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28/06/2005 | LUXEMBOURG | N°19563C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 juin 2005, 19563C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19563 C Inscrit le 29 mars 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 28 JUIN 2005 Recours formé par … et … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers - Appel -

(jugement entrepris du 21 février 2005, no 18947 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 29 mars 2005 pa...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19563 C Inscrit le 29 mars 2005

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 28 JUIN 2005 Recours formé par … et … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de police des étrangers - Appel -

(jugement entrepris du 21 février 2005, no 18947 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 29 mars 2005 par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, au nom de … et …, tous les deux de nationalité cap-

verdienne, demeurant ensemble à L-…, contre un jugement rendu en matière de police des étrangers par le tribunal administratif à la date du 21 février 2005, à la requête des actuels appelants tendant à l’annulation d’une décision implicite de refoulement, respectivement d’expulsion, sous-jacente à une décision de rétention administrative du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prise à l’encontre de … le 15 novembre 2004 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 27 avril 2005 par la déléguée du Gouvernement Claudine Konsbrück.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Ardavan Fatholahzadeh, ainsi que le délégué du Gouvernement Gilles Roth en leurs observations orales.

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Par requête, inscrite sous le numéro 18947 du rôle, déposée le 7 décembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, … et …, tous les deux de nationalité cap-verdienne, demeurant ensemble à L-…, ont demandé l’annulation d’une décision implicite de refoulement, respectivement d’expulsion, sous-jacente à une décision de rétention administrative du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prise à l’encontre de … le 15 novembre 2004.

Le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 21 février 2005, a reçu le recours en annulation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Ardavan Fatholahzadeh, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 29 mars 2005.

La décision de refus d'accorder à … une autorisation de séjour violerait tant les dispositions d'ordre public de l'article 212 et suivants du code civil que les dispositions supra-nationales de l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme en ce qu'elle conduit inéluctablement à l'éclatement de la cellule familiale des appelants.

Qu'il serait de principe que «même dans les cas ou l'administration dispose d'une réelle liberté d'appréciation lui permettant d'évaluer discrétionnairement les éléments de la situation, elle doit toujours baser sa décision sur des éléments concrets en rapport avec l'intérêt du service.» ( CE belge 18 décembre 1979, Pas. Belge 1982. IV. 17), Quant à l'appréciation du caractère disproportionné de la décision attaquée, le fait que le retour de … dans son pays d'origine emporterait à l'égard de celui-ci des conséquences qui seraient manifestement contraires au principe ci-avant rappelé, à savoir celui de l'exigence d'une conduite raisonnable de la part de l'autorité administrative alors que dans le même temps des dizaines de personnes se trouvant dans la même situation que les appelants ont pu bénéficier d'une autorisation de séjour sur base de l'unité familiale.

En outre …, arrivée au Luxembourg en 1996 et à ce titre disposant d'une carte de séjour réservée aux ressortissants non-communautaires valable au 23 avril 2008, aurait accompli des efforts d'intégration remarquables.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 27 avril 2005 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.

L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme dispose :

« 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2) Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

Les premiers juges ont à juste titre rappelé que s’il est de principe, en droit international, que les Etats ont le pouvoir souverain de contrôler l’entrée, le séjour et l’éloignement des étrangers, il n’en reste pas moins que les Etats qui ont ratifié la Convention européenne des droits de l’homme ont accepté de limiter le libre exercice de cette prérogative dans la mesure des dispositions de la Convention.

Il ressort des pièces du dossier que … a fait l’objet en date du 23 juillet 2002 d’une décision de refus d’entrée et de séjour et il n’est pas contesté qu’il est entré au courant du mois de juillet 2004 au Luxembourg avec un visa valable pour trois mois.

2 C’est partant à bon droit que les premiers juges ont décidé que la décision de refus d’entrée et de séjour datant de 2002 a perdu ses effets et qu’il y a lieu d’analyser les circonstances de l’affaire telles qu’elles se sont présentées au moment de la décision litigieuse.

… est revenu au Luxembourg en juillet 2004, sans préjudice quant à la date exacte, et il s’est marié au Luxembourg avec Santos Lima en date du 6 août 2004.

La sœur de l’appelant, …, atteste ce qui suit : « Je confirme que mon frère vivait déjà en concubinage notoire avec … au Cap-Vert.

Madame … est venue en première au Luxembourg en 1996. Mon frère est venu en 2001 et a été expulsé en 2002. Madame … n’a pas pu le voir lors de l’expulsion.

Mon frère est revenu en 2004 au Luxembourg et ils vivaient ensemble avant le mariage du 06.08.2004 et sont toujours ensemble ».

…, qui déclare connaître … depuis 1996, certifie dans une attestation signée le 7 mars 2005, un certain nombre de faits, non contestés par le représentant étatique, qui permettent de fixer avec précision le concubinage dans le temps et d’en mesurer la durée et que la Cour reconnaît comme suffisants pour caractériser une vie familiale effective entre les appelants.

Il y a partant lieu, par réformation du jugement du 21 février 2005, de retenir que les appelants tombent sous le champ d’application de l’article 8 de la CEDH en présence d’une vie privée et familiale au moment de la prise de la décision litigieuse de sorte que la décision implicite de refoulement, respectivement d’expulsion, sous-jacente à une décision de rétention administrative du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prise à l’encontre de … le 15 novembre 2004 et se référant à une décision refusant une demande d’autorisation de séjour du 22 septembre 2004 est à annuler.

Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 29 mars 2005, le déclare également fondé, par réformation du jugement du 21 février 2005, annule la décision implicite de refoulement, respectivement d’expulsion, sous-jacente à une décision de rétention administrative du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prise à l’encontre de … le 15 novembre 2004 et se référant à une décision refusant une demande d’autorisation de séjour du 22 septembre 2004, condamne l’Etat aux frais des deux instances, Ainsi délibéré et jugé par 3 Jean Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Carlo Schockweiler, conseiller et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19563C
Date de la décision : 28/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-06-28;19563c ?

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