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13/07/2005 | LUXEMBOURG | N°19077

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 juillet 2005, 19077


Numéro 19077 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 décembre 2004 Audience publique du 13 juillet 2005 Recours formé par l’association sans but lucratif F., Luxembourg contre une décision du bourgmestre de la commune de Goesdorf et une décision du bourgmestre de la commune de Heiderscheid en présence du Syndicat Intercommunal de Dépollution des Eaux résiduaires du Nord (SIDEN) en matière de permis de construire

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JUGEM

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Vu la requête, inscrite sous le numéro 19077 du rôle, déposée le 23 dé...

Numéro 19077 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 décembre 2004 Audience publique du 13 juillet 2005 Recours formé par l’association sans but lucratif F., Luxembourg contre une décision du bourgmestre de la commune de Goesdorf et une décision du bourgmestre de la commune de Heiderscheid en présence du Syndicat Intercommunal de Dépollution des Eaux résiduaires du Nord (SIDEN) en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête, inscrite sous le numéro 19077 du rôle, déposée le 23 décembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Pierre THIELEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’association sans but lucratif F., ayant son siège social à L-…, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à la réformation, sinon à l’annulation - d’un permis de construire n° 2004/41 délivré le 14 octobre 2004 par le bourgmestre de la commune de Goesdorf autorisant le Syndicat Intercommunal de Dépollution des Eaux résiduaires du Nord (SIDEN) à réaliser l’élargissement respectivement l’ouverture à neuf d’un chemin d’accès vers la nouvelle station d’épuration ainsi que la construction d’un nouveau pont reliant le territoire de la commune de Goesdorf au territoire de la commune de Heiderscheid sur les terrains inscrits au cadastre de la commune de Goesdorf, section F de Goesdorf, nos 626/2959, 626/2958, 612/1708 et 612/1624, - d’un permis de construire n° 2004/76 délivré le 8 octobre 2004 par le bourgmestre de la commune de Heiderscheid autorisant le Syndicat Intercommunal de Dépollution des Eaux résiduaires du Nord (SIDEN) à réaliser la construction d’un pont d’accès au site de la station d’épuration projetée au lieu-dit « Hengenahl » près de Heiderscheidergrund;

Vu le mémoire en réponse déposé le 21 mars 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Steve HELMINGER avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte du Syndicat intercommunal SIDEN et des administrations communales de Goesdorf et de Heiderscheid, ce mémoire ayant été notifié par voie de télécopie au mandataire de la partie demanderesse en date du 21 mars 2005;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Pierre THIELEN et Steve HELMINGER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 mai 2005.

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Suite à la demande afférente déposée le 20 décembre 2002 et complétée le 5 septembre 2003, le ministre de l’Environnement délivra, suivant arrêté du 22 juin 2004 (n° 1/02/0572), au Syndicat Intercommunal de Dépollution des Eaux résiduaires du Nord, établi à L-9359 Bleesbrück, ci-après désignée par le « SIDEN », l’autorisation d’installer et d’exploiter à Heiderscheidergrund une station d’épuration biologique d’une capacité épuratoire de 12.000 équivalents habitants sous les conditions et modalités y plus amplement émargées.

Après avoir exprimé son opposition au projet suivant courrier du 29 janvier 2004 adressé aux administrations communales de Goesdorf et de Heiderscheid dans le cadre de l’enquête commodo et incommodo, l’association sans but lucratif F. …, ci-après désignée par « l’association F. », fit introduire en date du 6 août 2004 un recours contentieux tendant à la réformation, sinon à l’annulation de l’arrêté ministériel précité du 22 juin 2004 lui notifié le 29 juin 2004 par l’entremise de l’administration communale de Goesdorf. Suivant requête déposée le même jour, l’association F. sollicita l’effet suspensif de ce recours contentieux, demande qui fut cependant déclarée sans objet par ordonnance du 13 août 2004 au motif essentiellement qu’à défaut de permis de construire la construction de la station d’épuration ne pouvait pas être légalement entamée.

Il résulte d’un avis publié dans l’édition du quotidien « Luxemburger Wort » du 17 juillet 2004 que le ministre de l’Environnement, sous la signature du Secrétaire d’Etat, avait conféré le 20 septembre 2000 l’autorisation requise suivant la loi modifiée du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, pour la construction de la station d’épuration susvisée. L’association F. introduisit le 15 octobre 2004 un recours contentieux à l’encontre de cette autorisation ministérielle. Il découle encore des éléments du dossier que cette autorisation a été prolongée suivant courriers du ministre de l’Environnement du 10 septembre 2002 et 30 juillet 2004.

Par courrier du 5 octobre 2004, l’administration de l’Environnement recommanda aux administrations communales de Heiderscheid et de Goesdorf de procéder à une nouvelle enquête publique telle que prévue par la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés et ce au regard de certains moyens, ayant trait notamment au caractère incomplet du dossier de l’enquête publique, exposés dans le cadre du recours contentieux susvisé déposé le 6 août 2004.

En date du 8 octobre 2004, le bourgmestre de la commune de Heiderscheid délivra au SIDEN le permis de construire n° 2004/76 l’autorisant à réaliser la construction d’un pont d’accès au site de la station d’épuration projetée au lieu-dit « Hengenahl » près de Heiderscheidergrund.

En date du 14 octobre 2004, le bourgmestre de la commune de Goesdorf délivra au SIDEN le permis de construire n° 2004/41 l’autorisant à réaliser l’élargissement respectivement l’ouverture à neuf d’un chemin d’accès vers la nouvelle station d’épuration ainsi que la construction d’un nouveau pont reliant le territoire de la commune de Goesdorf au territoire de la commune de Heiderscheid sur les terrains inscrits au cadastre de la commune de Goesdorf, section F de Goesdorf, nos 626/2959, 626/2958, 612/1708 et 612/1624.

Par requête déposée le 23 décembre 2004, l’association F. a introduit un recours contentieux tendant à la réformation, sinon à l’annulation de ces deux permis de construire du bourgmestre de la commune de Heiderscheid du 8 octobre 2004 et du bourgmestre de la commune de Goesdorf du 14 octobre 2004.

Aucune disposition légale n’instaurant un recours au fond en matière de permis de construire, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation. Le recours subsidiaire en annulation est par contre recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours, la partie demanderesse se prévaut du caractère prématuré des permis de construire attaqués concernant une voie et un pont d’accès à la station d’épuration dont la réalisation serait actuellement fortement hypothétique. Elle renvoie à cet égard aux recours par elle introduits contre l’arrêté du ministre de l’Environnement du 22 juin 2004 et l’arrêté du même ministre du 20 septembre 2000, ensemble les décisions de prorogation y afférentes, ainsi qu’à l’exécution d’une nouvelle enquête publique suite au courrier de l’administration de l’Environnement du 5 octobre 2004. S’y ajoute, d’après la partie demanderesse, également le fait que le bourgmestre de la commune de Heiderscheid n’aurait pas non plus encore délivré un permis de construire pour la station d’épuration elle-

même.

Ce moyen laisse cependant d’être fondé, étant donné qu’aucune disposition légale ou réglementaire n’impose un ordre chronologique entre les différentes autorisations qui doivent être obtenues sur pied de différentes législations et réglementations en vue de la réalisation d’un certain projet d’établissement et de ses infrastructures accessoires et que partant aucun texte n’empêche le demandeur d’autorisations pour un tel projet de solliciter d’abord les autorisations requises pour aménager le chemin nécessaire afin d’accéder au site devant accueillir l’établissement projeté.

La partie demanderesse s’empare ensuite des dispositions de la loi du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles pour relever que, dans la mesure où le projet litigieux de station d’épuration serait localisé dans la zone verte au sens de cette loi, la construction de la voie et du pont d’accès auraient dû faire l’objet d’une autorisation du ministre de l’Environnement sur base de cette loi et qu’à défaut d’une telle autorisation, les permis de construire déférés n’auraient pas pu être valablement délivrés.

Il ressort des dispositions de la loi du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, et plus particulièrement de ses articles 1er et 5, que le plan d’aménagement d’une commune est appelé à couvrir l’ensemble du territoire de la commune et à déterminer l’affectation de toutes les zones du territoire communal. Il en résulte que le pouvoir de police des autorités communales en matière de bâtisses et la faculté que la loi leur accorde de réglementer l’aménagement du territoire de la commune s’étend à l’ensemble de ce territoire.

D’un autre côté, en ce qui concerne la construction en zone verte au sens de la loi précitée du 11 août 1982, l’obligation de requérir de la part du ministre compétent l’autorisation de construire est uniquement basée sur des considérations relatives à la protection de la nature, à l’exclusion de toutes autres, notamment de celles relatives au maintien de la sécurité publique et à l’observation des règles d’urbanisme.

Il en découle que le pouvoir de police des autorités communales en matière de bâtisses et la faculté que la loi leur accorde de réglementer l’aménagement du territoire de la commune ne sont donc nullement entamés par la loi concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ces prérogatives du pouvoir local restant pleines et entières. En effet, les dispositions de la loi précitée du 11 août 1982 qui confèrent un pouvoir d’appréciation et de décision au ministre de l’Environnement ne sauraient empêcher que le pouvoir communal puisse être investi, sur base de textes régissant la matière communale, de pouvoirs propres et distincts (Cour adm. 2 juillet 2002, 14623 du rôle, Pas. adm. 2004, v° Etablissements classés, n° 106).

Le bourgmestre, ainsi que le ministre ayant dans ses attributions respectivement l’administration des Eaux et Forêts et l’administration de l’Environnement, ont donc, notamment dans les zones situées en dehors des agglomérations, des compétences concurrentes, chacune de ces autorités administratives agissant dans la sphère de sa compétence propre et en application de ses lois et règlements spécifiques, de sorte qu’elles doivent tirer autorité des normes et conditions qui relèvent de leurs sphères de compétence respectives (trib. adm. 9 juillet 2001, n° 13064, confirmé par Cour adm. 28 février 2002, n° 13885C ; Pas. adm. 2004, v° Environnement, n° 8 et les autres décisions y citées).

Par voie de conséquence, l’exigence légale d’une autorisation du ministre de l’Environnement sous l’égide de la prédite loi du 19 janvier 2004 pour un projet d’établissement reste sans incidence sur la légalité d’un permis de construire délivré pour ce même établissement, étant donné que le bourgmestre n’est admis qu’à vérifier si un projet respecte les conditions relevant de sa sphère de compétence, à savoir la réglementation de l’urbanisme et de la police des bâtisses, et n’est ni admis, ni tenu de prendre égard à la question de savoir si le ministre de l’Environnement a déjà exercé sa compétence distincte d’autorisation conformément aux prévisions de ladite loi du 19 janvier 2004. Le moyen y relatif de la partie demanderesse est partant à écarter pour manquer de fondement.

N’étant justifié en aucun de ses moyens, le recours en annulation sous analyse est à rejeter comme n’étant pas justifié.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation, reçoit le recours subsidiaire en annulation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, condamne la partie demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par:

M. CAMPILL, vice-président, M. SCHROEDER, premier juge, M. SPIELMANN, juge, et lu à l’audience publique du 13 juillet 2005 par le vice-président en présence de M.

LEGILLE, greffier.

LEGILLE CAMPILL 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19077
Date de la décision : 13/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-13;19077 ?

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