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15/06/2005 | LUXEMBOURG | N°19838

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 juin 2005, 19838


Tribunal administratif N° 19838 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 mai 2005 Audience publique du 15 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19838 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 20 mai 2005 par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocat

s à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo, Etat de Serbie et Monténégro), de nati...

Tribunal administratif N° 19838 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 mai 2005 Audience publique du 15 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19838 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 20 mai 2005 par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Kosovo, Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 31 mars 2005, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme étant manifestement infondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 2 mai 2005, intervenue suite à un recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 26 mai 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport à l’audience publique du 13 juin 2005, en présence de Maître Radu DUTA, en remplacement de Maître Gilles PLOTTKE, ainsi que de Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline JACQUES, qui se sont rapportés aux écrits respectifs de leurs parties.

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Le 14 mars 2005, Monsieur … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour, Monsieur … fut entendu par un agent de la police grand-ducale, section police des étrangers et des jeux, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg.

Il fut encore entendu en date du 23 mars 2005 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 31 mars 2005, notifiée par courrier recommandé expédié le 5 avril 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa Monsieur … de ce que sa demande avait été rejetée comme étant manifestement infondée au motif qu’il n’alléguerait aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays d’origine, de sorte qu’aucune crainte justifiée de persécution en raison d’opinions politiques, de la race, de la religion, de la nationalité ou de l’appartenance à un certain groupe social ne serait établie dans son chef.

Suite à un recours gracieux formulé par lettre du 27 avril 2005 à l’encontre de cette décision ministérielle, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prit une décision confirmative le 2 mai 2005, notifiée par courrier recommandé expédié le 3 mai 2005.

Le 20 mai 2005, Monsieur … a fait introduire le recours « qui lui est ouvert par la loi » contre les décisions ministérielles prévisées, en sollicitant l’annulation des décisions litigieuses et le renvoi devant l’autorité compétente.

Il ressort des éléments du dossier que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration s’est basé sur l’article 9 de la loi du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire et sur l’article 3 du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996.

L’article 10 (3) de la loi modifiée du 3 avril 1996 précitée prévoit expressément qu’en matière de demandes d’asile déclarées manifestement infondées au sens de l’article 9 de la loi précitée de 1996, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives, de sorte que le recours en annulation, par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

Quant au fond, le demandeur reproche au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration d’avoir fait une mauvaise application de la Convention de Genève et d’avoir méconnu la réalité et la gravité des motifs de crainte de persécution qu’il a mis en avant pour justifier la reconnaissance du statut de réfugié.

Il lui reproche plus particulièrement de ne pas avoir tenu compte des discriminations dont il aurait été l’objet dans son pays d’origine en tant que membre de la communauté albanaise du Kosovo, discriminations qui se seraient concrétisées par un refus d’accès à l’emploi.

Le délégué du Gouvernement pour sa part estime que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur, de sorte que celui-ci serait à débouter de son recours.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement ».

En vertu de l’article 3, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande ».

En l’espèce, l’examen des faits et motifs invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande d’asile dans le cadre de son audition, ainsi qu’au cours des procédures gracieuse et contentieuse, amène le tribunal à conclure qu’il n’a manifestement pas établi, ni même allégué, des raisons personnelles de nature à établir dans son chef l’existence d’une crainte justifiée de persécution au sens de la Convention de Genève dans son pays de provenance.

En effet, lors de son audition, telle que celle-ci a été relatée dans le compte rendu figurant au dossier, Monsieur … affirme ne pas avoir subi personnellement de persécutions au Kosovo. Sur question spéciale de l’agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration ayant procédé à son audition, le demandeur confirme ne jamais avoir été menacé ou agressé physiquement, ne jamais avoir été persécuté en raison de ses opinions politiques, religieuses ou de son groupe social ou national, et ne jamais avoir eu de problèmes en raison de son adhésion à un parti politique.

Monsieur … a encore précisé que sa vie n’était pas en danger au Kosovo, mais qu’il cherchait juste à avoir du travail.

Toujours sur question spécial de l’agent procédant à son audition, le demandeur a confirmé explicitement avoir quitté le Kosovo pour des raisons économiques, en précisant qu’à part ce problème économique, il n’aurait eu aucun autre problème au Kosovo.

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.

Cette conclusion n’est pas énervée par les affirmations non autrement étayées du mandataire du demandeur selon lesquelles ce dernier se verrait refuser un emploi en raison de son origine albanaise, cette affirmation étant particulièrement peu crédible au vu de l’appartenance du demandeur à l’ethnie non seulement majoritaire au Kosovo, mais encore y détentrice du pouvoir.

Partant, le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond, déclare le recours non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 15 juin 2005 par :

Mme Lamesch, juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lamesch 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19838
Date de la décision : 15/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-06-15;19838 ?

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