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07/07/2005 | LUXEMBOURG | N°20030C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 07 juillet 2005, 20030C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 20030 C Inscrit le 21 juillet 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 7 JUILLET 2005 Recours formé par … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative - Appel -

(jugement entrepris du 30 juin 2005, no 19899 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour admini...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 20030 C Inscrit le 21 juillet 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 7 JUILLET 2005 Recours formé par … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative - Appel -

(jugement entrepris du 30 juin 2005, no 19899 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 1er juillet 2005 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de …, né le … à …, (Guinée), de nationalité guinéenne, contre un jugement rendu en matière de rétention administrative par le tribunal administratif à la date du 30 juin 2005, à la requête de l’actuel appelant tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 10 mai 2005 instituant à son égard une mesure de placement pour la durée maximale d’un mois au Centre de séjour provisoire.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 6 juillet 2005 par le délégué du Gouvernement Guy Schleder.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Ardavan Fatholahzadeh ainsi que le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs observations orales.

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Par requête inscrite sous le numéro 19899 du rôle et déposée le 3 juin 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, …, né le … à …, (Guinée), de nationalité guinéenne, a demandé la réformation, sinon l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 10 mai 2005 instituant à son égard une mesure de placement pour la durée maximale d’un mois audit Centre de séjour provisoire.

Le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement en date du 30 juin 2005, vidant sur renvoi l’arrêt de la Cour administrative du 21 juin 2005, n° 19960 C du rôle, a déclaré le recours non justifié et en a débouté.

Maître Ardavan Fatholahzadeh a déposé une requête d’appel en date du premier juillet 2005 au greffe de la Cour administrative dans laquelle il demande la réformation du jugement intervenu en date du 30 juin 2005 pour violation de l'article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 et de l'article 13 (2) de la loi modifiée du 3 avril 1996 et l'article 33 de la Convention de Genève, ainsi que l'article 14 in fine de la loi modifiée du 28 mars 1972.

En ordre subsidiaire, il demande l’annulation de la décision ministérielle du 10 mai 2005, pour violation de la loi, excès du pouvoir, pour défaut de motifs valables et erreur d'appréciation manifeste en faits et en droit.

L’appelant souligne qu’il n'aurait jamais revendiqué dans le cadre de son recours en réformation devant le Tribunal Administratif le droit à un séjour sur le territoire du Grand-

Duché de Luxembourg sur base de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, ni sur base des revenus d'autres personnes vivant avec lui en concubinage et ayant son domicile légal au Luxembourg, mais sur base sa qualité du demandeur d'asile non encore débouté définitivement et dont le recours gracieux serait valablement pendant devant le Ministère des Affaires Etrangères et de l'Immigration.

Que ce serait à tort que les juges de première instance, en se basant sur le jugement du 4 mai 2005, auraient transposé purement et simplement le jugement dont question dans la présente affaire alors que dans le cadre du prédit jugement le demandeur se prévalait de son droit de séjour en raison de sa vie familiale au Luxembourg et ce dans le cadre d'un recours introduit contre une mesure de placement.

Or le requérant aurait introduit un recours gracieux en date du 3 juin 2005 à l'encontre de la décision de rejet de sa demande d'asile et au sens de l'article 13 (2) de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création d'une procédure relative à l'examen d'une demande d'asile « un éloignement ne peut avoir lieu, ni au cours de la procédure d'examen de la demande, ni pendant le délai d'introduction des recours prévus aux articles 10 et 12 qui précèdent.. » Qu'en outre le principe de non-refoulement aurait été également confirmé par l'article 33 de la Convention, ainsi que par l'article 14 in fine de la loi modifiée du 28 mars 1972.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date 6 du juillet 2005 dans lequel il demande la confirmation du jugement intervenu.

Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.

A l’appui de son recours, le demandeur continue à soutenir en instance d’appel que les conditions légales pour prononcer une mesure de placement ne seraient pas remplies, étant donné qu’il serait encore actuellement demandeur d’asile ne tombant dès lors pas sous les dispositions de l’article 15 de la loi du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ; 2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère.

2 En second lieu, le demandeur se réfère à son argumentation de première instance et soutient que la mesure critiquée serait disproportionnée par rapport au but poursuivi par l'autorité administrative et qu’il n’aurait pas été placé dans un établissement approprié.

Concernant le principal argument du demandeur en ce qu’il serait toujours demandeur d’asile, de sorte qu’aucun éloignement ne serait possible, le délégué du Gouvernement se réfère à ses développements de première instance pour soutenir que le demandeur aurait été débouté de sa demande en obtention du statut de réfugié politique par décision datée du 22 novembre 2004, décision actuellement coulée en force de chose décidée par écoulement des délais de recours.

Il expose dans cet angle que la décision le déboutant de sa demande en obtention du statut de réfugié politique aurait été notifiée à la seule adresse disponible au ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration et qu’en se présentant audit ministère en date du 6 décembre 2004, date à laquelle les voies de recours n’étaient pas encore épuisées, le demandeur aurait dû les informer du changement d’adresse intervenu dans son chef. Il conclut qu’à défaut de ce faire, il y aurait lieu de considérer la décision comme ayant été valablement notifiée et aucun reproche ne saurait dès lors être adressé au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration. Il relève encore que le demandeur serait parti en Autriche pour y déposer une nouvelle demande d’asile sous une autre identité le 23 janvier 2005, de sorte qu’il serait « mal venu de reprocher au Ministre de le considérer maintenant comme demandeur d’asile débouté ».

Quant au caractère inapproprié du lieu de placement, il relève que le demandeur n’aurait pas été placé au Centre pénitentiaire de Schrassig, mais au Centre de séjour provisoire et souligne que ledit centre serait, aux termes de la jurisprudence des juridictions administratives, à considérer comme établissement approprié.

En ce qui concerne le premier moyen d’annulation en substance tiré de ce que les conditions légales pour ordonner une mesure de placement ne serait pas remplies en l’espèce, les premiers juges ont à juste titre relevé qu’il se dégage de l’article 15 (1) de la loi précitée du 28 mars 1972 que, lorsque l’exécution d’une mesure d’expulsion ou de refoulement en application des articles 9 et 12 de la même loi est impossible en raison de circonstances de fait, l’étranger peut, sur décision du ministre compétent, être placé dans un établissement approprié à cet effet pour une durée d’un mois.

Or, la légalité d’une mesure de placement est conditionnée essentiellement par la réunion des deux conditions prévues par l’article 15, paragraphe (1), alinéa 1er de la loi précitée du 28 mars 1972, à savoir le caractère exécutoire d’une mesure d’expulsion ou de refoulement en application des articles 9 ou 12 de la loi du 28 mars 1972, non litigieux en l’espèce, et 2) l’impossibilité de l’éloignement de l’étranger en raison de circonstances de fait.

Le tribunal administratif a à bon escient décidé qu’en l’absence de contestations relatives à l’existence même d’une décision d’expulsion ou de refoulement exécutoire prise à l’encontre de l’intéressé, le moyen basé sur son prétendu statut de réfugié politique rendant impossible son éloignement, ne saurait être invoqué dans le cadre du recours sous examen visant exclusivement la décision de placement, mais uniquement le cas échéant dans le cadre du recours introduit contre la mesure d’éloignement sous-jacente à la mesure de placement.

En effet, une décision d’expulsion ou de refoulement à la base d’une mesure de rétention décidée par le ministre constitue une décision administrative distincte de la mesure de placement du demandeur et sa légalité ne saurait en principe être examinée dans le cadre du 3 présent recours dont l’objet est confiné à l’analyse du bien-fondé de l’arrêté ministériel de placement du 10 mai 2005.

Dans la mesure où l’impossibilité de procéder à l’exécution immédiate d’une mesure d’éloignement en raison des impératifs d’organisation s’analysant en des circonstances de fait, n’a pas été utilement critiquée en cause, ni en première instance, ni en instance d’appel, la décision ministérielle litigieuse est partant justifiée à suffisance de droit et de fait par le constat de l’imminence de son éloignement, ainsi que de l’impossibilité d’y céder dans l’immédiat.

Le moyen tenant à la qualité de demandeur d’asile de l’appelant n’aurait de pertinence éventuelle que dans le cadre d’un recours contre la décision de refoulement qui ne fait pas l’objet du présent recours de sorte que la Cour n’a pas besoin de se prononcer sur ce moyen qui est étranger à la matière de la mise à disposition du Gouvernement.

Quant au moyen soulevé par le demandeur visant le caractère disproportionné de la mesure de placement, il est constant que … rentre directement dans les prévisions de la définition des « retenus », telle que consacrée à l’article 2 du règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière et modifiant le règlement grand-ducal du 24 mars 1989 concernant l’administration et le régime interne de l’établissement pénitentiaire, et que la mise en place d’un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière repose précisément sur la prémisse qu’au-delà de toute considération tenant à une dangerosité éventuelle des personnes concernées, celles-ci, eu égard au seul fait de l’irrégularité de leur séjour et de l’imminence de l’exécution d’une mesure d’éloignement dans leur chef, présentent en principe et par essence un risque de se soustraire à la mesure d’éloignement, fût-il minime.

Au vu de ces développements, l’appel laisse d’être fondé de sorte que le jugement du 30 juin 2005 est à confirmer.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du premier juillet 2005, le déclare cependant non fondé confirme le jugement du 30 juin 2005 dans toute sa teneur, condamne la partie appelante aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Carlo Schockweiler, conseiller 4 et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 20030C
Date de la décision : 07/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-07;20030c ?

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