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13/07/2005 | LUXEMBOURG | N°19257

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 juillet 2005, 19257


Tribunal administratif N° 19257 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 février 2005 Audience publique du 13 juillet 2005 Recours formé par la société Groupement agricole … & …, société civile, …, et consorts contre une décision du bourgmestre de la commune de Hobscheid en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19257 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 février 2005 par Maître Pol URBANY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de 1.

la société civile Groupement agricole … & …, société civile, établie et ayant son siège...

Tribunal administratif N° 19257 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 février 2005 Audience publique du 13 juillet 2005 Recours formé par la société Groupement agricole … & …, société civile, …, et consorts contre une décision du bourgmestre de la commune de Hobscheid en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19257 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 4 février 2005 par Maître Pol URBANY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de 1. la société civile Groupement agricole … & …, société civile, établie et ayant son siège social à L-…, 2. Monsieur …, agriculteur, demeurant à L-…, 3. Monsieur …, agriculteur, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la commune de Hobscheid du 4 novembre 2004, portant refus d’autorisation de construire un hangar et une grange sur des fonds sis à Hobscheid, au lieu-dit « Kirchberg », inscrits au cadastre de la commune de Hobscheid, section A du chef-lieu sous les numéros 1789/1221, 1790/1222 et 1791 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg du 9 février 2005 portant signification de ce recours à l’administration communale de Hobscheid ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 3 mai 2005 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Hobscheid ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 2 mai 2005 portant notification de ce mémoire en réponse au mandataire des demandeurs ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 1er juin 2005 par Maître Pol URBANY au nom des demandeurs ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 31 mai 2005 portant notification de ce mémoire en réplique au mandataire de la commune de Hobscheid ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 29 juin 2005 par Maître Albert RODESCH, au nom de l’administration communale de Hobscheid ;

Vu l’acte d’avocat à avocat du 28 juin 2005 portant notification de ce mémoire en duplique au mandataire des demandeurs ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment la décision déférée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Trixy LANNERS, en remplacement de Maître Pol URBANY, en ses plaidoiries à l’audience publique du 6 juillet 2005.

Considérant qu’en date du 4 août 2004 la société civile Groupement agricole … & … société civile, ci-après « la société civile … & … » sollicita auprès du bourgmestre de la commune de Hobscheid l’autorisation de construire un hangar et une grange, autorisation libellée comme suit : « Vergrösserung und Neubau des Laufstalles mit Lagerhalle », implantés sur un terrain inscrit au cadastre de la commune de Hobscheid, section A du chef-lieu, lieu-dit « Kirchberg » sous les numéros 1789/1221, 1790/1222 et 1791, appartenant à ladite société civile ;

Que par décision du 4 novembre 2004, le bourgmestre de la commune de Hobscheid refusa le permis de construire sollicité, motif tiré de ce que pour les constructions projetées sur des terrains sis dans la zone II, zone de surveillance à régime sévère de protection des sources d’eau potable de la commune de Hobscheid, le règlement communal sur les bâtisses, constructions, voies publiques, chantiers, ci-après « Rb » prévoit une interdiction de construire à travers son article 42 B(1) ;

Considérant que par requête déposée en date du 4 février 2005, la société civile … & …, ainsi que Messieurs … et … ont fait introduire un recours en annulation dirigé contre la décision précitée du bourgmestre de la commune de Hobscheid du 4 novembre 2004 ;

Considérant que la commune de Hobscheid se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours en annulation en la pure forme, tout en soulevant le défaut d’intérêt à agir dans le chef des demandeurs … et … ;

Que les demandeurs de conclure que dans la présente affaire les intérêts de Messieurs … et … s’identifieraient avec ceux de la société civile Groupement agricole … & …, étant donné qu’ils en sont les fondateurs et seuls associés ;

Considérant que la société civile … & … ayant été la demanderesse en autorisation, propriétaire des terrains devant accueillir les constructions projetées et exploitante de celles-ci, elle s’est également retrouvée destinataire de la décision déférée ;

Qu’elle revêt partant un intérêt direct à agir ;

Considérant que les demandeurs, Messsieurs … et …, quoi qu’étant associés de ladite société civile aux côtés de Madame …, épouse …, n’ont apporté à la société civile que leur capital d’exploitation à l’exception des terrains et revêtent encore un intérêt suffisant à agir ;

Considérant que le recours ayant été pour le surplus introduit suivant les formes et délai prévus par la loi en ce qui concerne la société civile la société civile … & …, il est recevable dans la mesure où il a été introduit au nom de ladite société ;

Considérant qu’au fond, la société demanderesse de faire valoir qu’en l’espèce il s’agirait d’une extension de construction existante en ce qu’elle aurait uniquement sollicité l’autorisation de pouvoir agrandir l’étable d’ores et déjà existante ;

Que l’interdiction prévue par l’article 42 B PAG ne concernerait que les constructions et non point les extensions, de sorte que la décision déférée serait à annuler ;

Qu’en tout état de cause celle-ci serait contraire à la ratio legis de l’article 42 B PAG ;

Que pour le texte réglementaire en question il s’agirait exclusivement de protéger les eaux souterraines et d’en éviter la pollution ;

Qu’ainsi les activités et constructions y émargées ne seraient interdites que si elles polluent effectivement, voire qu’elles risquent de polluer les nappes phréatiques ;

Que la ratio legis résulterait encore de la rédaction du texte en ce que notamment l’élevage de la volaille et des lapins ne serait point interdit, de même que l’emploi d’engrais chimiques et de pesticides ne serait prohibé que pour autant qu’il est excessif et que l’épandage ne serait interdit que pour autant qu’il serait intensif et régulier ;

Que le texte réglementaire ne devrait pas trouver l’application absolue qui apparaît à travers son libellé ;

Qu’ainsi, si l’administration communale elle-même avait voulu prohiber toute construction de routes et de chemins, elle ne saurait aménager ceux dont la zone a besoin ;

Que le même raisonnement s’appliquerait en ce qui concerne les constructions et activités agricoles ;

Que la demanderesse de tirer encore argument de ce que sous l’empire du même texte réglementaire l’ancien bourgmestre de la commune a délivré l’autorisation de construire pour l’étable existante avec silo de fourrage et que dès lors les extensions actuellement projetées devraient être pareillement autorisables ;

Que le ministre de l’Environnement ayant délivré l’autorisation requise suivant la loi concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, il serait établi qu’au vu du dossier lui soumis, ledit ministre aurait constaté que les constructions envisagées ne sont susceptibles d’affecter ni la nature, ni les ressources naturelles ;

Qu’à travers son mémoire en réplique, la demanderesse de préciser que le texte de l’article 42 B PAG ne serait point automatique, mais que l’interdiction de construire y prévue serait à lire en ce sens que le bourgmestre dispose d’un pouvoir d’appréciation lui permettant d’interdire des constructions ou des activités, lorsqu’il estime qu’elles polluent, voire, risquent de polluer les sources, de sorte à être amené à autoriser celles pour lesquelles aucune pollution ne serait vérifiée ;

Qu’enfin l’eau de la source « Klengebour », dont la zone de surveillance à régime sévère et engloberait l’exploitation de la société demanderesse, ne serait plus utilisée comme eau potable depuis au moins vingt ans, alors qu’elle ne correspondrait plus aux normes sanitaires en vigueur ;

Que le risque de pollution de cette source serait donc en fait limité à zéro, au moins en ce qui concerne la qualité de l’eau potable ;

Qu’enfin, le risque de pollution de la source serait beaucoup plus élevé en raison du trafic routier sur la route principale longeant la zone que du fait de l’exploitation agricole de la société demanderesse ;

Considérant qu’il est constant que le terrain devant accueillir les constructions litigieuses sous refus de construire déféré, se trouvent dans la zone II, désignée encore comme zone de surveillance à régime sévère, telle que définie par l’article 42 B PAG ;

Que ledit article 42 B intitulé « la zone II ou zone de surveillance à régime sévère » dispose que : « Afin d’éviter toute pollution bactériologique et, d’une façon générale, toute pollution résultant de la présence d’êtres humains et animaux ou de la destruction des couches biologiques de couverture, il y est interdit notamment :

1.

la construction d’écuries, d’étables, de porcheries et d’établissements similaires et en somme toute exploitation agricole ou similaire, ainsi que les exploitations industrielles et commerciales.

Contrairement aux directives internationales, la construction de maisons d’habitation peut être autorisée sous condition que toutes les eaux de surface des terrains occupés soient raccordées à la canalisation d’eaux usées.

Il faudra éviter absolument une pollution de la nappe phréatique par des eaux d’infiltrations impropres (toitures, places, garages etc).

L’élevage de la volaille, des lapins etc. sera limité au minimum. … 5.

L’entreposage d’engrais animaux, … » ;

Considérant qu’avant toute interprétation le juge est amené à appliquer les dispositions légales et réglementaires suivant le sens premier qu’elles revêtent, dans la mesure où elles sont claires et précises ;

Considérant qu’en présence d’un texte clair et précis, ni le recours à un texte antérieur que le texte invoqué remplace, ni les avis et opinions exprimés au niveau des travaux préparatoires du texte, ni encore des réflexions de politique législative ou réglementaire n’entrent en ligne de compte (cf. trib. adm. 12 janvier 1999, n° 10800 du rôle, Pas. adm. 2004, V° Lois et règlements, n° 45, page 490 et autres décisions y citées) ;

Considérant que le tribunal est amené à constater que le texte de l’article 42 B est clair en ce que dans la zone II en question « est interdit notamment : … la construction d’étables et d’établissements similaires et en somme toute exploitation agricole ou similaire… » ;

Considérant que si l’agrandissement de l’étable pour lequel l’autorisation a été demandée peut se définir comme extension, il n’en reste pas moins qu’il s’agit en toute occurrence d’une construction d’étable, expressément interdite suivant le libellé même de l’article 42 B PAG sous revue ;

Qu’il en est même de la grange adjacente tombant sinon sous le vocable d’établissement similaire, du moins sous celui de « toute exploitation agricole ou similaire » ;

Qu’ainsi tout argumentaire de la partie demanderesse déduit de la ratio legis par elle invoquée, en rapport avec l’article 42 B PAG est à écarter en l’occurrence ;

Considérant qu’il résulte encore du caractère précis et inconditionnel du texte réglementaire sous revue que celui-ci n’a pas conféré au bourgmestre un pouvoir d’appréciation suivant la pollution effective ou le risque de pollution afférent concernant les constructions y émargées comme étant interdites dans la zone II ;

Considérant que le fait que sous l’empire de la même disposition réglementaire l’étable existante a été autorisée, ne saurait être de nature à conditionner l’application devant être faite par le tribunal des dispositions de l’article 42 B PAG en question par rapport aux constructions pour lesquelles l’autorisation de bâtir a été refusée suivant la décision déférée, le tribunal n’étant saisi que de cette seule décision et n’étant point appelé à apprécier par ailleurs la légalité de la première autorisation intervenue à l’époque ex post, à titre de « régularisation » ;

Considérant qu’au regard des termes clairs et précis de l’article 42 B PAG concernant l’interdiction de construire y libellée, il n’y a pas lieu non plus de vérifier la présence potentielle ou l’absence de pollution, le bourgmestre ne disposant pas d’un pouvoir d’appréciation y relativement au regard du texte clair et précis sous analyse ;

Considérant que le ministre de l’Environnement, dans le cadre de la législation du 9 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles et le bourgmestre dans le cadre de la réglementation communale d’urbanisme, statuant chacun dans la sphère de compétence qui lui est propre sur base des textes légaux et réglementaires conditionnant leurs pouvoirs respectifs, le fait que les étable et grange litigieuses aient été autorisées par le ministre de l’Environnement au regard de la législation sur la protection de la nature et des ressources naturelles n’est pas de nature à conditionner autrement la décision du bourgmestre appelé à appliquer la réglementation communale d’urbanisme ;

Considérant qu’il suit de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours n’étant fondé en aucun de ses moyens, il est à rejeter comme étant non justifié.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

déclare le recours recevable;

au fond, le dit non justifié ;

partant en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais .

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 13 juillet 2005 par :

M. Delaporte, premier vice-président, Mme Lamesch, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19257
Date de la décision : 13/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-13;19257 ?

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