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13/07/2005 | LUXEMBOURG | N°19000

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 juillet 2005, 19000


Tribunal administratif N° 19000 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 décembre 2004 Audience publique du 13 juillet 2005 Recours formé par la société anonyme S. S.A., … contre une décision du bourgmestre de la commune de Steinfort en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19000 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 décembre 2004 par Maître Gérard SCHANK, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la sociét

é anonyme S. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce...

Tribunal administratif N° 19000 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 14 décembre 2004 Audience publique du 13 juillet 2005 Recours formé par la société anonyme S. S.A., … contre une décision du bourgmestre de la commune de Steinfort en matière de permis de construire

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19000 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 décembre 2004 par Maître Gérard SCHANK, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme S. S.A., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B …., représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la commune de Steinfort du 27 septembre 2004, portant refus de délivrer une autorisation de construire une maison uni-familiale sur un terrain sis sur le territoire de la commune de Steinfort, section C de Kleinbettingen, inscrit sous les numéros cadastraux … ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre KREMMER, demeurant à Luxembourg, du 22 décembre 2004, portant signification de ce recours à l’administration communale de Steinfort, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, établie à L-8401 Steinfort, 4, Square Patton ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 21 mars 2005 par Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Steinfort, lequel mémoire a été notifié par voie de télécopie le même jour au mandataire constitué de la demanderesse ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 20 avril 2005 par Maître Gérard SCHANK pour compte de la demanderesse, lequel mémoire a été notifié par voie de télécopie le 19 avril 2005 au mandataire constitué de l’administration communale de Steinfort ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres Rafaëlle WEIS, en remplacement de Maître Gérard SCHANK, et Jean-Paul ESPEN, en remplacement de Maître Roger NOTHAR, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er juin 2005.

Vu les pièces supplémentaires versées en cause ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport complémentaire, ainsi que Maîtres Rafaëlle WEIS, en remplacement de Maître Gérard SCHANK, et Jean-Paul ESPEN, en remplacement de Maître Roger NOTHAR, en leurs plaidoiries à l’audience publique du 8 juin 2005.

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Le 29 avril 2003, la société anonyme S. S.A., ci-après dénommée « la société S. », introduisit auprès du bourgmestre de la commune de Steinfort une demande d’autorisation de construire une maison unifamiliale sur son terrain, situé sur le territoire de la commune de Steinfort, section C de Kleinbettingen, d’une contenance de 40 a 20 ca, inscrit sous les numéros cadastraux ….

Par courrier recommandé du 27 septembre 2004, le bourgmestre de la commune de Steinfort, ci-après dénommé le « bourgmestre », refusa de faire droit à la demande de la société S. du 29 avril 2003. Cette décision est libellée comme suit :

« Messieurs, Suite au jugement [du] Tribunal administratif du 12 juillet 2004 annulant la décision de refus déférée du conseil de l’Administration communale de Steinfort du 29 juillet 2003 et renvoyant ainsi l’affaire devant le bourgmestre de la commune de Steinfort, je suis au regret de vous informer que je ne serai (sic) donner une suite favorable à votre demande du 29 avril 2003 introduite par l’intermédiaire de votre architecte F.K. pour l’autorisation de construire une maison uni-familiale sur le terrain de la société S., sis sur le terrain de la commune de Steinfort, section C de Kleinbettingen, d’une contenance de 40a 20ca, inscrit sous les numéros cadastraux ….

Les terrains concernés par le projet de construction se situent pour le moment encore dans la zone d’habitation de faible densité d’après les dispositions du PAG de la commune.

Cette zone longe les installations industrielles deP. S.A. A ce titre, elle a fait l’objet d’une politique d’acquisition systématique de la part deP. en vue de créer une zone tampon entre la zone industrielle et la zone d’habitation.

Déférant à cette stratégie, l’entreprise, qui a pour finalité ultime de protéger les intérêts du site industriel par rapport à ceux des riverains, l’Administration communale de Steinfort fera classer les terrains en question en zone d’aménagement différé suivant les dispositions du nouveau projet d’aménagement de la commune.

Le caractère dangereux inhérent à l’activité industrielle liée au transvasement de gaz s’oppose à la délivrance d’une autorisation de bâtir d’une maison unifamiliale à proximité du site industriel.

Le principe de précaution et les impératifs de sécurité, de santé et de tranquillité publique ne permettent pas à ce stade de faire droit à une telle demande d’autorisation. Les risques d’accident graves sont suffisamment caractérisés par les pannes et incidents auxquels il fallait faire face.

Il va sans dire que la zone tampon actuellement indispensable pour séparer les intérêts industriels des intérêts privés aura vocation à disparaître lorsque la manipulation de gaz ne fera plus partie des activités deP.. Dans ce cas, les terrains en question pourront être sortis de la zone d’aménagement différé et affectés à la construction.

Il s’y ajoute que le terrain devant accueillir la construction projetée n’est pas raccordé aux infrastructures communales. Ceci vous a d’ailleurs déjà été confirmé par un certificat du 22 juin 2001.

En effet, la rue du Chemin de Fer n’est pas aménagée du côté du terrain devant accueillir la construction projetée alors qu’il n’y a ni trottoir, ni canalisation, ni électricité.

Ainsi, conformément à l’article 23 du règlement des bâtisses de la commune de Steinfort, l’autorisation de construire sollicitée est refusée alors qu’en bordure des voies publiques non achevées aucune construction ne peut être implantée.

Conformément à l’article 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suive par les administrations relevant de l’Etat et des communes, je tiens à vous informer qu’un recours contre la présente décision peut être introduit auprès du Tribunal administratif par un avocat de la liste I. Ce recours doit être introduit sous peine de déchéance dans un délai de 3 mois à partir de la notification de la présente décision.

Veuillez agréer, (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 décembre 2004, la société S. a fait introduire un recours en annulation contre la décision précitée du bourgmestre du 27 septembre 2004.

Sur question afférente du tribunal lors des plaidoiries du 1er juin 2005, le mandataire de la partie défenderesse a déclaré renoncer au moyen de nullité non autrement précisé libellé dans son mémoire en réponse. Il convient de lui en donner acte.

Le recours en annulation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

A l’appui de son recours, la société S. fait plaider en premier lieu que le refus du permis de construire sollicité lui aurait été opposé à tort, au motif que l’article 2.3.1 du règlement sur les bâtisses de la commune de Steinfort permettrait dans la zone d’habitation à faible densité, dans laquelle se trouverait le terrain litigieux, la construction d’habitations à caractère unifamilial.

Elle reproche ensuite au bourgmestre de s’être basé sur des considérations autres que celles relevant de la « réglementation des bâtisses ».

Ainsi, elle fait valoir que le bourgmestre aurait commis un excès de pouvoir, sinon un détournement de pouvoir en basant son refus sur le fait que le terrain litigieux devrait être classé en zone d’aménagement différé suivant les dispositions du nouveau projet d’aménagement général de la commune de Steinfort, au lieu de se baser sur la réglementation existante au moment de la prise de la décision déférée.

Elle critique encore le bourgmestre en ce qu’il se serait basé sur des considérations de sécurité tirées de la proximité du terrain, devant recevoir la construction litigieuse, d’un établissement industriel ayant pour objet le transvasement de gaz, alors que de telles considérations seraient étrangères à la réglementation des bâtisses et relèveraient du champ de compétence des ministres de l’Environnement et du Travail et de l’Emploi, compétents en matière d’autorisation d’établissements classés. Dans ce contexte, elle fait valoir que la décision litigieuse encourrait l’annulation pour défaut de motivation légale en ce que le refus du bourgmestre serait fondé sur « d’hypothétiques risques d’accident graves pouvant survenir de l’activité industrielle de la société P. s.a.», tout en relevant que celle-ci disposerait de toutes les autorisations nécessaires en la matière. Elle ajoute que l’argument de sécurité invoqué par le bourgmestre à l’appui de sa décision de refus ne serait pas vérifié en l’espèce, en ce que la construction de huit maisons aurait précédemment été autorisée à proximité du site industriel en question, et dont certaines seraient même plus proches de l’établissement de la société P. que la construction projetée par elle-même, ce qui entraînerait par ailleurs une rupture du principe de l’égalité des citoyens devant la loi.

Elle précise encore que la construction projetée respecterait la distance de sécurité réglementaire prescrite par la réglementation « TRB 801 ».

La société S. soutient ensuite que le bourgmestre aurait fait une mauvaise application du principe de précaution lequel serait inapplicable dans les rapports entre un administré et l’administration communale dans le cadre de la réalisation d’un projet de construction. Toutefois, pour le cas où ledit principe serait néanmoins applicable, elle soutient que son application devrait conduire à prendre des mesures destinées à contrôler les activités à l’origine du risque lié à l’exploitation d’une entreprise de transvasement de gaz, et non pas à un refus d’une autorisation de construire qui ne constituerait pas une mesure préventive dans la mesure où elle « ne vise pas à atteindre le prétendu risque qu’elle combat mais à endiguer ses effets ».

Elle ajoute qu’en vertu de la réglementation spécifique existant en la matière, compétence serait attribuée au ministre du Travail et de l’Emploi et au ministre de l’Environnement en matière d’autorisation pour les établissements de la classe 1, que d’après ses renseignements la société P. satisferait à toutes les conditions d’exploitation imposées par les autorisations d’établissement, que les autorités auraient procédé à un contrôle de ses installations, de sorte que la société P. devrait être considérée comme satisfaisant à l’obligation générale de sécurité. Elle conclut que le bourgmestre en refusant le permis de construire en vertu du principe de précaution sans procéder à une évaluation technique ou scientifique du risque aurait agi « de manière arbitraire, discriminatoire et/ou illégale ».

Elle soutient finalement que le motif de refus tiré de l’absence de raccordement du terrain devant recevoir la construction projetée aux infrastructures communales ne serait pas fondé, au motif que huit maisons se trouveraient déjà implantées, pour la plupart de l’autre côté de la rue du Chemin de Fer, lesquelles auraient nécessairement dû être raccordées aux infrastructures communales, et que la maison projetée devrait être érigée en face d’une maison déjà existante, de sorte qu’il n’existerait aucun obstacle à raccorder la construction projetée aux infrastructures existantes.

Dans son mémoire en réponse, l’administration communale de Steinfort fait exposer que le terrain de la société S. serait situé dans la zone d’habitation à faible densité et longerait les installations industrielles de la société P., établissement rangé dans la classe n° 1 dans la nomenclature des établissements classés et qu’en raison de la dangerosité de son activité de transvasement de gaz, la société P. aurait procédé à une « politique d’acquisition systématique » de terrains afin de créer une zone tampon entre la zone industrielle et la zone d’habitation « pour prévenir les conséquences graves d’un éventuel accident ». Elle explique qu’en accord avec la société S., elle aurait prévu de classer les terrains en question en zone d’aménagement différé, puis de les réaffecter à la construction une fois l’activité de maniement du gaz terminée, qu’un nouveau projet d’aménagement général de la commune de Steinfort serait ainsi à l’étude devant le collège échevinal afin de classer la zone tampon longeant le site de la société P. en zone d’aménagement différé. Elle soutient que l’industriel et la commune seraient tenus de respecter en l’espèce le principe de précaution, tel que consacré par le Traité de Maastricht et la Cour de Justice des Communautés européennes, et elle ajoute qu’en vertu de l’article 67 de la loi communale du 13 décembre 1988, le bourgmestre serait chargé de l’exécution des lois et règlements de police. Elle estime qu’au vu des incertitudes quant au risque inhérent à la manipulation de gaz et à son évaluation, le refus du bourgmestre serait proportionné par rapport à la situation de fait.

Quant au motif tiré de l’absence d’infrastructures le long du terrain devant accueillir la construction projetée, l’administration communale de Steinfort fait valoir qu’il ressortirait clairement d’un certificat de la commune du 22 juin 2001 qu’il n’y a pas d’infrastructures communales le long du terrain litigieux, tout comme il se dégagerait d’un extrait du plan cadastral que toutes les maisons de la rue du Chemin de Fer seraient construites sur le côté gauche, tandis que le terrain litigieux serait situé sur le côté droit, de sorte que la rue du Chemin de Fer serait uniquement aménagée du côté gauche et non du côté droit, lequel serait dépourvu de trottoirs, de canalisations et d’électricité. Elle en déduit que la construction projetée serait implantée en bordure d'une voie non achevée, les articles 23.1 et 23.2 du règlement sur les bâtisses de la commune de Steinfort interdisant toute construction en bordure d'une telle voie.

Dans son mémoire en réplique, la société S. rétorque, tout en développant ses moyens et arguments déjà exposés dans son recours, que la prétendue « politique d’acquisition systématique » de la société P. en vue de créer une zone tampon ne la concernerait pas et serait étrangère aux débats, qu’elle aurait acquis au prix fort du marché des terrains pouvant recevoir d’après le règlement sur les bâtisses de la commune de Steinfort la construction de maisons unifamiliales, que la constructibilité du terrain litigieux aurait été attestée par un certificat émis par la commune de Steinfort le 22 juin 2001. Dans ce contexte, elle conteste qu’elle aurait voulu acquérir des terrains au prix fort pour en faire une zone tampon, tout en relevant que la création d’une telle zone serait une mesure incombant aux pouvoirs publics et non aux personnes privées. Elle s’accorde à dire que des pourparlers auraient eu lieu entre les parties mais que la commune aurait refusé un arrangement.

Elle estime ensuite que le bourgmestre commet un détournement sinon un excès de pouvoir en basant sa décision de refus sur un projet d’aménagement de la commune qui serait « à l’étude devant le collège échevinal et qui serait en voie de finalisation ».

Elle fait encore valoir que le bourgmestre, en basant sa décision de refus sur des considérations de sécurité, non seulement s’arrogerait des pouvoirs qui seraient de la compétence d’autres autorités, mais qu’il ne serait pas non plus crédible ni cohérent dans la mesure où l’implantation de maisons d’habitation dans les proches alentours de la société P. aurait été autorisée précédemment.

Quant à l’absence d’infrastructures le long du terrain devant accueillir la construction projetée, la société S. rappelle que le terrain serait situé dans la zone d’habitation à faible densité et partant susceptible de recevoir la construction d’une maison d’habitation. Elle précise que la commune de Steinfort aurait certifié la constructibilité dudit terrain et conteste à cet égard que l’indication de l’absence d’infrastructures sur ledit certificat constituerait une réserve quant à la constructibilité dudit terrain. Elle soutient enfin que l’affirmation du bourgmestre que toutes les maisons seraient situées sur le côté gauche de la rue du Chemin de Fer, qui seul disposerait des infrastructures nécessaires, serait contredite par l’existence d’une maison du côté droit et que même s’il devait y avoir absence d’infrastructures du côté droit, il serait toujours possible d’effectuer un raccordement.

Il est constant en cause que le terrain de la société S. devant recevoir la construction d’une maison d’habitation unifamiliale est situé dans la zone d’habitation à faible densité de la commune de Steinfort, laquelle est réservée en principe, selon l’article 2.3.1. du règlement sur les bâtisses de la commune de Steinfort, aux habitations à caractère unifamilial.

Etant donné que la légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération de la situation de droit et de fait existant au jour où elle a été prise, le bourgmestre saisi d’une demande de permis de construire est appelé à statuer dans le cadre de la réglementation communale d’urbanisme applicable au moment de la prise de décision et il ne saurait partant fonder son refus de délivrer le permis de construire sollicité sur le fait qu’un nouvel avant-projet d’aménagement de la commune de Steinfort, prévoyant de classer les terrains litigieux en zone d’aménagement différé serait « à l’étude devant le collège échevinal et en voie de finalisation ».

La décision querellée est encore fondée sur le principe de précaution et les impératifs de sécurité, de santé et de tranquillité publiques.

S’il est vrai qu’il incombe de façon générale au bourgmestre dans le cadre de sa mission d’exécution des lois de police de faire jouir les habitants de la commune des avantages d’une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques, et qu’il est par ailleurs tenu de respecter le principe de précaution, il n’empêche que le bourgmestre doit lors de la délivrance d’une autorisation de construire, vérifier la conformité de la demande d’autorisation uniquement par rapport au plan d’aménagement général et au règlement sur les bâtisses de commune de Steinfort.

Or, dans la mesure où il est constant en cause que le terrain litigieux de la société S. était, conformément à la réglementation urbanistique en vigueur, constructible au jour de la prise de la décision déférée, ainsi qu’il ressort d’ailleurs du certificat émis par l’administration communale de Steinfort en date du 22 juin 2001, le bourgmestre ne saurait, au mépris des règles procédurales entourant la compétence spéciale des autorités communales leur permettant, par le biais d’une modification afférente du plan d’aménagement général de la commune, d’instituer des mesures contraignantes tenant tant à l’urbanisme qu’à la salubrité, à la sécurité et à la tranquillité publiques, invoquer au cas par cas, dans le cadre d’une décision individuelle relative à une autorisation de construire, un motif de sécurité tenant à un risque d’accident - non autrement étayé - provenant de l’activité de transvasement de gaz d’un établissement classé situé à proximité du terrain litigieux, pour frapper ce-

dernier d’une servitude non aedificandi non autrement arrêtée d’après les règles urbanistiques applicables.

Admettre le contraire reviendrait à admettre que le bourgmestre puisse suspendre les effets contraignants du plan d’aménagement général de la commune de Steinfort, selon lequel le terrain litigieux est constructible.

Il convient finalement d’examiner le motif de refus tiré de l’absence d’infrastructures communales le long de la rue du Chemin de Fer.

Le règlement sur les bâtisses de la commune de Steinfort dispose dans son article 20 que l'implantation de constructions est permise en principe le long des voies existantes ou nouvelles ou des parties de voies existantes et nouvelles situées à l’intérieur du périmètre d’agglomération.

En vertu de l'article 21, sont considérées comme voies ou parties de voies existantes, les voies de l'Etat ou de la commune ou les parties de ces voies qui, de mémoire d'homme, ont servi à l'implantation de constructions et qui, reconnues comme partie intégrante du réseau de voirie publique, ont été spécialement consolidées, pourvues de canalisations d'égout, d'adduction d'eau et d'éclairage public.

L'article 22 énumère certaines conditions qui doivent être remplies pour qu'une voie nouvelle puisse accueillir l'implantation de constructions.

L'article 23.1 considère comme non achevées les voies publiques ne répondant pas aux conditions énumérées à l'article 22, et l'article 23.2. prohibe l'implantation de constructions en bordure de telles voies.

Il se dégage de l'agencement des dispositions citées ci-avant que les articles 23.1 et 23.2 ne visent que les voies nouvelles dans ce sens que les voies nouvelles qui ne répondent pas aux critères posés à l'article 22 ne sont pas à considérer comme achevées et ne peuvent donc pas recevoir de constructions.

En revanche, l'article 21 qui traite des voies publiques existantes, se suffit à lui-même sans devoir être mis en relation avec les articles 23.1 et 23.2.

En l'espèce, il ressort des renseignements fournis et des pièces versées en cause que la rue du Chemin de Fer est bordée du côté opposé de celui devant accueillir la construction litigieuse de huit constructions et pourvue de ce côté des canalisations d'égout, d'adduction d'eau et d'éclairage public, qu'elle est reliée au réseau de la voirie publique et qu’elle est consolidée. S’il est vrai que l’administration communale de Steinfort a fait plaider l’absence de constructions et d’infrastructures communales du côté de la voie publique où est situé le terrain litigieux, il ressort néanmoins des pièces produites en cause qu’il existe une maison de ce côté, laquelle doit nécessairement être raccordée aux infrastructures communales.

La voie publique litigieuse est partant à considérer comme voie publique existante au sens de l'article 21 et peut, par conséquent, conformément à l'article 20, recevoir des constructions le long de son tracé.

Le moyen tiré du caractère non achevé de la voie publique au sens des articles 23.1 et 23.2. du règlement sur les bâtisses est donc également à écarter.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le refus du bourgmestre du 27 septembre 2004 n’est légalement motivé à travers les éléments fournis en cause ni en fait, ni en droit, de sorte qu’il est à annuler.

Il y a par ailleurs lieu de rejeter les demandes tendant à l’allocation d’indemnités de procédure pour le montant de 1.000.- euros chacune, formulées respectivement par la société S. et l’administration communale de Steinfort, au motif que les conditions légales ne sont pas remplies en l’espèce.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare justifié ;

partant annule la décision de refus déférée du bourgmestre de la commune de Steinfort du 27 septembre 2004 et lui renvoie le dossier en prosécution de cause ;

rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure sollicitées tant par la société anonyme S. S.A. que par l’administration communale de Steinfort ;

condamne l’administration communale de Steinfort aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 13 juillet 2005 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 9


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19000
Date de la décision : 13/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-13;19000 ?

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