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11/07/2005 | LUXEMBOURG | N°19700

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 juillet 2005, 19700


Tribunal administratif N° 19700 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 avril 2005 Audience publique du 11 juillet 2005 Recours formé par Monsieur …, … , contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19700 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 avril 2005 par Maître Olivier POOS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant actuellement à L-…, tend

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Tribunal administratif N° 19700 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 avril 2005 Audience publique du 11 juillet 2005 Recours formé par Monsieur …, … , contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19700 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 21 avril 2005 par Maître Olivier POOS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 8 février 2005 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et de celle confirmative intervenue sur recours gracieux du 21 mars 2005 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 18 mai 2005 ;

Vu le mémoire en réplique déposé par Maître Olivier POOS au greffe du tribunal administratif le 17 juin 2005 ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, Maître Olivier POOS et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH s’étant rapportés aux écrits de leurs parties à l’audience publique du 4 juillet 2005.

En date du 11 décembre 2003, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Il fut entendu en date du même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

En date du 11 février 2004, il fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le 8 mars 2005, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision.

Par décision du 21 mars 2005, envoyée par courrier recommandé le 22 mars 2005, le ministre confirma sa décision antérieure.

Le 21 avril 2005, Monsieur … a fait déposer au greffe du tribunal administratif un recours en réformation contre les deux décisions ministérielles visées ci-avant.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, le recours par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi est recevable.

A l’appui de son recours, Monsieur … fait valoir que les décisions entreprises devraient être réformées au motif qu’elles ne seraient pas justifiées et qu’elles n’apprécieraient pas la gravité des faits dont il se plaint. Il soutient que suite à une attaque de son village natal par les rebelles, il se serait enfui ensemble avec sa mère et aurait fini par tomber dans une embuscade des rebelles LURD, qu’il aurait été enrôlé de force dans leurs rangs, de sorte qu’il aurait dû combattre contre son gré à leurs côtés. Il ajoute que pour ne pas être lui-même torturé et tué il aurait dû commettre les pires crimes vis-à-vis de la population locale, ainsi que des troupes gouvernementales et qu’il aurait enfin fini par s’échapper lors des manifestations populaires à Monrovia du 14 octobre 2003. Il estime que depuis sa désertion du groupe LURD, sa vie serait sérieusement en danger, premièrement pour être poursuivi par les membres même du groupe et deuxièmement à cause des poursuites de la population civile laquelle ne serait pas prête à oublier les exactions qu’elle aurait dû subir de la part des rebelles pendant la guerre civile.

Le délégué du Gouvernement estime que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte qu’il serait à débouter de son recours.

Dans le cadre de son mémoire en réplique Monsieur … fait valoir que la situation actuelle au Libéria serait de nature à constituer toujours un danger pour sa personne et que le gouvernement de transition aurait incorporé des représentations de différentes fractions rebelles, de sorte qu’il devrait craindre des représailles de la part des autorités du Libéria du fait de sa désertion des rangs rebelles. Il termine que ce même gouvernement ne serait pas prêt à protéger le requérant face à la population civile rancunière.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d'un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l'opportunité d'une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

L’examen des déclarations faites par Monsieur … lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Les menaces mises en avant par le demandeur en raison de sa participation au groupe rebelle LURD émanent d’un côté de la population civile et d’un autre côté des rebelles mêmes. Or, des éléments de la population et les membres d’un groupe rebelle ne sauraient être considérés comme des agents de persécution au sens de la Convention de Genève, d’autant plus que le demandeur reste en défaut de faire valoir que les autorités en place encourageraient ces actes. A cela s’ajoute que c’est à juste titre que le ministre a fait remarquer que la crainte des rebelles s’avère hypothétique étant donné que le demandeur reste en défaut de faire valoir un élément concret duquel il résulterait que les membres du groupe rebelle LURD l’auraient persécuté. En effet il répond à la question :

« Have you been personally persecuted ? », « I have never been persecuted ». La prétendue absence de protection de sa personne de la part du Gouvernement face à population civile rancunière reste également à l’état de pure allegation.

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef. Partant le recours en réformation est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, déclare le recours non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 11 juillet 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19700
Date de la décision : 11/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-11;19700 ?

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