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15/06/2005 | LUXEMBOURG | N°19321

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 juin 2005, 19321


Tribunal administratif N° 19321 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 février 2005 Audience publique du 15 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19321 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 février 2005 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Cameroun), de nationali

té camerounaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation ...

Tribunal administratif N° 19321 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 février 2005 Audience publique du 15 juin 2005 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 19321 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 février 2005 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Cameroun), de nationalité camerounaise, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 17 janvier 2005, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 avril 2005 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 2 mai 2005 par Maître François MOYSE ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport à l’audience du 6 juin 2005, Maître Virginie VERDANET, en remplacement de Maître François MOYSE, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Claudine KONSBRÜCK s’étant rapportées aux écrits de leurs parties respectives.

Le 30 octobre 2003, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le 27 janvier 2004, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 17 janvier 2005, notifiée par lettre recommandée le 19 janvier 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration l’informa de ce que sa demande avait été refusée comme non fondée au motif qu’il n’alléguerait aucune crainte raisonnable de persécution susceptible de rendre sa vie intolérable dans son pays, de sorte qu’aucune crainte justifiée de persécution en raisons d’opinions politiques, de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de son appartenance à un certain groupe social ne serait établie dans son chef. Le ministre énonça plus particulièrement que la crédibilité de son récit, en absence de toute pièce afférente, serait fortement ébranlée par les fausses déclarations lors de son audition et par l’existence de contradictions dans son récit en citant des exemples très précis. Il relève en outre que l’affirmation que Monsieur … aurait été arrêté à cause de ses adhésions à deux mouvements politiques et pour avoir causé une émeute des chauffeurs de « moto-taxi » en date du 9 juillet 2003, ne correspondrait pas non plus à la réalité en soulevant plus particulièrement qu’il serait fort étonnant que Monsieur … aurait adhéré à deux partis politiques ayant des idéologies fort divergentes et que par ailleurs Monsieur … n’aurait été qu’un simple membre sans fonction particulière.

En ce qui concerne les prétendus problèmes au sein de sa famille liés à son engagement politique, le ministre constate qu’ils ne sauraient valoir comme actes de persécutions au sens de la Convention de Genève.

Par requête déposée en date du 17 février 2005, Monsieur … a introduit un recours contentieux tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 17 janvier 2005.

Etant donné que l’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, seule une demande en réformation a pu être dirigée contre la décision ministérielle critiquée. Le recours subsidiaire en annulation est partant irrecevable.

Le recours en réformation ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est partant recevable.

Le demandeur soulève en premier lieu que la décision critiquée ne répondrait pas aux exigences de motivation contenues à l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure administrative non contentieuse, de sorte qu’elle devrait encourir l’annulation.

Le demandeur fait ensuite exposer qu’il serait poursuivi dans son pays d’origine en raison de son adhésion à un parti politique d’opposition et pour avoir été soupçonné d’avoir causé l’émeute des chauffeurs de « moto-taxi » en date du 9 juillet 2003, qu’il aurait été emprisonné arbitrairement en 2003 et maltraité durant son incarcération, qu’ayant réussit à s’évader de la prison, il n’aurait eu d’autre solution que de quitter son pays. Il estime que le ministre, en lui refusant le droit d’asile, aurait mal apprécié la réalité des dangers par lui encourus.

En substance, il reproche au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration d’avoir fait une mauvaise application de la Convention de Genève et d’avoir méconnu la gravité des motifs de persécution qu’il a mis en avant pour justifier la reconnaissance du statut de réfugié.

Le délégué du Gouvernement rétorque que le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours laisserait d’être fondé. Il relève plus particulièrement que la décision serait correctement motivée pour étaler sur plusieurs pages les faits tel qu’invoqués par le demandeur lors de son audition et les motifs de refus retenus par le ministre. Par ailleurs, il estime qu’au vu des mensonges, contradictions et invraisemblances relevés à l’appui de la prédite décision, le demandeur resterait en défaut d’établir une quelconque crainte justifiée de persécution en raison d’un des motifs énoncés par la Convention de Genève.

Le moyen d’annulation invoqué par le demandeur consistant à soutenir que la décision ministérielle du 17 janvier 2005 serait entachée d’illégalité pour insuffisance de motivation est à abjuger comme étant non fondé, étant donné que la prédite décision indique de manière détaillée et circonstanciée les motifs en droit et en fait sur lesquels le ministre s’est basé pour justifier sa décision de refus, et ces motifs ont ainsi été portés à suffisance de droit, à la connaissance du demandeur.

L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, précise que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

L’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition du 27 janvier 2004, telles que celles-ci ont été relatées dans le compte rendu figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que le demandeur reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Force est de constater en l’espèce que le demandeur, confronté au fait que le ministre lui reproche d’avoir présenté un récit incohérent et invraisemblable, qu’il ne serait pas en mesure de présenter des pièces d’identité, alors qu’il ressort du dossier administratif qu’il a obtenu un visa Schengen de la part des autorités françaises, et que les contradictions et invraisemblances dans son récit laisseraient planer des doutes sur l’intégralité de son passé et les motifs de fuite invoqués, se limite à soutenir par simple affirmation non autrement explicitée qu’il estime remplir les conditions pour bénéficier du statut de réfugié pour avoir été soupçonné d’être à l’origine des émeutes des chauffeurs des « moto-taxi » et être recherché à cause de ses activités politiques, sans pour autant aborder concrètement la motivation pourtant exhaustive retenue à la base de la décision litigieuse du 17 janvier 2005.

En l’absence du moindre élément tangible fourni en cause, voire d’explication susceptible d’élucider les contradictions et invraisemblances dans son récit, le tribunal, appelé à examiner le bien fondé et la légalité d’une décision litigieuse dans le cadre des seuls moyens qui lui sont présentés, ne saurait constater en l’espèce l’engagement utile d’un débat permettant d’examiner plus en avant le bien-fondé de la décision litigieuse.

Il se dégage des considérations qui précèdent qu’en l’état actuel de l’instruction du dossier, le recours laisse d’être fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 15 juin 2005 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Lamesch, juge, Mme Thomé, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 19321
Date de la décision : 15/06/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-06-15;19321 ?

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