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15/06/2005 | LUXEMBOURG | N°19500

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 juin 2005, 19500


Tribunal administratif N° 19500 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 mars 2005 Audience publique du 15 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19500 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …. (Kosovo/Etat de Serbie et M

onténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, tendant à la r...

Tribunal administratif N° 19500 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 mars 2005 Audience publique du 15 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19500 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005 par Maître Valérie DEMEURE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le …. (Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 décembre 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 21 février 2005 prise sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 avril 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, Maître Valérie DEMEURE et Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline JACQUES s’étant rapportées aux écrits de leurs parties respectives à l’audience publique du 13 juin 2005.

Monsieur … introduisit en date du 4 octobre 2004 une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg et sur son identité.

Il fut entendu le 18 novembre 2004 par un agent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa Monsieur … par décision du 27 décembre 2004, lui envoyée par courrier recommandé expédié le 28 décembre 2004, de ce que sa demande a été refusée comme non fondée au motif qu’il n’alléguait aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays.

Le 31 janvier 2005, Monsieur … fit introduire un recours gracieux à l’encontre de cette décision.

Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration confirma sa décision antérieure par une décision prise en date du 21 février 2005.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mars 2005, Monsieur … a fait déposer un recours en réformation sinon en annulation à l’encontre des deux décisions ministérielles de refus citées ci-avant.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est dès lors irrecevable.

A l’appui de son recours, le demandeur reproche à l’autorité administrative d’avoir fait une appréciation erronée des faits d’espèce en ce sens que ce serait à tort que celle-ci a conclu que les faits relatés ne justifiaient pas la qualité de réfugié. Il invoque plus particulièrement l’opposition de la famille de sa concubine à leur relation amoureuse, et ajoute que l’UNHCR ferait part de tensions qui continueraient à exister entre les différentes ethnies et que les violences de mars 2004 auraient encore dégradé la confiance relative qui aurait existé entre les différentes communautés.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours sous analyse laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Force est de retenir que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses convictions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Il résulte du rapport de police judiciaire du 4 octobre 2004 que la demande d’asile que Monsieur … avait posée en Allemagne a été refusée le 10 mars 2003. En outre il en résulte que Monsieur … a été rapatrié deux fois dans son pays d’origine en date des 21 avril 1998 et 12 mars 2003. Par ailleurs, Monsieur … est connu sous une autre identité en Allemagne.

Le seul problème qu’il invoque après son retour au Kosovo en mars 2003 est celui relatif à la famille de sa concubine laquelle se serait opposée à leur relation et l’aurait menacé verbalement. Pour le surplus, il n’invoque aucune autre raison à la base de sa demande d’asile. En effet en réponse à la question „Weshalb haben Sie Ihr Land verlassen ?“, il répond: „Deshalb, wegen meiner Frau und Ihrer Familie. Sie haben ja eine andere Mentalität bei uns. Wir haben ja 3 Jahre versteckt gelebt. Ich habe jetzt andere Gewohnheiten da ich neun Jahre in Europa gelebt habe. Normalerweise darf man ja hier ab 18 Jahren machen was man will, aber dort ist es anders. Ich hätte Kosovo nicht verlassen, wenn ich nicht musste. Ich hätte meine Freundin auch mitgenommen, aber kein Geld“.

C’est dès lors à bon droit que le ministre a retenu que la demande de Monsieur … ne correspond à aucun critère de fond défini par la Convention de Genève, étant donné qu’il n’a pas fait état de persécutions du fait de ses opinions politiques, de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de son appartenance à un groupe social. C’est également à bon droit que le ministre fait ajouter que le fait que Monsieur … aurait eu des problèmes avec des membres de la famille de sa concubine ne constitue pas un acte de persécution selon la prédite convention, d’autant plus que ces derniers ne sauraient être considérés comme agents de persécution.

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève, susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef.

Partant le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, déclare le recours en annulation irrecevable, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 15 juin 2005 par :

Mme Lamesch, juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier en chef.

s. Schmit s. Lamesch 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19500
Date de la décision : 15/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-06-15;19500 ?

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