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13/07/2005 | LUXEMBOURG | N°19997

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 juillet 2005, 19997


Tribunal administratif N° 19997 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 juin 2005 Audience publique du 13 juillet 2005

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Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19997 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 juin 2005 par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des av

ocats à Luxembourg, au nom de M. …, né le … à Gllogoc (Kosovo/Etat de Serbie-et-Monténégro), de nationali...

Tribunal administratif N° 19997 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 juin 2005 Audience publique du 13 juillet 2005

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Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19997 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 24 juin 2005 par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, né le … à Gllogoc (Kosovo/Etat de Serbie-et-Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…., tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 25 avril 2005 par laquelle ledit ministre a déclaré manifestement infondée sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié, telle que cette décision a été confirmée par le même ministre le 24 mai 2005, suite à un recours gracieux du demandeur ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 1er juillet 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Radu DUTA, en remplacement de Maître Gilles PLOTTKE, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

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En date du 3 mars 2005, M. … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

M. … fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Il fut encore entendu le 17 mars 2005 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Par décision du 25 avril 2005, envoyée le lendemain par lettre recommandée, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’informa que sa demande avait été déclarée manifestement infondée au sens de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire.

La décision ministérielle est motivée comme suit :

« En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 4 mars 2005 et le rapport d’audition de l’agent du Ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration du 17 mars 2005.

Il ressort du rapport du Service de Police Judiciaire que vous auriez quitté le Kosovo le 27 février 2005 pour vous rendre en camionnette en direction du Luxembourg, où vous seriez arrivé le 2 mars 2005. Vous avez déposé votre demande d’asile le lendemain. Vous étiez en possession d’une carte d’identité ayant été établie le 14 février 2001 à Pristina tandis que votre passeport se trouverait au Kosovo.

Il résulte de vos déclarations que vous auriez quitté le Kosovo à la suite de problèmes que vous auriez eu avec la famille de votre petite amie. Les frères de cette dernière se seraient opposés à votre relation et vous auraient agressé et menacé en début de mars 2005. Vous n’auriez pas porté plainte contre cette agression.

Il n’y aurait pas d’autre raison pour laquelle vous auriez quitté le Kosovo et vous ne faites pas état de persécutions ou d’autres problèmes. Enfin, vous dites être membre du parti politique PDK, mais vous admettez ne jamais avoir eu de problèmes en raison de cette adhésion.

Selon l’article 9, alinéa 1 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, si la crainte du demander d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de fondement ou si la demande repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile ».

Force est de constater que votre demande ne correspond à aucun critère de fond défini par la Convention de Genève et que vous ne faites pas état de persécutions au Kosovo du fait de vos opinions politiques, de votre race, de votre religion, de votre nationalité ou de votre appartenance à un groupe social. Le fait que vous auriez eu des problèmes avec des membres de la famille de votre petite amie ne constitue pas un acte de persécution selon la prédite Convention, d’autant plus que ces derniers ne sauraient être considérés comme agents de persécution au sens de la prédite Convention.

Pour le surplus, le Kosovo, pour un Albanais, ne saurait être considéré comme un territoire dans lequel des risques de persécutions sont à craindre.

Votre demande en obtention du statut de réfugié est dès lors refusée comme manifestement infondée au sens de l’article 9 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, de sorte que vous ne saurez bénéficier de la protection accordée par la Convention de Genève ».

Suite à un recours gracieux formulé par lettre de son mandataire du 19 mai 2005 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration confirma sa décision initiale le 24 mai 2005.

Par requête déposée le 24 juin 2005, M. … a fait introduire un recours tendant à l’annulation des décisions précitées du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration des 25 avril et 24 mai 2005.

Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

A l’appui de son recours, M. … reproche au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation des circonstances de fait et de droit et d’avoir retenu à tort qu’il n’aurait pas invoqué de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif à la base de sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié, alors que tel aurait été le cas, dans la mesure où il aurait dû quitter son pays d’origine pour échapper aux brutalités des frères de sa copine qui seraient opposés à leur relation et qui auraient exigé la fin de leur relation, menaçant même de le tuer s’il n’obtempérait pas.

Le délégué du gouvernement estime que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que son recours laisse d’être fondé.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ou si la demande repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures en matière d’asile ».

En vertu de l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande ».

En l’espèce, au regard des faits et motifs invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande d’asile, tels qu’ils se dégagent du rapport d’audition susvisé du 17 mars 2005, force est de constater qu’il n’a manifestement pas établi, ni même allégué, des raisons personnelles de nature à établir dans son chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans son pays de provenance.

En effet, force est de constater que la seule crainte exposée par le demandeur, Albanais du Kosovo, à l’égard des frères de sa petite amie, qui font partie du même groupe de la population du Kosovo et qui pour des raisons restant inconnues sont opposés à leur relation amoureuse et qui l’auraient agressé et qui le menaceraient, n’est pas empreinte d’un quelconque des critères de fond prévus par la Convention de Genève, les frères de son amie, c’est-à-dire de simples personnes privées, ne pouvant par ailleurs pas être considérés comme des agents de persécution au sens de la Convention de Genève.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le demandeur reste en défaut de faire état d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève dans son pays de provenance, de sorte que c’est à bon droit que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration a déclaré sa demande d’asile manifestement infondée, le recours en annulation étant partant à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation dans la forme ;

au fond, le déclare cependant non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 13 juillet 2005 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Campill 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19997
Date de la décision : 13/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-13;19997 ?

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