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11/07/2005 | LUXEMBOURG | N°19502

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 juillet 2005, 19502


Tribunal administratif N° 19502 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 mars 2005 Audience publique du 11 juillet 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19502 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Algérie), de nationalit

é algérienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’...

Tribunal administratif N° 19502 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 mars 2005 Audience publique du 11 juillet 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19502 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Algérie), de nationalité algérienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 29 décembre 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et de celle confirmative, intervenue sur recours gracieux, du 21 février 2005 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 20 mai 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, Maître Valérie DEMEURE et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH s’étant rapportés aux écrits de leurs parties respectives à l’audience publique du 4 juillet 2005.

Le 20 octobre 2004, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour, il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son itinéraire suivi pour venir au Luxembourg et sur son identité.

Le 17 novembre 2004, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration.

Par décision du 29 décembre 2004, envoyée par lettre recommandée expédiée le 4 janvier 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’informa de ce que sa demande a été refusée comme non fondée au motif qu’il n'invoquerait aucune crainte fondée de persécution au sens de la Convention de Genève.

Le 3 février 2005, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision qui s’est soldé par une décision confirmative du 21 février 2005.

Par décision du 21 février 2005, Monsieur … a fait déposer au greffe du tribunal administratif un recours en réformation sinon en annulation contre les deux décisions ministérielles.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que seul un recours en réformation a pu être dirigé contre la décision ministérielle déférée. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est dès lors irrecevable.

A l’appui de son recours, Monsieur … reproche à l’autorité administrative d’avoir fait une appréciation erronée des faits d’espèce en ce sens que ce serait à tort qu’elle a conclut que les faits par lui relatés ne justifieraient pas la qualité de réfugié. Il estime qu’en raison de son appartenance au mouvement politique dirigé par le docteur Mohammed Hadef et de son rôle d’observateur lors des élections présidentielles de 2004, il ne serait pas impossible que le fait d’avoir dressé un rapport après les élections présidentielles pour dénoncer certaines irrégularités ait un rapport avec les menaces dont il a fait l’objet. Il ajoute que ces faits feraient de lui un opposant au président BOUTAFLIKA, de sorte que compte tenu du climat de répression en place il pourrait en effet craindre pour sa vie. Il termine que cette crainte serait d’autant plus justifiée, que depuis son départ d’Algérie il aurait été informé que l’armée sinon la police seraient venus à son domicile et auraient pris toutes ses affaires personnelles.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours sous analyse laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d'un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l'opportunité d'une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

L’examen des déclarations faites par Monsieur … lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

En premier lieu c’est à bon droit que le ministre a souligné que les problèmes lors des élections ne sont pas la cause du départ de Monsieur …. En effet, Monsieur … répond à la question : « Quelqu’un vous a-t-il inquiété après les élections », « Non. Je suis rentré dans la police, mais c’est à ce moment-là que j’ai reçu des menaces. Mais cela n’a pas de rapport avec les élections, enfin, je ne pense pas ». Ensuite, en ce qui concerne les menaces émanant non pas des autorités publiques mais de personnes privées non autrement identifiées, il y a lieu de souligner qu’il s’agit d’actes émanant de certains éléments de la population, de sorte qu’il appartient au demandeur de mettre en évidence un défaut de protection de la part des autorités publiques pour l’un des motifs énoncés par la Convention de Genève. Or, en l’espèce le demandeur est en aveu qu’il n’en a pas parlé à ses supérieurs, étant donné qu’il a préféré ne pas le faire parce qu’il ne leur faisait pas confiance. Ensuite, il répond à la question : «Pourquoi ne faisiez-vous pas confiance en vos propres supérieurs », « Je ne les connaissais pas encore bien et j’étais méfiant.

J’avais peur que mes supérieures ne me forcent à rester sur place, alors que dès que j’ai reçu ces menaces, j’ai songé à quitter le pays ».

C’est dès lors à bon droit que le ministre a conclut qu’il résulte du récit de Monsieur … qu’il éprouve un sentiment d’insécurité mais non pas une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève, susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.

Partant, le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur au frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 11 juillet 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

SCHMIT LENERT 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19502
Date de la décision : 11/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-11;19502 ?

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