tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision ministérielle initiale du 14 février 2005.

Si le juge administratif est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours, il doit se déclarer incompétent pour connaître du recours (cf. trib. adm. 28 mai 1997, Pas adm. 2004, V° Recours en réformation, n° 5 et autres références y citées).

Aucune disposition légale ne conférant compétence à la juridiction administrative pour statuer comme juge du fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande principale en réformation de la décision critiquée.

Le recours en annulation, non autrement contesté sous ce rapport, est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de leur recours, les demandeurs se réfèrent à la situation générale instable en l’Etat de Serbie-et-Monténégro qui empêcherait à l’heure actuelle leur retour dans leur pays d’origine. Quant à l’absence de moyens d’existence personnels suffisants leur opposée par le ministre, ils font valoir qu’en l’absence de permis de travail, il serait logique qu’ils ne peuvent pas travailler pour le moment, mais que Monsieur … se serait vu proposer des offres d’emploi et disposerait d’un diplôme de mécanicien d’automobile, de sorte qu’il pourrait facilement trouver du travail et soutenir financièrement sa famille.

Le délégué du gouvernement soutient que les raisons humanitaires invoquées par les demandeurs ne constitueraient pas des faits récents et auraient toutes été examinées pendant l’instruction de la demande d’asile dont les demandeurs ont été définitivement déboutés suivant arrêt de la Cour administrative du 25 avril 2002 (n° 14465C du rôle). Pour le surplus, les consorts …-… ne disposeraient pas de moyens d’existence personnels suffisants, à défaut d’en avoir rapporté la preuve par la production d’un permis de travail certifiant que l’« intéressé peut légalement s’adonner à un travail au pays ».

Conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger :

- qui est dépourvu de papiers de légitimation prescrits et de visa si celui-ci est requis, - qui est susceptible de compromettre la sécurité, la tranquillité, l’ordre ou la santé publics, - qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour. » La disposition légale prérelatée confère au ministre compétent la faculté de refuser l’entrée et le séjour au pays à un étranger qui ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour, abstraction faite notamment de tous moyens et garanties éventuellement procurés par des tiers (cf. trib. adm. 17 février 1997, Pas.

adm. 2004, V° Etrangers, n° 146 et autres références y citées).

En l’espèce, il est constant que les demandeurs ne sont pas titulaires d’un permis de travail qui les autoriserait à s’adonner à une activité salariée au Luxembourg. Or, la simple expectative d’un travail, aussi longtemps que le ministre compétent n’a pas délivré d’autorisation de travail, est en tout état de cause insuffisante pour établir l’existence de moyens personnels suffisants au sens de l’article 2 prérelaté de la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée.

Il s’ensuit que c’est à bon droit et sans commettre une erreur manifeste d’appréciation que le ministre compétent a pu se baser sur le défaut de moyens personnels propres légalement acquis au moment de la prise de la décision litigieuse pour refuser l’entrée et le séjour au pays au demandeur.

En ce qui concerne les raisons qualifiées d’humanitaires aux fins de justifier l’obtention de l’autorisation de séjour sollicitée, il y a lieu de constater en premier lieu que la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée, ne comporte aucune disposition imposant, voire prévoyant l’octroi d’une autorisation de séjour pour raisons humanitaires.

Si l’article 14 de la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée, prévoit certes qu’un étranger ne saurait être expulsé ou rapatrié dans un pays où sa vie ou sa liberté seraient gravement menacées ou s’il y serait exposé à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme ou encore à des traitements au sens des articles 1er et 3 de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, les motifs tels qu’avancés par les demandeurs, relatifs à la situation générale instable au Monténégro, ne sauraient suffire pour justifier l’octroi d’une autorisation de séjour sur base notamment de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 9 novembre 2005 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

s. Legille s. Campill 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19781
Date de la décision : 09/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-11-09;19781 ?

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